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"Je vous donne un commandement nouveau : c'est de vous aimer les uns les autres.

 

Comme je vous ai aimés, vous aussi aimez-vous les uns les autres.

 

Ce qui montrera à tous les hommes que vous êtes mes disciples, c'est l'amour que vous aurez les uns pour les autres."

 

Evangile de Jésus-Christ selon  saint Jean 

   

 

Pentecôte

" Le Défenseur, l'Esprit Saint que le Père enverra en mon nom, lui, vous enseignera tout, et il vous fera souvenir de tout ce que je vous ai dit."

 

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean  

 

   

 

 El Papa es argentino. Jorge Bergoglio                 

Saint Père François

 

 

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1er mai 2011 Béatification de Jean-Paul II

Béatification du Serviteur de Dieu Jean-Paul II

 

 

  Béatification du Père Popieluszko

beatification Mass, in Warsaw, Poland

à Varsovie, 6 juin 2010, Dimanche du Corps et du Sang du Christ

 

 

presidential palace in Warsaw

Varsovie 2010

 

 

Basilique du Sacré-Cœur de Montmartre
Sanctuaire de l'Adoration Eucharistique et de la Miséricorde Divine

La miséricorde de Dieu est comme un torrent débordé. Elle entraîne les cœurs sur son passage.
(Saint Curé d'Ars)
 

 


Le côté du Christ a été transpercé et tout le mystère de Dieu sort de là. C’est tout le mystère de Dieu qui aime, qui se livre jusqu’au bout, qui se donne jusqu’au bout. C’est le don le plus absolu qui soit. Le don du mystère trinitaire est le cœur ouvert. Ce n’est pas une image, c’est une réalité. C’est la réalité la plus profonde qui soit, la réalité de l’amour.
Père Marie-Joseph Le Guillou




Dans le cœur transpercé
de Jésus sont unis
le Royaume du Ciel
et la terre d'ici-bas
la source de la vie
pour nous se trouve là.

Ce cœur est cœur divin
Cœur de la Trinité
centre de convergence
de tous les cœur humains
il nous donne la vie
de la Divinité.


Sainte Thérèse Bénédicte de la Croix
(Edith Stein)



Le Sacré-Cœur représente toutes les puissances d'aimer, divines et humaines, qui sont en Notre-Seigneur.
Père Marie-Eugène de l'Enfant Jésus

 



feuille d'annonces de la Basilique du Sacré-Coeur de Montmartre

 

 

 

 

 

 

 

     

The Cambrai Madonna

Notre Dame de Grâce

Cathédrale de Cambrai

 

 

 

Cathédrale Notre Dame de Paris 

   

Ordinations du samedi 27 juin 2009 à Notre Dame de Paris


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Magnificat

     



Solennité de l’Immaculée Conception de la Vierge Marie à Notre-Dame de Paris


NOTRE DAME DES VICTOIRES

Notre-Dame des Victoires




... ma vocation, enfin je l’ai trouvée, ma vocation, c’est l’Amour !

 

 

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Voyages de Benoît XVI

 

SAINT PIERRE ET SAINT ANDRÉ

Saint Pierre et Saint André

 

BENOÎT XVI à CHYPRE 

 

Benedict XVI and Cypriot Archbishop Chrysostomos, Church of 

Salutation avec l'Archevêque Chrysostomos à l'église d' Agia Kyriaki Chrysopolitissa de Paphos, le vendredi 4 juin 2010

 

     

 

Benoît XVI en Terre Sainte  


 

Visite au chef de l'Etat, M. Shimon Peres
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Visite au mémorial de la Shoah, Yad Vashem




 






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Vicariat hébréhophone en Israël

 


 

Mgr Fouad Twal

Patriarcat latin de Jérusalem

 

               


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SALVE REGINA

31 mars 2011 4 31 /03 /mars /2011 04:00

Maintenant, nous devons écouter le texte plus attentivement encore. Il poursuit ainsi : "Comme dit l'Écriture : Des fleuves d'eau vive jailliront de son cœur" (Jn 7, 38).

 

De quel cœur ? À cette question, il y a depuis les premiers temps déjà deux types de réponse. La tradition alexandrine, inaugurée par Origène (mort vers 254), dans laquelle s'inscrivent aussi les éminents Pères latins que sont Jérôme et Augustin, lit ainsi la phrase "celui qui croit... de son cœur jailliront" : l'homme qui croit devient lui-même une source, une oasis dont jaillit l'eau fraîche et saine, la force dispensatrice de vie de l'Esprit Créateur. L'autre tradition, certes beaucoup moins répandue, celle d'Asie Mineure, par son origine plus proche de Jean et représentée par Justin (mort en 165), Irénée, Hippolyte, Cyprien et Éphrem, modifie la ponctuation. Celui qui a soif, qu'il vienne vers moi ; celui qui croit en moi, qu'il boive. Comme dit l'Écriture : de son cœur jailliront des fleuves. Son "cœur" est maintenant référé au Christ. C'est lui qui est la source, le rocher vivant, dont jaillira l'eau nouvelle.

 

 D'un point de vue purement linguistique, la première interprétation est plus convaincante, c'est pourquoi, à la suite des éminents Pères de l'Église, la plupart des exégètes modernes y souscrivent. Mais, du point de vue du contenu, on penche plutôt pour la deuxième interprétation, celle d'Asie Mineure, à laquelle adhère par exemple Schnackenburg, sans qu'il faille y voir une opposition de principe qui exclurait l'interprétation alexandrine.

 

Une clé importante pour l'interprétation nous est fournie par la tournure "comme dit l'Écriture". Jésus tient à s'inscrire dans la continuité de l'Écriture, dans la continuité de l'histoire de Dieu avec les hommes. Dans l'Évangile de Jean, mais également dans les Évangiles synoptiques et au-delà dans toute la littérature néotestamentaire, la croyance en Jésus est légitimée par le fait qu'en lui se rejoignent tous les fleuves de l'Écriture. À partir de lui, le sens de l'Écriture se manifeste dans toute sa cohérence comme ce qui est attendu de tous et vers quoi tout se dirige.

 

Mais en quel endroit l'Écriture parle-t-elle de cette source vive ? Manifestement, Jean ne pense pas à un passage précis, mais bien plutôt à l'Écriture, à la vision qui en traverse tous les textes. Plus haut, nous avions déjà mis en lumière un aspect central : l'histoire du rocher dispensateur de vie, devenu en Israël une image de l'espérance. Le deuxième grand aspect nous est proposée par Ézéchiel (47, 1-12) avec la vision du nouveau Temple : "Sous le seuil du Temple, de l'eau jaillissait en direction de l'orient" (Ez 47, 1). Plus de cinquante ans plus tard, Zacharie a repris cette image : "En ce jour-là, il y aura une source qui jaillira pour la maison de David et les habitants de Jérusalem : elle les lavera de leur péché et de leur souillure" (Za 13, 1). "En ce jour-là, des eaux vives sortiront de Jérusalem" (Za 14, 8). Le dernier chapitre de l'Écriture Sainte réinterprète ces images et c'est lui qui leur donne à présent toute leur grandeur : "Puis l'ange me montra l'eau de la vie : un fleuve resplendissant comme du cristal, qui jaillit du trône de Dieu et de l'Agneau" (Ap 22, 1).

