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"Je vous donne un commandement nouveau : c'est de vous aimer les uns les autres.

 

Comme je vous ai aimés, vous aussi aimez-vous les uns les autres.

 

Ce qui montrera à tous les hommes que vous êtes mes disciples, c'est l'amour que vous aurez les uns pour les autres."

 

Evangile de Jésus-Christ selon  saint Jean 

   

 

Pentecôte

" Le Défenseur, l'Esprit Saint que le Père enverra en mon nom, lui, vous enseignera tout, et il vous fera souvenir de tout ce que je vous ai dit."

 

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean  

 

   

 

 El Papa es argentino. Jorge Bergoglio                 

Saint Père François

 

 

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1er mai 2011 Béatification de Jean-Paul II

Béatification du Serviteur de Dieu Jean-Paul II

 

 

  Béatification du Père Popieluszko

beatification Mass, in Warsaw, Poland

à Varsovie, 6 juin 2010, Dimanche du Corps et du Sang du Christ

 

 

presidential palace in Warsaw

Varsovie 2010

 

 

Basilique du Sacré-Cœur de Montmartre
Sanctuaire de l'Adoration Eucharistique et de la Miséricorde Divine

La miséricorde de Dieu est comme un torrent débordé. Elle entraîne les cœurs sur son passage.
(Saint Curé d'Ars)
 

 


Le côté du Christ a été transpercé et tout le mystère de Dieu sort de là. C’est tout le mystère de Dieu qui aime, qui se livre jusqu’au bout, qui se donne jusqu’au bout. C’est le don le plus absolu qui soit. Le don du mystère trinitaire est le cœur ouvert. Ce n’est pas une image, c’est une réalité. C’est la réalité la plus profonde qui soit, la réalité de l’amour.
Père Marie-Joseph Le Guillou




Dans le cœur transpercé
de Jésus sont unis
le Royaume du Ciel
et la terre d'ici-bas
la source de la vie
pour nous se trouve là.

Ce cœur est cœur divin
Cœur de la Trinité
centre de convergence
de tous les cœur humains
il nous donne la vie
de la Divinité.


Sainte Thérèse Bénédicte de la Croix
(Edith Stein)



Le Sacré-Cœur représente toutes les puissances d'aimer, divines et humaines, qui sont en Notre-Seigneur.
Père Marie-Eugène de l'Enfant Jésus

 



feuille d'annonces de la Basilique du Sacré-Coeur de Montmartre

 

 

 

 

 

 

 

     

The Cambrai Madonna

Notre Dame de Grâce

Cathédrale de Cambrai

 

 

 

Cathédrale Notre Dame de Paris 

   

Ordinations du samedi 27 juin 2009 à Notre Dame de Paris


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Magnificat

     



Solennité de l’Immaculée Conception de la Vierge Marie à Notre-Dame de Paris


NOTRE DAME DES VICTOIRES

Notre-Dame des Victoires




... ma vocation, enfin je l’ai trouvée, ma vocation, c’est l’Amour !

 

 

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SAINT PIERRE ET SAINT ANDRÉ

Saint Pierre et Saint André

 

BENOÎT XVI à CHYPRE 

 

Benedict XVI and Cypriot Archbishop Chrysostomos, Church of 

Salutation avec l'Archevêque Chrysostomos à l'église d' Agia Kyriaki Chrysopolitissa de Paphos, le vendredi 4 juin 2010

 

     

 

Benoît XVI en Terre Sainte  


 

Visite au chef de l'Etat, M. Shimon Peres
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Visite au mémorial de la Shoah, Yad Vashem




 






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Vicariat hébréhophone en Israël

 


 

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SALVE REGINA

18 octobre 2010 1 18 /10 /octobre /2010 05:00

Voici qu'est apparue à tous les hommes la bénignité et l'humanité de notre Dieu Sauveur. Disciple de saint Paul, on dirait que le troisième Evangéliste s'est proposé de mettre en lumière la parole du Docteur des nations ; si toutefois ce n'est pas l'Apôtre lui-même qui caractérise par ce trait l'Evangile où son disciple nous montre le Sauveur exposé aux regards de tous les peuples, pour être la lumière des nations non moins que la gloire d'Israël. L'œuvre de l'Evangéliste et la parole citée de l'Apôtre sont, à peu d'années près en effet, du même temps, sans qu'on puisse établir l'antériorité de l'une ou de l'autre. Admirable harmonie : sous l'œil de Simon Pierre, à qui fut révélé d'en haut le Fils du Dieu vivant, Marc eut l'honneur de donner à l'Eglise l'Evangile de Jésus, Fils de Dieu ; avant lui, Matthieu rédigea pour Sion l'Evangile du Messie,  fils de David, fils d'Abraham ; près de saint Paul, Luc écrira pour les nations l'Évangile de Jésus,  fils d'Adam par Marie. Aussi loin remonte la généalogie de ce premier-né de sa mère, aussi étendue doit être la bénédiction qu'il répandra sur ses frères de nature, en les rachetant de la malédiction transmise à tous par le premier père.

 

 Car c'est bien l'un de nous, l'homme conversant avec les hommes et vivant de leur vie. Il a été vu sur terre au temps d'Auguste ; les préfets de l'empire ont enregistré la naissance de ce nouveau sujet de César dans la cité de ses aïeux. Comme nous, il a connu les langes du nourrisson ; comme ceux de sa race, il fut circoncis, offert au Seigneur et racheté selon le rit de son peuple. Enfant, il obéit à ses parents ; il grandit sous leurs yeux ; pour lui comme pour tous, la maturité sera le fruit des développements progressifs de l'adolescence. Homme fait, dans sa vie publique, en toute rencontre il prie prosterné le Dieu de toute créature ; il pleure sur sa patrie ; l'angoisse étreint son cœur, il sue jusqu'au sang à la veille des tourments où sa vie doit finir, et dans cette agonie ne refuse point le secours d'un ange. Telle se révèle, au troisième Evangile, l'humanité de notre Dieu Sauveur.

 

Quelles n'y sont pas sa grâce et sa bénignité ! Entre les fils des hommes, c'est bien celui qui mérita d'être l'attente des nations et leur désir, lui qu'une vierge a conçu dans son humilité, qu'elle met au jour en une étable où les bergers forment sa cour, tandis que les anges chantent en chœur dans la nuit profonde : Gloire à Dieu au plus haut des cieux, et sur la terre paix aux hommes de bonne volonté. Aux accords angéliques avait préludé la terre : le tressaillement du Précurseur au sein d'Elisabeth avait, comme dit l'Eglise, manifesté le Roi qui reposait encore en sa couche nuptiale ; à l'allégresse de l'Ami de l'Epoux la Vierge-Mère avait répondu par le plus beau des chants de la terre et des cieux, en attendant que Zacharie, puis Siméon, vinssent compléter le recueil des cantiques inspirés du peuple nouveau qu'Israël annonçait dans ses Psaumes. Tout chante autour du nouveau-né ; et Marie conserve toutes choses en son cœur, afin de les confier pour nous, qui étions loin alors, au bienheureux Evangéliste chargé de dissiper nos ténèbres mortelles.

 

Il a grandi en âge, en sagesse et en grâce, devant les hommes et devant Dieu, l'enfant divin dont les attraits humains doivent captiver les hommes dans ces liens de l'amour de charité qui atteint jusqu'à Dieu. Près de lui, la gentilité, la fille de Tyr, devenue mieux que l'égale de Sion, trouvera bon accueil. Qu'elle ne craigne pas, l'infortunée dont Madeleine était la figure : le scandale n'empêchera pas Jésus d'agréer ses pleurs et ses parfums ; il lui sera beaucoup pardonné pour son amour. Qu'il se reprenne à l'espérance, le prodigue épuisé par sa longue misère sur toutes les routes où l'erreur entraîna les nations : la plainte envieuse du frère aîné, l'irritation d'Israël, n'arrêtera pas les effusions du Cœur sacré célébrant le retour du fugitif, lui rendant ses honneurs de fils, replaçant à son doigt l'anneau de l'alliance primitivement offerte en Eden à l'humanité entière.  Quant à Juda, malheur à lui s'il se refuse à comprendre !

