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"Je vous donne un commandement nouveau : c'est de vous aimer les uns les autres.

 

Comme je vous ai aimés, vous aussi aimez-vous les uns les autres.

 

Ce qui montrera à tous les hommes que vous êtes mes disciples, c'est l'amour que vous aurez les uns pour les autres."

 

Evangile de Jésus-Christ selon  saint Jean 

   

 

Pentecôte

" Le Défenseur, l'Esprit Saint que le Père enverra en mon nom, lui, vous enseignera tout, et il vous fera souvenir de tout ce que je vous ai dit."

 

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean  

 

   

 

 El Papa es argentino. Jorge Bergoglio                 

Saint Père François

 

 

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1er mai 2011 Béatification de Jean-Paul II

Béatification du Serviteur de Dieu Jean-Paul II

 

 

  Béatification du Père Popieluszko

beatification Mass, in Warsaw, Poland

à Varsovie, 6 juin 2010, Dimanche du Corps et du Sang du Christ

 

 

presidential palace in Warsaw

Varsovie 2010

 

 

Basilique du Sacré-Cœur de Montmartre
Sanctuaire de l'Adoration Eucharistique et de la Miséricorde Divine

La miséricorde de Dieu est comme un torrent débordé. Elle entraîne les cœurs sur son passage.
(Saint Curé d'Ars)
 

 


Le côté du Christ a été transpercé et tout le mystère de Dieu sort de là. C’est tout le mystère de Dieu qui aime, qui se livre jusqu’au bout, qui se donne jusqu’au bout. C’est le don le plus absolu qui soit. Le don du mystère trinitaire est le cœur ouvert. Ce n’est pas une image, c’est une réalité. C’est la réalité la plus profonde qui soit, la réalité de l’amour.
Père Marie-Joseph Le Guillou




Dans le cœur transpercé
de Jésus sont unis
le Royaume du Ciel
et la terre d'ici-bas
la source de la vie
pour nous se trouve là.

Ce cœur est cœur divin
Cœur de la Trinité
centre de convergence
de tous les cœur humains
il nous donne la vie
de la Divinité.


Sainte Thérèse Bénédicte de la Croix
(Edith Stein)



Le Sacré-Cœur représente toutes les puissances d'aimer, divines et humaines, qui sont en Notre-Seigneur.
Père Marie-Eugène de l'Enfant Jésus

 



feuille d'annonces de la Basilique du Sacré-Coeur de Montmartre

 

 

 

 

 

 

 

     

The Cambrai Madonna

Notre Dame de Grâce

Cathédrale de Cambrai

 

 

 

Cathédrale Notre Dame de Paris 

   

Ordinations du samedi 27 juin 2009 à Notre Dame de Paris


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Magnificat

     



Solennité de l’Immaculée Conception de la Vierge Marie à Notre-Dame de Paris


NOTRE DAME DES VICTOIRES

Notre-Dame des Victoires




... ma vocation, enfin je l’ai trouvée, ma vocation, c’est l’Amour !

 

 

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Voyages de Benoît XVI

 

SAINT PIERRE ET SAINT ANDRÉ

Saint Pierre et Saint André

 

BENOÎT XVI à CHYPRE 

 

Benedict XVI and Cypriot Archbishop Chrysostomos, Church of 

Salutation avec l'Archevêque Chrysostomos à l'église d' Agia Kyriaki Chrysopolitissa de Paphos, le vendredi 4 juin 2010

 

     

 

Benoît XVI en Terre Sainte  


 

Visite au chef de l'Etat, M. Shimon Peres
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Visite au mémorial de la Shoah, Yad Vashem




 






Yahad-In Unum

   

Vicariat hébréhophone en Israël

 


 

Mgr Fouad Twal

Patriarcat latin de Jérusalem

 

               


Vierge de Vladimir  

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SALVE REGINA

19 mai 2011 4 19 /05 /mai /2011 15:00

A côté de Léon, l'insigne Docteur, Jésus ressuscité appelle en ce jour l'humble Pierre Célestin, Pontife suprême comme Léon, mais à peine assis sur la chaire apostolique, qu'il en est descendu pour retourner au désert. Entre tant de héros dont est formée la chaîne des Pontifes romains, il devait s'en rencontrer à qui fût donnée la charge de représenter plus spécialement la noble vertu d'humilité ; et c'est à Pierre Célestin que la grâce divine a dévolu cet honneur.

 

Arraché au repos de sa solitude pour être élevé sur le trône de saint Pierre et tenir dans ses mains tremblantes les formidables clefs qui ouvrent et ferment le ciel, le saint ermite a regardé autour de lui ; il a considéré les besoins de l'immense troupeau du Christ, et sondé ensuite sa propre faiblesse. Oppressé sous le fardeau d'une responsabilité qui embrasse la race humaine tout entière, il s'est jugé incapable de supporter plus longtemps un tel poids ; il a déposé la tiare, et imploré la faveur de se cacher de nouveau à tous les regards humains dans sa chère sollicitude. Ainsi le Christ, son Maître, avait d'abord enfoui sa gloire dans une obscurité de trente années, et plus tard sous le nuage sanglant de sa Passion et sous les ombres du sépulcre. Les splendeurs de la divine Pâque ont tout à coup dissipé ces ténèbres, et le vainqueur de la mort s'est révélé dans tout son éclat. Mais il veut que ses membres aient part à son triomphe, et que la gloire dont ils brilleront éternellement soit, comme la sienne, en proportion de leur empressement à s'humilier dans les jours de cette vie mortelle.

 

Quelle langue pourrait décrire l'auréole qui entoure le front de Pierre Célestin, en retour de cette obscurité au sein de laquelle il a cherché l'oubli des hommes avec plus d'ardeur que d'autres ne recherchent leur estime et leur admiration ? Grand sur le trône pontifical, plus grand au désert, sa grandeur dans les cieux dépasse toutes nos pensées.

 

Pour le louer, la sainte Eglise lui a consacré les lignes suivantes, aussi simples que la vie du Pontife anachorète : 

Pierre, nommé Célestin, du nom qu'il prit lorsqu'il fut créé pape, naquit de parents honnêtes et catholiques à Isernia dans les Abruzzes. A peine entré dans l'adolescence, il se retira au désert pour garantir son âme des séductions du monde. Il la nourrissait dans cette solitude par la contemplation, et réduisait son corps en servitude, portant sur sa chair une chaîne de fer. Il institua sous la règle de Saint-Benoît la congrégation connue depuis sous le nom de Célestins.

 

L'Eglise Romaine ayant été longtemps sans pasteur, il fut choisi à son insu pour occuper la chaire de saint Pierre, et on le tira de son désert où il ne pouvait plus demeurer caché davantage, comme on place la lumière sur le chandelier. Un événement si peu ordinaire ravit tout le monde de joie et d'admiration. Mais lorsque Pierre, élevé à cette dignité sublime, sentit que la multitude des affaires préoccupant son esprit, il pouvait à peine vaquer comme auparavant à la méditation des choses célestes, il renonça volontairement à la charge et à la dignité. Il reprit donc son ancien genre de vie, et s'endormit dans le Seigneur, par une mort précieuse, qui fut rendue plus glorieuse encore par l'apparition d'une croix lumineuse que l'on vit briller dans les airs au-dessus de l'entrée de sa cellule.

 

Pendant sa vie et après sa mort, il éclata par un grand nombre de miracles qui, ayant été soigneusement examinés, portèrent Clément V à l'inscrire au nombre des Saints, onze ans après sa mort.

 

Vous avez obtenu l'objet de votre ambition, ô Célestin ! il vous a été accordé de descendre les degrés du trône apostolique, et de rentrer dans le calme de cette vie cachée qui avait si longtemps fait toutes vos délices. Jouissez des charmes de l'obscurité que vous aviez tant aimée ; elle vous est rendue avec tous les trésors de la contemplation, dans le secret de la face de Dieu. Mais cette obscurité n'aura qu'un temps, et quand l'heure sera venue, la Croix que vous avez préférée à tout se dressera lumineuse à la porte de votre cellule, vous invitant à prendre part au triomphe pascal de celui qui est descendu du ciel pour nous apprendre que quiconque s'abaisse sera élevé.