 

Un bref regard sur la scène de la purification du Temple nous a déjà montré que Jean considère le Seigneur ressuscité, son corps, comme le nouveau Temple, attendu non seulement par l'Ancien Testament, mais par toutes les nations (Jn 2, 21). Ainsi, nous sommes autorisés à entendre aussi dans ce qui est dit des fleuves d'eau vive une annonce du nouveau Temple : oui, ce Temple existe. Il existe, ce fleuve de vie promis qui épure la terre saline pour faire mûrir la vie et pour faire pousser les fruits en abondance. Il est celui qui est allé dans l'amour jusqu'au bout, celui qui est passé par la Croix pour vivre maintenant dans une vie que nulle mort ne pourra plus menacer. C'est lui, le Christ vivant.

 

L'Homme des Douleurs par Hans Memling

 

Ainsi, la phrase prononcée pendant la fête des Tentes préfigure non seulement la nouvelle Jérusalem dans laquelle Dieu lui-même demeure et dans laquelle il est source de vie, mais indique aussi par avance directement le corps du crucifié, duquel sortent du sang et de l'eau (Jn 19, 34). Elle le révèle comme le vrai Temple, qui n'est pas fait de pierres ni de la main de l'homme. Pour cette raison précisément, parce qu'il est la demeure vivante de Dieu dans le monde, il est et restera source de vie aussi pour tous les temps.

 

Celui qui regarde l'histoire d'un œil attentif peut voir ce fleuve qui, à travers les temps, coule du Golgotha, du Jésus crucifié et ressuscité. Là où parvient ce fleuve, il peut voir comment la terre est purifiée, comment poussent les arbres fruitiers, comment jaillit la vie, la vie véritable, de la source d'amour qui s'est donnée et qui se donne.

 

Cette interprétation centrale qui se réfère au Christ ne peut nullement exclure, comme nous l'avons déjà dit, que cette phrase vaille aussi, de manière dérivée, pour les croyants. Une expression de l'évangile apocryphe de Thomas (10, 6) indique une direction qui est conforme à celle de l'Évangile de Jean : "Celui qui boit de ma bouche deviendra comme moi". Le croyant s'unit au Christ, il a part à sa fécondité. L'homme qui croit et qui aime avec le Christ devient un puits qui dispense la vie.

 

Cela aussi, on peut très bien le voir dans l'histoire. On peut aussi constater cela dans l'histoire de manière merveilleuse : à savoir comment les saints sont des oasis autour desquelles la vie éclôt et où revient quelque chose du paradis perdu. Et la source qui se donne en abondance reste finalement toujours le Christ lui-même. 

 

> fiche de l'édition de poche

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30 mars 2011 3 30 /03 /mars /2011 19:00

Leur conversation sainte durait encore, lorsque Tiburce, impatient de revoir son frère, entra et vint suspendre ce colloque digne des anges.

 

 Epouse de son frère chéri, Cécile était devenue sa soeur. Tiburce l'aborda par un baiser fraternel ; mais quelle fut sa surprise de sentir émaner des cheveux de la vierge un parfum qui rappelait celui des fleurs les plus fraîches du printemps ! L'hiver régnait encore à ce moment, où, s'il tempérait déjà ses rigueurs, la nature n'avait pas repris sa vie et son éclat.

 

" D'où vient, Cécile, cette odeur de roses et de lis en la saison où nous sommes ? s'écrie le jeune homme. Quand je tiendrais en ce moment dans mes mains le plus odorant faisceau de ces fleurs, il ne répandrait pas un parfum égal à celui que je respire. Cette merveilleuse senteur me transporte ; il me semble qu'elle renouvelle tout mon être.

" — C'est moi, ô Tiburce ! répond Valérien, c'est moi qui ai obtenu pour toi la faveur de sentir cette suave odeur ; si tu veux croire, tu mériteras même de voir de tes yeux les fleurs dont elle émane. C'est alors que tu connaîtras celui dont le sang est vermeil comme les roses, et dont la chair est blanche comme le lis. Cécile et moi, nous portons des couronnes que tes yeux ne peuvent apercevoir encore ; les fleurs dont elles sont tressées ont l'éclat de la pourpre et la pureté de la neige.

" — Est-ce un songe, ô Valérien, s'écria Tiburce, ou parles-tu selon la vérité ? — Jusqu'ici, répond l'époux de Cécile, notre vie n'a été qu'un songe ; maintenant, nous sommes dans la vérité, et il n'y a rien de menteur en nous ; car les dieux que nous adorions ne sont que des démons.

" — Comment le sais-tu ? répondit Tiburce. — Valérien reprit : L'ange de Dieu m'a instruit, et tu pourras voir toi-même cet esprit bienfaisant, si tu veux te purifier de la souillure des idoles. — Et combien de temps, répliqua Tiburce, devrai-je attendre cette purification qui me rendra digne de voir l'ange de Dieu ? — Elle sera prompte, reprit Valérien ; jure-moi seulement que tu renonces aux idoles, et qu'il n'est qu'un seul Dieu dans les cieux. — Je ne comprends pas, dit Tiburce, à quelle fin tu exiges de moi cette promesse."

 

 Cécile avait gardé le silence durant ce dialogue des deux frères ; elle avait dû laisser la parole au néophyte, dans l'ardeur du zèle qui le pressait. D'ailleurs, il était juste que Valérien parlât le premier à Tiburce ; mais la vierge, nourrie dès ses plus jeunes années de la doctrine évangélique, possédait mieux que son époux le langage qu'il fallait tenir à un païen pour le détacher des idoles. Empruntant donc les arguments des anciens prophètes, des apologistes chrétiens, et des martyrs devant leurs juges, sur la vanité de ces simulacres aux pieds desquels le monde se prosternait, elle prit ainsi la parole :

" Je m'étonne, ô Tiburce, que tu n'aies pas compris déjà que des statues de terre, de bois, de pierre, d'airain ou de tout autre métal, ne sauraient être des dieux. Ces vaines idoles sur lesquelles les araignées tendent leurs toiles, et les oiseaux déposent leurs nids et leurs ordures, ces statues dont la matière est tirée des entrailles de la terre par la main des malfaiteurs condamnés aux mines, comment peut-on les estimer des dieux, et placer sa confiance dans de tels objets ? Dis-moi, Tiburce, y a-t-il une différence entre un cadavre et une idole ? Un cadavre a encore tous ses membres, mais il n'a plus ni souffle, ni voix, ni sentiment ; de même l'idole a aussi tous les membres, mais ces membres sont inhabiles à l'action, et encore au-dessous de ceux d'un homme mort. Du moins, pendant que l'homme jouissait de la vie, ses yeux, ses oreilles, sa bouche, son odorat, ses pieds, ses mains, remplissaient leur office ; mais l'idole a commencé par la mort, et demeure dans la mort ; elle n'a jamais vécu ni même pu vivre."

 

Tiburce, frappé tout à coup de la vanité des simulacres auxquels il avait jusque-là brûlé son encens, s'écria vivement : "Oui, il en est ainsi, et qui ne le comprend pas est descendu jusqu'à la brute". Transportée de joie à cette réponse, Cécile se lève et serre dans ses bras ce païen qui commence à goûter la lumière : "C'est aujourd'hui, lui dit-elle, que je te reconnais pour mon frère. L'amour du Seigneur a fait de ton frère mon époux ; le mépris que tu professes pour les idoles fait de moi ta véritable soeur. Le moment est venu où tu vas croire ; va donc avec ton frère pour recevoir la régénération. C'est alors que tu verras les anges, après avoir obtenu le pardon de toutes tes fautes."

