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"Je vous donne un commandement nouveau : c'est de vous aimer les uns les autres.

 

Comme je vous ai aimés, vous aussi aimez-vous les uns les autres.

 

Ce qui montrera à tous les hommes que vous êtes mes disciples, c'est l'amour que vous aurez les uns pour les autres."

 

Evangile de Jésus-Christ selon  saint Jean 

   

 

Pentecôte

" Le Défenseur, l'Esprit Saint que le Père enverra en mon nom, lui, vous enseignera tout, et il vous fera souvenir de tout ce que je vous ai dit."

 

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean  

 

   

 

 El Papa es argentino. Jorge Bergoglio                 

Saint Père François

 

 

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1er mai 2011 Béatification de Jean-Paul II

Béatification du Serviteur de Dieu Jean-Paul II

 

 

  Béatification du Père Popieluszko

beatification Mass, in Warsaw, Poland

à Varsovie, 6 juin 2010, Dimanche du Corps et du Sang du Christ

 

 

presidential palace in Warsaw

Varsovie 2010

 

 

Basilique du Sacré-Cœur de Montmartre
Sanctuaire de l'Adoration Eucharistique et de la Miséricorde Divine

La miséricorde de Dieu est comme un torrent débordé. Elle entraîne les cœurs sur son passage.
(Saint Curé d'Ars)
 

 


Le côté du Christ a été transpercé et tout le mystère de Dieu sort de là. C’est tout le mystère de Dieu qui aime, qui se livre jusqu’au bout, qui se donne jusqu’au bout. C’est le don le plus absolu qui soit. Le don du mystère trinitaire est le cœur ouvert. Ce n’est pas une image, c’est une réalité. C’est la réalité la plus profonde qui soit, la réalité de l’amour.
Père Marie-Joseph Le Guillou




Dans le cœur transpercé
de Jésus sont unis
le Royaume du Ciel
et la terre d'ici-bas
la source de la vie
pour nous se trouve là.

Ce cœur est cœur divin
Cœur de la Trinité
centre de convergence
de tous les cœur humains
il nous donne la vie
de la Divinité.


Sainte Thérèse Bénédicte de la Croix
(Edith Stein)



Le Sacré-Cœur représente toutes les puissances d'aimer, divines et humaines, qui sont en Notre-Seigneur.
Père Marie-Eugène de l'Enfant Jésus

 



feuille d'annonces de la Basilique du Sacré-Coeur de Montmartre

 

 

 

 

 

 

 

     

The Cambrai Madonna

Notre Dame de Grâce

Cathédrale de Cambrai

 

 

 

Cathédrale Notre Dame de Paris 

   

Ordinations du samedi 27 juin 2009 à Notre Dame de Paris


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Solennité de l’Immaculée Conception de la Vierge Marie à Notre-Dame de Paris


NOTRE DAME DES VICTOIRES

Notre-Dame des Victoires




... ma vocation, enfin je l’ai trouvée, ma vocation, c’est l’Amour !

 

 

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Voyages de Benoît XVI

 

SAINT PIERRE ET SAINT ANDRÉ

Saint Pierre et Saint André

 

BENOÎT XVI à CHYPRE 

 

Benedict XVI and Cypriot Archbishop Chrysostomos, Church of 

Salutation avec l'Archevêque Chrysostomos à l'église d' Agia Kyriaki Chrysopolitissa de Paphos, le vendredi 4 juin 2010

 

     

 

Benoît XVI en Terre Sainte  


 

Visite au chef de l'Etat, M. Shimon Peres
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Visite au mémorial de la Shoah, Yad Vashem




 






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Vicariat hébréhophone en Israël

 


 

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SALVE REGINA

22 mars 2011 2 22 /03 /mars /2011 20:00

Lactance flatte un peu trop les Antonins, réservant sa sévérité pour Decius qu'il appelle l'exécrable animal, et pour ceux qui le suivirent ; mais le passage n'en est pas moins précieux, comme témoignage de la rapide propagation de la foi chrétienne à cette époque dans l'Empire, et ceux qui prétendraient excepter les Gaules auraient besoin d'y réfléchir encore. Il n'est pas de notre sujet de nous étendre davantage sur ce point.

 

Marc-Aurèle, en quittant la Germanie, ne devait pas être rassuré sur l'avenir de l'Empire. On pouvait refouler pour un temps les barbares sur la rive gauche du Danube ; mais il y avait tout lieu de craindre qu'un jour ou l'autre, leur marche ne s'arrêtât plus. L'Orient était-il plus fidèle à Rome ? La révolte de Cassius fit voir le contraire. La Syrie et l'Egypte se donnèrent à ce soldat de fortune, et la nouvelle en vint chercher Marc-Aurèle jusqu'au fond de la Pannonie. Cassius, il est vrai, succomba sous le glaive d'un centurion, et l'Orient resta assujetti au joug de Rome. Quant à Marc-Aurèle, délivré encore une fois du péril, il sentit qu'il devait se montrer à Antioche et à Alexandrie, et partit pour l'Orient. Il s'était donné les airs d'un chrétien par la clémence dont il avait usé envers la mère, le gendre et les enfants de Cassius, comme s'il eût voulu montrer   que   la   philosophie   pouvait   élever l'homme aussi haut que l'Evangile. Les applaudissements et les acclamations ne lui manquèrent pas. Il dit à ce sujet : "Je n'ai pas assez mal vécu, ni assez mal servi les dieux, pour que Cassius eût jamais pu être vainqueur". Un chrétien eût dit simplement : "J'ai fait ce que je devais faire". (LUC, XVII.) Il y a ici toute la différence qui sépare deux doctrines, l'une fondée sur la glorification de Dieu et l'autre sur l'exaltation de l'homme.