 

Votre nom, ô Célestin, brillera jusqu'au dernier jour du monde sur la liste des Pontifes romains ; vous êtes l'un des anneaux de cette chaîne qui rattache la sainte Eglise à Jésus son fondateur et son époux ; mais une plus grande gloire vous est réservée, celle de faire cortège à ce divin Christ ressuscité. La sainte Eglise, qui un moment s'est inclinée devant vous pendant que vous teniez les clefs de Pierre, vous rend depuis des siècles et vous rendra jusqu'au dernier jour l'hommage de son culte, parce qu'elle reconnaît en vous un des élus de Dieu, un des princes de la céleste cour.

 

Et nous aussi, ô Célestin ! nous sommes appelés à monter là où vous êtes, à contempler éternellement comme vous le plus beau des enfants des hommes, le vainqueur de la mort et de l'enfer. Mais une seule voie peut nous y conduire : celle que vous avez vous-même suivie, la voie de l'humilité. Fortifiez en nous cette vertu, ô Célestin ! et allumez-en le désir dans nos cœurs.

 

Substituez le mépris de nous-mêmes à l'estime que nous avons trop souvent le malheur d'en faire. Rendez-nous indifférents à toute gloire mondaine, fermes et joyeux dans les abaissements , afin qu'ayant "bu l'eau du torrent", comme notre Maître divin, nous puissions un jour, comme lui et avec vous, "relever notre tête" et entourer éternellement le trône de notre commun libérateur. 

 

DOM GUÉRANGER
L'Année Liturgique
 

 

Saint Celestin V par Bartolomeo Romano 

Au château de Fumone, près d’Alatri dans le Latium, en 1296, la naissance au ciel de saint Pierre Célestin. Alors qu’il menait une vie d’ermite dans les Abruzzes, la renommée de sa simplicité et de ses miracles le firent élire comme pontife romain à l’âge de quatre-vingts ans. Il prit le nom de Célestin V, mais il abdiqua la même année, préférant revenir à sa solitude. Il termina sa vie, enfermé dans un château, entièrement isolé du monde.  
Martyrologe romain

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19 mai 2011 4 19 /05 /mai /2011 10:00

Un touchant souvenir du premier âge de l'Eglise Romaine se rattache à ce jour. Une vierge chrétienne, la noble Pudentienne, l'a illustré par son trépas. Fille d'un riche Romain nommé Pudens, de la famille de ce premier Pudens que mentionne saint Paul dans la deuxième Epître à Timothée (II Tim. IV, 21.), elle eut le bonheur, ainsi que sa sœur Praxède,  d'être initiée dès le berceau à la foi chrétienne, et toutes deux consacrèrent à Jésus-Christ leur virginité.

 

A la mort de leur père, les deux sœurs distribuèrent aux pauvres leur opulent héritage, et consacrèrent leur vie tout entière aux bonnes œuvres. L'Eglise était à la veille de la persécution d'Antonin. Pudentienne, à peine âgée de seize ans, mais déjà mûre pour le ciel, prit son vol vers l'Epoux divin au fort de la tempête. Sa sœur lui survécut assez longtemps ; nous la retrouverons sur le Cycle de la sainte Eglise au 21 juillet.

 

La maison de Pudentienne, déjà consacrée, du temps de son aïeul, par le séjour de saint Pierre, fut mise par la vierge elle-même à la disposition du saint pape Pie Ier, et les divins Mystères y furent célébrés. Depuis lors elle est regardée comme l'un des plus augustes sanctuaires de Rome, et dans le cours du Carême la Station nous y a appelés le Mardi de la troisième semaine.

 

Pudentienne est une tendre fleur que l'Eglise Romaine offre aujourd'hui au divin Ressuscité. Les siècles n'ont point épuisé son parfum ; et, pure comme son nom, sa mémoire demeurera chère aux enfants de l'Eglise jusqu'au dernier jour du monde.

 

L'éloge que la sainte Liturgie lui consacre n'est, pour ainsi dire, qu'un simple souvenir ; mais ce souvenir est immortel : 

La vierge Pudentienne , fille de Pudens, sénateur romain, ayant perdu ses parents, se consacra tout entière, avec un zèle admirable, aux exercices de la piété chrétienne. D'accord avec sa sœur Praxède, elle distribua aux pauvres l'argent qu'elle avait retiré de la vente de son patrimoine, et s'appliqua avec zèle au jeûne et à l'oraison.

 

Par ses soins, toute sa famille, composée de quatre-vingt-seize personnes, reçut le baptême des mains du pape Pie. L'empereur Antonin ayant défendu par un édit aux chrétiens de pratiquer publiquement leur religion, le pontife célébrait les saints Mystères en présence des fidèles dans la maison de Pudentienne.

 

Elle recevait les chrétiens avec une grande charité, et leur fournissait les choses nécessaires à la vie. Elle mourut dans la pratique de  tous ces devoirs de la piété, et fut ensevelie dans le tombeau de son père, au cimetière de Priscille, sur la Voie Salaria, le quatorze des calendes de juin.

 

Semblable à la colombe de l'Arche, qui ne trouva pas où poser son pied sur le sol encore empreint de la colère de Dieu, vous avez pris votre vol, ô Pudentienne ! et vous êtes venue vous réfugier dans le sein de Jésus votre Pasteur et votre Epoux. Ainsi, au dernier jour du monde, les âmes des élus, revêtues de leurs corps glorieux, imiteront le vol de l'aigle, et se rendront autour de Jésus avec la rapidité que le roi des airs met à fondre sur sa proie. Ces âmes fuiront la terre profanée, de même que vous avez fui les abominations de Rome païenne qui s'enivrait du sang des martyrs. Nous saluons votre départ, ô vierge, dans un sentiment d'espérance pour nous-mêmes ; nous saluons votre arrivée près de l'Epoux, dans le désir de nous y rencontrer un jour avec vous.

 

Détachez-nous de tout ce qui passe ; faites-nous aimer de plus en plus cette vie nouvelle que la Pâque a répandue en nous ; faites, par vos prières, que nous n'ayons plus d'attrait pour cette autre vie inférieure qui n'est pas celle de Jésus ressuscité.

 

Fille de la sainte Eglise de Rome, intercédez aussi pour votre mère. Aux jours de Léon XIII elle souffre comme aux jours de Pie Ier. Après avoir régné longtemps sur les nations chrétiennes, elle est abandonnée et désavouée aujourd'hui par des peuples qui lui doivent tout, et qui tournent contre elle ses propres bienfaits. Soyez-lui en aide, ô Pudentienne ! et subvenez à votre auguste mère. 

 

DOM GUÉRANGER
L'Année Liturgique
 

 

Basilica Santa Pudenziana 1

BASILIQUE SAINTE PUDENTIENNE DE ROME 

 

Basilica Santa Pudenziana 2

 

Santa Pudenziana

SAINTE PUDENTIENNE

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19 mai 2011 4 19 /05 /mai /2011 04:00

Nous craindrions d'imposer une privation à la piété de nos lecteurs, si nous omettions aujourd'hui la mémoire d'un saint dont le culte n'est que local, il est vrai, mais qui n'en a pas moins été, durant des siècles, l'objet d'une vénération presque universelle. Au reste, la catholique Bretagne, sa patrie, n'a rien perdu du fervent amour qu'elle portait autrefois à son saint Yves ; et cette noble province a bien le droit que l'on recommande ici sa fidélité à ses saintes et antiques traditions. Dans ses églises, l'image patriotique d'un si célèbre patron est entourée d'un culte particulier ; dans ses villes et ses gros bourgs, le nom de saint Yves désigne et consacre toujours quelque rue ou quelque place ; et d'innombrables familles se transmettent, de génération en génération, ce nom béni comme un précieux héritage.

 

Yves est monté en ce jour vers son Sauveur ressuscité, après l'avoir représenté sur la terre par le sacerdoce dont il fut revêtu, par son zèle pour le salut des âmes, et par son héroïque charité envers les pauvres. Mais ce qui a frappé le plus vivement l'imagination des peuples, c'est le justicier qui rendait ses sentences avec une équité à laquelle nul n'eût osé contredire ; c'est l'avocat qui ne plaida jamais que dans un but charitable ; car saint Yves s'est assis sur le siège du magistrat durant une partie de sa vie, et plus tard on l'a entendu plaider au palais, non seulement dans les villes de la Bretagne, mais au loin, jusque dans Paris. Cette vie étonnante, qui est une merveille du XIIIe siècle et s'achève dans le XIVe, se rehausse encore de l'éclat des miracles, avec un luxe qui est en juste rapport avec la vive foi des Bretons ; et l'on peut affirmer qu'après saint Martin, saint Yves est le thaumaturge de la France.