 

 Malheur au riche dont l'opulence négligea si longtemps le pauvre Lazare ! Les privilèges de race n'existent plus. Des dix lépreux guéris dans leurs corps, l'étranger seul est sauvé dans son âme, parce que lui seul croit au libérateur et lui rend grâces. Du bon Samaritain, ou du lévite et du prêtre mis en scène dans les défilés de Jéricho, qui mérita, sinon le premier, l'éloge du Sauveur ? Il se trompe étrangement, le pharisien dont l'arrogante prière écrase de ses mépris le publicain frappant sa poitrine et criant miséricorde. Le fils de l'homme n'écoute pas plus la prière des superbes, qu'il n'a d'égard à leurs indignations ; il s'invite chez Zachée malgré leurs murmures, et le salut et l'allégresse entrent avec lui dans cette maison devenue dès lors, il le déclare, celle d'un véritable fils d'Abraham. Tant de bonté, d'universelle miséricorde, lui fermera les cœurs étroits de ses concitoyens ; ils refuseront de le laisser régner sur leur terre ; mais l'éternelle Sagesse aura retrouvé sa drachme perdue, et la joie sera grande parmi les Puissances des cieux. Au jour des noces sacrées, les humbles méprisés, les pécheurs repentants, rempliront la salle du festin préparé pour d'autres. Je vous le dis en vérité : il y avait beaucoup de veuves aux jours d'Elie dans Israël, et le prophète ne fut envoyé à aucune, mais à la veuve de Sarepta dans le pays de Sidon ; il y avait beaucoup de lépreux en Israël au temps d'Elisée, et ce fut Naaman le Syrien qui guérit.

 

Ô Jésus, votre Evangéliste a conquis nos cœurs.

 

 Nous vous aimons pour avoir pris en pitié notre misère ; en face de Sion, la remise de nos dettes immenses, à nous gentils, vous crée sur nous un titre à plus grand amour. Nous vous aimons, parce que vos grâces de choix sont pour Madeleine, comme nous pécheresse, et cependant appelée à la meilleure part. Nous vous aimons, parce que vous ne savez pas résister aux larmes des mères, et leur rendez, comme à Naïm, ceux qui déjà étaient morts. Au jour des trahisons, des abandons, des reniements, vous oubliez votre injure pour regarder Pierre, et faire jaillir ses larmes. Vous détournez de vous les pleurs de ces humbles et vraies filles de Jérusalem, qui s'attachent à vos pas douloureux sur les rampes du Calvaire. Cloué à la croix, on vous entend implorer grâce pour vos bourreaux. Comme Dieu, à cette heure suprême, vous assurez le paradis au voleur repentant ; comme homme, vous remettez votre esprit au Père. Véritablement, c'est jusqu'à la fin que nous apparaissent, au troisième Evangile, votre bénignité et votre humanité, ô Dieu Sauveur !

 

 Du même style châtié qu'il avait écrit l'Evangile des nations, Luc compléta son œuvre en donnant aux gentils l'histoire des premiers temps du christianisme, qui amenait celle de leur introduction dans l'Eglise et des grands travaux de Paul leur Apôtre. Au dire de la tradition, il fut artiste non moins que littérateur, et, l'âme ouverte à toutes les délicates inspirations, il voulut consacrer ses pinceaux à nous garder les traits de la Mère de Dieu : illustration digne de l'Evangile où nous est racontée la divine Enfance ; nouveau titre à la reconnaissance de ceux qui ne virent jamais Jésus ni Marie dans la chair.

 

Saint Luc peintre

 

Le patronage de l'art chrétien lui revenait dès lors, sans nuire à celui des carrières médicales qui a son fondement dans l'Ecriture même. Saint Luc avait puisé dans Antioche, sa patrie, tous les genres de connaissances ; la brillante capitale de l'Orient pouvait être fière de son illustre fils.

 

 

 L'Eglise emprunte à saint Jérôme les lectures historiques de la fête. Du livre de saint Jérôme, Prêtre, sur les Ecrivains ecclésiastiques :

 Originaire d'Antioche, Luc était médecin, et ses écrits montrent la connaissance qu'il avait de la langue grecque. Devenu disciple de l'Apôtre Paul, il l'accompagna dans tous ses voyages. Il a écrit un Evangile, et c'est de lui que l'Apôtre disait aux Corinthiens : Nous vous envoyons avec Tite le frère dont l'éloge est dans toutes les églises à cause de l'Evangile. Luc, le très cher médecin, vous salue, disait de même Paul aux Colossiens. Et à Timothée : Luc seul est avec moi. Nous lui devons un autre livre sans prix, les Actes des Apôtres, dont le récit va jusqu'aux deux années du séjour de Paul à Rome et à la quatrième de Néron ; ce qui donne à entendre que l'ouvrage fut lui-même composé dans cette ville.

 

 Cependant l'Apôtre Paul, qui n'avait point vécu avec le Seigneur, ne fut pas le seul à renseigner l'évangéliste Luc ; mais les autres Apôtres y eurent aussi leur part, selon la déclaration que lui-même place en tête de  son Evangile : Nous avons mis en œuvre les témoignages de ceux qui ont tout vu dès le commencement et qui furent les ministres de la parole. Il écrivit donc l'Evangile d'après ce qu'il avait entendu, et composa les Actes des Apôtres d'après ce qu'il avait vu lui-même. Sa vie se prolongea quatre-vingt-quatre ans, dans la continence ; ses ossements furent transportés d'Achaïe à Constantinople, avec les reliques de l'apôtre André, en la vingtième année de Constantin.

 

Le Taureau symbolique resplendit au ciel, rappelant les immolations figuratives et annonçant leur fin. Joignant sa force à la puissance de l'Homme, de l'Aigle et du Lion, il s'attelle au char de lumière qui porte en son triomphe l'Agneau vainqueur.

 

Evangéliste des gentils, soyez béni d'avoir mis fin à la longue nuit qui nous tenait captifs, et réchauffé nos cœurs glacés. Confident de la Mère de Dieu, votre âme retint de ces relations fortunées le parfum de saveur virginale que respirent vos écrits et votre vie entière.

 

Discrète tendresse et dévouement silencieux furent votre part en la grande œuvre où, trop souvent délaissé et trahi, l'Apôtre des nations vous trouva non moins fidèle au temps du naufrage et de la captivité que dans les beaux jours. C'est donc à bon droit que l'Eglise vous fait application de la parole où Paul disait de lui-même : Sans cesse angoissés, persécutés, abattus, nous promenons tous vivants la mort de Jésus dans nos corps ; mais cette mort sans fin manifeste aussi la vie du Seigneur en notre chair mortelle. Ce fils de l'homme que votre plume inspirée nous fit aimer dans son Evangile, que votre pinceau nous montra dans les bras de sa Mère, vous le révélez une troisième fois au monde par la reproduction en vous-même de sa propre sainteté.

 

Gardez en nous le fruit de vos multiples enseignements. Si les peintres chrétiens vous honorent à bon droit spécialement, s'il est bon qu'ils apprennent de vous que l'idéal de toute beauté réside dans le Fils et la Mère, il est un art pourtant autrement sublime que celui des lignes et des couleurs : l'art de produire en nous la divine ressemblance. C'est en ce dernier que nous voulons exceller à votre école; car nous savons de saint Paul, votre maître, que la conformité d'image avec le Fils de Dieu est le titre unique de la prédestination des élus.

 

Protégez les médecins fidèles ; ils s'honorent de marcher à votre suite ; ils s'appuient, dans leur ministère de dévouement et de charité, sur le crédit dont vous jouissez près de l'auteur de la vie. Aidez leurs soins pour guérir ou soulager la souffrance ; inspirez leur zèle, quand s'annonce le moment du redoutable passage.

 

Hélas ! aujourd'hui, le monde lui-même réclame pour sa sénile débilité les soins de quiconque est en mesure par la prière ou l'action de conjurer ses crises. Quand le fils de l'homme reviendra, pensez-vous qu'il trouve encore de la foi sur la terre ? C'était la parole du Seigneur en votre Evangile. Mais il disait encore qu'il faut prier toujours et ne se jamais lasser ; ajoutant pour l'Eglise de nos jours et de tous les temps, cette parabole de la veuve dont les importunités finissent par l'emporter sur le mauvais vouloir du juge inique entre les mains duquel est sa cause. Et Dieu ne fera pas justice à ses élus, s'ils crient vers lui jour et nuit ? et il tolérera qu'on les opprime sans fin ? Je vous le dis : il les vengera bientôt.

 

 

DOM GUÉRANGER
L'Année Liturgique

 

Saint Luc par Ghirlandaio

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16 octobre 2010 6 16 /10 /octobre /2010 05:00

Depuis le 13 mai 1920, jour de sa Canonisation, il s'est fait une grande diffusion de la Vie de Sainte Marguerite-Marie. Ce mouvement ne semble pas devoir se ralentir, puisque la dévotion envers la disciple du Cœur de Jésus progresse parallèlement avec la dévotion envers Lui. Partout, en effet, où germe et se développe le culte du Sacré Cœur, les âmes se montrent avides de mieux connaître l'humble confidente du Dieu d'amour et de miséricorde, celle qu'il a Lui-même choisie, non seulement pour lui révéler personnellement son divin Cœur, mais encore pour en être l'apôtre et l'évangéliste au sein de l'Église catholique. Et c'est ainsi que la chère Sainte de Parayle-Monial, qui n'ambitionnait qu'une chose : "être ensevelie dans un éternel oubli et mépris des créatures", voit maintenant, de par la volonté divine, son nom invoqué dans tous les pays et son intercession réclamée comme une grâce par les grands et les petits.