 

Le philosophe couronné, traversant la Grèce, ne manqua pas l'occasion de se faire initier au sanctuaire de la Minerve d'Athènes et aux mystères de Cérès à Eleusis. Son spiritualisme, nous l'avons dit, ne le garantissait pas de la superstition, et c'est une des raisons pour lesquelles le christianisme, qui ne pactise pas avec la superstition, était particulièrement odieux à l'école stoïcienne, qui avait toujours soin de ménager ce mauvais côté de l'homme. Mais on ne tarda pas à voir jusqu'où allait chez le plus sage des Césars le mépris de la nature humaine, sous le voile d'un culte religieux. Faustine avait suivi son mari en Orient. Elle mourut inopinément au pied du mont Taurus, laissant peser sur elle le soupçon d'une complicité avec Cassius, dont elle eût espéré le titre d'Auguste pour prix de sa main. Les honneurs de l'apothéose n'en attendaient pas moins la nouvelle Messaline. Marc-Aurèle les sollicita du sénat, en présence duquel il prononça l'éloge de cette femme décriée : le sénat s'empressa d'accorder la demande. Cette ignoble faiblesse du mari excita plus tard les railleries de Julien l'Apostat, cet autre philosophe couronné. Rome compta donc une divinité de plus, et le sénat vota un autel à Faustine, ordonnant que désormais toute Romaine nouvellement mariée y viendrait offrir un sacrifice, accompagnée de son époux.

 

Tel était l'appui que donnait aux moeurs politiques le sage tant vanté qui trouvait le christianisme trop dangereux pour lever l'arrêt de mort porté par Néron contre ses adhérents. Dans les rues de Rome, un chrétien conduit au martyre en vertu des lois maintenues par Marc-Aurèle, pouvait tous les jours rencontrer la pompe nuptiale de deux jeunes époux, se rendant à l'autel de Faustine, pour brûler l'encens aux pieds de sa statue d'argent, en vertu d'un sénatus-consulte rendu sur la demande du même César.

 

Que pouvait attendre l'Eglise sous un tel régime, sinon la persécution moins franche, mais tout aussi haineuse que celle qu'elle eut à subir de la part des empereurs qui lui furent le plus hostiles ? Après l'événement de la légion Fulminante, une sorte de pudeur politique assura aux chrétiens quelque répit, mais cette paix ne devait pas être de longue durée. Au fond, une rivalité d'école travaillait le philosophe couronné. Par un heureux plagiat, il avait su, comme plusieurs de ses prédécesseurs, emprunter au christianisme, qui s'infiltrait bon gré mal gré, certains principes plus conformes à l'humanité, et s'en servir pour modifier la législation de l'Empire ; mais le stoïcien, avec son orgueilleuse théorie du suicide, jalousait, on l'a vu, la mort humble et courageuse du martyr. Il eût voulu extirper de la terre cette race d'hommes, dont la philosophie supérieure voyait chaque jour s'accroître le nombre de ses partisans, tandis que les disciples du Portique ne devaient jamais arriver à la popularité. Invoquer la raison d'Etat contre les chrétiens aurait été intempestif. On venait de constater que dans la vaste conspiration de Cassius, qui avait failli embraser tout l'Orient, pas un seul d'entre eux ne s'était trouvé compromis. (TERTULL., Apolog., XXXV.) L'abstention des chrétiens dans une telle crise avait été pour l'Empire un service plus grand que le miracle de la légion Fulminante. Restait donc une seule ressource : celle de ne pas trop contrarier les instincts haineux dont une partie de la population de l'Empire était animée envers les chrétiens. Les calomnies les plus atroces, les fables les plus ridicules, circulaient de toutes parts sans obstacles, et l'émeute n'était pas moins à craindre que les dénonciateurs. Les récits contemporains les plus authentiques ne nous laissent aucun doute à ce sujet. Un trait direct, que nous sommes à même de vérifier,  constate aujourd'hui encore le mépris brutal des païens pour les fidèles, et cela jusque dans le palais de César.

 

On a découvert, en ces dernières années, une caricature grossièrement tracée sur le mur d'une salle basse dans les ruines du Palatin. Le local était occupé, vers les temps que nous racontons, par un poste de gardes impériaux, et l'un d'eux s'est laissé aller à l'envie de ridiculiser quelque camarade chrétien. Il a représenté un personnage à tête d'âne attaché à une croix. A côté est une figure de magot témoignant sa vénération pour le personnage crucifié. Comme explication, on lit ce graphite grec peu élégant de forme et peu correct : ΑΛΕΞΑΜΕΝΟС СΕΒΕΤΕ ΘΕΟΝ ; "Alexamène adore son Dieu". On sait par Tertullien que les païens accusaient les fidèles d'adorer l'âne. Minucius Félix en parle aussi dans son Octavius. Cette absurdité se rencontre déjà dans Tacite qui, prenant la chose de plus haut, étend l'accusation à la nation juive tout entière. Il arrivait dès lors ce qui arrive encore aujourd'hui, où l'on trouve des gens qui imputent à la croyance catholique des excentricités qui n'ont aucun fondement dans son symbole. Il ne tiendrait qu'à eux de s'assurer de la chose, mais on peut être sûr qu'ils ne le feront pas.

 

Plus récemment une nouvelle découverte est venue compléter la première. A quelque distance, gravé aussi sur l'enduit, est apparu cet autre graphite : ΑΛΕΞΑΜΕΝΟС, FIDELIS.

 

Cet Alexamène, confessant ainsi sa foi, a-t-il voulu répliquer à l'outrage que l'on faisait à son Dieu? ou la déclaration de sa foi a-t-elle provoqué l'insulte ? Il est difficile de le dire ; mais ces insultes personnelles n'étaient rien auprès du déchaînement dont les chrétiens étaient l'objet de la part du peuple superstitieux. Les calomnies odieuses et absurdes auxquelles les crimes des carpocratiens avaient donné occasion, trouvaient toujours la même créance, et l'on ne peut qu'être étonné du sérieux avec lequel les divers apologistes, dans leurs mémoires aux empereurs, sont obligés de discuter de si absurdes accusations. Au Palatin, on savait parfaitement à quoi s'en tenir sur ces fables. La haute moralité des chrétiens n'y faisait pas doute, et c'était même la principale raison d'une rivalité qui devait toujours être fatale au plus faible.

