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"Je vous donne un commandement nouveau : c'est de vous aimer les uns les autres.

 

Comme je vous ai aimés, vous aussi aimez-vous les uns les autres.

 

Ce qui montrera à tous les hommes que vous êtes mes disciples, c'est l'amour que vous aurez les uns pour les autres."

 

Evangile de Jésus-Christ selon  saint Jean 

   

 

Pentecôte

" Le Défenseur, l'Esprit Saint que le Père enverra en mon nom, lui, vous enseignera tout, et il vous fera souvenir de tout ce que je vous ai dit."

 

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean  

 

   

 

 El Papa es argentino. Jorge Bergoglio                 

Saint Père François

 

 

La Manif Pour Tous 

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1er mai 2011 Béatification de Jean-Paul II

Béatification du Serviteur de Dieu Jean-Paul II

 

 

  Béatification du Père Popieluszko

beatification Mass, in Warsaw, Poland

à Varsovie, 6 juin 2010, Dimanche du Corps et du Sang du Christ

 

 

presidential palace in Warsaw

Varsovie 2010

 

 

Basilique du Sacré-Cœur de Montmartre
Sanctuaire de l'Adoration Eucharistique et de la Miséricorde Divine

La miséricorde de Dieu est comme un torrent débordé. Elle entraîne les cœurs sur son passage.
(Saint Curé d'Ars)
 

 


Le côté du Christ a été transpercé et tout le mystère de Dieu sort de là. C’est tout le mystère de Dieu qui aime, qui se livre jusqu’au bout, qui se donne jusqu’au bout. C’est le don le plus absolu qui soit. Le don du mystère trinitaire est le cœur ouvert. Ce n’est pas une image, c’est une réalité. C’est la réalité la plus profonde qui soit, la réalité de l’amour.
Père Marie-Joseph Le Guillou




Dans le cœur transpercé
de Jésus sont unis
le Royaume du Ciel
et la terre d'ici-bas
la source de la vie
pour nous se trouve là.

Ce cœur est cœur divin
Cœur de la Trinité
centre de convergence
de tous les cœur humains
il nous donne la vie
de la Divinité.


Sainte Thérèse Bénédicte de la Croix
(Edith Stein)



Le Sacré-Cœur représente toutes les puissances d'aimer, divines et humaines, qui sont en Notre-Seigneur.
Père Marie-Eugène de l'Enfant Jésus

 



feuille d'annonces de la Basilique du Sacré-Coeur de Montmartre

 

 

 

 

 

 

 

     

The Cambrai Madonna

Notre Dame de Grâce

Cathédrale de Cambrai

 

 

 

Cathédrale Notre Dame de Paris 

   

Ordinations du samedi 27 juin 2009 à Notre Dame de Paris


la vidéo sur KTO


Magnificat

     



Solennité de l’Immaculée Conception de la Vierge Marie à Notre-Dame de Paris


NOTRE DAME DES VICTOIRES

Notre-Dame des Victoires




... ma vocation, enfin je l’ai trouvée, ma vocation, c’est l’Amour !

 

 

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Voyages de Benoît XVI

 

SAINT PIERRE ET SAINT ANDRÉ

Saint Pierre et Saint André

 

BENOÎT XVI à CHYPRE 

 

Benedict XVI and Cypriot Archbishop Chrysostomos, Church of 

Salutation avec l'Archevêque Chrysostomos à l'église d' Agia Kyriaki Chrysopolitissa de Paphos, le vendredi 4 juin 2010

 

     

 

Benoît XVI en Terre Sainte  


 

Visite au chef de l'Etat, M. Shimon Peres
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Visite au mémorial de la Shoah, Yad Vashem




 






Yahad-In Unum

   

Vicariat hébréhophone en Israël

 


 

Mgr Fouad Twal

Patriarcat latin de Jérusalem

 

               


Vierge de Vladimir  

Archives

    

 

SALVE REGINA

29 mai 2011 7 29 /05 /mai /2011 04:00

A l'heure où Jésus passait de ce monde à son Père, il disait à ses disciples :

  

" Si vous m'aimez, vous resterez fidèles à mes commandements. Moi, je prierai le Père, et il vous donnera un autre Défenseur qui sera pour toujours avec vous : c'est l'Esprit de vérité. Le monde est incapable de le recevoir, parce qu'il ne le voit pas et ne le connaît pas ; mais vous, vous le connaissez, parce qu'il demeure auprès de vous, et qu'il est en vous. Je ne vous laisserai pas orphelins, je reviens vers vous.


D'ici peu de temps, le monde ne me verra plus, mais vous, vous me verrez vivant, et vous vivrez aussi. En ce jour-là, vous reconnaîtrez que je suis en mon Père, que vous êtes en moi, et moi en vous.


Celui qui a reçu mes commandements et y reste fidèle, c'est celui-là qui m'aime ; et celui qui m'aime sera aimé de mon Père ; moi aussi je l'aimerai, et je me manifesterai à lui."

 

Évangile de Jésus-Christ selon saint Jean

 

Descente du Saint Esprit par Andrea da Firenze

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28 mai 2011 6 28 /05 /mai /2011 15:00

Depuis quelque temps Leslie R. m'approvisionne en histoires : 

Dans ma famille venue d'Angleterre au XVIIIe siècle, nous avons toujours eu des relations privilégiées avec les renards, bien que tous mes arrière-arrière-grands-parents aient eu chacun son équipage et sa meute. On ne courrait pas le renard. Seulement les lièvres et les chevreuils. J'ignore exactement quand la tradition a commencé et c'est sans doute peu à peu : chaque fois qu'un de mes aïeux mourait, le matin même se présentait à la grille une harde de renards. Ils glapissaient à la mort pendant deux ou trois minutes et repartaient, silencieux, en file indienne. Vers 1900, mon grand-père a disparu. Je dis bien "disparu" ! Parti sans bagages, sans laisser un mot. A cheval tout de même. Le soir, encore sellé, les étriers bas, la bride sur le coup, le cheval est revenu aux écuries. Tout le monde a pensé à un accident et on a curé les fossés, les étangs, fouillé les bois à l'entour. Rien. Comme s'il s'était volatilisé. Pour la première fois depuis des générations, les renards ne sont pas venus glapir à la grille. Au bout de cinq ou six années, ma grand-mère a voulu se remarier. Elle était jeune et belle, avec seulement deux enfants. Le curé, nous sommes catholiques, une exception dans le milieu, le curé a refusé de célébrer le mariage tant que les renards ne viendraient pas glapir à la grille. Quelques années après, à l'aube, ma grand-mère a été réveillée par les renards et, le même matin, le facteur a déposé une lettre d'avocat lui annonçant que son mari venait de mourir à Djakarta. Le curé a célébré le remariage dans la semaine. 

Cavalier

 

Cast a cold Eye

On Life, on Death,

Horseman, pass by !

 

Regarde froidement

La vie, la mort,

Cavalier, passe ton chemin !

 

 

Under bare Ben Bulben's head

In Drumcliff churchyard Yeats is laid.

An ancestor was rector there

Long years ago, a church stands near,

By the road an ancient cross,

No marble, no conventional phrase ;

On limestone quarried near the spot

By his command these words are cut :

Cast a cold Eye

On Life, on Death,

Horseman, pass by !

 

Au pied de Benbulben à la tête nue

Dans le cimetière de Drumcliff, Yeats est couché.

Un ancêtre y fut recteur

Il y a bien des années, une église est proche,

Sur la route, une ancienne croix,

Nul marbre, nuls mots convenus ;

On a taillé tout près d'ici un bloc de calcaire

Et sur son ordre, on a gravé ces mots :

Regarde froidement

La vie, la mort,

Cavalier, passe ton chemin !

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28 mai 2011 6 28 /05 /mai /2011 04:00

À Paris, en 576, saint Germain, évêque. D’abord abbé de Saint-Symphorien d’Autun, puis appelé au siège épiscopal de Paris, il conserva son mode de vie monastique en exerçant avec fruit sa tâche de pasteur, charitable envers les pauvres et veillant à la fondation du monastère de la Sainte-Croix, où il fut enterré et qui prit son nom, l'église et le monastère de Saint-Germain des Prés.
Martyrologe romain 

 

l'église Saint-Germain-des-Prés 

L'église et le monastère de Saint-Germain des Prés remontent, comme l'église cathédrale de Notre-Dame dans la Cité, et comme l'église collégiale de Saint-Germain-l'Auxerrois sur la rive droite, aux plus anciennes époques de la monarchie mérovingienne, c'est-à-dire à Childebert Ier et à Ultrogothe, sa femme, qui régnèrent à Paris de 511 à 538.