 

 Sainte Marguerite-Marie reste bien le trésor particulier de son monastère, de son Ordre et de la France ; mais, du fait même de sa mission, sanctionnée par la suprême autorité de l'Église, elle appartient à tout le monde. N'est-elle point chargée d'office de distribuer à tous les hommes les richesses infinies du Cœur de son Dieu ? Quelle incomparable investiture ! Notre-Seigneur lui disait un jour : "Je te constitue héritière de mon Cœur et de tous ses trésors pour le temps et l'éternité, te permettant d'en user selon ton désir". Ce n'est pas en vain qu'un Dieu prononce une telle parole. Or, ce qu'il dit, c'est ce qu'il veut et il le maintient. Et, chaque jour davantage — surtout depuis que Marguerite-Marie est devenue une sainte canonisée —  le Maître se plaît à répandre ses faveurs par elle. Nombreuses sont les grâces obtenues par sa médiation ; et on, en compte de toutes sortes — des temporelles comme des spirituelles. Il nous est doux de le publier, faisant ainsi écho à la reconnaissance de tous ceux qui ont éprouvé le bienfaisant secours de la Vierge de Paray.

 

 C'est afin de mettre encore à la portée de tous les fidèles une Vie complète bien qu'abrégée de la Servante de Dieu que nous donnons cette nouvelle édition du présent petit volume, les précédentes ayant déjà reçu un si bienveillant accueil dans le cloître et dans le monde.

 

 Daigne le Cœur de Jésus bénir une fois de plus ces modestes pages ! Elles n'ont d'autre but que de mettre en lumière l'oeuvre divine dans l'âme d'une Sainte dont la devise était :

" Tout de Dieu et rien de moi !

" Tout à Dieu et rien à moi

" Tout pour Dieu et rien pour moi !"

 

De notre Monastère de Paray-le-Monial, 26 juin 1923.

 

DIEU SOIT BÉNI

 

 

Avant-propos de la VIE DE SAINTE MARGUERITE-MARIE ALACOQUE

publié par le Monastère de Paray-le-Monial (1923)

 

Sainte Mmarguerite Marie

SAINTE MARGUERITE-MARIE

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15 octobre 2010 5 15 /10 /octobre /2010 05:00

" Encore que l'Eglise qui règne au ciel et celle qui gémit sur la terre semblent être entièrement séparées, dit pour cette fête l'Evêque de Meaux, il y a néanmoins un lien sacré par lequel elles sont unies. Ce lien, c'est la charité, qui se trouve dans ce lieu d'exil aussi bien que dans la céleste patrie ; qui réjouit les saints qui triomphent, et anime ceux qui combattent ; qui se répandant du ciel en terre, et des anges sur les mortels, fait que la terre devient un ciel, et que les hommes deviennent des anges. Car, ô sainte Jérusalem, heureuse Eglise des premiers nés, dont les noms sont écrits au ciel, quoique l'Eglise votre chère sœur, qui vit et combat sur la terre, n'ose pas se comparer à vous, elle ne laisse pas d'assurer qu'un saint amour vous unit ensemble. Il est vrai qu'elle cherche, et que vous possédez ; qu'elle travaille, et que vous vous reposez ; qu'elle espère, et que vous jouissez. Mais parmi tant de différences, par lesquelles vous êtes si fort éloignées, il y a du moins ceci de commun, que ce qu'aiment les esprits bienheureux, c'est ce qu'aiment aussi les hommes mortels. Jésus est leur vie, Jésus est la nôtre ; et parmi leurs chants d'allégresse et nos tristes gémissements, on entend résonner partout ces paroles du sacré Psalmiste : Mon bien est de m'unir à Dieu."

(Bossuet, Panégyrique de sainte Thérèse)

  

 Or, ce bien suprême de l'Eglise de la terre comme de l'Eglise des cieux, Thérèse, en un temps de ruines, eut mission de le rappeler au monde, des hauteurs du Carmel rendu par elle à sa première beauté. Au sortir de la glaciale nuit des siècles XIVe et XVe une puissance d'irrésistible attrait se dégage des exemples de sa vie, pour lui survivre en ses écrits, entraînant à sa suite les prédestinés sur les pas de l'Epoux.

  

 Ni l'Esprit-Saint pourtant n'ouvrait en Thérèse des voies inconnues ; ni Thérèse surtout, l'humble Thérèse, n'innovait en ses livres. Bien avant elle, l'Apôtre avait dit des chrétiens que leur conversation est dans les cieux ; et l'Aréopagite nous livrait sur ce point, lors de son récent passage au Cycle sacré, jusqu'aux formules de l'enseignement du premier âge. Faut-il citer après lui les Ambroise, les Augustin, les Grégoire le Grand, les Grégoire de Nazianze, tant d'autres témoins de toutes les Eglises ? On l'a dit et prouvé mieux que nous ne saurions faire : "Aucun état ne fut mieux reconnu par les Pères que celui de l'union parfaite qui s'achève au sommet de la contemplation ; en lisant leurs écrits, on ne peut s'empêcher de remarquer la simplicité avec laquelle ils en traitent ; ils paraissent le regarder comme fréquent, et n'y voient qu'un développement du christianisme dans sa plénitude."

  

 En cela comme en tout le reste, la scolastique recueillit leurs données. Elle affirma la doctrine concernant ces sommets de la vie chrétienne, dans les jours mêmes où l'affaiblissement de la foi des peuples ne laissait plus guère à la divine charité son plein essor qu'au fond de quelques cloîtres ignorés. Sous sa forme spéciale, l'enseignement de l'Ecole n'était malheureusement plus accessible à tous ; et, par ailleurs, le caractère anormal de cette époque si étrangement troublée se reflétait jusque chez les mystiques qu'elle possédait encore.

  

 Alors parut, au royaume catholique, la Vierge d'Avila. Admirablement douée par la grâce et par la nature, elle connut les résistances de celle-ci comme les appels de Dieu, les délais purifiants, les triomphes progressifs de l'amour ; l'Esprit, qui la voulait maîtresse en l'Eglise, la conduisait par le chemin classique, si l'on peut dire ainsi, des faveurs qu'il réserve aux parfaits. Arrivée donc à la montagne de Dieu, elle fit le relevé des étapes de la route qu'elle avait parcourue, sans autre prétention que d'obéir à qui lui commandait au nom du Seigneur ; d'une plume exquise de limpidité, d'abandon, elle raconta les œuvres accomplies pour l'Epoux ; avec non moins de charmes, elle consigna pour ses filles les leçons de son expérience, décrivit les multiples demeures de ce château de l'âme humaine au centre duquel, pour qui sait l'y trouver, réside en un ciel anticipé la Trinité sainte. Il n'en fallait pas plus : soustraite aux abstractions spéculatives, rendue à sa sublime simplicité, la Mystique chrétienne attirait de nouveau toute intelligence ; la lumière réveillait l'amour ; et les plus suaves parfums s'exhalaient de toutes parts au jardin de la sainte Eglise, assainissant la terre, refoulant les miasmes sous lesquels l'hérésie d'alors et sa réforme prétendue menaçaient d'étouffer le monde.

 

 Thérèse sans doute ne conviait personne à tenter de forcer, aussi présomptueusement qu'inutilement, l'entrée des voies non communes. Mais si l'union passive et infuse reste entièrement dépendante du bon plaisir de Dieu, l'union de conformité effective et active au vouloir divin, sans laquelle la première ne serait qu'illusion, s'offre avec l'aide de la grâce ordinaire à tout homme de bonne volonté. Ceux qui la possèdent "ont obtenu ce qu'ils peuvent souhaiter, dit la Sainte. C'est là l'union que j'ai désirée toute ma vie, que j'ai toujours demandée à Notre-Seigneur ; c'est aussi la plus facile à connaître et la plus assurée".

 

 Néanmoins elle ajoutait : "Gardez-vous de ces réserves excessives qu'on voit en certaines personnes, et qu'elles prennent pour de l'humilité. Si le roi daignait vous accorder quelque faveur, l'humilité consisterait-elle à l'accueillir par un refus ? Et lorsque le souverain Maître du ciel et de la terre daigne honorer mon âme de sa visite, qu'il vient pour me combler de ses grâces et se réjouir avec moi, ce serait me montrer humble que de ne vouloir ni lui répondre, ni lui tenir compagnie, ni accepter ses dons, mais de m'enfuir de sa présence et de le laisser là tout seul ? En vérité, la plaisante humilité que celle-là ! Voyez dans Jésus-Christ un père, un frère, un maître, un époux, et traitez avec lui selon ces diverses qualités ; lui-même vous apprendra quelle est celle qui peut le satisfaire davantage, et qu'il vous convient de choisir. Ne soyez pas si simples alors que de n'en pas faire usage". (Chemin de la perfection Ch. XXIX.)