 

Alors Tiburce, s'adressant à Valérien : " Quel est l'homme vers lequel tu vas me conduire ? — Un grand personnage, reprend Valérien ; il se nomme Urbain, vieillard aux cheveux blancs, au visage angélique, aux discours véritables et remplis de sagesse. — Ne serait-ce pas, dit Tiburce, cet Urbain que les chrétiens appellent leur pape ? J'ai entendu dire qu'il a déjà été condamné deux fois, et qu'il est réduit à se tenir caché. S'il est découvert, il sera livré aux flammes ; et nous, si l'on nous trouve avec lui, nous partagerons son sort. Ainsi nous aurons voulu chercher une divinité qui se cache dans les cieux, et nous rencontrerons sur la terre un supplice cruel."

 

Pour avoir appris à dédaigner les idoles, Tiburce n'en était pas encore à dédaigner les souffrances d'ici-bas ; Cécile vint à son secours. "En effet, lui dit-elle, si cette vie était la seule, s'il n'en était pas une autre, ce serait avec raison que nous craindrions de la perdre ; mais s'il est une autre vie qui ne finira jamais, faut-il donc tant redouter de perdre celle qui passe, quand, au prix de ce sacrifice, nous nous assurons celle qui durera toujours ?

 

 Un tel langage était bien nouveau à un jeune homme élevé dans cette société romaine du deuxième siècle, où régnaient à la fois les plus humiliantes superstitions, la corruption des moeurs la plus éhontée, et toutes les aberrations d'une philosophie sceptique. Il répondit donc à la vierge : "Jamais je n'ai rien entendu de semblable ; y aurait-il donc une autre vie après celle-ci ? — Mais, reprit Cécile, peut-on même appeler vie celle que nous passons en ce monde ? Jouet de toutes les douleurs du corps et de l'âme, elle aboutit à la mort qui met fin aux plaisirs comme aux angoisses. Quand elle est terminée, on dirait qu'elle n'a pas même été ; car ce qui n'est plus est comme rien. Quant à cette autre vie qui succède à la première, elle a des joies sans fin pour les justes et des supplices éternels pour les pécheurs. — Mais, répliqua Tiburce, qui est allé dans cette vie ? qui en est revenu pour nous apprendre ce qui s'y passe ? sur quel témoignage pouvons-nous y croire ?"

 

 Alors Cécile, se levant avec la majesté d'un apôtre, fit entendre ces imposantes paroles : "Le Créateur du ciel, de la terre et des mers, l'auteur du genre humain et de tous les êtres que nous voyons, a engendré de sa propre substance un Fils, avant toute création, et il a produit par sa vertu divine l'Esprit-Saint ; le Fils par lequel il devait créer toutes choses, l'Esprit-Saint par lequel il les vivifie. Tout ce qui existe, le Fils de Dieu, engendré du Père, l'a créé ; tout ce qui est créé, l'Esprit-Saint, qui procède du Père, l'a animé."

" — Comment, s'écria Tiburce, tout à l'heure tu disais, ô Cécile, que l'on ne doit croire qu'un seul Dieu, qui est dans le ciel, et maintenant tu parles de trois ! Cécile répondit : Il n'est qu'un seul Dieu dans sa majesté, et si tu veux concevoir comment ce Dieu existe dans une Trinité sainte, écoute cette comparaison. Un homme possède la sagesse ; par sagesse nous entendons le génie, la mémoire et l'intelligence : le génie qui découvre les vérités, la mémoire qui les conserve, l'intelligence qui les explore. Reconnaîtrons-nous pour cela plusieurs sagesses dans le même homme ? Si donc un mortel possède trois facultés dans la seule sagesse, devrons-nous hésiter à reconnaître une Trinité majestueuse dans l'essence unique du Dieu tout-puissant ?"

 

Tiburce, ébloui de l'éclat d'un si haut mystère, s'écria : " ô Cécile ! la langue humaine ne saurait s'élever à de si lumineuses explications : c'est l'ange de Dieu qui parle par ta bouche."  Tant   était   vive   la   reconnaissance   du   jeune homme envers cette divine lumière dont les rayons commençaient à descendre jusqu'à lui : il n'osait plus s'adresser à la vierge, interprète du ciel ; mais se tournant vers son frère : "Valérien, lui dit-il, je le confesse, le mystère d'un seul Dieu n'a plus rien qui m'arrête ; je ne désire qu'une chose, c'est d'entendre la suite du discours qui doit satisfaire à mes doutes. — C'est à moi, Tiburce, que tu dois t'adresser, reprit Cécile. Ton frère, encore revêtu de la robe blanche, n'est pas en mesure de répondre à toutes tes demandes ; mais moi, instruite dès le berceau dans la sagesse du Christ, tu me trouveras prête sur toute question qu'il te plaira de proposer. — Eh bien ! dit Tiburce, je demande quel est celui qui vous a fait connaître cette autre vie que vous m'annoncez l'un et l'autre ?"

 

 La vierge, reprenant son discours avec un enthousiasme tout divin, continua ainsi :

" Le Père a envoyé des cieux sur la terre son propre Fils unique, et une vierge l'a conçu. Ce Fils de Dieu, debout sur la montagne sainte, a fait entendre à haute voix ces paroles : "Peuples, venez tous à moi". Alors sont accourus vers lui tous les âges, les deux sexes, toutes les conditions. Il leur a dit à tous : Faites pénitence pour l'ignorance dans laquelle vous êtes tombés ; car le royaume de Dieu, qui doit mettre fin au règne des hommes, est arrivé. Dieu veut faire part de son  royaume à ceux qui croiront, et celui qui sera le plus saint y recevra le plus d'honneurs. Les pécheurs seront tourmentés par des supplices éternels, et des feux les dévoreront sans relâche. Quant aux justes, ils seront environnés d'une éternelle splendeur de gloire, et des délices sans fin seront leur partage. Ne cherchez donc plus, enfants des hommes, les joies fugitives de cette vie ; mais assurez-vous l'éternelle félicité de la vie à venir. La première est courte, la seconde dure toujours.

 

" Les peuples ne crurent pas d'abord à cet oracle, et ils dirent aussi : Quel est celui qui est entré dans cette vie, et en est revenu pour nous certifier la vérité de ce que vous dites ? Le Fils de Dieu leur a répondu : Si je vous fais voir des morts que vous-mêmes avez vu ensevelir, rendus à la vie, persévérerez-vous à ne pas croire la vérité ? Si vous ne croyez pas à mes paroles, croyez du moins à mes prodiges.

 

" Afin d'ôter tout prétexte au doute, il se rendait avec les peuples près des tombeaux, et il rappelait à la vie des morts ensevelis depuis trois et quatre jours, et exhalant déjà l'odeur des cadavres. Il marchait à pied sec sur les flots de la mer ; il commandait aux vents ; il apaisait les tempêtes. Aux aveugles il rendait la vue, aux muets la parole, l'ouïe aux sourds, l'usage de leurs membres aux boiteux et aux paralytiques ; il délivrait les possédés, il mettait en fuite les démons.

 

" Mais les impies s'irritèrent de ces prodiges ; car les peuples les quittaient pour s'attacher à sa suite, et jetaient leurs vêtements sous ses pas, en criant : Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur ! Des hommes appelés pharisiens, jaloux de ses triomphes, le livrèrent au gouverneur Pilate, disant qu'il était un magicien et un homme couvert de crimes. Ils excitèrent une sédition tumultueuse, au milieu de laquelle ils le crucifièrent. Lui, connaissant que sa mort devait opérer le salut du monde, se laissa prendre, insulter, fouetter et mettre à mort. Il savait que sa Passion seule pouvait enchaîner le démon, et retenir dans les flammes de leurs supplices les esprits immondes.