 

Childebert, revenant d'une expédition contre les Wisigoths, rapporta d'Espagne comme trophées de sa victoire la tunique de saint Vincent, une croix d'or et de pierreries conquises à Tolède, et des vases qui passaient pour avoir appartenu à Salomon. Par le conseil de saint Germain, évêque de Paris, il construisit, pour recevoir et garder les saintes reliques, une église et un monastère à l'extrémité occidentale des jardins dépendant du palais des Thermes. Le jour même de la mort de Childebert, en 558, saint Germain dédia la nouvelle église sous le titre de Sainte-Croix et de Saint-Vincent, et il y fut lui-même inhumé lorsqu'il mourut en 596.

 

Bientôt l'abbaye de Saint-Vincent ne porta plus d'autre nom que celui de Saint Germain, et devint la sépulture des rois, des princes et des reines de la dynastie mérovingienne. L'abbaye demeura longtemps isolée sur le versant méridional du petit Pré aux Clercs ; les hautes murailles élevées autour du couvent en 1239 par Simon, abbé de Saint-Germain, devinrent en 1368 de véritables fortifications par ordre de Charles V, qui, en guerre avec les Anglais, craignait une surprise de leur part contre les faubourgs de Paris ; en même temps fut creusé un petit canal large de huit à onze toises et profond de cinq toises, qui mettait les fossés de l'abbaye en communication avec la Seine. Ce canal, appelé la petite Seine ou la Noue, et qui séparait le petit Pré aux Clercs du grand, comblé vers le milieu du XVIe siècle, devint ensuite la rue des Petits-Augustins, puis la rue Bonaparte.

 

A la même époque, l'enceinte de l'abbaye, qui s'étendait sur la rue de l'Échaudé à l'est, la rue Sainte-Marguerite (Gozlin) au midi, la rue Saint-Benoît à l'ouest, et la rue Jacob au nord, fut démantelée, et les terrains qu'elle circonscrivait se couvrirent rapidement de constructions privées. Deux des anciennes portes par lesquelles on y pénétrait, celles de Sainte-Marguerite et de Saint-Benoît, subsistaient encore au XIXe siècle ; elles ont été emportées, ainsi que les rues d'Erfurt, de Childebert et Sainte-Marthe, qui dessinaient une sorte de cloître autour de la place Saint-Germain des Prés, par le percement de la rue de Rennes.

 

Il ne reste de l'abbaye et de ses dépendances que des fragments épars ; enfin, l'église elle-même, privée des sépultures mérovingiennes qui, après avoir été violées et dispersées, se trouvent aujourd'hui réunies dans les caveaux de l'abbaye de Saint-Denis, a été cruellement mutilée. Trois fois brûlée et ruinée par les Normands, elle fut rebâtie aux frais du roi Robert dans les premières années du XIe siècle (1001 à 1014), quoiqu'elle n'eût été achevée que longtemps après. Le pape Alexandre III en fit la dédicace le 21 août 1163 ; elle demeure, dans ses parties les plus anciennes, plus âgée d'environ deux siècles que Notre-Dame de Paris.

 

Le plan de ce vénérable sanctuaire est une croix latine dont les croisillons ou transepts sont extrêmement courts relativement à la longueur de la nef, 21 mètres sur 65 ; sa hauteur est de 19 mètres. La nef, accompagnée de bas côtés, se partage dans sa longueur en cinq travées ; elle a été refaite, depuis l'abbé Morard, son premier constructeur, sous Robert II, d'abord en 1644, puis de 1820 à 1824, et restaurée encore une fois sous Napoléon III ; les chapiteaux qui soutiennent les arcs latéraux de la nef ont été refaits pour la plupart sur le modèle des anciens, qui sont conservés, au nombre de douze, dans la grande salle du palais des Thermes.

 

Le choeur a gardé intact le style du XIIe siècle, époque de transition, où le cintre et l'ogive se trouvent en présence. Au-dessus du choeur règne une galerie dont les baies sont supportées par des colonnes presque toutes en marbres rares et les autres en pierres ; leurs chapiteaux sont admirés des connaisseurs ; ils représentent le plus étrange fouillis de têtes humaines, de lions, de harpies, de branches de feuillages et d'oiseaux. La nef, entre le porche d'entrée et le transept, n'est éclairée que par les hautes fenêtres percées dans le mur du midi, tandis que la muraille du nord est pleine, les jours, s'il en exista jamais de ce côté, étant bouchés par l'une des ailes non démolies de l'ancien cloître, qui s'applique exactement au côté gauche de l'église.

 

A l'intérieur de Saint-Germain des Prés, on voit, dans une chapelle de gauche le tombeau du roi de Pologne Jean-Casimir Sobieski, mort abbé de Saint-Germain des Prés en 1672 ; dans une chapelle de droite le tombeau d'Olivier et Louis de Castellan, tués au service de Louis XIV ; un peu plus loin, la chapelle des Douglas, princes d'Écosse. Une double plaque de marbre noir, érigée en 1819 par les soins de l'Académie française, renferme les épitaphes de Boileau, de Descartes, du P. Mabillon et du P. Montfaucon, dont les restes, recueillis par Alexandre Lenoir au Musée des Petits-Augustins, furent déposés à Saint-Germain des Prés après la suppression du musée.

 

Au cours de sa dernière restauration, l'église entière, depuis la voûte jusqu'aux murailles, a été peinte de diverses couleurs, sous la direction de l'architecte Baltard ; cette décoration polychrome s'applique même aux colonnes, dont les chapiteaux sont dorés. Tout autour du chœur et de la nef, Hippolyte Flandrin, le plus célèbre des élèves d'Ingres, a peint à la cire une suite de compositions tirées de l'Ancien et du Nouveau Testament.

 

Cet artiste distingué, et pénétré de la foi chrétienne qui guidait ses pinceaux, mourut en 1864 avant d'avoir complété son oeuvre en peignant les croisillons du transept ; Alexandre Hesse et Sébastien Cornu ont achevé cette partie de la décoration générale. Un monument en marbre blanc, exécuté par le sculpteur Oudiné, surmonté du buste d'Hippolyte Flandrin, a été érigé par ses admirateurs et ses amis dans le bas côté septentrional, qui n'a ni fenêtres ni chapelles.

 

Saint-Germain des Prés ne possède plus un seul vitrail ancien ; les fenêtres sont garnies de verres légèrement teintés qui n'arrêtent pas la lumière ambiante. C'est une surprise toujours nouvelle, pour les visiteurs habitués à voir les vitraux des églises catholiques réfléchir les rayons colorés sur des murailles blanches et nues, d'apercevoir l'effet inverse dans l'église de Saint-Germain des Prés, où les fenêtres versent la lumière blanche sur des murailles colorées.

 

A l'extérieur, la vieille église s'annonce par un porche mesquin, construit au XVIIe siècle et surmonté d'une grosse tour carrée ; à son plus haut étage, deux baies cintrées du XIIe siècle, accompagnées de colonnes, s'ouvrent sur chacune de ses quatre faces et laissent échapper les vibrations de ses cloches sonores ; terminée par une haute flèche couverte en ardoises, la tour de Saint-Germain des Prés, avec ses arceaux romans, domine majestueusement cette région de Paris, qui est née et s'est développée sous son ombre. Un souvenir curieux s'y rattache : le 2 novembre 1589, Henri IV, assiégeant Paris, monta au sommet de la tour, accompagné d'un seul religieux, pour examiner la situation de la ville ; il fit ensuite le tour du cloître sans entrer dans l'église, et se retira sans dire un mot.

 

Dans les angles du choeur et du transept, on aperçoit à droite, du côté du boulevard Saint-Germain, et à gauche, du côté de la rue de l'Abbaye, deux masses carrées, s'arrêtant à la naissance de la voûte : c'est la base des deux autres tours, qui donnaient une physionomie originale à Saint Germain des Prés et l'avaient fait surnommer l'église aux trois clochers ; elles ont été détruites en 1822, sous Louis XVIII, "par économie", afin d'épargner les frais de leur restauration ; et si on les a laissées subsister dans leur partie inférieure, c'est qu'elles ont paru nécessaires comme appui de l'église.

 

Le côté nord de celle-ci est isolé par une rue dite de l'Abbaye, ouverte en l'an VIII à travers le magnifique cloître dont il ne subsiste plus que l'aile droite, appuyée à l'aile gauche de l'église. Au bout de la rue de l'Abbaye, derrière le choeur de l'église, s'élève le palais abbatial construit vers 1586 par le cardinal de Bourbon. On admire son imposante façade, en briques et pierres, décorée de refends, de pilastres et de frontons ; au sommet du pavillon de gauche, une femme assise tient un écusson aux armes du fondateur.