 

Honorons cet homme aux entrailles de miséricorde qui fut le modèle des magistrats, et ne porta jamais une sentence pénale que l'on ne vît des larmes couler de ses yeux, parce qu'il faisait réflexion sur lui-même, et pensait qu'il serait jugé à son tour ; cet homme qui, changeant de rôle, fit si souvent entendre sa voix au palais dans l'intérêt du pauvre et de l'opprimé ; vrai gentilhomme breton devenu plus tard, sous la robe du prêtre, l'émule des chevaliers de son sang ; cet homme enfin qui voua sa vie et ses forces aux saintes fonctions de curé de campagne, et réalisa l'idéal de ce touchant ministère avec une perfection qui a rendu son nom impérissable.

 

L'amour de la pauvreté et les habitudes de la plus sévère pénitence en firent un personnage tout céleste ; et quand l'heure fut venue, il s'élança vers le souverain bien avec toute l'ardeur de l'exilé auquel il est permis de rentrer dans sa patrie. Peu de jours avant son départ pour le ciel, il se trouvait au château de Coatredan, chez Typhaine de Pestivien, dame de Kéraurais : "Depuis quelque temps, dit-il à la pieuse femme, je me sens très affaibli ; je m'attends à mourir sous peu, et je m'en réjouis fort, si c'est le bon plaisir de Dieu. — Ne dites pas cela, s'écria la noble châtelaine ; quel malheur pour moi et pour tant d'autres qui tirons un si grand profit de vos exemples et de vos enseignements ! — Vous vous réjouiriez, répondit le saint Recteur, si vous aviez terrassé votre ennemi ; laissez-moi donc me réjouir de mon trépas ; car j'ai la confiance d'avoir, par la grâce de Dieu, vaincu mon adversaire."

 

Tel fut dans toute sa vie cet homme simple et fort, au milieu d'une population digne de le comprendre. Mais non seulement il commandait aux hommes ; la nature elle-même obéissait à sa voix ; et lorsque les prélats commis par le Souverain Pontife pour instruire la cause de sa canonisation, eurent à présenter dans le consistoire le résultat de leur enquête sur les lieux, ils déclarèrent que, sur le nombre des miracles avérés qu'ils avaient à constater, ils s'étaient contentés d'en recueillir cent dont ils apportaient les procès-verbaux.

 

Nous donnons ici les Leçons de l'Office de saint Yves, que nous avons empruntées au Propre de l'Eglise de Nantes : 

Yves, prêtre de Tréguier, était fils d'Hélorius et d'Hadone, tous deux de race noble. Dès son enfance, il se distingua par sa piété, visitant les églises soir et matin, et se montrant empressé à servir les prêtres et les autels. Sa pieuse mère l'exhortant un jour à tendre à la sainteté, il lui répondit qu'il n'avait pas d'autre désir. En effet, lorsqu'il lui arrivait de lire la Vie des saints, s'il y rencontrait quelque trait de perfection, il s'efforçait de l'imiter autant qu'il lui était possible.

 

Il fit ses premières études à Paris, et vint ensuite à Orléans pour s'y livrer à la théologie et au droit canonique. Fuyant le vin et la bonne chère, ainsi que tous les plaisirs, il domptait son corps par les austérités, en sorte qu'à cet âge si dangereux de la jeunesse il maintint son âme agréable à Dieu par une entière chasteté.

 

L'archidiacre de Rennes l'appela auprès de lui, et le chargea de rendre la justice en son nom. Yves fit paraître la plus rare intégrité dans cet office, ne portant jamais une sentence pénale sans verser des larmes, et s'efforçant toujours de concilier les parties entre elles. L'évêque de Tréguier l'établît officiai dans sa cour épiscopale ; mais Yves,après avoir exercé quelque temps cet emploi avec une grande distinction, désirant s'adonner avec plus de liberté à la contemplation des choses divines, se démit de son office, et se chargea du gouvernement de la paroisse de Tresdretz, d'où il fut appelé à celle de Lohanet, dont il demeura curé jusqu'à la fin de sa vie.

 

Il y vécut de la manière la plus frugale et la plus austère, vêtu d'un habit grossier qui couvrait un cilice. Son sommeil était court, il le prenait sur la terre nue ou sur des morceaux de bois étendus à terre, ayant pour chevet une Bible, ou d'autres fois une pierre. Il se levait à minuit pour réciter l'Office divin, célébrait la Messe chaque jour, à moins qu'il n'en fût empêché par de très graves affaires ou par la nécessite. Il portait dans cette sainte action au plus haut degré la pureté de conscience et la ferveur de l'esprit. Un jour, au moment où il élevait la sainte hostie afin que le peuple l'adorât, chacun la vit entourée d'un cercle de feu qui répandait une admirable splendeur. Son attrait pour l'oraison et la contemplation était si grand, que souvent il lui fit oublier de prendre sa nourriture. On le vit quelquefois passer la semaine entière dans sa chambre, fixé dans une oraison continuelle.

 

Sa libéralité envers les pauvres, son hospitalité à l'égard des étrangers, sa compassion pour les malades, étaient merveilleuses ; il servait chacun avec tout l'empressement de son âme. Il vouait tous ses efforts et consacrait son patronage à secourir les orphelins et les veuves dans leurs nécessités, et souvent il plaidait leurs causes dans les tribunaux, en sorte qu'on l'appelait volontiers le père et l'avocat des pauvres.

 

Non seulement il annonçait avec assiduité la parole de Dieu dans son église, mais il prêchait encore dans les paroisses environnantes. Un jour qu'il s'était mis en route pour remplir cette fonction, il trouva tout couvert d'eau un pont sur lequel il avait coutume de passer la rivière. Il fit le signe de la croix sur les eaux, qui s'écartèrent aussitôt pour le laisser passer, et revinrent dès qu il eut traversé le pont. Enfin, épuisé par ses pieux travaux, après avoir prédit le jour de sa mort, muni des sacrements, il s'endormit saintement dans le Christ, étant âgé de cinquante ans, le quatorze des calendes de juin, l'an du salut mil trois cent trois.

 

Il fut enseveli dans l'église de Tréguier, où l'on conserve encore aujourd'hui son chef avec vénération. Quarante-quatre ans après sa mort, il tut mis au nombre des Saints par Clément VI , à Avignon.

 

Puissant serviteur de Dieu, vous à qui la voix du peuple chrétien a décerné le beau nom d'Avocat des pauvres, écoutez l'humble prière des fidèles qui viennent aujourd'hui remettre entre vos mains la cause de leur salut. Vous avez été cher au Christ, "notre Avocat auprès du Père" parce que vous avez été comme lui le protecteur du faible contre l'oppresseur ; vous avez attiré sur vous les regards miséricordieux de Marie, que la sainte Eglise appelle "notre Avocate" ; plaidez maintenant en notre faveur en présence du fils et de la mère.

 

Votre charité si vive et si agissante ici-bas est plus ardente encore dans les cieux ; nous la réclamons en ce jour où vous avez quitté la terre de l'exil pour la patrie. Tant de prodiges opérés à votre glorieux tombeau montrent assez que vous êtes demeuré attentif et compatissant aux besoins des habitants de la terre. Nous vous demandons d'élever nos cœurs jusqu'à Jésus ressuscité que vos yeux contemplent maintenant, et vers lequel vous avez constamment aspiré ici-bas.

 

Obtenez que nous soyons affranchis comme vous des convoitises terrestres, et que nous aimions la justice comme vous l'avez aimée.

 

Inspirez aux magistrats qui recourent à vous le sentiment que vous éprouviez vous-même sur votre tribunal, en pensant à la suprême judicature du Christ qui doit, au dernier jour, réviser toutes les sentences de la terre.

 

Suscitez des défenseurs qui plaident la cause de l'opprimé, non pour un vain renom d'éloquence ou pour un intérêt mondain, mais pour rendre hommage au bon droit.

 

Aimez toujours, ô grand Yves, la noble terre qui vous a produit pour l'Eglise et pour le ciel. Jusqu'ici votre protection l'a maintenue catholique et fidèle ; en retour du culte fervent et patriotique dont elle vous honore, demandez au Seigneur qu'il lui conserve la foi, qu'il la préserve de la séduction, qu'il la maintienne ferme et loyale dans un temps où les caractères défaillent parce qu'ils sont moins chrétiens. La Bretagne est demeurée votre héritage ; ne la laissez pas déchoir.