 

" Il fut donc chargé de chaînes, celui qui n'a point commis Je péché, afin que le genre humain fût affranchi des liens du péché. Il fut maudit, celui qui est béni à jamais, afin que nous fussions arrachés à la malédiction. Il souffrit d'être le jouet des méchants, afin de nous enlever à l'illusion des démons dont nous étions le jouet nous-mêmes. Il reçut sur la tête une couronne d'épines, pour nous soustraire à la peine capitale que les épines de nos péchés avaient méritée. Il laissa porter le fiel à sa bouche, pour rétablir dans l'homme le sens du goût que le premier père avait faussé, au jour où la mort envahit le monde. Il fut abreuvé de vinaigre pour attirer en lui toute l'âcreté dont notre sang était brûlé, voulant boire lui-même le calice que nous avions mérité. Il fut dépouillé, pour couvrir d'un vêtement éclatant de blancheur la nudité produite chez nos premiers ancêtres, par leur docilité aux perfides conseils du serpent. Il fut suspendu au bois de sa Passion, pour enlever la prévarication qui était venue par le bois. Il laissa la mort approcher de lui, afin qu'elle fut renversée dans la lutte, et que celle qui avait régné par le serpent devînt la captive du Christ, ainsi que le serpent lui-même.

 

" Enfin, lorsque les éléments contemplèrent leur créateur élevé sur la croix, un tremblement d'horreur les saisit : la terre s'ébranla, les rochers se fendirent, le soleil épouvanté s'obscurcit, et un voile lugubre couvrit le monde. Un nuage sanglant intercepta les pâles rayons de la lune, et les étoiles s'enfuirent du ciel. Gémissante comme d'un enfantement, la terre rendit les corps de plusieurs saints qui sortirent de leurs sépulcres, pour attester que le Sauveur était descendu aux enfers, qu'il avait arraché le sceptre au démon, et qu'en mourant il avait dompté la mort, désormais enchaînée et abattue sous les pieds de ceux qui croiraient en lui.

 

" Voilà pourquoi nous nous réjouissons lorsque nous sommes maltraités pour son nom, pourquoi nous trouvons notre gloire dans les persécutions. Il en doit être ainsi, puisque nous savons que notre vie caduque et misérable fait place à cette vie éternelle que le Fils de Dieu, ressuscité d'entre les morts, a promise à ses apôtres qui l'ont vu monter au ciel. Le témoignage de trois personnes suffit pour asseoir la conviction d'un homme sage ; mais le Christ ressuscité ne s'est pas montré seulement à ses disciples qu'il avait choisis au nombre de douze, il s'est fait voir à plus de cinq cents personnes, et n'a pas voulu laisser le plus léger prétexte au doute sur un si étonnant prodige. Ses disciples, envoyés par lui pour prêcher toutes ces merveilles dans le monde entier, ont appuyé leur prédication sur les plus évidents miracles. Ils ont, en son nom, guéri toutes les maladies, mis en fuite tous les démons et rendu la vie aux morts.

 

" Maintenant, ô Tiburce, je pense n'avoir rien omis pour satisfaire à ta demande. Vois s'il n'est pas juste de mépriser du fond de son coeur cette vie présente, et de rechercher avec ardeur et courage celle qui doit la suivre. Celui qui a la foi dans le Fils de Dieu et qui s'attache à ses commandements, ne sera pas même touché par la mort, quand il déposera ce corps périssable ; il sera reçu par les saints anges, et conduit dans l'heureuse région du paradis. Mais la mort s'unit au démon pour enchaîner les hommes par mille distractions, et préoccuper leur imprudence d'une foule de nécessités qu'elle leur suggère. Tantôt c'est un malheur à venir qui les intimide, tantôt un gain à saisir qui les captive ; c'est la beauté sensuelle qui les charme,  c'est l'intempérance qui les entraîne ; enfin, par tous genres d'appâts, la mort fait en sorte que, pour leur malheur,  ils ne songent qu'à la vie présente, afin que leurs âmes, à la sortie du corps, soient trouvées entièrement nues, et n'ayant sur elles que le poids de leurs péchés.

 

" Je le sens, ô Tiburce ! je  n'ai  fait  que  toucher  quelques points d'un si vaste sujet ; si tu veux m'entendre davantage, je suis prête."

 

Ainsi parla la vierge.

 

DOM GUÉRANGER

SAINTE CÉCILE ET LA SOCIÉTÉ ROMAINE AUX DEUX PREMIERS SIÈCLES (pages 123 à 133)

 

Cecilia

SAINTE CÉCILE - Santa Cecilia in Trastevere, Rome

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30 mars 2011 3 30 /03 /mars /2011 11:00

Dans sa première Lettre, Jean a encore repris le thème du sang et de l'eau en lui donnant une autre connotation : "C'est lui, Jésus Christ, qui est venu par l'eau et par le sang : pas seulement l'eau, mais l'eau et le sang. Et celui qui rend témoignage, c'est l'Esprit, car l'Esprit est la vérité. Ils sont trois qui rendent témoignage, l'Esprit, l'eau et le sang, et tous les trois se rejoignent en un seul témoignage" (1 Jn 5, 6-8).

 

Ici, nous avons manifestement une tournure polémique contre un christianisme qui reconnaît, certes, le baptême de Jésus comme événement salvifique, mais pas sa mort sur la croix. Il s'agit d'un christianisme qui veut, pour ainsi dire, seulement le Verbe, mais pas la chair et le sang. Le corps de Jésus et sa mort sont, en dernière instance, sans importance. Du christianisme, il ne reste ainsi que "de l'eau" — le Verbe sans la corporéité de Jésus perd sa force. Le christianisme devient une simple doctrine, un simple moralisme et une affaire de l'intellect, mais il lui manque la chair et le sang. Le caractère rédempteur du sang de Jésus n'est plus accepté. Il perturbe l'harmonie intellectuelle.

 

 Comment ne pas y voir des menaces pour notre christianisme actuel ? L'eau et le sang forment un tout. L'incarnation et la croix, le Baptême, le Verbe et le sacrement sont indissociables. Et le Pneuma doit se joindre à cette triade du témoignage. À ce sujet, Schnackenburg signale à juste titre que le témoignage de l'Esprit dans l'Église et par l'Église est à comprendre à partir de Jean 15, 26 et de Jean 16, 10.

 

Triptych of the Redemption by Rogier van der Weyden

 

 Penchons-nous maintenant sur les paroles de révélation que Jésus prononce dans le contexte de la fête des Tentes et que Jean nous transmet. C'était le jour solennel où se terminait la fête. "Jésus, debout, s'écria : Si quelqu'un a soif, qu'il vienne à moi et qu'il boive, celui qui croit en moi ! Comme dit l'Écriture : Des fleuves d'eau vive jailliront de son cœur" (Jn 7, 37-38).

 

À l'arrière-plan, nous avons le rite de la fête consistant à puiser de l'eau dans la source de Siloé afin de pouvoir faire des libations dans le Temple durant les sept jours que durait la fête. Le septième jour, les prêtres tournaient sept fois autour de l'autel avec le récipient d'eau doré avant de procéder à la libation. Ces rites d'eau renvoient d'abord à l'origine de la fête dans les religions de la nature. La fête était à l'origine une prière pour demander la pluie dont un pays menacé de sécheresse avait cruellement besoin. Ensuite, le rite commémorait un épisode de l'histoire du salut, c'est-à-dire l'eau que Dieu a fait jaillir du rocher pour les Hébreux, pendant la marche dans le désert, malgré leurs doutes et leurs peurs (Nb 20, 1-13).