 

On était encore, il est vrai, au lendemain des mesures indulgentes prises à la suite de l'événement merveilleux qui avait signalé la campagne contre les Quades et les Marcomans ; mais si les dénonciations contre les chrétiens arrivaient par trop nombreuses, il était à prévoir que les magistrats, occupés à sévir contre les dénoncés, n'auraient bientôt plus assez de loisirs pour faire le procès des dénonciateurs. D'ailleurs l'émeute dispensait de toute formalité, et l'on savait bien qu'elle était toujours au moment d'éclater contre les chrétiens dans toutes les villes de l'Empire.

 

Marc-Aurèle ne pouvait-il pas donner en preuve de ses sentiments pleins d'humanité l'impopularité qu'il n'avait pas craint d'encourir lorsque, empruntant, sans le dire, l'idée chrétienne, il s'était permis de marchander le sang des gladiateurs dans l'amphithéâtre, au point d'irriter le peuple qui voyait en lui un ennemi de ses plaisirs ? Etait-ce donc sa faute, si les barrières qu'il avait posées sur la fin de son règne pour protéger les chrétiens, et derrière lesquelles ceux-ci se multipliaient de plus en plus, étaient parfois renversées par le peuple au nom de la religion de l'Empire ? Ajoutons que des encouragements et des excitations à la rigueur pouvaient bien aussi lui venir de son entourage. N'avait-il pas près de lui une tourbe de sophistes, de littérateurs, de jurisconsultes, tous stoïciens à la manière du maître et ennemis jurés des chrétiens ? Junius Rusticus, le meurtrier de saint Justin, n'avait-il pas été entre tous le favori et le conseil ordinaire de l'empereur, qui alla jusqu'à solliciter du sénat une statue en son honneur ? Un trait du caractère de Marc-Aurèle qui vient à notre sujet, est ce mot que lui attribue son historien Capitolinus : "Il vaut mieux, aurait-il dit, que je me conduise d'après le conseil de tels et tels amis, que de contraindre tels et tels amis à suivre la volonté de moi seul".

 

En 176, dès son retour de l'Orient, il associa à l'Empire son fils Commode, âgé de quinze ans. Ce jeune prince, digne fils de Faustine, n'avait aucune des qualités de son père, dont la philosophie n'était pas descendue jusqu'à lui. C'en était fait de la dynastie des Antonins ; l'impuissance du stoïcisme se déclarait, et l'Empire asiatique allait commencer bientôt.

 

A celte même époque, d'affreuses calamités éclataient dans plusieurs provinces : Ephèse et Smyrne s'affaissaient dans les tremblements de terre, et de toutes parts le peuple, surexcité par les prêtres des idoles, accusait les chrétiens d'être les auteurs de tant de maux. Entre les villes où des soulèvements populaires eurent lieu, il faut compter celle de Lyon dans les Gaules.

 

L'Eglise y était très florissante, et la réaction qui s'éleva contre elle en l'année 177, va nous éclairer sur la manière dont Marc-Aurèle entendait les adoucissements qu'il avait apportés au sort des chrétiens.

 

DOM GUÉRANGER

SAINTE CÉCILE ET LA SOCIÉTÉ ROMAINE AUX DEUX PREMIERS SIÈCLES (pages 87 à 94)

 

Cecilia

SAINTE CÉCILE - Santa Cecilia in Trastevere, Rome

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22 mars 2011 2 22 /03 /mars /2011 05:00

C'est alors qu'apparaissent Moïse et Élie qui parlent avec Jésus. Ce que le Ressuscité déclarera plus tard aux disciples sur la route d'Emmaüs est ici de l'ordre du phénomène visible. La Loi et les Prophètes parlent avec Jésus, parlent de Jésus. Luc est le seul à raconter - au moins sous forme de brève allusion - de quoi parlent les deux grands témoins de Dieu avec Jésus : "Apparus dans la gloire : ils parlaient de son départ qui allait se réaliser à Jérusalem" (Lc 9, 31). Le sujet de leur dialogue est la croix, mais il faut la comprendre dans toute son extension en tant que "exode de Jésus", qui devait avoir lieu à Jérusalem. La croix de Jésus est un exode, une sortie hors de cette vie, une traversée de la "mer Rouge" de la Passion et un passage vers la gloire, qui porte néanmoins toujours les stigmates de la Passion.

 

 Ce qui indique clairement que le sujet principal de la Loi et des Prophètes est "l'espérance d'Israël", l'exode qui libère définitivement, et que le contenu de cette espérance est le Fils de l'homme souffrant, le serviteur de Dieu, dont la souffrance permet d'ouvrir la porte sur la liberté et la nouveauté. Moïse et Élie sont eux-mêmes des figures et des témoins de la Passion. Avec le Transfiguré ils parlent de ce qu'ils ont dit sur terre, ils parlent de la Passion de Jésus, mais ce dialogue avec le Transfiguré fait apparaître que cette Passion apporte le salut, qu'elle est envahie par la gloire de Dieu, que la Passion devient lumière, liberté et joie.

 

 À ce point, il nous faut anticiper l'entretien que les trois disciples ont eu avec Jésus en descendant de la "haute montagne". Jésus parle avec eux de sa future résurrection d'entre les morts, ce qui implique évidemment le préalable de la crucifixion. Les disciples, eux, l'interrogent sur le retour d'Élie annoncé par les scribes. Sur quoi Jésus leur dit : "Certes, Élie viendra d'abord pour remettre tout en place. Mais alors, pourquoi l'Écriture dit-elle, au sujet du Fils de l'homme, qu'il souffrira beaucoup et sera méprisé ? Eh bien ! je vous le déclare : Élie est déjà venu, et ils lui ont fait tout ce qu'ils ont voulu, comme l'Écriture le dit à son sujet" (Mc 9, 12-13). Ainsi Jésus confirme, d'un côté, l'attente du retour d'Élie, mais il complète et corrige, de l'autre, l'idée qu'on s'en fait. Sans le dire expressément, il identifie l'Élie qui revient à Jean le Baptiste : c'est dans l'activité du Baptiste que s'est produit le retour d'Élie.