 

DOM GUÉRANGER
L'Année Liturgique
 

 

Saint Yves

SAINT YVES ENTRE LE RICHE ET LE PAUVRE Eglise de Minihy-Tréguier 

 

Près de Tréguier en Bretagne, l’an 1303, saint Yves, prêtre, qui, dans sa charge d’officiel, rendit la justice sans faire acception de personnes, favorisa la concorde, défendit pour l’amour du Christ les causes des orphelins, des veuves et des pauvres et accueillit chez lui les miséreux.
Martyrologe romain

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18 mai 2011 3 18 /05 /mai /2011 19:00

En terminant notre excursion à travers les oeuvres de la peinture consacrées à sainte Cécile par les artistes du quinzième siècle, nous devons remarquer ici, à propos des deux volets peints par Jean de Bruges, que c'est seulement de ce siècle que date l'usage de peindre la sainte avec un instrument de musique.

 

 Depuis, cet accessoire est devenu comme obligé dans toutes les représentations de sainte Cécile, qui n'ont pas pour objet d'exprimer quelque trait particulier de sa vie ; jusqu'alors, le symbole de la musique n'apparaît nulle part comme attribut spécial de la martyre. Une tradition qui n'a rien d'historique est sortie insensiblement de cette pratique devenue comme universelle, et il existe une suite d'auteurs se copiant tous les uns les autres, qui ont répété que sainte Cécile était une très forte musicienne, qui s'accompagnait des instruments dans le chant des louanges de Dieu. Assurément il serait téméraire d'affirmer qu'il n'en a pas été ainsi ; mais les Actes, document unique sur la vie de l'illustre matrone romaine, n'en parlent ni directement, ni indirectement. Doit-on pour cela voir un inconvénient dans un poétique préjugé issu de la liberté qu'ont eue de tout temps les artistes de suivre les élans de leur génie, conjointement avec les données de l'bistoire ? Ce n'est pas nous assurément qui aurons la barbarie d'improuver cette innocente nouveauté, qui, par le laps de temps, n'en est déjà plus une.

 

On voit évidemment que les peintres ont été entraînés à cette licence par les premières paroles de l'Office de sainte Cécile, extraites des Actes : Cantantibus  organis, Caecilia Domino decantabat. Il est vrai que les organa dont il est ici question n'étaient rien moins qu'un concert spirituel. On a vu ci-dessus par le récit qu'il s'agit des accords profanes qui retentissaient dans la salle du festin nuptial, au milieu des pompes du mariage de Valérien et de Cécile. Les Actes continuant le récit nous apprennent que Cécile se dérobait à tout ce fracas, en chantant silencieusement dans son coeur, in corde suo, un verset de David, par lequel elle demandait à Dieu d'être assistée de son secours dans la lutte qui allait bientôt s'ouvrir pour elle. Le chant de Cécile était donc d'une nature toute différente de celui qu'entendaient les convives, et sa mélodie bien supérieure à tous les concerts de la terre. C'est cette supériorité qui dans le principe a inspiré aux artistes l'heureuse idée de représenter Cécile avec les attributs de la reine de l'harmonie et l'Eglise a béni cette pensée.

 

Le plus séduisant de tous les arts, celui qui complète par son concours les hommages que la terre rend à Dieu, n'avait-il pas droit de recevoir pour patronne celle qui dès ici-bas sut dépasser les concerts de la terre, et réaliser dans son coeur l'union avec les concerts immatériels des esprits angéliques ? L'apôtre ne nous enseigne-t-il pas que le chrétien ne doit pas se borner à prier, mais encore qu'il doit chanter à Dieu dans son coeur : Cantantes et psallentes in cordibus vestris Domino (Ephes., V) ; et n'est-ce pas un indice de l'abaissement du sentiment chrétien, que le mutisme d'une âme, qui semble n'avoir plus besoin du chant pour compléter la prière, et lui donner sa forme supérieure ? Les saintes Ecritures, formule inspirée de notre prière à Dieu, ne sont que chant et poésie ; mais qu'il est petit le nombre de ceux qui aujourd'hui ont recours aux Psaumes, comme le fit à ce moment Cécile, pour louer le Seigneur et lui demander ce qu'ils désirent !

 

L'auteur contemporain de la vie de sainte Catherine de Sienne nous apprend combien cette admirable sainte avait présente dans son souvenir la situation de Cécile en ce moment solennel, et comment, pour obtenir le secours céleste, elle recourait avec transport à cette même strophe du roi-prophète que Cécile avait chantée dans son coeur. Il n'y a donc rien à retrancher dans l'acclamation de la terre vers Cécile, lorsqu'elle la célèbre comme la musicienne par excellence ; il suffit seulement de ne pas aller chercher la raison de cette attribution dans un fait qui n'a pas de fondement historique, et de saisir la relation délicate entre les deux musiques dont Cécile est devenue le lien merveilleux. Ce caractère manquait encore à l'ensemble de ses grandeurs, et la Providence divine a voulu qu'un jour il lui fût attribué pour durer jusqu'à la fin des siècles. Aujourd'hui encore, malgré la froideur universelle et l'abaissement de l'art, la fête de sainte Cécile ne passe point inaperçue, partout où la musique est l'objet d'un intérêt plus ou moins sérieux.

 

Dans ces concerts annuels qui ramènent au pied des autels tant d'hommes entraînés le reste de l'année par les préoccupations mondaines, les chefs-d'oeuvre peuvent être rares, l'exécution défectueuse,  les motifs ou insignifiants,  ou trop souvent empruntés à des sources profanes ; mais il sera toujours beau de voir le plus séduisant des arts amené, chaque année, à confesser que le sentiment supérieur de l'harmonie émane de la pureté du coeur et des sens, si divinement symbolisée dans Cécile.  C'est alors que, dans plus d'une âme, l'attrait céleste cherche à pénétrer, qu'il sollicite l'homme d'aspirer à des concerts plus harmonieux et plus durables que ceux de ce monde de douleurs, où le péché brisa les cordes de la lyre, qui ne se sont jamais rejointes que par instants fugitifs, et qui ne résonnent d'un son plein et parfait que lorsque l'homme les emploie à célébrer, son Créateur, de concert avec les esprits angéliques.

 

Mais il est temps de rentrer dans Rome et d'y glaner encore quelques traits de l'histoire de notre héroïne, qui se rapportent au quinzième siècle. Nous voyons, dans les dernières années de ce siècle, le cardinal Laurent Cibo, neveu d'Innocent VIII, titulaire de la basilique, comme l'avait été son oncle, y entreprendre d'importantes restaurations. Entre autres, il fit réparer à neuf la chapelle du Bain, où l'on voit encore aujourd'hui ses armes ; mais il respecta l'autel et le pavé de cet auguste sanctuaire, qui ont conservé jusqu'aujourd'hui le caractère du moyen-âge.

 

Nous ne pouvons terminer ce chapitre sans jeter un coup d'ceil attristé sur les catacombes romaines, qui depuis des siècles ne comptaient plus, pour ainsi dire, parmi les sanctuaires de la ville sainte. L'enlèvement des corps des martyrs au neuvième siècle et leur translation dans les basiliques de la ville, avaient peu à peu éteint le pieux intérêt dont Rome souterraine fut si longtemps l'objet. En perdant les martyrs, elle avait perdu ses trésors. Ses nombreuses cryptes n'auraient pu se maintenir qu'au prix de réparations continuelles, et nous avons vu qu'un des motifs qui portèrent les papes du huitième et du neuvième siècle à en retirer les saintes reliques, fut en particulier l'état de délabrement dans lequel ces immenses souterrains étaient tombés. Les ruines s'accumulèrent d'année en année, et, de toutes parts, des éboulements vinrent intercepter les voies. Une sorte de terreur semblait planer sous ces voûtes que les pèlerins ne visitaient plus.

 

A peine demeura-t-il quelque quartier très restreint qu'un reste de dévotion fréquentait encore, au voisinage d'un petit nombre de basiliques situées hors les murs. Les troubles politiques dont Rome ne cessa d'être le théâtre depuis le dixième siècle jusqu'à la fin du moyen âge, y rendaient d'ailleurs l'existence des papes trop précaire, pour qu'il leur fût possible d'entreprendre de grands travaux. La nomenclature des cimetières s'était cependant conservée ; mais avec le temps, des confusions inévitables s'y introduisirent.