 

Mais, répète-t-on de toutes parts, cette voie est toute semée d'écueils : une telle s'y est perdue ; celle-ci s'y est égarée ; cette autre qui ne cessait de prier, n'a pu éviter de tomber... — Admirez ici l'inconcevable aveuglement du monde. Il ne s'inquiète point de ces milliers de malheureux qui, entièrement étrangers à la vie d'oraison, vivent dans les plus horribles débordements ; et s'il arrive, par un malheur déplorable sans doute, mais très rare, que les artifices du tentateur séduisent une âme qui fait oraison, on en tire avantage pour inspirer aux autres les plus grandes terreurs et pour les éloigner des pratiques saintes de la vertu. N'est-ce pas être victime de la plus funeste erreur que de croire qu'il faille, pour se garantir du mal, éviter de faire le bien ? Elevez-vous au-dessus de toutes ces craintes. Efforcez-vous de conserver votre conscience toujours pure ; fortifiez-vous dans l'humilité ; foulez aux pieds toutes les choses de la terre ; soyez inébranlables dans la foi de la sainte Eglise notre mère, et ne doutez pas après cela que vous ne soyez dans le bon chemin". (Chemin de la perfection ch. XXII.)

 

Il est trop vrai : "lorsqu'une âme ne trouve pas en elle cette foi vigoureuse et que ses transports de dévotion ne contribuent pas à augmenter son attachement pour la sainte Eglise, elle est dans une voie pleine de périls. L'Esprit de Dieu n'inspire jamais que des choses conformes aux saintes Ecritures, et, s'il y avait la plus légère divergence, cette divergence suffirait à elle seule pour prouver d'une manière si évidente l'action du mauvais esprit que, le monde entier m'assurât-il que c'est l'Esprit divin, je ne le croirais pas". (Vie, ch. XXV )

 

Mais l'âme évite un tel  péril, en interrogeant ceux qui peuvent l'éclairer. "Tout chrétien doit, quand il le peut, rechercher un guide instruit, et le plus éclairé sera le meilleur. Un tel secours est encore plus nécessaire aux personnes d'oraison, et c'est dans les états les plus élevés qu'elles peuvent le moins s'en passer. J'ai toujours aimé les hommes éminents en doctrine. Quelques-uns, j'en conviens, n'auront pas une connaissance expérimentale des voies spirituelles ; mais ils n'en ont point aversion, ils ne les ignorent pas, et à l'aide de l'Ecriture sainte, dont ils font une étude constante, ils reconnaissent toujours les véritables marques du bon Esprit. L'esprit de ténèbres redoute singulièrement la science humble et vertueuse ; il sait qu'il sera découvert par elle, et qu'ainsi ses stratagèmes tourneront à sa perte. Seigneur, moi ignorante et inutile, je vous bénis pour ces ministres fidèles qui nous donnent la lumière. Je n'ai pas plus de science que de vertu ; je n'écris qu'à la dérobée, et encore avec peine : cela m'empêche de filer, et je suis dans une maison pauvre où les occupations ne me manquent pas. Il me suffit d'être femme, et femme si imparfaite, pour que la plume m'échappe des mains". (Vie, ch. XIII.)

 

A votre gré, ô Thérèse : délivrez votre âme ; passant plus outre, au souvenir de ce que vous appelez vos infidélités, avec Madeleine arrosez de vos larmes les pieds du Seigneur, reconnaissez-vous dans les Confessions d'Augustin ! Oui ; dans ces relations de jadis qu'approuvait, il est vrai, l'obéissance, dans ces entretiens où tout n'était qu'honneur et vertu, c'était pourtant une faute à vous, conviée plus haut, de disputer à Dieu tant d'heures qu'il vous sollicitait intimement de garder pour lui seul ; et qui sait où les froissements prolongés de l'Epoux eussent en effet conduit votre âme ? Mais nous dont la froide casuistique ne saurait découvrir en vos grands péchés par eux-mêmes que ce qui serait la perfection pour tant d'autres, c'est notre droit d'apprécier comme l'Eglise et votre vie et vos ouvrages, disant avec elle : Exaucez-nous, ô Dieu sauveur ; en ce jour de joie, en cette fête de votre bienheureuse vierge Thérèse, nourrissez-nous de sa céleste doctrine, infusez-nous son amour.

 

Selon la parole du divin Cantique, pour introduire Thérèse en ses réserves les plus excellentes, l'Epoux avait dû ordonner l'amour en son âme et y régler la charité. Ayant donc revendiqué, comme il était juste, ses droits souverains, il ne tardait pas à la rendre au prochain lui-même plus dévouée, plus aimante que jamais. Le dard du Séraphin ne dessécha ni ne déforma son cœur. Au point culminant de la perfection qu'elle devait atteindre, l'année même de sa bienheureuse mort : "Si vous m'aimez beaucoup, écrivait-elle, je vous le rends, je vous assure, et j'aime que vous me le disiez. Oh ! qu'il est vrai que notre nature nous porte à vouloir être payées de retour ! Cela ne doit point être mauvais, puisque Notre-Seigneur même l'exige de nous. C'est un avantage pour nous de lui ressembler en quelque chose, ne fût-ce qu'en celle-là". (lettre à Marie de Saint-Joseph, Prieure de Séville, 8 novembre 1581)

 

Et ailleurs, parlant de ses voyages sans fin au service de l'Epoux : "La peine des peines, c'était lorsque je devais quitter mes filles et mes sœurs. Elles sont détachées de tout en ce monde, mais Dieu ne leur a pas accordé de l'être de moi ; il l’a peut-être permis pour que ce me fût un plus grand tourment,car je ne suis pas non plus détachée d'elles". (Fondations, ch. XXVII.)

 

Non ; la grâce ne déprécie pas la nature, œuvre, elle aussi, du Créateur. En la consacrant, elle l'assainit, la fortifie, l'harmonise ; elle fait du plein épanouissement de ses facultés le premier, le plus tangible hommage rendu par l'homme régénéré, sous l'oeil de ses semblables, au Dieu rédempteur. Qu'on lise ce chef-d'œuvre littéraire qu'est le livre des Fondations, ou tout aussi bien les innombrables lettres disputées par la séraphique Mère à sa vie dévorante ; et l'on reconnaîtra si l'héroïsme de la foi et de toutes les vertus, si la sainteté à sa plus haute expression mystique, nuisit un instant chez Thérèse, nous ne dirons pas à la constance, au dévouement, à l'énergie, mais à cette intelligence que rien ne déconcerte, alerte et vive jusqu'à l'enjouement, à ce caractère toujours égal, répandant de sa plénitude sérénité et paix sur tout ce qui l'entoure, à la délicate sollicitude, à la mesure, au tact exquis, au savoir-vivre aimable, enfin au génie pratique, à l'incomparable bon sens de cette contemplative dont le cœur transpercé ne battait plus que par miracle, dont  la devise était :  Souffrir ou mourir !

 

Au bienfaiteur d'une fondation projetée : "Ne croyez pas, Monsieur, avoir à donner seulement ce que vous pensez, écrit-elle ; je vous en préviens. Ce n'est rien de donner de l'argent, cela ne fait pas grand mal. Mais quand nous nous verrons au moment d'être lapidés, vous, monsieur votre gendre, et tous tant que nous sommes qui nous mêlons de cette affaire, comme il faillit nous arriver lors de la fondation de Saint-Joseph d'Avila, oh ! c'est alors qu'il y fera bon". (lettre à Alphonse Ramirez, 19 février 1569)

 

C'est à cette même fondation de Tolède, en effet fort mouvementée, que se rapporte le mot de l'aimable Sainte : "Thérèse et trois ducats, ce n'est rien ; mais Dieu, Thérèse et trois ducats, c'est tout".

 

Thérèse éprouva mieux que les dénuements humains : un jour, Dieu même sembla lui manquer. Comme avant elle Philippe Benizi, comme après elle Joseph Calasanz et Alphonse de Liguori, elle connut l'épreuve de se voir condamnée, rejetée, elle, et ses filles, et ses fils, au nom et par l'autorité du Vicaire de l'Epoux. C'était un de ces jours, prédits dès longtemps, où il est donné à la bête de faire la guerre aux saints et de les vaincre (Apoc. XIII, 7.)