 

 Finalement, l'eau jaillissant du rocher était devenue progressivement un thème de l'espérance messianique. Durant la marche dans le désert, Moïse avait donné à Israël le pain du ciel et l'eau du rocher. Par conséquent, on attendait aussi du nouveau Moïse, du Messie, ces deux dons essentiels pour la vie. Cette interprétation messianique du don de l'eau se reflète aussi dans la première Lettre de Saint Paul aux Corinthiens : "Tous, ils ont mangé la même nourriture, qui était spirituelle ; tous, ils ont bu à la même source, qui était spirituelle ; car ils buvaient à un rocher qui les accompagnait, et ce rocher, c'était déjà le Christ" (1 Co 10, 3-4).

 

 Par la parole que Jésus prononce durant le rite de l'eau, il répond à cette espérance. Il est le nouveau Moïse. Il est lui-même le rocher qui dispense la vie. Comme il se révèle comme le pain véritable venant du ciel dans le discours sur le Pain de vie, de même il se présente, de manière analogue à ce qu'il a déjà dit face à la Samaritaine, comme l'eau vive à laquelle l'homme aspire dans sa soif la plus profonde, la soif de vie, de "vie en abondance" (Jn 10, 10) ; d'une vie qui ne serait plus marquée par les besoins qu'il faut assouvir en permanence, mais d'une vie qui jaillirait d'elle-même de l'intérieur.

 

Jésus répond aussi à cette question : comment boit-on cette eau de la vie ? Comment vient-on à la source, comment peut-on la puiser ? "Celui qui croit en moi..." Croire en Jésus, voilà la façon de boire l'eau vive, de boire la vie qui n'est plus menacée par la mort.

 

> fiche de l'édition de poche

demain : ce fleuve qui à travers les temps coule du Golgotha, du Jésus crucifié et ressuscité

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30 mars 2011 3 30 /03 /mars /2011 04:00

Près de Vienne en Autriche, l’an 1943, la bienheureuse Hélène Kafka (Marie-Restituta), vierge, des Sœurs franciscaines de la Charité et martyre. Originaire de Bohême, elle était infirmière pendant la seconde guerre mondiale quand elle fut arrêtée par le régime nazi et décapitée. Martyrologe romain

 

 Restituta Kafka naît en 1894. Avant d'être majeure, elle exprime son intention d'entrer au couvent. Ses parents s'y opposent, mais elle ne perd pas de vue son projet : devenir sœur "par amour de Dieu et des hommes" et servir en particulier les pauvres et les malades.

 

Les Sœurs franciscaines de la Charité l'accueillent, lui permettant de réaliser sa vocation dans le monde hospitalier : un engagement quotidien souvent dur et monotone. Sœur infirmière dans l'âme, elle fait bientôt figure "d'institution" à Mödling. Sa compétence, sa résolution et sa cordialité sont telles que de nombreuses personnes l'appellent 'Sœur Resoluta' et non Sœur Restituta.

 

Son courage et sa fermeté ne lui permettent pas de se taire face au régime national-socialiste. Elle refuse de retirer le crucifix des chambres des malades et même lorsqu'on bâtit une nouvelle aile à l'hôpital, elle y fait mettre des crucifix, prête à payer de sa vie plutôt que de renoncer à ses convictions.

 

Le mercredi des Cendre 1942, elle est arrêtée par la Gestapo. C'est alors que commence pour elle en prison un 'Calvaire' qui dure plus d'un an. Malgré de nombreux recours en grâce, elle est condamnée à mort.

 

Conservant le crucifix dans son cœur, elle lui rend encore témoignage peu de temps avant d'être conduite au lieu de l'exécution : elle demande à l'aumônier de la prison de lui faire le signe de la croix sur le front.

 

Ses dernières paroles connues sont : "J'ai vécu pour le Christ, je veux mourir pour le Christ".

 

Elle est décapitée dans la prison de Vienne le 30 mars 1943. La Gestapo prend soin que son corps ne soit pas rendu à la Communauté de peur qu'on en fasse une martyre.

 

abbaye-saint-benoit.ch/hagiographie/ (extrait)

 

Maria Restituta Kafka

Patron Saints Index : Blessed Mary Restituta Kafka

Martin Bormann decided that her execution would provide "effective intimidation" for other opponents of the Nazis. She spent her remaining time in prison caring for other prisoners ; even the Communist prisoners spoke well of her.

She was offered her freedom if she would abandon her religious community ; she declined. Martyr.

 

"Sie hat geholfen ohne Rücksicht auf Nationalität oder Weltanschauung, ob jemand katholisch war oder konfessionslos oder kommunistisch war oder sozialdemokratisch oder christlich-sozial, da hat sie weder gefragt, noch hatte es irgendeine Bedeutung für sie... Sie hat die Menschen sichtlich wirklich gerne gehabt." Anna Haider, kommunistische Parteifunktionärin und Mitgefangene

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29 mars 2011 2 29 /03 /mars /2011 19:00

Poussé par une force inconnue, le jeune Romain, naguère si bouillant, quitte sans effort la vierge dont les accents si doux ont changé son coeur. 

 

Il se met en marche, et aux premières lueurs du jour il arrive près d'Urbain, ayant trouvé toutes choses comme Cécile lui avait annoncé. Il raconte au saint évêque l'entretien de la chambre nuptiale, qui seul peut expliquer la présence de Valérien dans ces lieux. Le vieillard est ravi de joie ; il tombe à genoux, et, levant ses bras vers le ciel, il s'écrie, les veux pleins de larmes : "Seigneur Jésus-Christ, auteur des chastes résolutions, recevez le fruit de la divine semence que vous avez déposée au coeur de Cécile. Bon pasteur, Cécile, votre servante, comme une éloquente brebis, a rempli la mission que vous lui aviez confiée. Cet époux, qu'elle avait reçu semblable à un lion impétueux, elle en a fait, en un instant, le plus doux des agneaux. Si Valérien ne croyait pas déjà, il ne serait pas venu jusqu'ici. Ouvrez, Seigneur, la porte de son coeur à vos paroles, afin qu'il reconnaisse que vous êtes son Créateur, et qu'il renonce au démon, à ses pompes et à ses idoles."

 

Valérien avec le Pape Urbain - Oratoire de Sainte Cécile, Église Saint-Jacques le Majeur à Bologne 

Fresque de la vie de Sainte Cécile : scène 2 par Lorenzo Costa le Vieux

 

 Urbain pria longtemps, et Valérien était ému dans toutes les puissances de son âme. Tout à coup apparaît, aux regards du jeune homme et du saint évêque, un vieillard vénérable couvert de vêtements blancs comme la neige, et tenant à la main un livre écrit en lettres d'or. C'était le grand Paul, l'apôtre des gentils. A cette vue imposante, Valérien, saisi de terreur, tombe comme mort, la face contre terre. L'auguste vieillard le relève avec bonté, et lui dit : "Lis les paroles de ce livre et crois ; tu mériteras d'être purifié et de contempler l'ange dont la très fidèle vierge Cécile t'a promis la vue."

 

Valérien lève les yeux et commence à lire sans prononcer de paroles. Le passage était ainsi conçu : Un seul Seigneur, une seule foi, un seul baptême ; un seul Dieu, Père de toutes choses, qui est au-dessus de tous et en nous tous. (EPHES., IV.) Quand il eut achevé de lire, le vieillard lui dit : " Crois-tu qu'il en est ainsi ?" Valérien s'écria avec force : "Rien de plus vrai sous le ciel ; rien qui doive être cru plus fermement."