 

Le palais abbatial est habité depuis longtemps par l'industrie privée. Au droit du palais abbatial, une courte et large rue descend de la rue de l'Abbaye à la rue Jacob. Ouverte en 1699, elle porte le nom du cardinal de Furstenberg, qui fut abbé de Saint-Germain des Prés. Elle était encadrée originairement par les communs du palais ; la grande maison n° 6 en conserve la livrée architecturale, briques et pierres. Habitée par des artistes, et renfermant des ateliers spacieux, elle a vu mourir le grand peintre Eugène Delacroix (aujourd'hui -2011- musée Eugène Delacroix).

 

L'aile occidentale du cloître renfermait la bibliothèque de Saint-Germain des Prés, la plus considérable de Paris en ce temps-là, et qui était ouverte au public ; commencée par le P. du Breul, l'historien des Antiquités de Paris, elle avait reçu par dons testamentaires les bibliothèques du médecin Noël Vaillant, de l'abbé Baudran, de l'abbé Jean d'Estrées, de l'abbé Renaudot, du chancelier Séguier, du cardinal de Gesvres, du conseiller d'État de Harlay, et de M. de Coislin ; ensemble cent mille volumes imprimés et vingt mille manuscrits, qui ont été versés à la Bibliothèque nationale.

 

De l'autre côté du palais abbatial, en marge du boulevard Saint-Germain, sur la face occidentale de la place Gozlin, s'élevait la prison de l'Abbaye, témoin des massacres du 2 septembre 1792 ; avant la Révolution, elle était particulièrement affectée aux gardes françaises ; plus lard, elle reprit cette destination, généralisée aux soldats de toutes armes, jusqu'à l'époque où les anciens bâtiments du couvent du Bon-Pasteur, rue du Cherche-Midi, furent convertis en prison militaire. Devant la prison de l'Abbaye s'élevait le pilori, signe visible de la justice seigneuriale qui appartenait aux abbés sur tout le bourg Saint-Germain ; et devant le pilori s'ouvrait la rue de la Foire, devenue rue de Bissi, aujourd'hui rue Montfaucon.

 

La rue de Bissi semblait continuer la rue de Buci, de l'autre côté du boulevard Saint-Germain actuel, de là des confusions fréquentes. Au XVe siècle, la foire Saint-Germain tenait directement au petit jardin du presbytère de l'église Saint-Sulpice ; le marché en est aujourd'hui séparé par la rue Saint-Sulpice, ouverte dans sa partie orientale par le cardinal abbé de Bourbon dont elle porta longtemps le nom, tandis que la partie occidentale débouchant sur la place Saint-Sulpice s'appela rue de l'Aveugle, puis des Aveugles, en souvenir d'un riche aveugle qui possédait en 1595 plusieurs maisons en bordure de l'église, et que celle-ci racheta plus tard à ses héritiers.

 

Henri Gourdon De Genouillac, Paris à travers les siècles, Histoire nationale de Paris et des Parisiens depuis la fondation de Lutèce jusqu'à nos jours, 1879, Paris 

Paris à travers les siècles 

> lecture sur 'Open Library' 

 

métro Saint-Germain-des-Prés

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27 mai 2011 5 27 /05 /mai /2011 04:00

Quatre cents ans étaient à peine écoulés, depuis le départ d'Eleuthère pour la patrie céleste, qu'un second apôtre de la grande île britannique s'élevait de ce monde, au même jour, vers la gloire éternelle. La rencontre de ces deux pontifes sur le cycle est particulièrement touchante, en même temps qu'elle nous révèle la prévoyance divine qui règle le départ de chacun de nous, en sorte que le jour et l'heure en sont fixés avec une sagesse admirable. Plus d'une fois nous avons reconnu avec évidence ces coïncidences merveilleuses qui forment un des principaux caractères du cycle liturgique. Aujourd'hui, quel admirable spectacle dans ce premier archevêque de Cantorbéry, saluant sur son lit de mort le jour où le saint pape à qui l'Angleterre doit la première prédication de l'Evangile, monta dans les cieux, et se réunissant à lui dans un même triomphe ! Mais aussi qui n'y reconnaîtrait un gage de la prédilection dont le ciel a favorisé cette contrée longtemps fidèle, et devenue depuis hostile à sa véritable gloire ?

 

L'œuvre de saint Eleuthère avait péri en grande partie dans l'invasion des Saxons et des Angles, et une nouvelle prédication de l'Evangile était devenue nécessaire. Rome y pourvut comme la première fois. Saint Grégoire le Grand conçut cette noble pensée ; il eût désiré assumer sur lui-même les fatigues de l'apostolat dans cette contrée redevenue infidèle ; un instinct divin lui révélait qu'il était destiné à devenir le père de ces insulaires, dont il avait vu quelques-uns exposés comme esclaves sur les marchés de Rome. Mais du moins il fallait à Grégoire des apôtres capables d'entreprendre ce labeur auquel il ne lui était pas donné de se livrer en personne. Il les trouva dans le cloître bénédictin, où lui-même avait abrité sa vie durant plusieurs années. Rome alors vit partir Augustin à la tête de quarante moines se dirigeant vers l'île des Bretons, sous l'étendard de la croix.

 

Ainsi la nouvelle race qui peuplait cette île recevait à son tour la foi par les mains d'un pape ; des moines étaient ses initiateurs à la doctrine du salut. La parole d'Augustin et de ses compagnons germa sur ce sol privilégié. Il lui fallut, sans doute, du temps pour s'étendre à l'île tout entière ; mais ni Rome, ni l'ordre monastique n'abandonnèrent l'œuvre commencée ; les débris de l'ancien christianisme breton finirent par s'unir aux nouvelles recrues, et l'Angleterre mérita d'être appelée longtemps l'île des saints.

 

Les gestes de l'apostolat d'Augustin dans cette île ravissent la pensée. Le débarquement des missionnaires romains qui s'avancent sur cette terre infidèle en chantant la Litanie ; l'accueil pacifique et même bienveillant que leur fait dès l'abord le roi Ethelbert ; l'influence de la reine Berthe, française et chrétienne, sur l'établissement de la foi chez les Saxons ; le baptême de dix mille néophytes dans les eaux d'un fleuve au jour de Noël, la fondation de l'Eglise primatiale de Cantorbéry, l'une des plus illustres de la chrétienté par la sainteté et la grandeur de ses évêques : toutes ces merveilles montrent dans l’évangélisation de l'Angleterre un des traits les plus marqués de la bienveillance céleste sur un peuple.

 

Le caractère d'Augustin, calme et plein de mansuétude, son attrait pour la contemplation au milieu de tant de labeurs, répandent un charme de plus sur ce magnifique épisode de l'histoire de l'Eglise ; mais on a le cœur serré quand on vient à songer qu'une nation prévenue de telles grâces est devenue infidèle à sa mission, et qu'elle a tourné contre Rome, sa mère, contre l'institut monastique auquel elle est tant redevable, toutes les fureurs d'une haine parricide et tous les efforts d'une politique sans entrailles.

 

Nous donnons ici le récit liturgique de la vie du saint apôtre : 

Augustin, moine du monastère de Latran à Rome, fut envoyé par Grégoire le Grand en Angleterre pour convertir à Jésus-Christ les peuples de cette contrée. Environ quarante moines de sa communauté l'accompagnaient. C'était en l'année cinq cent quatre-vingt dix-sept. Le très puissant Ethelbert, alors roi de Kent, ayant appris la cause de l'arrivée d'Augustin, l'invita à venir à Cantorbéry, métropole de son royaume, et lui accorda gracieusement la faculté d'y demeurer et de prêcher Jésus-Christ. Le saint construisit donc près de Cantorbéry un oratoire où il se fixa quelque temps et s'efforça d'imiter avec les siens la vie apostolique.

 

L'exemple de sa vie, la doctrine céleste qu'il prêchait et qu'il confirmait par beaucoup de miracles, adoucirent tellement le caractère de ces insulaires,qu'il amena la plupart d'entre eux à la loi chrétienne, et enfin le roi lui-même,qu'il régénéra dans la fontaine sacrée avec un nombre considérable des gens de sa suite. Berthe, l'épouse royale, qui était chrétienne, s'en réjouit grandement. Un jour de Noël, il administra le baptême à plus de dix mille personnes dans les eaux de la rivière d'York ; et l'on raconte que tous ceux de ces néophytes qui étaient atteints de quelque maladie, reçurent en cette circonstance la santé de leurs corps avec le salut de leurs âmes.

 

Ordonné évêque par le commandement de Grégoire, il établit son siège à Cantorbéry, dans l'Eglise du Sauveur qu'il avait bâtie, et il y plaça une partie des moines qui l'aidaient dans ses travaux. Il fonda ensuite dans les faubourgs le monastère de Saint-Pierre, qui plus tard fut appelé du nom d'Augustin lui même. Le même Grégoire lui accorda l'usage du pallium et les pouvoirs nécessaires pour établir la hiérarchie ecclésiastique en Angleterre, en même temps qu'il lui envoyait un nouveau renfort d'ouvriers, savoir Mellitus, Justus, Paulin et Rufinien.