 

 Jean était venu pour rassembler à nouveau Israël, pour le préparer à la venue du Messie. Mais si le Messie est lui-même le Fils de l'homme souffrant, et si lui seul ouvre la voie du salut par cette souffrance, alors l'activité préparatoire d'Élie doit nécessairement se placer, d'une façon ou d'une autre, sous le signe de la Passion. Et en effet : "Ils lui ont fait tout ce qu'ils ont voulu, comme l'Écriture le dit à son sujet" (Mc 9, 13). Jésus rappelle alors ce qu'a réellement été le destin du Baptiste, mais en citant l'Écriture, il fait également allusion à l'existence de traditions qui prévoyaient le martyre d'Élie : Élie passait pour le seul qui avait échappé au martyre, bien qu'il fût aussi poursuivi. Lors de son retour... il devra lui aussi subir la mort.

 

 Attente du salut et Passion sont donc constamment liées, si bien qu'est élaborée une conception de la Rédemption qui est profondément conforme à l'Écriture, tout en étant d'une nouveauté bouleversante par rapport aux attentes existantes. L'Écriture devait nécessairement être relue avec le Christ souffrant et elle doit continuer à l'être. Sans relâche nous devons laisser le Seigneur nous introduire dans son dialogue avec Moïse et Élie, sans relâche nous devons apprendre de lui, le Ressuscité, comment renouveler notre compréhension de l'Écriture.

 

Transfiguration by Cristofano Gherardi

 

 Revenons maintenant au récit proprement dit de la Transfiguration. Les trois disciples sont bouleversés par la grandeur de l'apparition : la "crainte de Dieu" les saisit, comme nous l'avons vu à d'autres moments où ils ont éprouvé la présence de Dieu en Jésus, où ils ont ressenti du même coup à quel point ils étaient pitoyables et ils ont été réellement paralysés par la peur. "Tant était grande leur frayeur", nous dit Marc (9, 6). Ce qui n'empêche pas Pierre de parler, même si "de fait, il ne savait que dire" (9, 6) : "Rabbi, il est heureux que nous soyons ici ! Dressons donc trois tentes : une pour toi, une pour Moïse et une pour Élie" (Mc 9, 5).

 

Ces paroles prononcées sur un mode quasi extatique, dans la crainte et en même temps dans la joie causées par la proche présence de Dieu, ont fait l'objet d'innombrables discussions. Ont-elles un rapport avec la fête des Tentes, au dernier jour de laquelle l'apparition eut lieu ? Hartmut Gese le conteste et pense que la véritable référence dans l'Ancien Testament se trouve dans les versets 7 à 11 du chapitre 33 de l'Exode, dans lesquels se trouve décrite la "ritualisation de l'événement du Sinaï" : selon ce texte, Moïse plante "hors du camp" la tente de la Révélation sur laquelle descend la colonne de nuée qui se tient ensuite à l'entrée. Dans cette tente, le Seigneur et Moïse parlaient "face à face, comme on s'entretient d'homme à homme". Ainsi Pierre voulait pérenniser l'événement en dressant des tentes de la Révélation. La nuée qui recouvre les disciples de son ombre pourrait confirmer l'hypothèse de Gese. Ces textes pourraient donc se faire écho, car l'exégèse juive et l'exégèse du christianisme primitif connaissent l'une et l'autre une imbrication de références à la Révélation, qui les fait se rejoindre et se compléter. Qu'il soit question de trois tentes à dresser contredit un tel rapport ou montre, tout au moins, qu'il est secondaire.

 

Le rapport avec la fête des Tentes devient pertinent quand on considère la signification messianique de cette fête dans le judaïsme de l'époque de Jésus. Jean Daniélou a fait ressortir cet aspect dans une étude convaincante et il l'a relié au témoignage des Pères, qui connaissaient encore très bien les traditions juives et les interprétaient à la lumière du contexte chrétien. La fête des Tentes présente le caractère tridimensionnel que l'on retrouve généralement dans les grandes fêtes juives : une fête provenant à l'origine de la religion de la nature devient en même temps une fête de commémoration historique des actions salvifiques de Dieu, et le souvenir devient l'espérance du salut définitif. La création, l'histoire et l'espérance sont reliées les unes aux autres. Si la fête des Tentes avec son sacrifice de l'eau permettait d'implorer la pluie indispensable pour une terre desséchée, la fête se transforme aussitôt en commémoration de la traversée du désert par Israël, au cours de laquelle les Juifs habitaient dans des tentes (des cabanes, soukkhot) (Lv 23, 43). Daniélou cite Riesenfeld : "Les cabanes furent conçues non seulement comme une réminiscence de la protection divine dans le désert, mais aussi comme une préfiguration des soukhhot dans lesquels les justes habiteraient dans le siècle à venir. Ainsi il apparaît qu'une signification eschatologique très précise était attachée au rite le plus caractéristique de la fête des tabernacles, telle qu'elle était célébrée au temps du judaïsme."

 

Dans le Nouveau Testament, c'est chez Luc qu'il est fait mention des tentes éternelles habitées par les justes dans la vie future. "La manifestation de la gloire de Jésus apparaît à Pierre comme le signe que les temps messianiques sont arrivés. Or l'un des caractères des temps messianiques était l'habitation des justes dans les cabanes qui figuraient les huttes de la fête des Tabernacles". L'expérience de la Transfiguration vécue par Pierre pendant la fête des Tentes lui a permis de comprendre dans son extase que "les réalités préfigurées par les rites de la fête étaient accomplies... Ainsi la scène de la Transfiguration marque que les temps messianiques sont arrivés". C'est seulement en descendant de la montagne que Pierre devra s'ouvrir à une nouvelle évidence : l'époque messianique est tout d'abord l'époque de la croix, et la Transfiguration - devenir lumière en vertu du Seigneur et avec lui - implique que notre être soit transformé par la lumière de la Passion.

 

C'est à partir de ce contexte qu'une nouvelle signification peut être donnée à la parole fondamentale du prologue de Jean par laquelle l'évangéliste résume le mystère de Jésus : "Le Verbe s'est fait chair et il a habité [littéralement, il a campé] parmi nous" (Jn 1, 14). Oui, le Seigneur a "campé", dressé la tente de son corps parmi nous, inaugurant ainsi l'époque messianique.