 

L'espace nous manque pour raconter ces incidents douloureux ; et à quoi bon ? La bête alors n'a qu'un procédé, qu'elle répète au XVIe siècle, au XVIIe, au XVIIIe, et toujours ; comme, en le permettant, Dieu n'a qu'un but : d'amener les siens à ce haut sommet de l'union crucifiante où Celui qui voulut le premier savourer l'amertume de cette lie, put dire à plus douloureux titre qu'aucun : Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m'avez vous abandonné ?

 

 

 DOM GUÉRANGER
L'Année Liturgique

 

 

SAINTE THÉRÈSE par François Gérard

" Alors parut, au royaume catholique, la Vierge d'Avila."

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14 octobre 2010 4 14 /10 /octobre /2010 05:00

Celui-là fut un signe de contradiction dans Israël. Autour de lui ou contre lui se groupèrent de son temps les baptisés ; or, l'émoi qu'excitait son nom il y a seize cents ans n'apparut pas moindre, lorsqu'au milieu du siècle qui finit, la découverte d'un livre fameux offrit aux sectaires de nos jours l'occasion de se compter comme ceux d'autrefois contre Calliste et l'Eglise. PHILOSOPHUMENA ou réfutation des hérésies : c'était le titre du livre, qui remontait par sa date de composition au troisième siècle de notre ère ; Calliste, dont on présentait le caractère et la vie sous les plus sombres couleurs, y était rangé parmi les pires corrupteurs de la doctrine. Au IIIe siècle cependant, l'auteur des Philosophumena s'attaquant au Pontife qu'il eût voulu supplanter, dressant dans Rome, comme il l'avoue, chaire contre chaire, ne fit qu'afficher devant l'Eglise sa propre honte, en prenant place lui-même parmi les dissidents dont son ouvrage se donnait comme la réfutation et l'histoire. Le nom de ce premier des antipapes ne devait pas arriver jusqu'à nous ; mais, suprême châtiment ! dédaignée des contemporains, l'œuvre de sa plume envieuse viendrait à l'heure voulue réveiller l'attention endormie de la lointaine postérité ; l'impartiale critique des derniers âges, écartant les insinuations, mais retenant les faits apportés par l'accusateur, les apprécierait à la lumière des multiples données de la science, et dégagerait de ses perfidies les éléments de la glorification la plus inattendue pour son rival détesté. Ainsi, une fois de plus, l'iniquité se serait menti à elle-même ; ainsi se vérifierait la parole de l'Evangile : Il n'y a rien de caché qui ne se découvre enfin, rien de secret qui ne doive être connu.

 

 Ecoutons le plus grand des archéologues chrétiens ; l'enthousiasme s'empare de son intelligence si sûre, si réservée, à tant de lumière jaillissant d'une telle source. "Tout cela, s'écrie le Commandeur de Rossi dans l'étude de l'odieux document, tout cela me fait clairement voir pourquoi l'accusateur dit de Calliste avec ironie qu'il fut réputé le très admirable ; pourquoi, lorsque toute connaissance des actes de celui-ci était perdue, son nom pourtant est venu jusqu'à nous si grand et si vénéré ; pourquoi dans les siècles troisième et quatrième, où la mémoire de son gouvernement était fraîche encore, il fut plus honoré qu'aucun de ses prédécesseurs ou successeurs de l'âge des persécutions. Calliste régit l'Eglise quand elle était à l'apogée du premier stade de sa course divine, et s'acheminait à de nouveaux et plus grands triomphes. La foi chrétienne, embrassée d'abord par chaque croyant en son nom propre, était devenue la foi des familles, et les pères en faisaient profession pour eux et pour leurs enfants. Ces familles formaient la presque majorité déjà dans chaque ville ; la religion du Christ était à la veille de devenir la religion publique du peuple et de l'empire. Que de problèmes nouveaux de droit social chrétien, de droit ecclésiastique, de discipline morale, ne surgissaient pas tous les jours dans le champ de l'Eglise, étant donnée sa grande situation de l'heure présente, étant donné l'avenir encore plus grand qui s'ouvrait devant elle ! Calliste résolut ces doutes ; il régla les jugements relatifs à la déposition des clercs, prit les mesures qui s'imposaient pour ne pas détourner les catéchumènes du baptême, les pécheurs de la pénitence ; il définit la notion de l'Eglise que le génie d'Augustin devait développer plus tard. En face des lois civiles, il affirma le droit dela conscience chrétienne et celui de l'Eglise touchant le mariage de ses fidèles. Il ne connut esclaves ni libres, grands ou petits, nobles ou plébéiens dans la fraternité évangélique qui minait les bases de la société romaine et adoucissait l'inhumanité des mœurs. Et c'est pourquoi son nom est grand jusqu'à nos jours ; et c'est pourquoi la voix des jaloux ou de ceux qui mesuraient les temps à l'étroitesse de leur esprit superbe, fut étouffée sous le cri de l'admiration et méprisée."

 

L'espace nous manque pour faire suivre des développements qu'il comporterait cet exposé magistral. On sait comment, à l'heure où Cécile vierge et martyre céda aux Pontifes le lieu primitif de son repos dans la mort, Calliste, alors diacre de Zéphyrin, disposa l'hypogée des Cœcilii pour ses destinées nouvelles. Auguste crypte en laquelle, pour la  première fois, l'Etat reconnut à l'Eglise son droit de posséder sur terre ; sanctuaire autant que nécropole, où jusqu'au triomphe de la Croix, Rome chrétienne accumula pour le jour de la résurrection ses  trésors. Jugé le plus digne de rappeler tant de gloires, le nom donné à ce Cimetière par excellence fut celui de notre grand Pontife martyr, bien que la Providence eût arrêté que lui-même n'y reposerait jamais. Sous le règne bienveillant d'Alexandre Sévère, il perdit la vie au quartier du Transtévère, dans une sédition des païens contre lui. La cause en fut sans doute l'acquisition qu'il avait faite de la  fameuse Taberna meritoria du sol de laquelle, au temps d'Auguste, une fontaine d'huile avait jailli  et coulé tout un jour. Le Pontife érigea ce lieu en église, et le dédia à la Mère du Sauveur ; c'est la basilique de Sainte-Marie au delà du Tibre. La propriété en fut disputée à Calliste, et la cause déférée à l'empereur, qui décida pour les chrétiens. La mort violente de Calliste semble une vengeance des adversaires, et elle eut lieu tout près de l'édifice que sa fermeté avait conservé à l'Eglise. Les séditieux le précipitèrent dans un puits, que l'on  voit encore dans l'église de Saint-Calliste, à quelques pas seulement de la basilique Transtibérine. La sédition ne permit pas de transporter le corps du martyr sur la voie Appienne ; on le déposa dans un cimetière déjà ouvert  sur la voie Aurélia, où sa sépulture donna origine à un nouveau centre historique de Rome souterraine.

 

Voici la brève notice rédigée dans un temps où l'histoire de Calliste était moins connue qu’elle ne l'est de nos jours :

Calliste, né à Rome, gouverna l'Eglise au temps de l'empereur Antonin Héliogabale. Il établit les Quatre-Temps, ordonnant que le jeûne dont la tradition venait des Apôtres y serait observé par tous. Il construisit la basilique de Sainte-Marie au delà du Tibre, et agrandit sur la voie Appienne un ancien cimetière où grand nombre de saints Pontifes et de Martyrs furent ensevelis ; on l'appela de lui le cimetière de Calliste.

 

 Le corps du bienheureux Calépodius Prêtre et Martyr avant été jeté au Tibre, il le fit dans sa piété rechercher avec grand soin, et, l'ayant trouvé, l'ensevelit avec honneur. Le consulaire Palmatius, le sénateur Simplicius, Félix et Blanda, tous ensuite Martyrs, reçurent de lui le baptême. Mis en prison pour ce motif, il y  gagna à Jésus-Christ le soldat Privatus, en le guérissant par un miracle des ulcères qui le couvraient ; Privatus venait à peine d'embrasser la foi, qu'il mourait pour elle sous les fouets armés de plomb.

 

 Calliste avait siégé cinq ans, un mois et douze jours. En cinq ordinations au mois de décembre, il avait créé seize prêtres, quatre diacres, huit évêques Soumis au supplice de la faim, à des flagellations répétées, il fut enfin précipité dans un puits et couronné ainsi du martyre sous l'empereur Alexandre Sévère. On le transporta au cimetière de Calépodius, au troisième mille sur la voie Aurélia. C'était la veille des ides d'octobre. Son corps fut par la suite ramené dans la basilique de Sainte-Marie au delà du Tibre, qu'il avait bâtie, et placé sous l'autel majeur où on l'entoure d'une grande vénération.