 

Ayant réglé les affaires de cette Eglise, Augustin tint un concile avec les évêques et les docteurs des anciens Bretons, qui étaient depuis longtemps en désaccord avec l'Eglise Romaine dans la célébration de la Pâque et sur plusieurs autres rites. Mais comme ils refusaient de se rendre et à l'autorité du Siège Apostolique, et aux miracles qu'il faisait pour les ramener à la concorde, inspiré par un esprit prophétique, Augustin leur prédit les désastres qui les attendaient.

 

Enfin, après avoir accompli les plus grands travaux pour Jésus-Christ, illustré par ses miracles, ayant préposé Mellitus à l'Eglise de Londres, Justus à celle de Rochester, Laurent à la sienne, il passa au ciel le sept des calendes de juin, sous le règne d'Ethelbert.

 

On l'ensevelit au monastère de Saint-Pierre, qui devint par la suite le lieu de sépulture des archevêques de Cantorbéry et de plusieurs rois. Les peuples d'Angleterre lui rendirent un culte fervent ; et le Souverain Pontife Léon XIII a étendu son Office et sa Messe à toute l'Eglise.

 

 Vous êtes, ô Jésus ressuscité, la vie des peuples, comme vous êtes la vie de nos âmes. Vous appelez les nations à vous connaître, à vous aimer et à vous servir; car "elles vous ont été données en héritage" (Psalm. II.), et vous les possédez tour à tour. Votre amour vous inclina de bonne heure vers cette île de l'Occident que, du haut de la croix du Calvaire, votre regard divin considérait avec miséricorde. Dès le deuxième siècle, votre bonté dirigea vers elle les premiers envoyés de la parole ; et voici qu'à la fin du sixième, Augustin, votre apôtre, délégué par Grégoire, votre vicaire, vient au secours d'une nouvelle race païenne qui s'est rendue maîtresse de cette île appelée à de si hautes destinées.

 

Vous avez régné glorieusement sur cette région, ô Christ ! Vous lui avez donné des pontifes, des docteurs, des rois, des moines, des vierges, dont les vertus et les services ont porté au loin la renommée de l'Ile des saints ; et la grande part d'honneur dans une si noble conquête revient aujourd'hui à Augustin, votre disciple et votre héraut.

 

Votre empire a duré longtemps, ô Jésus, sur ce peuple dont la foi fut célèbre dans le monde entier ; mais, hélas ! des jours funestes sont venus, et l'Angleterre n'a plus voulu que vous régniez sur elle, et elle a contribué à égarer d'autres nations soumises à son influence. Elle vous a haï dans votre vicaire, elle a répudié la plus grande partie des vérités que vous avez enseignées aux hommes, elle a éteint la foi, pour y substituer une raison indépendante qui a produit dans son sein toutes les erreurs. Dans sa rage hérétique, elle a foulé aux pieds et brûlé les reliques des saints qui étaient sa gloire, elle a anéanti l'ordre monastique auquel elle devait le bienfait du christianisme, elle s'est baignée dans le sang des martyrs, encourageant l'apostasie et poursuivant comme le plus grand des crimes la fidélité à l'antique foi.

 

En retour, elle s'est livrée avec passion au culte de la matière, à l'orgueil de ses flottes et de ses colonies ; elle voudrait tenir le monde entier sous sa loi. Mais le Seigneur renversera un jour ce colosse de puissance et de richesse. La petite pierre détachée de la montagne l'atteindra à ses pieds d'argile, et les peuples seront étonnés du peu de solidité qu'avait cet empire géant qui s'était cru immortel. L'Angleterre n'appartient plus à votre empire, ô Jésus ! Elle s'en est séparée en rompant le lien de communion qui l'unit si longtemps à votre unique Eglise. Vous avez attendu son retour, et elle ne revient pas ; sa prospérité est le scandale des faibles, et c'est pour cela que sa chute, que l'on peut déjà prévoir, sera lamentable et sans retour.

 

En attendant cette épreuve terrible que votre justice fera subir à l'île coupable, votre miséricorde, ô Jésus, glane dans son sein des milliers d'âmes, heureuses de voir la lumière, et remplies pour la vérité qui leur apparaît, d'un amour d'autant plus ardent, qu'elles en avaient été plus longtemps privées. Vous vous créez un peuple nouveau au sein même de l'infidélité, et chaque année la moisson est abondante. Poursuivez votre œuvre miséricordieuse, afin qu'au jour suprême ces restes d'Israël proclament, au milieu des désastres de Babylone, l'immortelle vie de cette Eglise dont les nations qu'elle a nourries ne sauraient se séparer impunément.

 

Saint apôtre de l'Angleterre, Augustin, votre mission n'est donc pas terminée. Le Seigneur a résolu de compléter le nombre de ses élus, en glanant parmi l'ivraie qui couvre le champ que vos mains ont ensemencé. Venez en aide au labeur des nouveaux envoyés du Père de famille.

 

Par votre intercession, obtenez ces grâces qui éclairent les esprits et changent les cœurs.

 

Révélez à tant d'aveugles que l'Epouse de Jésus est "unique", comme il l'appelle lui-même ; que la foi de Grégoire et d'Augustin n'a pas cessé d'être la foi de l'Eglise catholique, et que trois siècles de possession ne sauraient créer un droit à l'hérésie sur une terre qu'elle n'a conquise que par la séduction et la violence, et qui garde toujours le sceau ineffaçable de la catholicité.

 

DOM GUÉRANGER
L'Année Liturgique

 

Tree of Jesse, Stained Glass Window, Cathedral, Canterbury, 1170s

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26 mai 2011 4 26 /05 /mai /2011 19:00

Le bruit d'une si importante découverte se répandit promptement dans Rome, et prépara l'explosion de l'enthousiasme qui éclata les jours suivants.

 

Sfondrate n'avait pas voulu procéder plus avant, ni consommer l'invention des martyrs, sans avoir invité le souverain pontife à venir lui-même faire la reconnaissance d'un si sacré dépôt. A l'exemple de Jean qui courut plus vite que Pierre et arriva avant lui au sépulcre, mais s'abstint d'y entrer le premier, déférant l'honneur au chef du collège apostolique (JOHAN., XX), Sfondrate, muni de la clef qui garantissait l'inviolabilité des reliques, et ayant donné les ordres convenables, partit en hâte pour Frascati, où Clément VIII était allé prendre le repos de la campagne. Baronius était en ce moment auprès du pontife.

 

Nous emprunterons quelque chose à la narration qu'il a donnée, dans ses Annales, du grand événement que nous racontons :

" Clément se trouvait retenu au lit par de violentes douleurs de goutte, et n'admettait personne à son audience ; mais lorsqu'il eut appris le motif de l'arrivée de Sfondrate, il voulut tout aussitôt voir le cardinal, et entendre de sa bouche le récit de l'événement. Le pontife écouta tout avec une joie extrême ; mais sa douleur fut grande de ne pouvoir, à cause de son infirmité, partir immédiatement pour rendre visite à une si grande martyre et lui présenter ses hommages. Or il advint que ce contretemps tourna à mon avantage ; car, tout indigne que j'en fusse, le pontife me donna commission d'aller reconnaître et vénérer le corps de sainte Cécile. Sans perdre de temps, Sfondrate repartit aussitôt pour Rome ; je l'accompagnai, et, le jour même, nous entrâmes dans la ville, et arrivâmes sur le soir, pleins d'allégresse, au Titre de Sainte-Cécile.

" Je vis l'arche de cyprès qui avait été renfermée dans le sarcophage de marbre. Elle contenait les membres sacrés de Cécile. Un couvercle fort mince et légèrement endommagé servait à la fermer. J'admirai comment, après huit cent soixante-dix-huit ans, un coffre de simple bois, enfoui sous terre, privé d'air, ayant à combattre l'humidité du marbre qui le contenait, avait pu se conserver ainsi dans son entier, sans aucune disjonction ni avarie, mais toujours solide et résistant, en sorte que chacun pouvait encore le toucher, le manier, lui donner en un mot les marques les plus vives de sa vénération, sans le léser en aucune manière. Son couvercle ductile était dans un tel état de conservation qu'on pouvait, sans aucun péril, l'ôter et le remettre, comme il arriva sans cesse, pendant plusieurs jours, pour satisfaire la dévotion de ceux qui désiraient voir et vénérer la sainte martyre dont il recouvrait le corps."

 

Nous avons démontré que l'on doit rapporter ce coffre de cyprès à une époque plus éloignée encore. Baronius reprend ainsi sa narration :

" Ayant donc considéré cette châsse avec une grande admiration, nous voulûmes voir enfin le corps sacré qu'elle renfermait. C'est alors que, selon la parole de David, comme nous avions entendu, ainsi nous avons vu, dans la cité du Seigneur des armées, dans la cité de notre Dieu. (Psalm. XLVII.) En effet, nous trouvâmes le vénérable corps de Cécile dans le même état où nous avions lu qu'il avait été trouvé et remis dans le tombeau par le pape Paschal. A ses pieds étaient encore les voiles imbibés de sang ; la robe dont parle le pontife était toujours reconnaissable à son tissu de soie et d'or, quoique endommagée par le temps.