 

Nulle part cet inconvénient ne fut plus sensible que sur la voie Appienne, si riche de souvenirs chrétiens, et sur les deux côtés de laquelle s'étendaient les plus célèbres hypogées. On en vint jusqu'à perdre la notion du lieu où était situé le cimetière de Calliste. Quelques galeries cémétériales étaient demeurées accessibles autour de la basilique de Saint-Sébastien, non loin du célèbre puits où avaient été cachés les corps des saints apôtres. On voulut y voir l'oeuvre de Calliste, et peu à peu, à l'aide du Liber pontificalis mal compris, une crédulité inventive alla jusqu'à assigner dans ces corridors vulgaires la place et les noms de chacun des papes qu'on savait avoir reposé sur la voie Appienne. Les Bollandistes ont publié, à ce sujet, un curieux document qui nous apprend comment ces arrangements étaient encore entendus dans le cours du seizième siècle. (Acta SS., t. III Aprilis.)

 

Naturellement, il avait bien fallu découvrir une alvéole pour l'assigner à Cécile, que l'on savait, par les Actes, avoir été ensevelie près des pontifes. Cette assignation était déjà faite en 1409. Guillaume de Bois-Ratier, archevêque de Bourges, se trouvant à Rome en cette même année, descendit dans les cryptes de Saint-Sébastien, et, trouvant sans honneurs cette tombe qu'on lui disait avoir gardé durant six siècles le corps de la grande martyre, il fit décorer à ses frais ce sépulcre abandonné. Le temps a détruit le monument que la piété de Guillaume y avait élevé à Cécile ; mais l'inscription qu'il y plaça est demeurée jusqu'à nos jours. On y lit ces paroles :

 

HIC   QVONDAM   RECONDITVM

FVIT   CORPVS   BEATAE   CAECILIAE

VIRGINIS   ET   MARTYRIS

HOC   OPVS   FECIT   FIERI   REVERENDISSIMVS

PATER   DOMINVS   GVILLELMVS   ARCIEPS
BITVRICENSIS   ANNO   DOMINI   MCCCC   NONO

 

Cette inscription devait contribuer à égarer de plus en plus l'opinion sur la véritable topographie de Rome souterraine. Qui jamais eût songé, avant ces années de notre siècle, où l'archéologie chrétienne rend chaque jour de si éminents services aux antiquités ecclésiastiques, à dresser la topographie des divers cimetières, à rechercher sur chaque voie les centres historiques, en un mot à refaire Rome souterraine ? Qui songeait à consulter les fioles de Monza comme une carte routière des catacombes, même après que le savant Marini eut publié le diplôme de l'abbé Jean dans ses Papiri diplomatici (1805) ? Les Itinéraires des pèlerins qui se succèdent à partir du septième siècle, gisaient incompris dans de savants recueils ; mais qui pensait à leur consacrer un intérêt quelconque ? Sur la voie Appienne, les éboulements avaient rendu inaccessible le centre même de Rome souterraine, la crypte papale et le cubiculum de Cécile.

 

Si parfois les excavateurs à la recherche des corps saints ont traversé ces lieux, leur passage fut sans nulle conséquence, et bientôt les terres qu'il fallait déplacer pour passer d'une galerie explorée à une autre qui ne l'était pas, venaient fermer toute communication avec les vénérables sanctuaires dont nous jouissons aujourd'hui. Pour n'avoir pas su employer les secours dont nous venons de parler, les plus savants voyageurs dans Rome souterraine, malgré leur science réelle, ne purent jamais se démêler sur la voie Appienne. Bosio en est venu jusqu'à confondre le magnifique cimetière de la voie Ardéatine avec celui de Calliste, et des hommes tels que Boldetti et Marangoni n'ont pu sortir des difficultés inextricables que leur présentait une question dont ils n'avaient pas tous les termes. Sans une topographie appuyée sur les faits, la vie de sainte Cécile ne pouvait être exactement racontée, et nous tenons à exprimer ici à M. de Rossi la reconnaissance personnelle que lui a vouée l'humble historiographe de l'illustre romaine.

 

Le seizième siècle qui, dans ses dernières années, devait offrir un si glorieux triomphe à Cécile par la nouvelle translation de sa dépouille mortelle, se montra, dès le début, empressé de continuer par les arts le concert d'hommages que lui avait offert le siècle précédent.

 

DOM GUÉRANGER

SAINTE CÉCILE ET LA SOCIÉTÉ ROMAINE AUX DEUX PREMIERS SIÈCLES (pages 314 à 323)

 

Cecilia

SAINTE CÉCILE - Santa Cecilia in Trastevere, Rome

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18 mai 2011 3 18 /05 /mai /2011 10:00

La palme du martyre n'a pas été conquise par ce saint pape dans une victoire remportée sur quelque prince païen ; il l'a gagnée en luttant pour la liberté de l'Eglise contre un roi chrétien. Mais ce roi était hérétique, et par conséquent ennemi de tout pontife zélé pour le triomphe de la vraie foi. La situation du vicaire de Jésus Christ ici-bas est une situation de lutte, et souvent il arrive qu'un pape est véritablement martyr sans avoir versé son sang.

 

Saint Jean Ier, que nous honorons aujourd'hui, n'a pas succombé sous le glaive ; un indigne cachot a été l'instrument de son martyre ; mais bien d'autres pontifes brilleront au ciel en sa compagnie, sans avoir même porté le poids des chaînes : le Vatican a été leur Calvaire. Ils ont vaincu et ils ont succombé sans éclat, laissant au ciel le soin de venger leur cause : tel fut entre autres l'angélique Clément XIII au siècle dernier.

 

Celui qui paraît aujourd'hui sur le Cycle exprime dans sa conduite la pensée qui doit inspirer tout membre de l'Eglise, s'il est digne de sa mère. Saint Jean Ier nous apprend que nous ne devons jamais pactiser avec l'hérésie, ni prendre part aux mesures qu'une politique mondaine croit devoir instituer pour lui assurer des droits. Si les siècles, aidés de l'indifférence religieuse des  gouvernements, ont légué la tolérance et même le privilège de l'égalité aux sectes qui ont rompu avec l'Eglise, nous pouvons subir cette situation qui est la plus grave atteinte à la constitution chrétienne d'un Etat ; mais notre conscience catholique nous interdit de la louer et de la considérer comme un bien. En quelque condition que la divine Providence nous ait placés, nous n'en devons pas moins puiser nos inspirations dans la foi de notre baptême, dans l'enseignement et dans la pratique infaillibles de l'Eglise, hors desquels il n'y a que contradiction, péril et naufrage.

 

La sainte Liturgie consacre aujourd'hui ces lignes à l'éloge des vertus et de la constance de saint Jean Ier : 

Jean, né dans l'Etrurie, gouverna l'Eglise sous l'empire de Justin l’Ancien. Il fit le voyage de Constantinople pour implorer le secours de ce prince, dans un moment où le roi hérétique Théodoric persécutait l'Italie.

 

Dieu illustra par des miracles le voyage du pontife. Un homme de condition lui prêta pour se rendre à Corinthe le cheval dont sa propre femme se servait. Il arriva que cette bête, qui avait été jusqu'alors de la plus grande douceur, ayant été rendue après que le pontife s'en fut servi, se montra désormais furieuse et agitée de mouvements violents chaque fois que sa maîtresse voulut la monter, et qu'elle la jeta par terre plusieurs fois, comme si elle se fût indignée de porter une femme, après avoir été montée par le vicaire de Jésus-Christ ; ce qui fut cause que le mari et la femme en firent hommage au pontife.

 

Mais un prodige plus grand eut lieu à Constantinople à l'entrée de la porte dorée, lorsque le saint Pape rendit la vue à un aveugle, sous les yeux d'un peuple immense qui, ainsi que l'empereur, était accouru par honneur au-devant du pontife. Ce prince se prosterna à ses pieds pour lui rendre l'hommage de sa vénération. Les affaires étant réglées avec l'empereur, Jean retourna en Italie, et envoya aussitôt à tous les évêques de ce pays l'ordre de consacrer au service catholique les Eglises des ariens. Il ajoutait ces paroles : "Nous-même, durant le séjour que nous avons fait à Constantinople pour l'intérêt de la religion catholique et pour les affaires du roi Théodoric, nous avons consacré dans ce pays comme Eglises catholiques toutes celles que nous avons trouvées en la possession des hérétiques".