 

 

 L'Esprit-Saint, qui garde l'Eglise, vous prépara comme un auxiliaire d'élite dans la souffrance et l'humiliation. Vous naquîtes esclave, jeune encore, les mines de Sardaigne comptaient en vous un forçat de plus, mais c'était pour le Seigneur. Serf de la peine, comme disait l'ancienne Rome, vous ne l'étiez plus de votre ancien maître ; et délivré des mines à l'heure marquée par Celui qui conduit les événements au gré de sa providence, le titre de Confesseur, en vous ennoblissant pour jamais, vous recommandait à l'attention maternelle de l'Eglise.

 

 Tels apparurent dès lors votre mérite et vos vertus, qu'inaugurant le plus long pontificat de l'époque des martyrs, Zéphyrin vous choisit pour le conseiller, l'appui, le suppléant de sa vieillesse ; en attendant que l'Eglise, suffisamment  instruite par l'expérience de ces dix-huit années, vous élût à son tour comme pasteur suprême.

 

Combien grande vous la laissez aujourd'hui, cette noble Epouse du Fils de Dieu ! Toute la noblesse des anciens âges, toute la valeur morale, tout l'essor intellectuel de l'humanité apparaissent concentrés en elle à cette heure. Où sont les mépris de jadis, les calomnies d'antan ? Le monde n'ignore plus qu'il a devant lui la reine de l'avenir ; l'atrocité des persécutions que l'Etat païen lui réserve encore viendra de cette conviction qu'il s'agit pour lui de la lutte, et d'une lutte désespérée, pour la vie. Aussi hésite-t-il, et semble-t-il plutôt vouloir aujourd'hui transiger avec les chrétiens.

 

Vous fûtes l'initiateur des voies nouvelles, pleines de péril comme de grandeur, où entrait l'Eglise. De l'absolu et brutal Non licet esse vos ( Il ne vous est pas permis d'être) des jurisconsultes bourreaux, vous sûtes le premier amener l'empire à reconnaître en quelque chose officiellement les droits de la communauté chrétienne : Cécile assurait par vous à celle-ci la propriété de la tombe, la faculté de se réunir, de se cotiser, pour honorer ses morts ; à Marie, Fons Olei, et ce fut l'occasion de votre martyre, il vous était donné de consacrer le premier sanctuaire légalement acquis dans Rome aux chrétiens. Or, loin de céder quoi que ce fût des droits de Dieu en pactisant avec César, vous affirmiez dans le même temps à l'encontre de celui-ci, comme nul ne l'avait fait encore, l'indépendance absolue de l'Eglise concernant cette question du mariage soustraite de par le Christ-roi à la juridiction des pouvoirs civils. "D'ores et déjà ne dirait-on pas une nation dans la nation ? oui ; jusqu'à ce que la nation elle-même ait  passé tout entière  dans les rangs de ce peuple nouveau."

 

Au sein de l'Eglise, autres soucis, l'ardeur des luttes doctrinales est à son comble et s'est portée sur le premier de nos mystères : Sabellius, condamné pour son audace à déclarer incompatible avec l'unité de Dieu la réelle distinction de la Trinité sainte, laisse le champ libre à l'école qui sépare les augustes personnes au risque de multiplier Dieu même. Puis c'est Montan, dont les disciples, ennemis des théories sabelliennes antérieurement à Sabellius même, escomptent la faveur du premier Siège pour leur système de fausse mystique et de réforme outrée. Mais comme le pilote expérimenté déjoue les écueils, entre les subtilités des dogmatisants, les prétentions des rigoristes, les utopies des politiques, vous dirigiez d'une main dont la sûreté était celle de l'Esprit-Saint lui-même la barque de Pierre à ses immortelles destinées. En la mesure où Satan vous déteste et vous poursuit jusqu'à nos jours, soyez glorifié à jamais ; bénissez en nous vos disciples et vos fils.

 

 

DOM GUÉRANGER
L'Année Liturgique

 

 

Santa Maria in Trastevere

Santa Maria in Trastevere

"... la  fameuse Taberna meritoria du sol de laquelle, au temps d'Auguste, une fontaine d'huile avait jailli  et coulé tout un jour. Le Pontife érigea ce lieu en église, et le dédia à la Mère du Sauveur ; c'est la basilique de Sainte-Marie au delà du Tibre."

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13 octobre 2010 3 13 /10 /octobre /2010 05:00

Saluons le lis que porte à son sommet l'antique branche des rois de Wessex ! Les temps ont marché depuis ce sixième siècle où le païen Cerdik et les autres chefs de bandes, venus comme lui de la mer du Nord, jonchaient de ruines le sol de l'île des Saints. Leur mission de colère accomplie, les Anglo-Saxons furent des instruments de grâce pour la terre qu'ils avaient conquise. Baptisés par Rome, comme auparavant les Bretons qu'ils venaient de châtier, ils oublièrent moins qu'eux d'où leur venait le salut ; une éclosion de sainteté nouvelle marqua les complaisances que le ciel prenait derechef en Albion, pour la fidélité dont princes et peuples de l'heptarchie ne cessèrent point d'entourer le Siège de Pierre.

 

L'an 800 du Seigneur, Egbert, descendant de Cerdik, visitait en pèlerin la Ville éternelle, lorsqu'une députation des West-Saxons lui offrit la couronne à ce tombeau du Prince des Apôtres au pied duquel, à l'heure même, Charlemagne restaurait l'empire. Comme Egbert devait ramener sous un sceptre unique la puissance des sept royaumes, ainsi Edouard, son dernier successeur, en résume aujourd'hui les gloires saintes. Neveu du Martyr du même nom, Edouard s'est vu attribuer devant les hommes et devant Dieu le beau titre de Confesseur.

 

L'Eglise, dans le récit de sa vie, relève avant tout les vertus qui lui méritèrent une appellation si glorieuse ; on ne doit pas négliger toutefois de saluer dans son règne de vingt-quatre ans l'un des plus fortunés que l'Angleterre ait connus. Alfred le Grand n'eut point de plus illustre imitateur. Les Danois, si longtemps maîtres, soumis au dedans pour toujours, au dehors contenus par la fière attitude du prince ; Macbeth, l'usurpateur du trône d'Ecosse, vaincu dans une campagne que Shakespeare a immortalisée ; et ces lois d'Edouard restées jusqu'à nos temps l'une des bases du droit britannique ; et sa munificence pour toutes les nobles entreprises, dans le même temps qu'il trouvait le secret de réduire les charges de son peuple : tout montre assez que le plus suave parfum des vertus qui firent de lui l'intime de Jean le bien-aimé, n'a rien d'incompatible en histoire avec la grandeur des rois.

 

 Voici les lignes que lui consacre l'Eglise :

 Edouard , surnommé le Confesseur, était le neveu du saint roi Edouard le Martyr, et il fut le dernier roi des Anglo-Saxons. Le Seigneur avait révélé dans une extase sa future royauté à un saint personnage du nom de Brithuald. Cependant les Danois qui dévastaient l'Angleterre le cherchant pour le faire mourir, il fut dès sa dixième année contraint de s'exiler à la cour du duc de Normandie, son oncle. Telles y parurent, au milieu de toutes les amorces des passions, l'intégrité de sa vie, l'innocence de ses mœurs, qu'il faisait l'admiration générale. On voyait dès lors éclater en lui l'extraordinaire piété qui l'attirait vers Dieu et les choses divines. D'une nature très douce, sans nulle ambition de dominer, on rapporte de lui cette parole : "J'aime mieux ne régner jamais, que de recouvrer mon royaume par la violence et l'effusion du sang."

 

 Mais les tyrans qui avaient enlevé la vie et le trône à ses frères étant morts, il fut rappelé dans sa patrie et couronné au milieu des acclamations et de l'allégresse universelle. Tous ses soins se tournèrent à effacer les traces des fureurs de l'ennemi, en commençant par la religion et les églises, réparant les unes, en élevant de nouvelles, les dotant de revenus et de privilèges ; car son premier souci était de voir refleurir le culte de Dieu qui avait grandement souffert. C'est l'affirmation de tous les auteurs que, contraint par les seigneurs de sa cour au mariage, il y garda la virginité avec son épouse, vierge comme lui. Tels étaient son amour et sa foi dans le Christ, qu'il mérita de le voir au saint Sacrifice lui souriant et resplendissant d'un éclat divin. On l'appelait communément le père des orphelins et des malheureux car sa charité était si grande qu'on ne le voyait jamais plus heureux que lorsqu'il avait épuisé le trésor royal pour les pauvres.