" Immédiatement sur le corps de la sainte martyre, on remarquait d'autres tissus d'une légère étoffe de soie ; leur dépression aidait à suivre la pose et l'inflexion des membres. On voyait avec admiration que ce corps n'était pas étendu comme ceux des morts dans leurs tombeaux ; mais la très chaste vierge était couchée sur le côté droit, comme sur un lit, les genoux rapprochés avec modestie, offrant plutôt l'aspect d'une personne endormie, et inspirant à tous un tel respect, que, malgré l'attrait d'une pieuse curiosité, nul n'osa soulever les vêtements pour découvrir ce corps virginal. Chacun se sentait ému d'une ineffable vénération, comme si l'Epoux céleste, veillant sur le sommeil de son épouse, eût proféré cet ordre et cette menace : Ne réveillez pas ma bien-aimée, jusqu'à ce qu'elle le veuille elle-même. (Cant., II, 7.)

" Nous vîmes, nous reconnûmes, nous adorâmes. Le lendemain, dès le matin, nous offrîmes à Dieu, sur l'autel de la Confession, le sacrifice de la Messe, pour la mémoire et l'honneur d'une si grande vierge et martyre et des autres saints ensevelis près d'elle. Nous repartîmes ensuite pour Frascati, afin de faire le rapport de ce que nous avions vu au souverain pontife qui nous avait envoyé. Clément écouta notre récit avec satisfaction, et s'occupa tout aussitôt de la translation de cet auguste corps dans sa Confession, fonction qu'il déclara vouloir accomplir lui-même, à l'exclusion de tout autre prélat, de quelque dignité éminente qu'il fût revêtu. Le jour fut fixé à la fête même de sainte Cécile." (BARONIUS, Annal. Eccles., ad annum 821.)

 

Nous suspendons ici le récit du grand annaliste ; mais qu'il nous soit permis d'arrêter un moment le lecteur, pour considérer avec lui un des plus touchants caractères de l'Eglise catholique, si divinement exprimé dans les scènes que nous venons de raconter, et dans celles qui nous restent à décrire. Un homme d'Etat a dit de nos jours : "Le catholicisme est la plus grande école de respect qui soit sur la terre" ; nous ajouterons que la religion, telle que l'enseigne et la pratique l'Eglise romaine, est la source intarissable de la plus haute et de la plus noble sensibilité qu'il soit donné à l'homme d'éprouver en ce monde. C'est cette inépuisable tendresse qui produit chaque jour tant d'actes de dévouement dans son sein, qui enfante sans efforts tant de généreux sacrifices, et entretient cet enthousiasme ardent et pur que les sectes séparées ne connurent jamais.

 

Or, veut-on savoir où l'Eglise catholique en puise le secret ? Sans doute, dans la doctrine et les exemples de l'Homme-Dieu ; mais cet Homme-Dieu, depuis qu'il est remonté à la droite du Père,   se plaît à  reproduire dans les saints les traits admirables sous lesquels il s'est montré à nous. De là, dans l'Eglise, cet amour, ce souvenir incessant des héros qu'elle a produits, et par eux, en elle, ce développement toujours ancien et toujours nouveau du principe de charité. Ils vivent avec Dieu dans l'éternité bienheureuse; mais elle vit avec eux dans cette vallée de larmes, et de même qu'elle ne cesse de ressentir leur protection, de même aussi elle ne cesse de les aimer, de se délecter dans leur souvenir, de rechercher leurs traces, comme la voie lumineuse qui la conduit au Christ lui-même. Les personnes vraiment chères que la mort nous a ravies ne sont jamais totalement absentes de nous ; car, ainsi que le dit le livre sacré, "l'amour est fort comme la mort" (Cant., VIII) ; quelle ne sera donc pas la confiance de l'Eglise qui sait que les saints, objet de son amour durant leur vie mortelle, sont plus vivants pour elle, plus occupés de ses destinées, plus tendres à son égard, maintenant qu'ils sont établis à la source même de l'amour éternel, qu'ils ne furent aux jours où ils vivaient en ce monde, séjour de toutes les imperfections ?

 

Voyez Clément VIII, vieillard austère, qui naguère différa deux ans entiers la réconciliation du Béarnais triomphant dans Paris, et implorant à genoux par ses ambassadeurs l'absolution de son hérésie ; ce pontife, héritier de l'énergie de ses plus mâles prédécesseurs, et qui porta sans fléchir le poids de la catholicité dans ce siècle où Rome avait vu se détacher d'elle un si grand nombre de ses provinces d'Europe ; voyez-le ému jusqu'au fond de sa grande âme, à la nouvelle que l'on vient de découvrir les restes d'une jeune femme chrétienne de l'âge des persécutions. Aussitôt que ses forces le lui permettront, il se rendra en personne pour vénérer ces ossements séculaires, il les arrosera de ses larmes de joie et d'attendrissement; il estimera l'un des grands événements de son pontificat, la translation que ses mains auront faite du cercueil de Cécile dans une châsse splendide, pour laquelle il épuisera le trésor papal.

 

Un tel spectacle est incompréhensible, sans doute, pour quiconque n'est pas initié à la foi catholique ; mais est-il rien cependant qui fasse mieux saisir la suprême moralité de l'Eglise, toujours éprise pour la vertu de ce fervent enthousiasme envers ceux qui l'ont pratiquée, sans que les siècles attiédissent en rien cette noble ardeur, sans que la durée d'un tel sentiment fasse autre chose que de le rendre plus touchant et plus vif ? A six siècles d'intervalle, Paschal ressentit pour la vierge Cécile la respectueuse tendresse dont l'avait entourée Urbain, et, huit siècles après, la fille de Caecilii retrouvait au coeur de Clément, sans aucun refroidissement, la pieuse affection que lui vouèrent Urbain et Paschal.

 

A ce moment pourtant, l'orgueilleuse réforme triomphait, les souvenirs les plus chers à tant de générations fidèles étaient foulés aux pieds, les ossements des saints protecteurs étaient jetés à la voirie ; car ils rappelaient l'exemple de ces sublimes vertus qui n'allaient plus à un siècle émancipé des superstitions du papisme. Cependant celle qu'on appelait la Prostituée de Babylone et que maudissaient tant de nations, Rome s'ébranlait à la nouvelle de la découverte du corps d'une jeune patricienne immolée pour la foi sous les Césars, comme si un trésor destiné a enrichir tous ses habitants se fût tout à coup révélé.

 

Quelle idée, quel sentiment représentait donc cette Romaine ensevelie depuis tant de siècles ? Une pureté digne des anges, un dévouement inviolable à Dieu auquel elle s'était consacrée, un zèle ardent pour le salut des âmes et pour le soulagement des pauvres, une indomptable fermeté à confesser cette foi qui relève ainsi la nature humaine, un courage qui brava deux fois la mort ; enfin ce charme inexprimable que de si sublimes vertus répandirent sur la grande martyre de Rome.

 

Tels étaient aux jours de son immolation, tels furent au neuvième siècle, tels furent à la fin du seizième, tels seront, jusqu'à la fin des temps, les titres de Cécile à l'amour des enfants de l'Eglise.

 

DOM GUÉRANGER

SAINTE CÉCILE ET LA SOCIÉTÉ ROMAINE AUX DEUX PREMIERS SIÈCLES (pages 346 à 352)

 

Cecilia

SAINTE CÉCILE - Santa Cecilia in Trastevere, Rome

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26 mai 2011 4 26 /05 /mai /2011 11:00

La journée est encore embellie par la mémoire d'un de ces premiers pontifes qui, comme Urbain, ont été les fondements de la sainte Eglise à l'âge des tempêtes. Eleuthère monta sur le Siège Apostolique au milieu de la tourmente excitée par la persécution de Marc-Aurèle et de Commode. Il vit arriver à Rome la légation que lui envoyaient les martyrs de l'Eglise de Lyon, et qui avait à sa tête le grand Irénée. Cette illustre Eglise, couronnée à ce moment des palmes les plus glorieuses, venait les offrir à la nouvelle Rome en qui elle reconnaissait la "puissante principauté" qu'a célébrée le même saint Irénée, dans ses livres Contre les Hérésies.

 

La paix ne tarda pas à être rendue à l'Eglise, et le reste du pontificat d'Eleuthère s'écoula dans le calme et la tranquillité. Au sein de cette paix, avec son nom qui exprime la Liberté, ce pontife est une image de notre divin ressuscité, dont le Psalmiste nous dit qu'il est libre entre les morts (Psalm. LXXXVII, 6.).