 

Dans ce sillage, Grégoire de Nysse a médité ensuite, dans un texte magnifique, le rapport entre la fête des Tentes et l'Incarnation. Il dit que la fête des Tentes a certes toujours été célébrée, mais qu'elle n'a pas été accomplie : "Le véritable constructeur des tabernacles n'était pas encore là. C'est pour accomplir cette fête, conformément à la parole prophétique [allusion au PS 118, 27], que le Dieu et Seigneur de tout s'est manifesté à nous pour accomplir la reconstruction de la tente détruite de la nature humaine."

 

> fiche de l'édition de poche

demain : l'anticipation de la Parousie   

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21 mars 2011 1 21 /03 /mars /2011 22:30
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21 mars 2011 1 21 /03 /mars /2011 20:00

Un évêque nommé Urbain remplit un rôle principal dans les Actes de sainte Cécile. Son existence y paraît liée à cette région de la voie Appienne que nous explorons en ce moment.

 

 Les Actes le montrent en rapport le plus intime avec Cécile. Il est constant que les Caecilii avaient une propriété sur la voie Appienne, en face du cimetière de Prétextât ; des relations devaient naturellement s'ensuivre entre eux et le représentant d'Eleuthère. On voit aussi par les Actes que, dans les moments où sévissait la persécution, des moyens étaient établis et connus des Caecilii pour communiquer avec Urbain sur la voie Appienne. On ne doit pas oublier non plus que la sépulture d'Urbain, après son martyre, eut lieu au cimetière de Prétextât, et que l'unique temple du pagus Triopius qui soit demeuré debout, transformé en église, porte de temps immémorial le vocable du saint évêque.

 

 Dès le siècle dernier, le savant jésuite Lesley, dans les notes de son édition du missel mozarabe dédiée à Benoît XIV, ne fait aucune difficulté de reconnaître dans l'Urbain des Actes de sainte Cécile un évêque dont la résidence aurait été, sous Marc-Aurèle, un pagus de la voie Appienne. Le P. du Sollier, dans son commentaire du Martyrologe d'Usuard, et le docte Mazzochi, dans son précieux travail sur le calendrier napolitain, avaient déjà pressenti l'incompatibilité du récit des Actes de sainte Cécile avec les événements du pontificat de saint Urbain Ier, sous Alexandre Sévère. Nous avions exposé leur sentiment dans la deuxième édition de notre Histoire de sainte Cécile, sans cependant abandonner l'opinion vulgaire. L'évidence des faits nous a contraint depuis à changer d'avis; mais nous ne nous étions pas permis de mépriser l'autorité de ces savants hommes ; bien moins encore, nous serions-nous scandalisé à propos d'une pure question de chronologie, qui ne tient ni de près ni de loin à la révélation.

 

 On ne doit pas s'étonner qu'Eleuthère apparaisse ainsi accompagné d'un vicaire revêtu du caractère épiscopal, quand on se rappelle que saint Pierre lui-même avait ordonné évêques Linus, Cletus et Clément. Le savant Bianchini a prouvé assez clairement que plusieurs des papes que nous avons vus se succéder, avaient d'abord servi en qualité de vicaires de leur prédécesseur. Avant lui, le P. Papebrock, dans ses travaux sur la chronologie papale, avait proposé ce système, et plus d'une fois il l'a justifié par des arguments très plausibles. La liberté avec laquelle Urbain agit dans Rome d'après le récit des Actes, dénote en lui trop expressément la qualité de représentant du pontife, pour qu'il soit possible de douter qu'il ait joui de toute la confiance d'Eleuthère. Les Actes de saint Urbain lui-même nous apprennent qu'il était d'un âge avancé, et que déjà à deux reprises, il avait confessé la foi. On voit par ceux de sainte Cécile que la notoriété de ce saint personnage était assez grande pour que les païens fussent conduits à voir en lui le chef du christianisme dans Rome.

 

 Nous venons de rappeler les propriétés que les Caecilii possédaient sur la droite de la voie Appienne. Dans les années où nous sommes arrivés, la piété de certains membres de cette famille y avait fait entreprendre un nouvel hypogée chrétien appelé aux plus hautes destinées. Peut-être l'initiative de ce travail vint-elle de Cécile elle-même ; dans tous les cas, c'est là qu'elle devait reposer bientôt, et attirer autour d'elle toutes les grandeurs de l'église romaine.  La voie Appio-Ardéatine, qui a disparu sous les terrains de la vigne Amendola, isolait ce nouveau cimetière de celui de Lucine ; plus tard, ils furent mis en communication au moyen de galeries creusées sous la voie. Jusque-là, les Caecilii chrétiens avaient eu leurs sépultures dans les cryptes de Lucine, et nous verrons une partie de la famille demeurer fidèle à cette tradition. Nous allons avoir à suivre les développements du nouveau cimetière, qui débuta,  selon l'usage, par une salle sépulcrale destinée aux membres de la famille qui le faisait construire. Ainsi se préparait sans bruit celui des cimetières de Rome souterraine qui devait approcher le plus de la gloire dont le cimetière des Cornelii était en possession dès l'an 67 ; ainsi le christianisme, objet de répulsion pour les uns et  d'un   héroïque   dévouement   pour   d'autres, poursuivait de toutes parts l'occupation du sol romain. Quant à la personne des chrétiens, les exécutions à mort allaient leur train, à la volonté des dénonciateurs ; la liberté et la vie n'étaient plus assurées ; mais on circulait, on entretenait ses relations jusqu'à ce que l'on fût appelé au prétoire. L'autorité avait des moyens d'arrêter une cause trop compromettante, et aussi d'accélérer l'issue fatale d'un procès, auquel souvent il arrivait qu'elle n'était pas étrangère.