 

Théodoric fut irrité de cette conduite ; il attira par ruse le pontife à Ravenne, et le fit jeter en prison. L'insalubrité du lieu et les dures privations que Jean y subit achevèrent sa vie en peu de jours. Il avait siégé deux ans, neuf mois et quatorze jours, et avait ordonné durant ce temps quinze évêques.

 

Théodoric mourut peu après ; et saint Grégoire raconte à son sujet qu'un pieux anachorète avait vu ce prince en présence du pape Jean et du patricien Symmaque, qu'il avait aussi fait mourir, et que Théodoric avait été jeté dans le cratère de Lipari ; en sorte que ces deux hommes de la mort desquels il était coupable étaient ses juges et le condamnaient. Le corps de Jean fut rapporté de Ravenne à Rome, et on l'ensevelit dans la Basilique de Saint-Pierre.

 

Vous avez cueilli la palme, saint Pontife, en confessant la sainteté immaculée de l'Eglise. Cette Epouse du Fils de Dieu "n'a ni tache ni ride", comme nous dit l'Apôtre ; et c'est pour cela qu'elle ne peut habiter avec l'hérésie dans la terre que son Époux divin lui a assignée en dot.

 

Des jours sont venus où les hommes, épris des calculs et des intérêts de ce monde passager, ont résolu de régler la société humaine sans plus tenir compte des droits du Fils de Dieu, de qui procède tout ordre social comme toute vérité. Ils ont refoulé l'Eglise dans le cœur de ses fidèles, et se sont complus à élever de toutes parts des temples pour les sectes qui se sont révoltées contre elle. Le catholique Mexique a vu s'accomplir cet attentat au grand jour, et Dieu ne l'a pas laissé sans vengeance. Saint Pontife, réveillez dans les cœurs des chrétiens d'aujourd'hui le sentiment du droit imprescriptible de la vérité divine. Nous pourrons alors nous abaisser devant les nécessités imposées par le triomphe fatal de l'erreur, dans l'âge qui nous a précédés, sans accepter comme un progrès l'égalité que l'on affecte d'établir entre l'erreur et la vérité.

 

Dans votre prison, vaillant martyr, vous avez proclamé le droit de l'Eglise unique ; au milieu de la défection prédite par l'Apôtre (1. II Thess. II, 3.), gardez-nous des lâches complaisances, des entraînements funestes, de la légèreté coupable qui fait tant de victimes en ces jours ; et que notre dernière parole, au sortir de ce monde, soit celle que le Fils de Dieu a daigné nous apprendre lui-même : "Ô vous qui êtes notre père, que votre Nom soit sanctifié, que votre règne arrive !"

 

 DOM GUÉRANGER
L'Année Liturgique

 

Gradual (fragment) The initial B on this leaf enclosing The Trinity

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18 mai 2011 3 18 /05 /mai /2011 04:00

Le martyr d'aujourd'hui nous reporte aux persécutions des empereurs romains. C'est en Italie, à Camerino, qu'il a rendu son témoignage. Accueillons avec joie ce nouveau champion de notre Emmanuel, et félicitons-le d'avoir soutenu loyalement le combat, en ces jours du Temps pascal, tout retentissants de la victoire que la vie a remportée sur la mort.

 

 Le récit que la Liturgie a consacré aux mérites de saint Venant étincelle de prodiges. Plus d'une fois la puissance de Dieu a semblé faire assaut avec la fureur des bourreaux, afin de glorifier leurs victimes. Ces moyens merveilleux servaient à la conquête des âmes, et souvent les témoins de ces miracles qui sembleraient superflus, s'écriaient tout à coup qu'eux aussi voulaient être chrétiens, et donnaient leurs noms à une religion aussi favorisée du ciel qu'illustrée par la patience surhumaine de ses martyrs.

 

 Venant, né à Camérino, n'était âgé que de quinze ans, lorsqu'il fut accusé d'être chrétien devant Antiochus, qui était gouverneur de la ville sous l'empire de Décius. Il se présenta lui-même près des portes de la ville à ce magistrat qui, après l'avoir tenté longtemps, mais inutilement, par les promesses et les menaces, le fit fouetter et charger de chaînes. Le saint ayant été délié miraculeusement par un Ange, on le brûla avec des torches ardentes, et on le suspendit la tête en bas, pour recevoir la fumée d'un feu qu'on avait allumé sous lui. Le greffier Anastase, saisi d'admiration pour la constance du saint dans les tourments, et surpris de le voir délié une seconde fois par l'Ange et marchant au-dessus de la fumée avec un habit blanc, crut en Jésus-Christ, et se fit baptiser, ainsi que sa famille, par le bienheureux prêtre Porphyre, dans la compagnie duquel il remporta, peu de temps après, la palme du martyre.

 

 Venant fut de nouveau amené devant le gouverneur, qui l'ayant encore sollicité en vain d'abandonner la foi du Christ, le fit reconduire en prison. Là il lui envoie un héraut nommé Attale, qui vient dire au martyr que lui aussi a été chrétien, mais qu'il a renoncé à cette profession, parce qu'il a reconnu la vaine illusion de cette foi, au nom de laquelle les chrétiens se privent des biens présents dans l'espérance d'autres biens futurs qui ne sont pas réels. Mais le noble athlète du Christ, qui n'ignorait pas les embûches de notre perfide ennemi, rejeta bien loin ce ministre du diable. Il  fut donc ramené devant le président, par ordre duquel on lui cassa toutes les dents, et on lui rompit les mâchoires ; après quoi on le jeta sur un fumier. Ayant encore été tiré de là par un Ange, on le fit comparaître de nouveau devant le juge qui, à la voix de Venant, tomba de son siège, et expira en poussant ce cri : "Le Dieu de Venant est le vrai Dieu ; il faut renverser les nôtres".

 

 Cette nouvelle ayant été portée au gouverneur, il fit aussitôt exposer Venant aux lions ; mais ces animaux, oubliant leur cruauté naturelle, se jetèrent à ses pieds. Comme le saint profitait de la circonstance pour enseigner au peuple la foi de Jésus-Christ, on l'enleva et on le reconduisit en prison. Le lendemain, Porphyre ayant raconté au gouverneur une vision qu'il avait eue durant la nuit, et dans laquelle il avait vu Venant tout éclatant de lumière et administrant le baptême au peuple, tandis que le gouverneur était couvert d'un brouillard épais et ténébreux, celui-ci, transporté de colère, lui fit aussitôt trancher la tête, et ordonna que l'on traînât Venant jusqu'au soir par des lieux couverts de buissons épineux et de chardons. On le laissa à demi mort après ce supplice ; mais le lendemain matin il se présenta encore au gouverneur, qui le fit aussitôt précipiter du haut d'un rocher. Ayant encore été sauvé miraculeusement, on le traîna de nouveau jusqu'à un mille de la ville par les plus rudes sentiers. Les soldats eurent soif ; Venant s'agenouilla sur une pierre dans une vallée, et en fit sortir de l'eau par le signe de la Croix. Il laissa sur cette pierre la marque et la forme de ses genoux, ainsi qu'on peut le voir encore dans son église, où elle est conservée. Touchés de ce miracle, plusieurs des soldats crurent en Jésus-Christ. Le gouverneur leur fit trancher la tête, ainsi qu'à Venant lui-même, dans le lieu du prodige. Aussitôt des éclairs sillonnèrent le ciel, et il se fit un si terrible tremblement de terre, que le gouverneur prit la fuite ; mais il ne put se dérober à la justice divine, et il périt peu de jours après d'une mort très honteuse. Cependant les chrétiens ensevelirent dans un lieu honorable le corps de Venant et ceux de ses compagnons, lesquels reposent encore aujourd'hui à Camérino, dans l'église dédiée au saint martyr.

 

 Priez pour nous, jeune martyr, vous que les saints Anges aimaient, et qu'ils assistèrent dans le combat ! Comme vous, nous sommes les soldats du divin Ressuscité, et comme vous nous sommes appelés à rendre témoignage de sa divinité et de ses droits en présence du monde. Si le monde n'est pas toujours armé d'instruments de torture comme aux jours de vos luttes, il n'est pas moins redoutable par ses séductions. A nous aussi il voudrait ravir cette vie nouvelle que Jésus a communiquée à ses membres ; défendez-nous de ses atteintes, ô Martyr !