 

L'Eglise honore saint Eleuthère comme martyr, avec les autres papes qui ont siégé avant la paix de Constantin, et qui presque tous ont versé leur sang dans les persécutions des trois premiers siècles. Associés à toutes les souffrances de l'Eglise, gouvernant la chrétienté à travers mille périls, ne goûtant la paix que dans de rares et courts intervalles, cette suite de trente-trois pontifes a droit d'être considérée comme une série de martyrs.

 

Une gloire particulière pour Eleuthère est d'avoir été l'apôtre de la grande île britannique qui est devenue plus tard l'Angleterre. Les Romains avaient colonisé dans cette île, qui n'était plus comme auparavant séparée du reste du monde. La divine Providence choisit les années de paix du pontificat d'Eleuthère pour agréger à ['Eglise les prémices de la population bretonne. Plus tard, l’île évangélisée ainsi dès le second siècle par les soins de notre saint pape deviendra l'Ile des saints, et dans deux jours ses gloires chrétiennes resplendiront une seconde fois sur le cycle.

 

Eleuthère, né à Nicopolis en Grèce, fut d'abord diacre du pape Anicet, et gouvernera ensuite l'Eglise sous l'empire de Commode. Au commencement de son pontificat, il reçut des lettres de Lucius, roi des Bretons, qui le suppliait de l'admettre ainsi que ses sujets au nombre des chrétiens. Eleuthère envoya donc dans la Grande-Bretagne Fugacius et Damien, personnages doctes et pieux, pour enseigner la foi à ce prince et à sa nation.

 

Ce fut aussi sous son pontificat que saint Irénée, disciple de saint Polycarpe, vint à Rome, où il fut accueilli avec une grande cordialité. L'Eglise Jouit d'une grande paix et d'un profond repos sous Eleuthère, et la foi taisait de grands progrès dans le monde entier, principalement à Rome.

 

Il exerça le pontificat quinze ans et vingt-trois jours, et fit trois ordinations au mois de décembre, dans lesquelles il créa douze prêtres, huit diacres et quinze évêques pour divers lieux. Il fut enseveli au Vatican près du corps de saint Pierre.

 

Votre nom, ô Eleuthère, est le nom du chrétien ressuscité avec Jésus-Christ. La Pâque nous a tous délivrés, tous affranchis, rendus tous libres. Priez donc, afin que nous conservions toujours cette glorieuse liberté des enfants de Dieu, que recommande l'Apôtre (Rom. VIII, 21). Par elle nous sommes retirés des liens du péché qui nous livrait à la mort, de la servitude de Satan qui nous entraînait loin de notre fin, de la tyrannie du monde qui nous égarait par ses maximes charnelles La vie nouvelle que nous a donnée la Pâque est toute du ciel où le Christ nous attend dans sa gloire ; nous ne pourrions la perdre que pour être esclaves de nouveau. Saint Pontife, obtenez que la Pâque, à son retour en l'année qui suivra, nous retrouve dans cette heureuse liberté qui est le fruit de notre délivrance par le Christ.

 

Il est une autre liberté que vante le monde, et pour la conquête de laquelle il arme les hommes les uns contre les autres. Elle consiste à fuir, comme on fuirait un crime, toute sujétion et toute dépendance, à ne s'incliner devant aucune autorité qu'on ne l'ait créée soi-même, pour ne durer qu'autant qu'il nous plaira. Délivrez-nous, saint Pontife, de tout attrait pour cette prétendue liberté si contraire à la soumission chrétienne, et qui n'est que le triomphe de l'orgueil humain. Dans sa frénésie, elle verse des torrents de sang ; enivrée de ce qu'elle appelle fastueusemcnt les droits de l'homme, elle substitue l'égoïsme au devoir. Pour elle la vérité n'est plus, car elle va jusqu'à reconnaître des droits à l'erreur ; pour elle le bien n'est plus, car elle a abdiqué tout droit d'enchaîner le mal : tant elle est devenue esclave du principe sauvage de l'indépendance. Elle détrône Dieu autant qu'il lui est possible, en refusant de le reconnaître dans les dépositaires de l'autorité sociale, et jette l'homme sans défense sous le joug de la force brutale, l'écrasant sous le poids de ce qu'elle appelle les majorités, et sous la pression monstrueuse des faits accomplis. Non, telle n'est pas, ô Eleuthère, la liberté à laquelle nous a conviés le Christ, notre libérateur. Soyez comme des hommes libres, nous dit Pierre votre prédécesseur, et ne soyez pas de ceux qui, sous un voile trompeur, sont les sectateurs de la liberté du mal (I PETR. II, 16.).

 

Demeurez toujours, ô saint Pontife, le père de la société humaine dont vous fûtes le chef ici-bas. Durant votre régne pacifique, vous avez siégé près des Césars dans la ville aux sept collines. La pourpre et le diadème étaient portés par d'autres ; mais votre nom n'était pas ignoré dans le monde. Tandis que le pouvoir matériel tenait la hache suspendue sur votre tête, d'innombrables fidèles se dirigeaient vers Rome pour vénérer la tombe de Pierre et rendre hommage à son successeur. Vous vîtes arriver un jour l'ambassade d'un roi barbare. Cette légation ne se dirigeait pas vers le palais des Césars ; elle s'arrêtait à la porte de votre humble demeure. Un peuple était appelé par la grâce divine à recevoir la bonne nouvelle, à entrer dans la famille chrétienne. Les destinées de ce peuple que vous avez évangélisé le premier devaient être grandes dans l'Eglise. L'île des Bretons est fille de l'Eglise Romaine ; et c'est en vain qu'elle voudrait effacer cette noble origine. Prenez ses maux en pitié, ô vous qui fûtes son premier apôtre; aidez les efforts qui sont faits de toutes parts pour la rendre à l'unité. Souvenez-vous de la foi de Lucius et de son peuple, et montrez votre paternelle sollicitude en faveur d'un pays que vous avez enfanté à la foi.

 

DOM GUÉRANGER
L'Année Liturgique

 

Maiestas Domini by Miniaturist, English

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26 mai 2011 4 26 /05 /mai /2011 04:00

La joie est, ainsi que nous l'avons dit, le caractère principal du Temps pascal : joie surnaturelle, motivée à la fois par le triomphe si éclatant de notre Emmanuel et par le sentiment de notre heureuse délivrance des liens de la mort. Or, ce sentiment de l'allégresse intérieure a régné d'une manière caractéristique dans le grand serviteur de Dieu que nous honorons aujourd'hui ; et c'est bien d'un tel homme, dont le cœur fut toujours dans la jubilation et dans l'enthousiasme des choses divines, que l'on peut dire, avec la sainte Ecriture "que  le cœur du juste est comme un festin continuel" (Prov. XV, 15).

 

Un de ses derniers disciples, l'illustre Père Faber, fidèle aux doctrines de son maître, enseigne, dans son beau livre du Progrès spirituel, que la bonne humeur est l'un des principaux moyens d'avancement dans la perfection chrétienne. Nous accueillerons donc avec autant d'allégresse que de respect la figure radieuse et bienveillante de Philippe Néri, l'Apôtre de Rome et l'un des plus beaux fruits de la fécondité de l'Eglise au XVIe siècle.

 

L'amour de Dieu, un amour ardent, et qui se communiquait comme invinciblement à tous ceux qui l'approchaient, fut le trait particulier de sa vie. Tous les saints ont aimé Dieu, car l'amour de Dieu est le premier et le plus grand commandement, mais la vie de Philippe réalise ce divin précepte avec une plénitude, pour ainsi dire, incomparable. Son existence ne fut qu'un transport d'amour envers le souverain Seigneur de toutes choses ; et sans un miracle de la puissance et de la bonté de Dieu, cet amour si ardent au cœur de Philippe eût consumé sa vie avant le temps.

 

Il était arrivé à la vingt-neuvième année de son âge, lorsqu'un jour, dans l'Octave de la Pentecôte, le feu de la divine charité embrasa son cœur avec une telle impétuosité que deux côtes de sa poitrine éclatèrent, laissant au cœur l'espace nécessaire pour céder désormais sans péril aux transports qui l'agitaient. Cette fracture ne se répara jamais ; la trace en était sensible par une proéminence visible à tout le monde ; et grâce à ce soulagement miraculeux, Philippe put vivre cinquante années encore, en proie à toutes les ardeurs d'un amour qui tenait plus du ciel que de la terre.