 

Valérien est baptisé - Oratoire de Sainte Cécile, Église Saint-Jacques le Majeur à Bologne

Fresque de la vie de Sainte Cécile : scène 3 par Francesco Francia

 

Comme il achevait ces paroles, le vieillard disparut, et laissa Valérien seul avec Urbain. Le saint évêque s'empressa de donner au jeune homme le symbole de la foi ; il le régénéra dans l'eau baptismale, et après que le néophyte eut participé aux mystères augustes des chrétiens, il lui dit de retourner vers son épouse.

 

 Il n'avait donc fallu que quelques heures pour transformer Valérien en un disciple complet du Christ. Sollicitée par Cécile, une grâce était descendue du ciel sur le jeune Romain, et sa conversion subite venait accroître le nombre de celles que la bonté de Dieu opérait d'une manière immédiate en ces jours. Souvent des visions merveilleuses venaient triompher de toute résistance, et abattre le païen aux pieds du Christ ; Tertullien en rend témoignage dans son Apologétique. (Cap. XXIII.) Nous apprenons d'Eusèbe que saint Basilide fut gagné à la foi dans une apparition de la vierge Potamienne, qui lui plaça une couronne sur la tête, et lui prédit qu'il la suivrait dans le martyre. Le savant Arnobe, au rapport de saint Jérôme, fut appelé au christianisme par une grâce du même genre, dont on trouve aussi de nombreux exemples dans les Actes les plus authentiques des martyrs.

 

 Origène se joint à Tertullien pour proclamer le fait de ces prodigieuses  vocations à la foi. "Je ne doute pas, dit ce grand philosophe chrétien, que Celse ne me tourne en dérision ; mais cela ne m'empêchera pas de dire que beaucoup de personnes ont embrassé la foi chrétienne comme malgré elles, leur coeur s'étant trouvé tout à coup tellement changé par quelque esprit qui leur apparaissait, tantôt le jour, tantôt la nuit, qu'au lieu de l'aversion qu'elles avaient eue jusqu'alors pour notre doctrine, elles l'ont aimée jusqu'à mourir pour elle. Il est beaucoup de ces sortes de changements dont nous sommes témoins, et que nous avons vus nous-mêmes." (Contra Cels., lib. I, cap. XLVI.)

 

 Cécile avait vaincu, et le premier trophée de sa victoire était le coeur de Valérien offert pour jamais au Sauveur des hommes. Durant l'absence de son époux, elle n'avait pas quitté la chambre nuptiale toute retentissante encore du célèbre entretien de la nuit, tout embaumée des célestes parfums de la virginité. Elle avait prié sans relâche pour la consommation du grand oeuvre que sa parole avait commencé, et elle attendait avec confiance le retour de cet époux qui lui serait plus cher que jamais.

 

 Valérien, couvert encore de la tunique blanche des néophytes qu'il venait à peine de revêtir, est arrivé à la porte de la chambre. Il entre et ses regards respectueux rencontrent Cécile prosternée dans la prière et près d'elle l'ange du Seigneur, au visage éclatant de mille feux, aux ailes brillantes des plus riches couleurs. L'esprit bienheureux tenait dans ses mains deux couronnes entrelacées de roses et de lis. Il en pose une sur la tête de Cécile, l'autre sur celle de Valérien, et, faisant entendre les accents du ciel, il dit aux deux époux : "Méritez de conserver ces couronnes par la pureté de vos coeurs et par la sainteté de vos corps ; c'est du jardin du ciel que je vous les apporte. Ces fleurs ne se faneront jamais, leur parfum  sera toujours  aussi  suave ; mais  personne ne les  pourra voir qu'il  n'ait mérité comme vous, par sa pureté, les complaisances du ciel. Maintenant, ô Valérien, parce que tu as acquiescé au désir pudique de Cécile, le Christ, Fils de Dieu, m'a envoyé vers toi pour recevoir toute demande que tu aurais à lui adresser."

 

Couronnement de Cécile et Valérien - Oratoire de Sainte Cécile, Église Saint-Jacques le Majeur à Bologne

Fresque de la vie de Sainte Cécile : scène 4 par Francesco Francia

 

Le jeune homme, saisi de reconnaissance, se prosterne aux pieds du divin messager, et ose ainsi exprimer son désir : "Rien en cette vie ne m'est plus doux que l'affection de mon frère ; il serait cruel à moi, qui suis maintenant affranchi du péril, de laisser ce frère bien-aimé en danger de se perdre. Je réduirai donc toutes mes demandes à une seule : je supplie le Christ de délivrer mon frère Tiburce, comme il m'a délivré moi-même, et de nous rendre tous deux parfaits dans la confession de son nom". Alors l'ange, retournant vers Valérien un visage rayonnant de cette joie dont tressaillent au ciel les esprits bienheureux, lorsque le pécheur revient à Dieu, lui répond : "Parce que tu as demandé une grâce que le Christ est encore plus empressé de t'accorder que tu ne l'es toi-même de la désirer, de même qu'il a gagné ton coeur par Cécile, sa servante, ainsi toi-même tu gagneras le coeur de ton frère, et tous deux vous arriverez à la palme du martyre."

 

L'ange remonta aux cieux, et laissa les deux époux dans la plénitude de leur bonheur. Cécile glorifiait le maître des coeurs qui avait déployé avec tant d'éclat les richesses de sa miséricorde ; elle tressaillait à la vue des roses mêlées aux lis sur la couronne de Valérien comme sur la sienne, pour annoncer que lui aussi aurait part aux honneurs du martyre. Tiburce partagerait la palme avec son frère ; mais la prédiction fortunée ne s'était pas étendue jusqu'à elle. La vierge devait donc survivre aux deux frères, et les assister dans le combat ; jusque-là, le ciel n'avait point manifesté plus avant ses décrets. Les deux époux s'épanchèrent dans un entretien que l'amour du Christ rendait semblable à un festin délicieux, et ils s'encouragèrent à mériter toujours la couronne dont l'ange avait ceint leurs fronts. Le néophyte, rempli du feu divin qu'avaient allumé dans son coeur les mystères auxquels Urbain l'avait fait participer, savourait à longs traits cette vie nouvelle révélée tout à coup à son âme. Cécile, initiée dès son enfance à la doctrine du salut, parlait avec l'expérience et l'autorité d'une chrétienne éprouvée.

 

Leur conversation sainte durait encore, lorsque Tiburce, impatient de revoir son frère, entra et vint suspendre ce colloque digne des anges. 

 

DOM GUÉRANGER

SAINTE CÉCILE ET LA SOCIÉTÉ ROMAINE AUX DEUX PREMIERS SIÈCLES (pages 118 à 122)

 

Cecilia

SAINTE CÉCILE - Santa Cecilia in Trastevere, Rome

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29 mars 2011 2 29 /03 /mars /2011 04:00

Dans le chapitre suivant, le cinquième, l'eau apparaît plutôt en passant. C'est l'histoire de l'homme, infirme depuis trente-huit ans, qui attend la guérison de la descente dans la piscine de Béthesda, mais qui ne trouve personne pour l'aider à y entrer. Jésus le guérit par son pouvoir. Il accomplit sur le malade ce que ce dernier attendait du contact avec l'eau thérapeutique. Dans le septième chapitre, qui selon une hypothèse convaincante des exégètes modernes, suivait à l'origine sans doute directement le cinquième, nous trouvons Jésus à la fête des Tentes avec son rituel solennel du don de l'eau ; nous allons y revenir en détail.