 

La divine chair de l'Agneau vous avait nourri dans les jours de la Pâque, et la force qui a paru en vous était toute à la gloire de ce céleste aliment. Nous nous sommes assis à la même table ; veillez sur tous les convives du festin pascal. Ainsi que vous, nous avons connu le Seigneur dans la fraction du pain : obtenez-nous l'intelligence du divin mystère dont nous reçûmes les prémices en Bethléhem, et qui s'est développé sous nos yeux et en nous-mêmes par les mérites de la Passion et de la Résurrection de notre Emmanuel.

 

D'autres merveilles nous attendent ; nous ne sortirons pas de la saison pascale sans avoir été initiés à la plénitude du don divin de l'Incarnation.

 

Obtenez, ô saint Martyr, que nos cœurs soient ouverts de plus en plus, et qu'ils gardent fidèlement tous les trésors que les augustes mystères de l'Ascension et de la Pentecôte doivent encore verser en eux.

 

DOM GUÉRANGER
L'Année Liturgique

 

Vierge à l'Enfant, Tryptique de Camerino

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17 mai 2011 2 17 /05 /mai /2011 19:00

Deux ans auparavant, le 17 septembre 1073, Hubald, évêque de Sabine, avait dédié l'autel renouvelé, dans la salle du bain où Cécile fut couronnée martyre. Nous prenons acte de cette particularité qui maintient la tradition sur un lieu si sacré.

 

 Un souvenir de Cécile, qui se rapporte également au onzième siècle, se rencontre à Monte Gargano, dans la Pouille. La célèbre grotte qui est le sanctuaire principal du grand arcbange Michel dans l'Occident, est fermée par de magnifiques portes en bronze qui furent exécutées à Constantinople en 1076, aux frais d'un pieux personnage, nommé Pantaleone. Elles sont divisées en vingt-quatre panneaux, tous consacrés à la gloire des saints anges, et sur lesquels sont retracés les faits bibliques qui ont rapport à l'intervention de ces esprits bienheureux en faveur des hommes. Pour compléter la série, l'artiste bizantin a eu recours aux Actes des martyrs, et sur le vingt-quatrième panneau, il a représenté l'ange couronnant Cécile et Valérien, après le baptême de ce dernier. (Dantier, Les Monuments normands en Italie et en Sicile.)

 

Le douzième siècle est représenté par une peinture murale que l'on voit à Rome, dans une crypte située sous la basilique de Saint-Laurent-hors-les-Murs. Sainte Cécile y est peinte, la couronne en tête ; elle a pour pendant sainte Catherine. Cette fresque a été reproduite en couleur dans la collection des peintures des catacombes, publiée par le gouvernement français, sur les dessins de M. Perret.

 

Au treizième siècle, le 15 août 1282, Bernard de Chatenet, évoque d'Alby, posait la première pierre de son église cathédrale, l'une des plus étonnantes productions de l'architecture ogivale en France, et le plus imposant des monuments élevés à la gloire de Cécile. L'église antérieure était déjà sous son vocable, et elle n'est pas la seule cathédrale qui ait été élevée sous le nom de la vierge romaine. En Allemagne, celle de Werden s'honore pareillement de ce glorieux patronage. (CAHIER, Caractéristiques des Saints.)

 

Construite en brique et noircie par le temps, terminée à l'extrémité occidentale par une immense tour qui s'élève sur quatre galeries, à 4 00 pieds au-dessus du niveau des eaux du Tarn, Sainte-Cécile d'Alby, avec son aspect sévère, ses lignes sans agrément, et ses murs qui montent à 115 pieds de hauteur, sans autres saillies que des contre-forts arrondis en tourelles, semble d'abord une forteresse redoutable, plutôt qu'un temple consacré à la gracieuse vierge dont elle porte le nom. Mais dès qu'on a franchi le riche porche flamboyant accolé au flanc droit de l'édifice, il ne paraît point au-dessous de l'honneur auquel il a été appelé, d'être le radieux sanctuaire de la reine de l'harmonie. Ce vaste édifice, sans piliers et sans transept, qui lance l'ogive de ses voûtes à la hauteur de 92 pieds au-dessus du pavé, et autour duquel rayonnent vingt-neuf chapelles, semble s'animer aux yeux du pèlerin, non seulement par le jeu élégant et grandiose de ses arcs et de ses voûtes, mais encore par la concentration dans son enceinte des deux grands moyens de la statuaire et de la peinture, dont l'emploi, combiné avec la construction même, fait de cet édifice l'église la plus complète qui s'élève en deçà des Alpes.

 

Au point de vue architectonique, on ne saurait trop admirer l'art merveilleux avec lequel sont fondus dans une même oeuvre les développements qu'a suivis le style ogival du treizième siècle au quinzième, sans que la moindre incorrection, une transition heurtée, viennent offenser le goût en altérant la grâce et la pureté des lignes. Un admirable jubé posé, pour ainsi dire, sur le pavé et percé de cinq ouvertures, arrête la vue aux deux tiers de la nef, et ménage, pour une seconde surprise, la magnificence imprévue d'un choeur digne de compléter un tel édifice. Derrière cette riche clôture, le choeur se développe à l'aise, circonscrit par un pourtour très orné qui laisse un espace suffisant au développement des collatéraux factices, dont l'illusion est complète.

 

La construction de cet ensemble dura deux siècles, et l'oeuvre fut successivement reprise par les évêques Berald de Falguès, Jean de Sayo, Guillaume de la Voulte, et enfin Louis d'Amboise, qui célébra la dédicace le 23 avril 1480. Nous parlerons plus loin des peintures qui décorent cet admirable édifice ; quant à la sculpture, c'est principalement au quinzième siècle qu'elle s'appliqua à produire sa part dans l'ornementation ; mais son triomphe fut la décoration du jubé et du choeur. A l'intérieur de celui-ci, le sculpteur a conçu et réalisé l'idée d'un vaste concert d'anges, distribués à chacune des stalles, tous ayant des instruments de musique et exécutant la louange divine. Au centre et au-dessus de la porte principale, par laquelle le jubé communique avec la nef, sous un dais richement sculpté, parée des atours d'une grande dame du quinzième siècle, Cécile, la reine de l'harmonie, supportant un petit orgue dans sa main gauche, préside au concert ; mais, comme au festin des noces, la mélodie céleste que son âme perçoit l'enlève au charme de la musique d'ici-bas, toujours imparfaite ; elle renverse la tête en arrière, et l'on sent qu'elle va défaillir dans l'extase. Cette statue de petite dimension, remplie de naïveté et admirablement belle, est regardée avec raison comme le principal morceau de sculpture de la merveilleuse cathédrale.

 

Pour revenir au treizième siècle, dont les décorations de ce somptueux édifice nous ont un peu écarté, il nous faut parler du cardinal Jean Cholet, évêque de Beauvais, qui posséda à Rome le Titre de Sainte-Cécile. En 1283, son zèle pour le culte de la grande martyre le porta à reconstruire avec magnificence l'autel de la Confession, qui avait été consacré deux siècles auparavant par saint Grégoire VII. Sauf les décorations qu'il reçut à la fin du seizième siècle et dont nous parlerons bientôt, cet autel est celui qui existe encore aujourd'hui. On y lit toujours l'inscription que Jean Cholet y plaça à la fin du treizième siècle. Elle est ainsi conçue :

 

HOC  OPVS FECIT ARNVLFVS   ANNO MCCLXXXIII

 

Vasari pense que cet Arnulphe est le célèbre architecte Arnolfo di Lapo. L'ornementation de l'autel consiste en un riche travail de mosaïque qui a pour centre une vaste plaque du beau marbre violet connu sous le nom de Paonazzetto. L'oeuvre d'Arnolfo se complète par un ciborium, formé de quatre colonnes de ce marbre noir, tacheté de blanc, que les Italiens nomment Preconesio.

 

Le même siècle vit fleurir le célèbre peintre Cimabué, qui, parmi ses oeuvres devenues si rares, nous a laissé un tableau sur bois en l'honneur de sainte Cécile. Cette peinture, destinée à une église de Florence autrefois dédiée à la sainte et détruite depuis, passa à celle de Saint-Etienne, d'où elle a été transférée au musée, en 1844. Cimabué a représenté Cécile, assise sur une chaire, dans toute la solennité des mosaïques byzantines. Celte grande figure, ornée d'un voile et enveloppée dans une large draperie bleu foncé, a la main appuyée sur le livre des Evangiles et tient de l'autre une palme. Huit petits sujets, empruntés aux Actes, accompagnent comme encadrement la figure principale. On voit par cette représentation que le treizième siècle n'avait pas encore assigné d'attributs particuliers à sainte Cécile.