 

 Il fut illustré du don de prophétie, et reçut des lumières d'en haut touchant l'avenir de son pays ; fait remarquable entre autres : il connut surnaturellement, à l'instant même qu'elle arriva, la mort de Suénon, roi de Danemark, englouti dans les flots comme il s'embarquait pour envahir l'Angleterre. Fervent dévot de saint Jean l'Evangéliste, il avait la coutume de ne jamais refuser ce qu'on lui demandait en son nom ; comme donc, un jour, l'Apôtre lui-même, sous l'apparence d'un mendiant en haillons, lui demandait l'aumône, le roi, n'ayant pas d'argent, tira du doigt son anneau et l'offrit au Saint, qui peu après le retourna à Edouard avec l'annonce de sa mort prochaine. Le roi, prescrivant à sa propre intention des prières, mourut en effet très pieusement au jour prédit par l'Evangéliste, à savoir les nones de janvier de l'an du salut mil soixante-six. La gloire des miracles entoura sa tombe, et dans le siècle suivant, Alexandre III l'inscrivit parmi les Saints.

 

 Toutefois le culte de sa mémoire dans l'Eglise universelle a été, quant à l'Office public, fixé par Innocent XI au présent jour ; c'est celui où son corps, levé du tombeau après trente-six ans, fut trouvé sans corruption et répandant une suave odeur.

 

 

Vous représentez au Cycle sacré le peuple en qui Grégoire le Grand prévit l'émule des Anges ; tant de saints rois, d'illustres vierges, de grands évêques et de grands moines, qui furent sa gloire, forment aujourd'hui votre cour brillante. Où sont les insensés pour lesquels, avec vous, votre race a semblé mourir ? C'est du ciel que doit se juger l'histoire. Tandis que vous et les vôtres y régirez toujours, jugeant les nations et dominant les peuples ; les dynasties de vos successeurs d'ici-bas, jalousant l'Eglise, appelant de longue date le schisme et l'hérésie, se sont éteintes l'une après l'autre, stérilisées par la colère de Dieu, dans ces vaines renommées dont le livre de vie ne garde nulle trace. Combien meilleurs et plus durables apparaissent, ô Edouard, les fruits de votre virginité sainte ! Apprenez-nous à voir dans le monde présent la préparation d'un autre qui ne doit pas finir, à n'estimer les événements humains qu'en raison de leurs résultats éternels.

 

Des yeux de l'âme, notre culte vous cherche et vous trouve en votre royale abbaye de Westminster ; c'est de là que par avance nous aimons à vous contempler montant dans la gloire, au redoutable jour qui verra près de vous tant de fausses grandeurs manifester leur honte et leur néant.

 

Bénissez-nous, prosternés de cœur à ce tombeau dont l'hérésie inquiète prétend vainement écarter la prière. Offrez à Dieu les supplications qui montent de tous les points du monde, à cette heure, pour les brebis errantes que la voix du pasteur rappelle si instamment en nos jours à l'unique bercail.

 

 

DOM GUÉRANGER
L'Année Liturgique

 

Chœur de la Cathédrale de Lincoln (XIIIe s.)

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9 octobre 2010 6 09 /10 /octobre /2010 05:00

Annoncé par Brigitte, la voyante du Nord, Denys paraît comme le flambeau le plus brillant de cette constellation des mystiques sacrés qui illumine le Cycle à son déclin des premières lueurs de l'union éternelle. Bientôt, près de lui, nous saluerons Thérèse de Jésus, précédant Pierre d'Alcantara son guide ; tandis que des ombres de sa nuit mystérieuse, Jean de la Croix s'élèvera le mois prochain dans la gloire, au voisinage de Gertrude la Grande.

 

 L'Homme-Dieu commença par agir, avant de formuler sa doctrine ; ainsi l'Eglise a-t-elle, dans son Année liturgique, multiplié les exemples donnés par les Saints, en attendant de codifier par la plume des Saints mêmes les lois de la sainteté. On dirait que, forte à ses propres yeux des résultats acquis, elle se repose maintenant dans la sécurité que donne l'expérience. Comme au Propre du Temps, dont celui des Saints est l'écho fidèle, elle laisse donc carrière à son désir de voir ses fils comprendre avec les Saints la largeur, la longueur, la hauteur, la profondeur du mystère supérieur à toute science, pour être eux-mêmes enfin remplis de toute la plénitude de Dieu. N'est-ce pas là l'œuvre bonne dont l'Apôtre implore en chacun de nous la consommation, pour ce dernier des jours auquel l'évolution des semaines après la Pentecôte nous prépare désormais ? Justice parfaite, fruit de l'amour en son plein développement. Mais le développement de l'amour ne va pas sans celui de l'âme en toute sagesse et intelligence spirituelle ; et ce discernement du meilleur, dont parle saint Paul, ne s'acquiert que dans le commerce des Saints ou l'étude de leurs œuvres.

 

 Or donc, initiateur incomparable, Denys préside aujourd'hui l'assemblée fidèle. Avec l'Orient et l'Occident, faisons silence : parler convient au maître, écouter au disciple :

 "Toute grâce excellente, tout don parfait est d'en haut, et descend du Père des lumières. Toute émanation de splendeur que la céleste bienfaisance laisse déborder sur l'homme, réagit en lui comme principe de simplification spirituelle et de céleste union, et par sa force propre, le ramène vers l'unité souveraine et la déifique simplicité du Père. Car toutes choses viennent de Dieu et retournent à Dieu."

 

Siérait-il de rien ajouter ? Remarque déjà faite : en cette saison qui prépare le monde au suprême avènement de l'Epoux, l'Eglise elle-même modère sa voix. Combien mieux devons-nous l'imiter, aujourd'hui que le divin Aréopagite s'écrie sous le poids de son impuissance : "Nos locutions sont d'autant plus abondantes qu'elles conviennent moins à Dieu. A mesure que l'homme s'élève vers les cieux, le coup d'œil qu'il jette sur le monde spirituel se simplifie, et ses discours s'abrègent ; au voisinage du sommet, non seulement les paroles se font plus concises, mais le langage, mais la pensée même arrivent à faire défaut. Précédemment, notre discours allait s'étendant en proportion de la hauteur d'où il descendait ; s'élevant de bas en haut, il doit se raccourcir d'autant et, parvenu au dernier terme, il cessera tout à fait pour s'aller confondre avec l'ineffable."

 

Rome cependant va nous dire comment, venu d'Athènes en nos régions, le révélateur des célestes hiérarchies féconda de son sang généreux la semence répandue par lui dans la future capitale du pays des Francs. Riche de son très saint corps, l'humble bourgade devenue Saint-Denys en France l'emporta longtemps sur Lutèce, sa voisine, en renommée. Notre patrie rendait en gloire à son apôtre le dévouement qu'il lui avait montré ; il sembla que, dans une inspiration chevaleresque, elle eût pris à tâche de compenser l'adieu qu'il avait dit pour elle  aux grands souvenirs du sol natal. On sait l'immense concours du peuple au saint tombeau, et surtout la piété des rois. L'oriflamme, bannière du Martyr, fut leur étendard ; Mont-Joye Saint-Denys, leur cri de guerre sous tous les cieux où les conduisait la victoire. Comme, durant cette vie, ils ne quittaient point le royaume sans remettre sa garde au protecteur des lis de France en son abbaye, c'était encore à lui qu'au sortir de ce monde, on les voyait confier leurs restes mortels. Malgré de sacrilèges profanations, la nécropole auguste réserve à la terre, pour le dernier jour, un spectacle sublime : alors que sous les yeux d'Adrien césar et de ses préfets, le supplicié de Montmartre, le condamné qu'ils vouèrent à l'infamie, se lèvera de sa tombe escorté des trois dynasties fières de former sa cour en la résurrection, comme elles s'honorèrent de l'entourer dans la mort. Vos serviteurs sont honorés jusqu'à l'excès, à Dieu !

 

Le récit de l'Eglise romaine touchant saint Denys et ses Compagnons est conforme à celui de l'Eglise grecque en ses Menées :

Denys était d'Athènes, et l'un des juges de l'Aréopage. Son instruction était complète en tout genre de science. Encore païen, on raconte que témoin de la miraculeuse éclipse de soleil arrivée le jour où fut crucifié le Seigneur, il s'écria : "Ou le Dieu de la nature souffre, ou le système du monde se détruit". Paul étant donc venu à Athènes, et ayant rendu compte de la doctrine qu'il prêchait dans l'Aréopage où on l'avait conduit, Denys et beaucoup d'autres crurent au Christ dont l'Apôtre annonçait la résurrection comme prémices de celle de tous les morts.

 

 Saint Paul le baptisa et lui remit le gouvernement de l'église d'Athènes. Venu plus tard à Rome, il reçut du Pontife Clément la mission d'aller prêcher l'Evangile en Gaule et pénétra jusqu'à Lutèce, ville des Parisiens, en la compagnie du prêtre Rustique et du diacre Eleuthère. Il y convertit beaucoup de monde à la religion chrétienne, en suite de quoi le préfet Fescennius le fit battre de verges avec ses compagnons. Sa constance a prêcher la foi n'en étant nullement ébranlée, ils passèrent ensemble par le supplice du gril ardent et beaucoup d'autres.