 

Et puis, nous rencontrons de nouveau le symbolisme de l'eau au chapitre 9. Jésus guérit un aveugle de naissance. Le processus de guérison implique que l'aveugle, sur ordre de Jésus, doit se laver dans la piscine de Siloé. Ainsi, il recouvre la vue. Siloé, "ce nom signifie : Envoyé", commente l'évangéliste pour ses lecteurs qui ne connaissent pas l'hébreu (Jn 9, 7). Mais c'est plus qu'une simple note philologique. Cela nous indique la véritable raison du miracle. Car "l'Envoyé", c'est Jésus. En fin de compte, c'est Jésus par lequel et dans lequel il se laisse purifier pour recouvrer la vue. Le chapitre tout entier s'avère une explication du baptême qui nous rend la vue. Le Christ dispense la lumière et, par l'intermédiaire du sacrement, il nous ouvre les yeux.

 

Dans un sens analogue, mais tout de même différent, l'eau apparaît au chapitre 13, à l'heure de la dernière Cène, lors du lavement des pieds. Jésus se lève de table, dépose son vêtement et prend un linge dont il se ceint. Il verse ensuite de l'eau dans un bassin et commence à laver les pieds des disciples (cf. 13, 4-5). L'humilité de Jésus, qui se fait serviteur des siens, est le bain de pieds purificateur qui rend les hommes dignes de s'asseoir à la table de Dieu.

 

Et pour finir, l'eau apparaît à nos yeux encore une fois, grande et mystérieuse, à la fin de la Passion. Jésus mort, ses jambes ne furent pas brisées, mais un des soldats "avec sa lance lui perça le côté ; et aussitôt, il en sortit du sang et de l'eau" (Jn 19, 34). Indubitablement, Jean a voulu indiquer les deux sacrements principaux de l'Église, le Baptême et l'Eucharistie, qui jaillissent du cœur transpercé de Jésus et par lesquels, de cette manière, l'Église naît du côté de Jésus.

 

Crucifixion by Dürer

 

> fiche de l'édition de poche

demain : l'eau et le sang forment un tout

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28 mars 2011 1 28 /03 /mars /2011 19:00

Les deux frères ne se trompaient pas dans leur espérance ; mais Dieu seul savait combien l'amour que Cécile verserait dans leurs cœurs l'emporterait sur ces affections terrestres qu'ils devaient si rapidement dépasser, et combien prompte serait la migration des deux frères et de la sœur vers la région où les âmes pures s'unissent au sein de l'amour infini.

 

 Cécile n'avait donc pas été libre de repousser les avances de Valérien. Pleine d'estime pour les qualités de ce jeune païen, elle l'eût aimé comme un frère ; mais elle était sa fiancée, et le jour des noces approchait avec toutes ses alarmes. Qui pourrait dépeindre les angoisses de la vierge ? La volonté irrésistible des parents, la fougue du jeune homme la glaçaient de crainte, et elle ne pouvait que refouler au fond de son âme le chaste secret de cet amour qui avait obtenu l'irrévocable empire sur son coeur.

 

 Elle savait que son ange veillait près d'elle ; mais bientôt elle allait avoir à lutter elle-même ; l'heure était venue de se préparer au combat. Sous le luxe de ses vêtements, un cilice meurtrissait sa chair innocente. Cette armure sévère assujettissait les sens à l'esprit ; la chair serait moins rebelle, si, bientôt victime de l'amour du Christ, Cécile devait paver de son sang l'honneur d'avoir été préférée par cet époux divin. Condamnée à vivre au sein de la mollesse patricienne, elle prenait ses sûretés envers elle-même ; elle émoussait par la souffrance volontaire l'attrait du plaisir qui tyrannise les enfants d'Eve, et qui révèle trop souvent à l'âme imprudente et inattentive les abîmes du coeur de l'homme.

 

 Si, à l'exemple de la veuve de Béthulie, Cécile dissimulait sous ses habits somptueux l'instrument de sa pénitence, comme David elle affaiblissait encore sa chair par des jeûnes rigoureux. Selon l'usage des premiers chrétiens, lorsqu'ils voulaient fléchir le ciel ou obtenir quelque grâce signalée, elle s'abstenait de toute nourriture pendant deux jours, quelquefois pendant trois jours, ne prenant que le soir l'austère repas qui devait soutenir sa vie. Ces avances courageuses par lesquelles elle cherchait à assurer sa victoire, étaient rendues plus efficaces encore par la prière ardente et continuelle qui s'échappait de son coeur. Avec quelles instances elle recommandait au Seigneur l’heure pour laquelle elle tremblait ! Avec combien de larmes et de soupirs elle implorait les esprits célestes qui coopèrent au salut de nos âmes, les saints apôtres, patrons et fondateurs de Rome chrétienne, les bienheureux habitants du ciel qui protègent nos combats !

 

 La grâce que sollicitait Cécile était accordée ; mais l'Epoux céleste se plaisait à éprouver sa noble fiancée, afin que sa vertu s'élevât plus mâle et plus épurée. Ne devait-elle pas bientôt, en retour de tant d'alarmes, entrer dans le repos de l'éternelle possession ? D'ailleurs la lutte qui approchait, et dont Cécile devait sortir avec tant de gloire, n'était que le prélude d'autres combats pour lesquels il faudrait plus encore que le courage et la grandeur d'âme d'une fille de l'ancienne Rome.

 

Enfin le jour est venu où Valérien va recevoir la main de Cécile. On était dans l'hiver de 177 à 178. Tout s'ébranle dans la demeure des Caecilii ; le coeur du jeune homme tressaille de bonheur, et les deux familles, fières de s'unir dans de si chers rejetons, saluent l'espoir d'une postérité digne des aïeux.

 

Le mariage de Cécile et Valérien - Oratoire de Sainte Cécile, Église Saint-Jacques le Majeur à Bologne 

Fresque de la vie de Sainte Cécile : scène 1 par Francesco Francia

 

Cécile est amenée : elle s'avance dans la parure nuptiale des patriciennes. Une tunique de laine blanche, unie, ornée de bandelettes et serrée d'une ceinture aussi de laine blanche, est son vêtement et figure la candeur de son âme. Cette tenue modeste, dernière trace de l'antique simplicité des moeurs romaines, était en même temps un glorieux souvenir dans la maison des Caecilii. La robe sans luxe des nouvelles épouses était destinée à rappeler celles que tissait de ses mains la royale matrone Caïa Caecilia. Les cheveux de la vierge, partagés en six tresses, imitent la coiffure des vestales, touchant symbole de la consécration de Cécile. Un voile couleur de flamme, appelé pour cela flammeum, dérobe ses traits pudiques aux regards des profanes, sans les ravir à l'admiration des anges. En ce moment solennel, le coeur de la vierge reste ferme et sans trouble ; elle s'appuie sur le secours de l'ange qui a reçu du ciel la mission de la protéger.

 

Etrangère jusqu'alors aux rites païens, Cécile est contrainte d'en subir le spectacle. Tertullien demande si un chrétien peut prendre part aux noces, toujours accompagnées de ces rites idolâtriques qui enserraient de toutes parts l'existence des Romains. Il répond que la présence du chrétien est licite en ces occasions, s'il est là par égard pour les hommes, et non par honneur pour l'idole. (De idololat., cap. XVI.) L'offrande du vin et du lait s'accomplit donc en présence de la vierge, qui détourne ses regards. Le gâteau, symbole de l'alliance, est rompu, et la tremblante main de Cécile, ornée de l'invisible anneau des épouses du Christ, est placée dans celle de Valérien. Tout est consommé aux yeux des hommes, et la vierge sur qui veille le ciel a fait un pas de plus vers le péril.