 

 C'est au milieu de cette situation qu'en l'année 174 Marc-Aurèle passa le Danube à la tête de ses troupes, dans une expédition contre les barbares qui ravageaient la frontière de l'Empire. Les légions romaines firent reculer les Marcomans ; mais quand l'empereur se fut avancé dans le pays des Quades, son armée se trouva enveloppée par ces barbares, dont le nombre était de beaucoup supérieur à celui des Romains. Un soleil ardent faisait ressentir aux soldats une soif dévorante, la lutte était devenue impossible pour l'armée romaine, et un désastre était à craindre. En ce moment redoutable pour l'Empire, Dieu tenta par un dernier effort d'enlever Marc-Aurèle à son orgueil et à ses préjugés, en accordant aux prières des chrétiens un miracle qui sauvera l'armée et l'empereur. Celui-ci avait eu recours inutilement aux incantations de ses magiciens, lorsque la douzième légion appelée la Fulminante, formée tout entière de chrétiens et recrutée dans le district de Mélitène en Cappadoce, sortit du camp, et, fléchissant le genou, implora le secours du vrai Dieu. Les barbares furent dans la stupeur à la vue de ces six mille hommes priant immobiles ; les bras étendus ; mais ils furent bien autrement surpris, lorsqu'un épais nuage se forma tout à coup au-dessus des deux armées, versant les flots d'une pluie rafraîchissante sur les Romains et éclatant en grêle et en foudre sur eux-mêmes. La déroute des Quades fut promptement décidée ; ils se ruaient sous l'incendie céleste, et, loin de poursuivre désormais les Romains, ils se jetaient dans leurs lignes, désespérés et implorant la clémence de Marc-Aurèle.

 

Tout l'Empire demeura persuadé qu'un secours surnaturel était descendu sur l'armée romaine. Les auteurs païens, Dion Cassius, Lampridius, Capitolinus, Themistius, Claudien, s'accordent sur le fait en lui-même avec les écrivains de l'antiquité chrétienne. II est hors de doute que l'intervention pieuse de la légion de Mélitène fut non seulement connue, mais consentie par Marc-Aurèle, qui avait recours en même temps à ses dieux. Dans une lettre au sénat que rappellent aux païens Apollinaire et Tertullien, auteurs contemporains, et qui n'a rien de commun avec la pièce apocryphe qui a été fabriquée à ce sujet, Marc-Aurèle mentionnait la prière des chrétiens, entre les secours à l'aide desquels un tel bienfait avait été obtenu du ciel. Quant aux auteurs païens, ils cherchent à en rendre compte, en invoquant les uns les ressources de la magie, les autres la piété de l'empereur.

 

Il est indubitable, par le témoignage de Tertullien dans son Apologétique, que Marc-Aurèle crut devoir, à cette occasion, faire quelque chose en faveur des chrétiens. Il se garda bien, à la vérité, d'abolir la pénalité décernée contre eux par les lois de l'Empire, mais il renouvela et aggrava même les ordonnances d'Antonin, qui punissaient de mort leurs dénonciateurs. L'avenir de la persécution demeurait toujours réservé, et on avait l'air de faire quelque chose pour une partie nombreuse de la population. Comme les chrétiens ne se défendaient pas, on serait toujours à même de tourner contre eux l'un des tranchants de ce glaive qui en avait deux. En attendant, l'Eglise profitait de la demi-liberté qui lui était laissée. C'était beaucoup pour elle de n'avoir à redouter que la persécution de fait, et elle en profitait pour étendre indéfiniment ses conquêtes. Il n'y a donc pas lieu de s'étonner si, d'après le témoignage des anciens, malgré tant de violences et un si grand nombre de martyrs dans tout l'Empire, l'époque des Antonins vit, plus que toute autre, la propagation du christianisme. Trajan, Hadrien et Marc-Aurèle lui-même furent loin de tenter contre les chrétiens tout ce qu'ils auraient pu, et l'on sait combien le zèle de la foi a toujours été empressé de profiter des moindres libertés pour répandre jour et nuit la parole divine.

 

On entend dire quelquefois,  aujourd'hui encore, que le christianisme ne fut pas propagé dans les Gaules  avant le  milieu du troisième siècle. Les soutenants de cette opinion, qu'a vue naître   le   dix-septième   siècle,   devraient   enfin s'apercevoir qu'ils montrent trop gratuitement la légèreté de leur savoir. Est-il possible d'ignorer que saint Irénée, Tertullien et Origène s'accordent à nommer la Gaule parmi les contrées où florissait déjà l'Evangile ? Qu'il nous soit permis d'ajouter à ces trois grands témoins Lactance, qui n'a point été cité dans la controverse, et qui, en ruinant de fond en comble le système, a l'avantage de confirmer directement ce que nous venons de dire. On pourra y prendre une idée de l'extension du christianisme sous les Antonins, et par là même du progrès qu'il dut faire alors dans la Gaule si voisine de Rome. "Après l'acte du sénat qui cassa toutes les sentences du tyran Domitien,  dit cet auteur,   l'Eglise reprit non seulement son état antérieur (celui qu'elle avait eu sous les Flaviens) ; mais elle brilla et fleurit toujours davantage. A l'époque qui suivit, durant laquelle plusieurs princes ornés de bonnes qualités tinrent le gouvernail  de l'Empire romain, elle se trouva garantie des assauts de ses ennemis, et put étendre ses bras tant à l'Orient qu'à l'Occident. Il n'y eut plus un coin de terre, si éloigné qu'il fût, où le culte de Dieu ne pénétrât ; il n'y eut plus une nation, si féroce qu'elle fût, qui n'eût accepté la vraie religion, et adouci ses moeurs au moyen des oeuvres saintes." (De mortibus persec, cap. III.)

 

Lactance flatte un peu trop ici les Antonins, réservant sa sévérité pour Decius qu'il appelle l'exécrable animal, et pour ceux qui le suivirent; mais le passage n'en est pas moins précieux, comme témoignage de la rapide propagation de la foi chrétienne à cette époque dans l'Empire, et ceux qui prétendraient excepter les Gaules auraient besoin d'y réfléchir encore.

 

Il n'est pas de notre sujet de nous étendre davantage sur ce point.

 

DOM GUÉRANGER

SAINTE CÉCILE ET LA SOCIÉTÉ ROMAINE AUX DEUX PREMIERS SIÈCLES (pages 80 à 86)

 

Cecilia

SAINTE CÉCILE - Santa Cecilia in Trastevere, Rome

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21 mars 2011 1 21 /03 /mars /2011 05:00

La confession de foi de Pierre et le récit de la Transfiguration de Jésus sont reliés par une indication temporelle dans les trois synoptiques. Matthieu et Marc disent : "Six jours après, Jésus prend avec lui Pierre, Jacques et Jean, et les emmène, eux seuls, à l'écart" (Mc 9, 2 ; Mt 17, 1). Luc écrit : "Et voici qu'environ huit jours après avoir prononcé ces paroles, Jésus prit avec lui Pierre, Jean et Jacques" (Lc 9, 28).