 

Ce séraphin dans un corps d'homme fut comme une réponse vivante aux insultes dont la prétendue Réforme poursuivait l'Eglise catholique. Luther et Calvin avaient appelé cette sainte Eglise l'infidèle et la prostituée de Babylone ; et voici que cette même Eglise avait à montrer de tels enfants à ses amis et à ses ennemis : une Thérèse en Espagne, un Philippe Néri dans Rome. Mais le protestantisme s'inquiétait beaucoup de l'affranchissement du joug, et peu de l'amour. Au nom de la liberté des croyances, il opprima les faibles partout où il domina, il s'implanta par la force là même où il était repoussé ; mais il ne revendiquait pas pour Dieu le droit qu'il a d'être aimé. Aussi vit-on disparaître des pays qu'il envahit ce dévouement qui produit le sacrifice à Dieu et au prochain. Un long intervalle de temps s'est écoulé depuis la prétendue Réforme, avant que celle-ci ait songé qu'il existe encore des infidèles sur la surface du globe ; et si plus tard elle s'est fastueusement imposé l'œuvre des missions, on sait assez quels apôtres elle choisit pour organes de ses étranges sociétés bibliques. C'est donc après trois siècles qu'elle s'aperçoit que l'Eglise catholique n'a pas cessé de produire des corporations vouées aux œuvres de charité. Emue d'une telle découverte, elle essaie en quelques lieux ses diaconesses et ses infirmières. Quoi qu'il en soit du succès d'un effort si tardif, on peut croire raisonnablement qu'il ne prendra jamais de vastes proportions; et il est permis de penser que cet esprit de dévouement qui sommeilla trois siècles durant au cœur du protestantisme, n'est pas précisément l'essence de son caractère, quand on l'a vu, dans les contrées qu'il envahit, tarir jusqu'à la source de l'esprit de sacrifice, en arrêtant avec violence la pratique des conseils évangéliques qui n'ont leur raison d'être que dans l'amour de Dieu.

 

Gloire donc à Philippe Néri, l'un des plus dignes représentants de la divine charité au XVIe siècle ! Par son impulsion, Rome et bientôt la chrétienté reprirent une vie nouvelle dans la fréquentation des sacrements, dans les aspirations d'une piété plus fervente. Sa parole, sa vue même électrisaient le peuple chrétien dans la cité sainte ; aujourd'hui encore la trace de ses pas n'est point effacée. Chaque année, le vingt-six mai, Rome célèbre avec transport la mémoire de son pacifique réformateur. Philippe partage avec les saints Apôtres les honneurs de Patron dans la ville de saint Pierre. Les travaux sont suspendus, et la population en habits de fête se presse dans les églises pour honorer le jour où Philippe naquit au ciel, après avoir sanctifié la terre. Le Pontife romain en personne se rend en pompe à l'église de Sainte-Marie in Vallicella, et vient acquitter la dette du Siège Apostolique envers l'homme qui releva si haut la dignité et la sainteté de la Mère commune.

 

Philippe eut le don des miracles, et tandis qu'il ne cherchait que l'oubli et le mépris, il vit s'attacher à lui tout un peuple qui demandait et obtenait par ses prières la guérison des maux de la vie présente, en même temps que la réconciliation des âmes avec Dieu. La mort elle-même obéit à son commandement, témoin ce jeune prince Paul Massimo que Philippe rappela à la vie, lorsque l'on s'apprêtait déjà à lui rendre les soins funéraires. Au moment où cet adolescent rendait le dernier soupir, le serviteur de Dieu dont il avait réclamé l'assistance pour le dernier passage, célébrait le saint Sacrifice. A son entrée dans le palais, Philippe rencontre partout l'image du deuil : un père éploré, des sœurs en larmes, une famille consternée ; tels sont les objets qui frappent ses regards. Le jeune homme venait de succomber après une maladie de soixante-cinq jours, qu'il avait supportée avec la plus rare patience. Philippe se jette à genoux, et après une ardente prière, il impose sa main sur la tête du défunt et l'appelle à haute voix par son nom. Paul, réveillé du sommeil de la mort par cette parole puissante, ouvre les yeux, et répond avec tendresse : "Mon Père !" Puis il ajoute : "Je voudrais seulement me confesser". Les assistants s'éloignent un moment, et Philippe reste seul avec cette conquête qu'il vient de faire sur la mort. Bientôt les parents sont rappelés, et Paul, en leur présence, s'entretient avec Philippe d'une mère et d'une sœur qu'il aimait tendrement, et que le trépas lui a ravies. Durant cette conversation, le visage du jeune homme, naguère défiguré par la fièvre, a repris ses couleurs et sa grâce d'autrefois. Jamais Paul n'avait semblé plus plein de vie. Le saint lui demande alors s'il mourrait volontiers de nouveau. — "Oh ! oui, très volontiers, répond le jeune homme ; car je verrai en paradis ma mère et ma sœur". — "Pars donc, répond Philippe ; pars pour le bonheur, et prie le Seigneur pour moi". A ces mots, le jeune homme expire de nouveau, et entre dans les joies de l'éternité, laissant l'assistance saisie de regret et d'admiration.

 

Tel était cet homme favorisé presque constamment des visites du Seigneur dans les ravissements et les extases, doué de l'esprit de prophétie, pénétrant d'un regard les consciences, répandant un parfum de vertu qui attirait les âmes par un charme irrésistible. La jeunesse romaine de toute condition se pressait autour de lui. Aux uns il faisait éviter les écueils ; aux autres il tendait la main dans le naufrage. Les pauvres, les malades, étaient à toute heure l'objet de sa sollicitude. Il se multipliait dans Rome, employant toutes les formes du zèle, et ayant laissé après lui une impulsion pour les bonnes œuvres qui ne s'est pas ralentie.

 

Philippe avait senti que la conservation des mœurs chrétiennes dépendait principalement d'une heureuse dispensation de la parole de Dieu, et nul ne se montra plus empressé à procurer aux fidèles des apôtres capables de les attirer par une prédication solide et attrayante. Il fonda sous le nom d'Oratoire une institution qui dure encore, et dont le but est de ranimer et de maintenir la piété dans les populations. Cette institution, qu'il ne faut pas confondre avec l'Oratoire de France, a pour but d'utiliser le zèle et les talents des prêtres que la vocation divine n'appelle pas à la vie du cloître, et qui, en associant leurs efforts, arrivent cependant à produire d'abondants fruits de sanctification.

 

En fondant l'Oratoire sans lier les membres de cette association par les vœux de la religion, Philippe s'accommodait au genre de vocation que ceux-ci avaient reçu du ciel, et leur assurait du moins les avantages d'une règle commune, avec le secours de l'exemple si puissant pour soutenir l'âme dans le service de Dieu et dans la pratique des œuvres du zèle. Mais le saint apôtre était trop attaché à la foi de l'Eglise pour ne pas estimer la vie religieuse comme l'état de la perfection. Durant toute sa longue carrière, il ne cessa de diriger vers le cloître les âmes qui lui semblèrent appelées à la profession des vœux. Par lui les divers ordres religieux se recrutèrent d'un nombre immense de sujets qu'il avait discernes et éprouvés : en sorte que saint Ignace de Loyola, ami intime de Philippe et son admirateur, le comparaît agréablement à la cloche qui convoque les fidèles à l'Eglise, bien qu'elle n'y entre pas elle-même.

 

La crise terrible qui agita la chrétienté au XVIe siècle, et enleva à l'Eglise catholique un si grand nombre de ses provinces, affecta douloureusement Philippe durant toute sa longue vie. Il souffrait cruellement de voir tant de peuples aller s'engloutir les uns après les autres dans le gouffre de l'hérésie. Les efforts tentés par le zèle pour reconquérir les âmes séduites par la prétendue Réforme faisaient battre son cœur, en même temps qu'il suivait d'un œil attentif les manœuvres à l'aide desquelles le protestantisme travaillait à maintenir son influence. Les Centuries de Magdebourg, vaste compilation historique destinée à donner le change aux lecteurs, en leur persuadant, à l'aide de passages falsifiés, de faits dénaturés et souvent même inventés, que l'Eglise Romaine avait abandonné l'antique croyance et substitué la superstition aux pratiques primitives ; cet ouvrage sembla à Philippe d'une si dangereuse portée, qu'un travail supérieur en érudition, puisé aux véritables sources, pouvait seul assurer le triomphe de l'Eglise catholique. Il avait deviné le génie de César Baronius, l'un de ses compagnons à l’Oratoire. Prenant en main la cause de la foi, il commanda à ce savant homme d'entrer tout aussitôt dans la lice, et de poursuivre l'ennemi de la vraie foi en s'établissant sur le terrain de l'histoire. Les Annales ecclésiastiques furent le fruit de cette grande pensée de Philippe ; et Baronius lui-même en rend le plus touchant témoignage en tète de son huitième livre. Trois siècles se sont écoulés sur ce grand œuvre. Avec les moyens de la science dont nous disposons aujourd'hui, il est aise d'en signaler les imperfections ; mais jamais l'histoire de l'Eglise n'a été racontée avec une dignité, une éloquence et une impartialité supérieures à celles qui règnent dans ce noble et savant récit dont le parcours est de douze siècles. L'hérésie sentit le coup ; l'érudition malsaine et infidèle des Centuriateurs s'éclipsa en présence de cette narration loyale des faits, et l'on peut affirmer que le flot montant du protestantisme s'arrêta devant les Annales de Baronius, dans lesquelles l'Eglise apparaissait enfin telle qu'elle a été toujours, "la colonne et l'appui de la vérité" ( I Tim III, 15. ). La sainteté de Philippe et le génie de Baronius avaient décidé la victoire ; de nombreux retours à la foi romaine vinrent consoler les catholiques si tristement décimés ; et si de nos jours d'innombrables abjurations annoncent la ruine prochaine du protestantisme, il est juste de l'attribuer en grande partie au succès de la méthode historique inaugurée dans les Annales.

