extraits du Chapitre 3 : Le «yishouv» juif à Jérusalem au début du dix-neuvième
siècle
Les Peroushim arrivent à Jérusalem dans le courant de la seconde décennie du dix-neuvième siècle et s’y installent
discrètement. Ils prient dans les synagogues sépharades et nous n’avons pas d’échos de leur présence dans la ville. Ils ne commencent à s’organiser en tant que communauté indépendante que
quelques années plus tard. En 1822, l’assistance financière de la halukah est organisée à leur profit par les «Pekidim et Amarkalim de Terre Sainte», une organisation philanthropique basée en
Hollande et dont les dirigeants, les frères Lehren, s’étaient attribués le titre de «Présidents d’Israël».
Avec la conquête égyptienne, en 1831, la situation des Peroushim s’améliore en même temps que celle de l’ensemble de la communauté juive de Jérusalem, qui compte alors 3.000 âmes, soit 2.500
sépharades et 500 ashkénazes. Au début des années trente, les Juifs se rendent compte que le gouvernement égyptien est très différent du gouvernement turc. En 1834, la communauté sépharade
s’adresse à Mohammed Ali pour lui demander l’autorisation de restaurer et de rénover les synagogues sépharades. Il s’agit des quatre synagogues qui existent encore aujourd’hui dans la Vieille
Ville et qui sont connues sous le nom des synagogues de Raban Yokhanan Ben-Zakaï. Les dômes de ces synagogues étaient en bois, la pluie y pénétrait, mais pendant des centaines d’années les
membres de la communauté n’avaient pas été autorisés à les réparer. L’autorisation est octroyée par Mohammed Ali et nous possédons des descriptions détaillées de ces travaux de réfection des
synagogues sépharades en 1834.
Un autre événement important eut lieu au cours de la domination égyptienne, contribuant grandement à l’accroissement de la population juive de Jérusalem. Il s’agit du terrible tremblement de terre de 1837, qui a fortement meurtri les Juifs de Safed et de Tibériade. On estime que la moitié des membres de ces deux communautés ont été soit tués, soit gravement affectés. Un très grand nombre de maisons ayant été détruites, il y a eu de nombreux rescapés qui, n’ayant pu se rétablir sur place à Safed ou à Tibériade, préférèrent partir pour Jérusalem.
Pendant les deux années qui suivent, 1.000 à 1.500 Juifs viennent s’installer à Jérusalem, à tel point qu’un dicton de l’époque pouvait affirmer que «la ruine de Tibériade et Safed a contribué à
la construction de Jérusalem». En 1840, lorsque les Turcs reprennent possession d’Eretz-Israël, la population juive de Jérusalem compte 5.000 individus. Entre 1800 et 1840, l’accroissement de la
population musulmane de la ville n’est pas aussi important. Elle passe de 4.000 à 4.500 habitants. On note la même augmentation en nombre chez les chrétiens, qui passent de 3.000 à 3.500. En
1840, la population de Jérusalem, dans son ensemble, compte 13.000 habitants environ. C’est donc au sein de la population juive de la ville que nous observons l’accroissement le plus
significatif. En 1840, la communauté juive est donc la plus importante en nombre: elle compte 5.000 individus, contre 4.500 musulmans et 3.500 chrétiens. A partir de 1840, elle va continuer de
s’accroître encore plus rapidement.
Yehoshua Ben-Arieh Jérusalem au XIXe siècle
Présentation de l'éditeur
Jérusalem est au centre d’un conflit qui dépasse très largement
ses frontières.Ville et mythe, elle est à la fois la clé et l’obstacle majeur de tout règlement local des conflits qui la traversent. Le livre de Ben Arieh a le grand mérite de retracer
l’histoire de la constitution des quartiers de Jérusalem au XIXe siècle, et du développement des “Jérusalems” en dehors de l’enceinte même de la “vieille ville”. C’est une période absolument
essentielle pour comprendre l’histoire de la ville et les enjeux qu’elle représente.Travail de géographe et de démographe, d’une clarté exemplaire et d’une grande objectivité, le livre permet de
disposer d’éléments préalables pour “penser Jérusalem” aujourd’hui.
L'auteur vu par l'éditeur
Yehoshua Ben Arieh (Tel Aviv 1928) est professeur émérite de l’université hébraïque de Jérusalem. Il travaille depuis de longues années sur l’histoire géo-politique de Jérusalem et a publié un
grand nombre d’ouvrages sur les différents moments historiques déterminants de la ville. Son livre sur Jérusalem au XIXe siècle, paru en deux volumes et traduit en plusieurs langues fait autorité
en la matière. Le volume que nous publions est une introduction à ce travail de longue haleine. Il a également publié un ouvrage remarquable sur l’iconographie de Jérusalem à travers les siècles
et prépare actuellement un ouvrage sur la période décisive du mandat britannique (1922-1948).
article faisant suite à Jérusalem au XIXe siècle