 

Cela signifie d'abord qu'il y a un lien entre les deux événements, dans lesquels Pierre joue un rôle essentiel. Nous pourrions dire dans un premier temps qu'il s'agit, les deux fois, de la divinité de Jésus, le Fils, mais que, les deux fois, la manifestation de sa gloire est également liée au thème de la Passion. La divinité de Jésus et la croix sont indissociables, et seule cette relation permet de bien comprendre Jésus. Jean a su exprimer cette intrication entre la croix et la gloire, quand il dit que la croix est "l'exaltation" de Jésus et que son "exaltation" ne peut s'accomplir autrement que par la croix. Mais il est temps d'examiner d'un peu plus près cette datation étrange. Il y a deux interprétations divergentes, étant entendu que celles-ci ne s'excluent pas obligatoirement l'une l'autre.

 

 Jean-Marie van Cangh et Michel van Esbroek, en particulier, ont étudié le rapport avec le calendrier des fêtes juives. Ils attirent notre attention sur le fait que cinq jours seulement séparent deux grandes fêtes juives de l'automne. Il y a d'abord Yom Kippour, la fête du Grand Pardon, et, six jours après, on célèbre, une semaine durant, la fête des Tentes (Soukkhot). Cela signifierait que la confession de foi de Pierre coïncidait avec le jour du Grand Pardon et que du point de vue théologique, il faudrait l'interpréter aussi sur l'arrière-plan de cette fête qui est le seul jour de l'année où le grand prêtre prononce solennellement le nom de YHWH dans le Saint des Saints du Temple. La confession de foi de Pierre en Jésus Fils du Dieu vivant acquerrait, dans ce contexte, une nouvelle profondeur. A l'inverse, Jean Daniélou rapporte, lui, la datation des évangélistes exclusivement à la fête des Tentes qui, nous l'avons vu, dure une semaine entière. Ainsi les indications de temps données par Matthieu, Marc et Luc seraient en fin de compte convergentes. Les six à huit journées désigneraient alors la semaine de Soukkhot, la fête des Tentes. La Transfiguration de Jésus aurait donc eu lieu le dernier jour de cette fête, qui en constituait en même temps le sommet et la synthèse profonde.

 

 Ce que les deux interprétations ont en commun, c'est que la Transfiguration de Jésus a un rapport avec la fête des Tentes. Nous verrons que ce rapport apparaît effectivement dans le texte lui-même et qu'il nous permet de mieux comprendre cet épisode dans son ensemble. Au-delà de leurs particularités, ces récits montrent un trait fondamental de la vie de Jésus, que Jean a particulièrement fait ressortir, comme nous l'avons vu au chapitre précédent. Les événements majeurs de la vie de Jésus ont un rapport intrinsèque avec le calendrier des fêtes juives. Ce sont, pourrait-on dire, des événements liturgiques dans lesquels la liturgie avec ses commémorations et ses attentes devient réalité, devient vie qui conduit à son tour à la liturgie et, de là, aspire à redevenir vie.

 

 C'est justement en analysant les rapports entre l'histoire de la Transfiguration et la fête des Tentes que nous nous apercevrons clairement, une fois encore, que toutes les fêtes juives recèlent trois dimensions. Elles proviennent de célébrations de la religion de la nature et elles parlent donc du créateur et de la création. Elles se transforment ensuite en souvenirs de l'agir de Dieu dans l'histoire et enfin, de là, en fêtes de l'espérance qui vont au-devant du Seigneur qui vient. En lui, s'accomplit l'action salvifique de Dieu dans l'histoire, qui devient en même temps la réconciliation de la création entière. Nous verrons comment ces trois dimensions des fêtes s'approfondissent et se régénèrent par leur réalisation dans la vie et la passion de Jésus.

 

 Face à cette interprétation liturgique de la date, on en trouve une autre, défendue avec insistance par Hartmut Gese. Estimant que l'allusion à la fête des Tentes n'est pas suffisamment fondée, cette interprétation lit tout le texte en se référant à la montée de Moïse sur le mont Sinaï au chapitre 24 du Livre de l'Exode. Et en effet, ce chapitre qui raconte la conclusion par Dieu de l'alliance avec Israël, est une clé essentielle pour interpréter l'histoire de la Transfiguration. On peut y lire : "La gloire du Seigneur demeura sur la montagne du Sinaï, que la nuée recouvrit pendant six jours. Le septième jour, le Seigneur appela Moïse du milieu de la nuée" (Ex 24, 16). Qu'il soit ici question du septième jour, à la différence de ce qui est dit dans les Évangiles, n'invalide pas obligatoirement le rapport entre le chapitre 24 de l'Exode et l'histoire de la Transfiguration, mais la datation à partir du calendrier des fêtes juives me paraît plus convaincante. Pour le reste, il n'y a, il est vrai, rien d'inhabituel dans le fait que des connexions typologiques différentes se trouvent réunies dans certains épisodes de la vie de Jésus, ce qui montre clairement que, globalement, Moïse et les prophètes parlent tous de Jésus.

 

The Transfiguration of Christ by Gerard David

 

 Venons-en à présent au texte même de la Transfiguration. On peut y lire que Jésus prit avec lui Pierre, Jacques et Jean, et qu'il les emmena seuls sur une haute montagne (Mc 9, 2). Nous retrouverons ces trois disciples sur le mont des Oliviers (Mc 14, 33), à l'heure de l'ultime angoisse de Jésus. Cette scène contraste avec celle de la Transfiguration, mais toutes deux, néanmoins, sont indissociablement liées. C'est ici qu'on ne peut ignorer le rapport avec le chapitre 24 du Livre de l'Exode, où Moïse, dans sa montée, prend avec lui Aaron, Nadab et Abihu, mais aussi soixante-dix des anciens d'Israël.