 

Mais comme ils affrontaient avec courage et joie tous ces tourments, Denys, âgé de cent un ans, fut avec les autres frappé de la hache le sept des ides d'octobre. On rapporte de lui que prenant dans ses mains sa tête tranchée, il la porta l'espace de deux milles. Il a écrit des livres admirables et tout célestes, sur les Noms divins, la Hiérarchie céleste, la Hiérarchie ecclésiastique, la Théologie mystique, et quelques autres.

 

 

 Honneur à vous en ce jour de victoire ! honneur au Docteur des nations qui vous reçoit comme sa très noble conquête au seuil de l'éternité ! Quel ne fut pas, dès la première heure, l'élan de votre âme vers ce Dieu inconnu que l'Apôtre découvrait enfin aux longues aspirations de votre riche et droite nature ! Aux ténèbres du polythéisme, aux doutes de la philosophie, aux trop vagues lueurs de confuses traditions succédait subitement la lumière, et son triomphe était complet. Platon, devenu en vous chrétien, voyait s'élargir ses horizons, se rectifier ses formules, et leur magnificence devenir le digne vêtement de la vérité. Lui aussi se faisait apôtre : la distinction du grec et du barbare, loi du vieux monde, s'effaçait pour lui dans l'origine commune assignée par Paul à tous les peuples ; tandis qu'esclaves et libres s'embrassaient, aux regards de sa foi, dans cette noblesse qui fait du genre humain la race de Dieu,  la charité, qui débordait en son cœur, n'y laissait plus que l'immense pitié de Dieu lui-même pour les longs siècles de l'ignorance où l'humanité s'était vue plongée.

 

 Ainsi dans votre zèle, vous prêtant au souffle de l'Esprit comme la nuée chargée des bénédictions du Seigneur, apportiez-vous la fertilité jusqu'aux terres de l'extrême Occident ; ainsi, père de notre patrie, nos pères apprenaient ils de vous à chercher Dieu, à le trouver, à vivre en lui ; ainsi notre lointaine Eglise n'avait-elle point à jalouser les premières, bâties sur le fondement des Prophètes et des Apôtres. Ô pierre de choix, bonne aux fondations, si intimement unie à la pierre d'angle que toute construction qu'elle porte s'élève en un temple saint du Seigneur : nous aussi, bâtis sur vous, nous sommes par vous la maison de Dieu.

 

Ô Denys, réveillez en nous les germes divins. Rendez Paris et la France à leurs traditions, oubliées dans la fièvre du lucre et des plaisirs.

 

Ramenez Athènes à la communion du vicaire du Christ, indispensable condition de l'union au Seigneur.

 

A toute église sous le ciel obtenez les pasteurs dont vous traciez le portrait dans ces lignes, en révélant ce que vous étiez vous-même : "Par la sainte dilection qui nous entraîne vers lui, Jésus calme la tempête des soucis dissipants, et rappelant nos âmes à l'unité de la vie divine, nous confirme dans la fécondité permanente de ce noble ministère. Bientôt, par l'exercice des fonctions sacrées, nous approchons des anges, essayant de nous placer comme eux dans un état fixe d'immuable sainteté. De là, jetant le regard sur la divine splendeur de Jésus béni, et enrichis de la science profonde des contemplations mystiques, nous pouvons être consacrés et consacrer à notre tour, recevoir la lumière et la communiquer, devenir parfaits et mener les autres à la perfection."

 

DOM GUÉRANGER
L'Année Liturgique

 

 

Martyre de Saint Denys

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7 octobre 2010 4 07 /10 /octobre /2010 15:00

Successeur de Silvestre, le Pontife de la Paix, Marc est honoré de temps immémorial en ce jour. Au témoignage de Damase, ses vertus ne rappelèrent pas moins que son nom lui-même le second des Evangélistes.

 

Il occupa huit mois seulement le premier Siège, continuant d'organiser la victoire récente de l'Eglise. Rome lui dut deux sanctuaires nouveaux L'évêque d'Ostie, consécrateur attitré des Pontifes romains, reçut de lui, pour relever un si haut privilège, l'usage du Pallium, dont c'est ici la première mention dans l'histoire.

 

 Ce pontificat vit la mort d'Arius. Constantin abusé venait d'ordonner la réhabilitation de l'homme par qui l'enfer, au lendemain du triomphe sur l'idolâtrie, prétendit convaincre l'Eglise de n'adorer dans le Verbe qu'une créature. L'hérésiarque, suivi de ses partisans, parcourait en vainqueur les rues de Constantinople ; il s'apprêtait à forcer les portes de la basilique où, jeûnant et pleurant avec l'évêque saint Alexandre, les fidèles suppliaient Dieu d'écarter la profanation. Soudain, saisi d'un tremblement ignominieux, Arius est contraint de gagner un lieu secret où ses adulateurs le trouvent peu après étendu à terre, les entrailles répandues. Mort de Judas ! n'avait-il pas lui aussi livré le Fils de Dieu aux discussions de la foule, aux moqueries des superbes, aux contradictions du prétoire ?

 

 Entre les Martyrs dont la mémoire revient aujourd'hui chaque année, Marcel et Apulée rappellent le souvenir du premier des Papes. Disciples d'abord de Simon le Magicien, les miracles du Prince des Apôtres arrachèrent leur bonne foi aux tromperies des prestiges de son vil antagoniste ; c'est jusqu'au sang qu'ils restèrent fidèles au seul vrai Dieu qu'annonçait Simon Pierre.

 

Saint Serge compte en Orient parmi les plus glorieux témoins du Seigneur. Il souffrit dans la dixième et dernière persécution avec son compagnon, saint Bacq, soldat comme lui des armées romaines en Syrie. Telle fut la gloire de son tombeau, qu'une ville, devenue bientôt épiscopale et métropolitaine, s'éleva à l'entour sous le nom de Sergiopolis. La voix de l'Occident s'unit de bonne heure au concert d'hommages qui montait vers les saints Martyrs. Rome leur dédia une église.

 

Saint-Serge d'Angers, fondé par Clovis II, continue d'attester la vénération pour eux des Francs nos pères.

 

 Seigneur , exaucez nos prières ; par l'intercession du bienheureux Marc, votre Confesseur et Pontife, accordez-nous le pardon et la paix dans votre miséricorde. 

Par Jésus-Christ

 

 Puissent, Seigneur,  nous profiter les mérites bienheureux de vos saints Martyrs Serge, Bacq, Marcel et Apulée ; qu'ils nous obtiennent d'être toujours fervents dans votre amour. 

Par Jésus-Christ

 

 

MEMOR ero tui Justina virgo

C'est l'acclamation que Venise faisait graver sur les monnaies de la république au lendemain du triomphe de Lépante : Vierge Justine, votre souvenir sera toujours présent à ma pensée ! En ce jour de victoire, la Martyre montée quinze siècles plus tôt, le sept octobre, aux cieux, avait uni la force de ses prières à la puissance redoutée du Lion de saint Marc, et la Seigneurie proclamait Justine sa seconde patronne devant Dieu. Mais Lépante n'est pas le seul titre de la vierge à la reconnaissance du monde.

 

 Déjà sa ville natale avait vu la tombe qui gardait ses restes précieux exhaler de si purs parfums, que l'élite des fils de saint Benoit s'était groupée autour d'elle. Parti de Sainte-Justine de Padoue, le grand mouvement dû à l'initiative du vénitien Louis Barbo arrachait l'Ordre monastique aux plus désastreuses conséquences de l'asservissement où l'avaient plongé les commendes séculières, et lui rendait jusque sur le Cassin une partie de son antique splendeur.

 

 Honneur donc à ce jour de salut pour le peuple saint ! Gloire à celle par qui les cieux ont exaucé la supplication de la terre, en lui envoyant leur rosée !

 

Ô Dieu, qui nous réjouissez par cette solennité annuelle de la bienheureuse Justine, votre Vierge et votre Martyre ; faites-nous la grâce d'imiter par une sainte vie les exemples de celle à qui aujourd'hui nous rendons nos devoirs. 

Par Jésus-Christ

 

 

Le même jour, au Martyrologe romain, commémoraison de Notre-Dame de la Victoire. Si, en effet, la Vierge des vierges s'est donné la gracieuse Martyre de Padoue pour compagne au triomphe de Lépante, à Marie pourtant revient sans conteste l'honneur principal de cette journée. Il est donc expédient de renouveler notre hommage à la Reine du Très Saint Rosaire, en l'anniversaire précis qui la vit délivrer à ce titre la chrétienté.

  

 DOM GUÉRANGER
L'Année Liturgique

 

 

Bataille de Lépante par Véronèse

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