 

 Mais il est temps de lire le récit liturgique des vertus et des saintes œuvres de l'apôtre de Rome au XVIe siècle : 

Philippe Néri naquit à Florence de parents honnêtes et pieux, et dès son enfance il donna des marques visibles de sa future sainteté. Arrivé à l'adolescence, il abandonna une riche succession qui lui venait d'un oncle paternel, et se rendit à Rome où il étudia la philosophie et la théologie, et se consacra entièrement à Jésus-Christ. Son abstinence était telle, que souvent il passait jusqu'à trois jours sans nourriture. Adonné à la veille et à la prière, il visitait fréquemment les sept Eglises de Rome, et il avait coutume de passer la nuit au Cimetière de Calliste dans la contemplation des choses célestes

 

Ayant reçu par obéissance le sacerdoce, il s'appliqua tout entier au service des âmes, et continua jusqu'au dernier jour de sa vie d'entendre les confessions. Il donna à Jésus-Christ un nombre d'enfants presque innombrable ; et afin de les soutenir par la nourriture quotidienne de la parole de Dieu, la fréquentation des sacrements, l'assiduité à l'oraison, et par d'autres exercices de piété, il institua la congrégation de l'Oratoire.

 

L'amour de Dieu dont il portait la blessure le jetait dans une continuelle langueur, et l'ardeur qui l'embrasait était si grande, que son cœur se trouvant trop resserré dans les bornes naturelles, le Seigneur lui élargit miraculeusement la poitrine par la rupture et l'élévation de deux côtes. Quelquefois Philippe, célébrant la Messe, ou priant avec une plus grande ferveur, était élevé de terre, et paraissait tout environné d'une lumière éclatante. Il rendait aux pauvres et à ceux qui étaient dans quelque besoin tous les soins que peut inspirer la charité, et il mérita qu'un ange vînt recevoir de lui l'aumône sous la figure d'un mendiant. Une autre fois, comme il portait du pain la nuit aux indigents, étant tombé dans une fosse, le secours d'un autre ange l'en fit sortir sain et sauf. Voué à l'humilité, il eut toujours le plus grand éloignement pour les honneurs, et refusa plus d'une fois les premières dignités de l'Eglise qui lui étaient offertes.

 

Rendu illustre par le don de prophétie, il fut remarquable aussi par la pénétration des pensées les plus secrètes. Il garda toute sa vie la plus entière virginité, et il avait reçu le don de distinguer à la bonne ou à la mauvaise odeur ceux qui étaient chastes et ceux qui ne l'étaient pas. Il apparaissait quelquefois à des personnes éloignées du lieu où il se trouvait, et les secourait dans le danger. Il rétablit en santé un grand nombre de malades, et même des moribonds. Il rappela un mort à la vie.

 

La Sainte Viergei apparaît à Saint Philippe Néri par Carlo Maratti 

 

Honoré souvent de l'apparition des esprits célestes et même de la Vierge Mère de Dieu, il vit les âmes de plusieurs personnes monter au ciel brillantes de lumière.

 

Enfin l'an du salut mil cinq cent quatre-vingt-quinze, le huit des calendes de juin, jour auquel tombait la fête du Saint-Sacrement, après avoir célébré le Sacrifice dans les transports d'une pieuse joie, et avoir exercé les autres fonctions ordinaires, il s'endormit dans le Seigneur âgé de quatre-vingts ans, un peu après minuit, à l'heure même qu'il avait prédite. Après sa mort il éclata encore par ses miracles, et fut mis au nombre des Saints par Grégoire XV.

 

 

Vous avez aimé le Seigneur Jésus, ô Philippe, et votre vie tout entière n'a été qu'un acte continu d'amour ; mais vous n'avez pas voulu jouir seul du souverain bien. Tous vos efforts ont tendu à le faire connaître de tous les hommes, afin que tous l'aimassent avec vous et parvinssent à leur fin suprême.

 

Durant quarante années, vous fûtes l'apôtre infatigable de la ville sainte, et nul ne pouvait se soustraire à l'action du feu divin qui brûlait en vous. Nous qui sommes la postérité de ceux qui entendirent votre parole et admirèrent les dons célestes qui étaient en vous, nous osons vous prier de jeter aussi les regards sur nous. Enseignez-nous à aimer notre Jésus ressuscité. Il ne nous suffit pas de l'adorer et de nous réjouir de son triomphe ; il nous faut l'aimer : car la suite de ses mystères depuis son incarnation jusqu'à sa résurrection, n'a d'autre but que de nous révéler, dans une lumière toujours croissante, ses divines amabilités. C'est en l'aimant toujours plus que nous parviendrons à nous élever jusqu'au mystère de sa résurrection, qui achève de nous révéler toutes les richesses de son cœur. Plus il s'élève dans la vie nouvelle qu'il a prise en sortant du tombeau, plus il apparaît rempli d'amour pour nous, plus il sollicite notre cœur de s'attacher à lui.

 

Priez, ô Philippe, et demandez que "notre  cœur et notre chair tressaillent pour le Dieu  vivant" (Psalm. LXXXIII, 2.).

 

Après le mystère de là Pâque, introduisez-nous dans celui de l'Ascension ; disposez nos âmes à recevoir le divin Esprit de la Pentecôte ; et lorsque l'auguste mystère de l'Eucharistie brillera à nos regards de tous ses feux dans la solennité qui approche, vous, ô Philippe, qui l'ayant fêté une dernière fois ici-bas, êtes monté à la fin de la journée au séjour éternel où Jésus se montre sans voiles, préparez nos âmes à recevoir et à goûter "ce pain vivant qui donne la vie au monde" (JOHAN. VI, 33.).

  

La sainteté qui éclata en vous, ô Philippe, eut pour caractère l'élan de votre âme vers Dieu, et tous ceux qui vous approchaient participaient bientôt à cette disposition, qui seule peut répondre à l'appel du divin Rédempteur.

 

Vous saviez vous emparer des âmes, et les conduire à la perfection par la voie de la confiance et la générosité du cœur. Dans ce grand œuvre votre méthode fut de n'en pas avoir, imitant les Apôtres et les anciens Pères, et vous confiant dans la vertu propre de la parole de Dieu.

 

Par vous la fréquentation fervente des sacrements reparut comme le plus sûr indice de la vie chrétienne. Priez pour le peuple fidèle, et venez au secours de tant d'âmes qui s'agitent et s'épuisent dans des voies que la main de l'homme a tracées, et qui trop souvent retardent ou empêchent l'union intime du créateur et de la créature.

  

Vous avez aimé ardemment l'Eglise, ô Philippe ; et cet amour de l'Eglise est le signe indispensable de la sainteté.

 

Votre contemplation si élevée ne vous distrayait pas du sort douloureux de cette sainte Epouse du Christ, si éprouvée dans le siècle qui vous vit naître et mourir. Les efforts de l'hérésie triomphante en tant de pays stimulaient le zèle dans votre cœur : obtenez-nous de l'Esprit-Saint cette vive sympathie pour la vérité catholique qui nous rendra sensibles à ses défaites et à ses victoires.

 

Il ne nous suffit pas de sauver nos âmes ; nous devons désirer avec ardeur et aider de tous nos moyens l'avancement du règne de Dieu sur la terre, l'extirpation de l'hérésie et l'exaltation de notre mère la sainte Eglise : c'est à cette condition que nous sommes enfants de Dieu.

 

Inspirez-nous par vos exemples, ô Philippe, cette ardeur avec laquelle nous devons nous associer en tout aux intérêts sacrés de la Mère commune.

 

Priez aussi pour cette Eglise militante qui vous a compté dans ses rangs comme un de ses meilleurs soldats. Servez vaillamment la cause de cette Rome qui se fait honneur de vous être redevable de tant de services. Vous l'avez sanctifiée durant votre vie mortelle ; sanctifiez-la encore et défendez-la du haut du ciel.

 

DOM GUÉRANGER
L'Année Liturgique

 

La Sainte Vierge apparaît à Saint Philippe Néri par Tiepolo

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