 

 Comme c'était déjà le cas pour le Sermon sur la montagne et dans les nuits de prière, nous rencontrons à nouveau la montagne comme lieu de la proximité de Dieu. Rassemblons donc encore une fois les différentes montagnes de la vie de Jésus : la montagne de la tentation, la montagne de sa grande prédication, la montagne de la prière, la montagne de la Transfiguration, la montagne de l'angoisse, la montagne de la crucifixion et pour finir la montagne de l'Ascension, sur laquelle le Seigneur, en opposition avec l'offre de domination sur le monde par le pouvoir du diable, déclare : "Tout pouvoir m'a été donné au ciel et sur la terre" (Mt 28, 18). Mais en arrière-plan, on voit aussi se profiler le Sinaï, l'Horeb, le mont Moriah - monts de la révélation de l'Ancien Testament, qui sont tout à la fois des monts de la passion et des monts de la révélation, et qui renvoient aussi au mont du Temple, sur lequel la révélation devient liturgie.

 

Si nous cherchons une interprétation il y a d'abord en arrière-fond le symbolisme général de la montagne : la montagne comme lieu d'élévation, non seulement d'ascension extérieure, mais aussi d'élévation intérieure. La montagne comme libération du fardeau de la vie quotidienne, comme respiration de l'air pur de la création, la montagne du haut de laquelle on embrasse l'étendue de la création et sa beauté, la montagne qui me donne une élévation intérieure et qui me fait pressentir le Créateur. À partir de l'histoire, s'ajoutent à tout cela l'expérience du Dieu qui parle et l'expérience de la passion, avec son apogée dans le sacrifice d'Isaac, dans le sacrifice de l'agneau, préfiguration de l'Agneau définitif sacrifié sur la montagne du Golgotha. Sur la montagne, Moïse et Élie avaient pu recevoir la révélation de Dieu ; et ils s'entretiennent maintenant avec celui qui est la Révélation de Dieu en personne.

 

" Et il fut transfiguré devant eux", dit alors Marc avec une grande simplicité, ajoutant avec une certaine maladresse, quasi balbutiant devant le mystère : "Ses vêtements devinrent resplendissants, d'une blancheur telle que personne sur terre ne peut obtenir une blancheur pareille" (Mc 9, 3). En cette circonstance, les mots dont dispose Matthieu sont déjà bien plus grandioses : "Son visage devint brillant comme le soleil, et ses vêtements, blancs comme la lumière" (Mt 17, 2). Luc est le seul à avoir évoqué le but de l'ascension, "il alla sur la montagne pour prier", avant de relater ensuite l'événement dont les trois disciples sont témoins : "Pendant qu'il priait, son visage apparut tout autre, ses vêtements devinrent d'une blancheur éclatante" (Lc 9, 29).

 

 La Transfiguration est un événement de prière. Ce qui devient visible, c'est ce qui se passe quand Jésus parle avec le Père, l'intime unité de son être avec Dieu, qui devient pure lumière. Dans son union avec le Père, Jésus est lui-même lumière de lumière. Ce qu'il est au plus intime de lui-même et ce que Pierre avait tenté de dire dans sa confession de foi, tout cela devient même, à cet instant, perceptible par les sens : l'être de Jésus dans la lumière de Dieu, son propre être-lumière en tant que Fils.

 

C'est ici que se manifestent tout à la fois le rapport et la différence avec la figure de Moïse : "Lorsque Moïse descendit de la montagne du Sinaï, ayant en mains les deux tables de la charte de l'Alliance, il ne savait pas que son visage rayonnait de lumière depuis son entretien avec le Seigneur" (Ex 34, 29). Du fait qu'il parle avec Dieu, la lumière de Dieu rayonne sur lui et le fait rayonner lui-même. Mais il s'agit d'un rayon qui arrive sur lui de l'extérieur, et qui le fait resplendir ensuite. Jésus, lui, resplendit de l'intérieur, il ne fait pas que recevoir la lumière, il est lui-même lumière de lumière.

 

Et pourtant le vêtement blanc de lumière que porte Jésus lors de la Transfiguration parle aussi de notre avenir. Dans la littérature apocalyptique, les vêtements blancs sont l'expression des êtres célestes — les vêtements des anges et des élus. Ainsi l'Apocalypse de Jean parle des vêtements blancs que porteront ceux qui seront sauvés (en particulier Ap 7, 9.13 ; 19, 14). Mais nous est aussi communiqué quelque chose de nouveau : les vêtements des élus sont blancs parce qu'ils les ont lavés et blanchis dans le sang de l'agneau (Ap 7, 14), ce qui signifie que, par le Baptême, ils sont liés à la Passion de Jésus, et que sa Passion est la purification qui nous rend le vêtement d'origine que nous avons perdu par le péché.

 

Par le Baptême, nous avons été revêtus de lumière avec Jésus et nous sommes devenus nous-mêmes lumière.

 

 

> fiche de l'édition de poche

demain : La Transfiguration marque que les temps messianiques sont arrivés

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20 mars 2011 7 20 /03 /mars /2011 21:46
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20 mars 2011 7 20 /03 /mars /2011 12:30

L’évangile de la Transfiguration du Seigneur nous fait contempler la gloire du Christ qui anticipe la résurrection et annonce la divinisation de l’homme.

 

La communauté chrétienne découvre qu’à la suite des apôtres Pierre, Jacques et Jean, elle est conduite "dans un lieu à part, sur une haute montagne" (Mt 17,1) afin d’accueillir d’une façon nouvelle, dans le Christ, en tant que fils dans le Fils, le don de la Grâce de Dieu : "Celui-ci est mon Fils bien-aimé, qui a toute ma faveur, écoutez-le".

 

Ces paroles nous invitent à quitter la rumeur du quotidien pour nous plonger dans la présence de Dieu : Il veut nous transmettre chaque jour une Parole qui nous pénètre au plus profond de l’esprit, là où elle discerne le bien et le mal (cf. He 4,12) et affermit notre volonté de suivre le Seigneur.

 

Benoît XVI

extrait du Message pour le Carême 2011

 

Transfiguration of Christ by Veronese

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