 

 A la chute du jour, selon l'usage antique, la nouvelle épouse est conduite à la demeure de son époux. La maison de Valérien était située, comme nous l'avons dit, dans la région Transtibérine, près de la voie Salutaris, à peu de distance du pont Sublicius, auquel se rattachait le glorieux souvenir de Valérie.

 

 Les torches nuptiales précédaient le cortège qui conduisait Cécile à son époux. La foule applaudissait aux grâces de la jeune vierge ; quant à Cécile, elle conversait dans son coeur avec le Dieu puissant qui préserva des flammes les enfants de la fournaise et sauva Daniel de la fureur des lions. Ces souvenirs de l'ancienne alliance si souvent retracés sur les peintures murales des cryptes, qui avaient été familières à Cécile dès son enfance, soutenaient son courage, comme ils avaient fortifié celui de tant de martyrs.

 

 On arrive enfin au palais des Valerii. Sous le portique orné de blanches tentures sur lesquelles ressortent en festons des guirlandes de fleurs et de verdure, Valérien attendait Cécile. Selon la coutume des aïeux, l'époux préludait par cette interrogation : "Qui es-tu ?" disait-il. L'épouse répondait : "Là où tu seras Caïus, je serai Caïa". L'allusion était plus vive encore au mariage d'une fille des Caecilii ; car cette formule était aussi un souvenir de Caïa Caecilia, vénérée par les Romains comme le type de la femme vouée aux soins du ménage. Mais la Cécile chrétienne trouvait un modèle plus accompli encore dans le portrait que l'Esprit-Saint a tracé de la femme forte, et bientôt Valérien connaîtrait la vérité de cet oracle divin qui devait s'accomplir dans son épouse : "La force et la grâce sont sa parure, et elle sourira à sa dernière heure. Sa bouche s'est ouverte pour donner les leçons de la sagesse, et la loi de miséricorde est sur ses lèvres. Son époux s'est levé, et il l'a comblée de louanges." (Proverb., XXXI.)

 

 Cécile franchit le seuil de la maison. Le respect de Valérien pour son épouse fit sans doute qu'on lui épargna, en sa qualité de chrétienne, les rites superstitieux dont les Romains accompagnaient le moment où l'épouse entrait sous le toit conjugal. Ces rites ne tenaient en rien à la célébration du mariage qui avait eu lieu dans la demeure de l'épouse et sous les yeux des parents. Les usages qui s'accomplissaient ensuite avaient plus de convenance. On présentait de l'eau à l'épouse, en signe de la pureté dont elle devait être ornée ; on lui remettait une clef, symbole de l'administration intérieure qui désormais lui était confiée ; enfin, elle s'asseyait un instant sur une toison de laine, qui lui rappelait les travaux domestiques auxquels elle devait se rendre familière.

 

 Les époux passèrent ensuite dans le triclinium, où le souper des noces était servi. Durant le festin, on chanta l'épithalame qui célébrait l'union de Valérien et de Cécile, et un choeur de musiciens fit retentir la salle du son harmonieux des instruments. Au milieu de ces profanes concerts, Cécile chantait aussi, mais dans son coeur, et sa mélodie s'unissait à celle des anges. Elle redisait au Seigneur cette strophe du Psalmiste qu'elle adaptait à sa situation : " Que mon coeur et mes sens demeurent purs, ô mon Dieu ! que ma pudeur ne souffre pas d'atteinte !" (Psal. CXVIII.) La chrétienté qui chaque année redit ces paroles de la vierge, au jour de sa fête, en a gardé fidèle mémoire,  et,  pour honorer le sublime concert que Cécile exécutait avec les anges bien au delà des mélodies de la terre, elle l'a saluée pour jamais reine de l'harmonie.

 

Après le festin, des matrones guidèrent les pas tremblants de Cécile jusqu'aux portes de la chambre nuptiale, décorée dans tout le luxe romain, mais rendue plus imposante par le silence et le mystère. Valérien suivait les traces de la vierge.

 

Quand ils furent seuls, tout à coup Cécile, remplie de la vertu d'en haut, adressa à son époux ces douces et naïves paroles : "Jeune et tendre ami, j'ai un secret à te confier ; mais jure-moi que tu sauras le respecter". Valérien jure avec ardeur qu'il gardera le secret de Cécile, et que rien au monde ne pourra forcer sa bouche à le révéler. — "Ecoute, reprend la vierge : j'ai pour ami un ange de Dieu qui veille sur mon corps avec sollicitude. S'il voit que, dans la moindre chose, tu oses agir avec moi par l'entraînement d'un amour sensuel, soudain sa fureur s'allumera contre toi, et, sous les coups de sa vengeance, tu succomberas dans la fleur de ta brillante jeunesse. Si, au contraire, il voit que tu m'aimes d'un coeur sincère et d'un amour sans tache, si tu gardes entière et inviolable ma virginité, il t'aimera comme il m'aime, et te prodiguera ses faveurs."

 

Troublé jusqu'au fond de son âme, le jeune homme, que la grâce maîtrise déjà à son insu, répond à la vierge : "Cécile, si tu veux que je croie à ta parole, fais-moi voir cet ange. Lorsque je l'aurai vu, si je le reconnais pour l'ange de Dieu, je ferai ce à quoi tu m'exhortes ; mais si tu aimes un autre homme, sache que je vous percerai de mon glaive l'un et l'autre". La vierge reprend avec une ineffable autorité : "Valérien, si tu veux suivre mon conseil, si tu consens à être purifié dans les eaux de la fontaine qui jaillit éternellement, si tu veux croire au Dieu unique, vivant et véritable, qui règne dans les cieux, tu pourras alors voir l'ange qui veille à ma garde. — Et quel est celui qui me purifiera, afin que je voie ton ange ?" reprit Valérien. — Cécile répondit : "Il existe un vieillard qui purifie les hommes, après quoi ils peuvent voir l'ange de Dieu. — Ce vieillard, où le trouverai-je ? dit Valérien. — Sors de la ville par la voie Appienne, répondit Cécile ; va vers la troisième colonne milliaire. Là, tu trouveras des pauvres qui demandent l'aumône à ceux qui passent. Ces pauvres sont l'objet de ma constante sollicitude, et mon secret leur est connu. Quand tu seras près d'eux, tu leur donneras mon salut de bénédiction, tu leur diras : Cécile m'envoie veus vous, afin que vous me fassiez voir le saint vieillard Urbain ; j'ai un message secret à lui transmettre. Arrivé en présence du vieillard, tu lui rendras les paroles que je t'ai dites ; il te purifiera et te revêtira d'habits nouveaux et blancs. A. ton retour, en rentrant dans cette chambre où je te parle, tu verras le saint ange devenu aussi ton ami, et tu obtiendras de lui tout ce que tu lui demanderas."

 

Poussé par une force inconnue, le jeune Romain, naguère si bouillant, quitte sans effort la vierge dont les accents si doux ont changé son coeur.

 

DOM GUÉRANGER

SAINTE CÉCILE ET LA SOCIÉTÉ ROMAINE AUX DEUX PREMIERS SIÈCLES (pages 110 à 117)

 

Cecilia

SAINTE CÉCILE - Santa Cecilia in Trastevere, Rome

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