 

Rome nous offre aussi d'anciennes peintures relatives à l'histoire de sainte Cécile, dans l'église de Saint-Urbain, à la Caffarella, dernier débris du pagus Triopius. Ces peintures se rapportent au treizième siècle, et ont paru assez importantes à d'Agincourt pour mériter d'être reproduites dans son grand ouvrage, où malheureusement elles sont par trop réduites. Nous rapportons au treizième siècle, et non au neuvième, comme on l'a fait trop légèrement, les intéressantes peintures à compartiments qui ornaient autrefois le portique de la basilique de Sainte-Cécile, et dont une seule a été sauvée. Les autres ne sont plus connues que par les dessins qu'on eut soin d'en prendre avant qu'elles eussent totalement péri, et qui se conservent dans la bibliothèque Barberini. Les gravures qu'en publia Bosio dans son édition des Actes de sainte Cécile sont très imparfaites. La fresque conservée jusque aujourd'hui et transportée dans la basilique, représente dans un même encadrement la sépulture de la vierge par saint Urbain, et son apparition à saint Paschal ; cette dernière partie est d'une naïveté pleine de grâce. La mitre et, plus encore, le pluvial du pontife ne permettent pas d'assigner l'époque de cette peinture avant le treizième siècle,  et nous ne nous disputerions pas avec ceux qui croiraient devoir la descendre jusqu'au quatorzième.

 

 S'il nous reste peu de monuments des arts à l'honneur de sainte Cécile au quatorzième siècle, le quinzième,  en revanche,  montre les grands artistes de  cette  époque,   si  glorieuse  pour  la peinture chrétienne, consacrant à l'envi leur pinceau à sa gloire. 

 

Le Couronnement de la Vierge

Le Couronnement de la Vierge par Fra Angelico, Musée du Louvre

Nous devons mentionner à leur tête l'angélique Jean de Fiesole, Fra Giovanni da Fiesole ou Fra Angelico, qui a su donner une place si distinguée à la vierge romaine dans le  groupe des saints,  qui  est comme  la frange de son beau tableau du Couronnement de la Madone,  au musée  du  Louvre.

 

L'immortel artiste n'a pas laissé de composition tant soit peu étendue sur sainte Cécile ; mais il est aisé de reconnaître que le type de la sainte martyre lui était familier, et qu'il l'eût traité avec son inspiration ordinaire,  si l'occasion s'en  fût offerte. Nous n'avons qu'une peinture de lui où sainte Cécile est traitée de face, et elle fait vivement regretter qu'un tel sujet n'ait pas été plus souvent réclamé de ses pinceaux.

 

Sur un reliquaire peint pour l'église de Santa-Maria-Novella, à Florence, il a représenté l'Annonciation et l'Adoration des Mages, et au-dessous,  comme support à ce tableau, étaient placées dix petites figures de saintes, entre lesquelles il faut compter la Madone. Il y a sainte Catherine de Sienne, sainte Apolline, sainte Marguerite, sainte Lucie, sainte Marie-Magdeleine, sainte Agnès, sainte Cécile, sainte Dorothée et sainte Ursule (Cartier, Vie de frà Angelico de Fiesole). Il nous eût coûté de ne pas signaler au moins cet hommage rendu à notre héroïne par le prince de la peinture chrétienne au quinzième siècle.  

 

Le Retable de L'Agneau Mystique par van Eyck 

Son contemporain, le chef de l'école de Bruges, Jean Van Eyck, a laissé deux petits volets peints selon sa manière naïve, et représentant, l'un d'eux, sainte Cécile au clavier d'un orgue, et l'autre, un groupe de saintes chantant la louange divine.

 

Nous eussions été heureux de pouvoir décrire aussi la série des fresques sur l'histoire de sainte Cécile que Taddeo Bartolo avait peintes dans l'église de Saint-Dominique à Pérouse. Elles ont péri sans qu'il en soit demeuré la moindre trace.

 

Mais nous ne devons pas omettre de parler d'une charmante fresque du même temps conservée à Rome dans la sacristie de l'église de Santa-Maria del divino Amore, qui fut autrefois celle de Sainte-Cécile de Domo. Cette fresque représente le couronnement de Cécile et de Valérien par l'ange. Tiburce et Urbain, vêtu en pape, accompagnent la scène. Une impression de piété et de paix règne sur tout l'ensemble, et rappelle, quelle que soit la différence du pinceau, ces merveilles de recueillement et de placidité que savait produire celui d'Angélique de Fiesole.

 

Pinturicchio voulut être à son tour un des peintres de l'illustre vierge. Il est resté de lui un petit tableau, conservé au musée de Berlin, et représentant le martyre de sainte Cécile, comme sujet principal, auquel se rattachent trois compartiments de moindre étendue. On y reconnaît la manière vive et la puissante imagination du peintre. On sera peut-être surpris de voir sur ce tableau et sur une quantité d'autres représentations du martyre de sainte Cécile, au quinzième et au seizième siècle, la sainte placée dans une chaudière. L'étonnement cessera, quand on se rendra compte de l'impuissance où l'on était, alors, de comprendre ce que pouvaient être les bains de vapeur que les anciens prenaient dans le caldarium de leurs thermes. Les artistes devaient bien éprouver quelque embarras à expliquer les paroles des Actes, où l'on raconte comme un prodige que les membres de Cécile, qui auraient dû être inondés d'une sueur violente, en furent totalement préservés. Si la martyre eût été plongée dans l'eau bouillante, la remarque serait au moins étrange ; mais au moyen âge, où l'on voit commencer cette manière de rendre la scène du martyre de sainte Cécile, l'archéologie n'était pas là pour faire comprendre aux artistes dont nous parlons un genre de bain qui n'entrait pas dans les habitudes de leur temps. Comment d'ailleurs leur eût-il été possible d'exprimer par la peinture l'action du prodige sur la sainte en prières dans la salle du caldarium ? Plus tard, Jules Romain et Guido Reni, qui comprenaient mieux les usages des anciens, ont senti que l'on ne pouvait guère représenter le martyre de sainte Cécile qu'en figurant la sainte à genoux, couverte de ses habits et tendant le cou au licteur. Un seul peintre, Lionello Spada, qui a vécu du seizième au dix-septième siècle, a essayé de représenter sainte Cécile au milieu des vapeurs embrasées. Son tableau est à Bologne, dans l'église de Saint-Michel del Bosco.

 

Nous renvoyons au seizième siècle les charmantes fresques de Francia, qui ne mourut qu'en 1533 ; mais, pour être tant soit peu complet, il nous faudrait pouvoir signaler comme elles le méritent les miniatures des manuscrits liturgiques, bréviaires, missels et livres d'heures au quinzième siècle. Nous avons reproduit ailleurs la copie au trait d'une page du célèbre bréviaire du cardinal Grimani ; mais combien il nous eût été plus agréable de pouvoir donner ici la magnifique miniature du missel de Jacques Juvénal des Ursins, qui représentait d'une manière ineffable le couronnement de Cécile et de Valérien par l'Ange ! Ce missel, que l'on peut regarder comme le chef-d'oeuvre de l'art des miniaturistes français, dont l'école a été célébrée par Dante lui-même dans la Divine Comédie (PURGATOR., Cant. XI), et était reconnue comme supérieure à toutes celles de l'Europe, fut conservé à la France en 1861, par le dévouement de M. Ambroise Firmin Didot, et acquis ensuite par la ville de Paris, pour être le principal ornement de la bibliothèque de l'Hôtel de ville. Ce souvenir, hélas ! n'excite plus aujourd'hui que d'amers regrets, lorsqu'on est contraint de se rappeler que dix ans après, durant l'envahissement de la barbarie dans la capitale de la France, un tel monument a misérablement péri dans les flammes allumées par le pétrole.

 

En terminant notre excursion à travers les oeuvres de la peinture consacrées à sainte Cécile par les artistes du quinzième siècle, nous devons remarquer ici, à propos des deux volets peints par Jean de Bruges, que c'est seulement de ce siècle que date l'usage de peindre la sainte avec un instrument de musique.

 

DOM GUÉRANGER

SAINTE CÉCILE ET LA SOCIÉTÉ ROMAINE AUX DEUX PREMIERS SIÈCLES (pages 304 à 313)

 

Cecilia

SAINTE CÉCILE - Santa Cecilia in Trastevere, Rome

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