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"Je vous donne un commandement nouveau : c'est de vous aimer les uns les autres.

 

Comme je vous ai aimés, vous aussi aimez-vous les uns les autres.

 

Ce qui montrera à tous les hommes que vous êtes mes disciples, c'est l'amour que vous aurez les uns pour les autres."

 

Evangile de Jésus-Christ selon  saint Jean 

   

 

Pentecôte

" Le Défenseur, l'Esprit Saint que le Père enverra en mon nom, lui, vous enseignera tout, et il vous fera souvenir de tout ce que je vous ai dit."

 

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean  

 

   

 

 El Papa es argentino. Jorge Bergoglio                 

Saint Père François

 

 

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1er mai 2011 Béatification de Jean-Paul II

Béatification du Serviteur de Dieu Jean-Paul II

 

 

  Béatification du Père Popieluszko

beatification Mass, in Warsaw, Poland

à Varsovie, 6 juin 2010, Dimanche du Corps et du Sang du Christ

 

 

presidential palace in Warsaw

Varsovie 2010

 

 

Basilique du Sacré-Cœur de Montmartre
Sanctuaire de l'Adoration Eucharistique et de la Miséricorde Divine

La miséricorde de Dieu est comme un torrent débordé. Elle entraîne les cœurs sur son passage.
(Saint Curé d'Ars)
 

 


Le côté du Christ a été transpercé et tout le mystère de Dieu sort de là. C’est tout le mystère de Dieu qui aime, qui se livre jusqu’au bout, qui se donne jusqu’au bout. C’est le don le plus absolu qui soit. Le don du mystère trinitaire est le cœur ouvert. Ce n’est pas une image, c’est une réalité. C’est la réalité la plus profonde qui soit, la réalité de l’amour.
Père Marie-Joseph Le Guillou




Dans le cœur transpercé
de Jésus sont unis
le Royaume du Ciel
et la terre d'ici-bas
la source de la vie
pour nous se trouve là.

Ce cœur est cœur divin
Cœur de la Trinité
centre de convergence
de tous les cœur humains
il nous donne la vie
de la Divinité.


Sainte Thérèse Bénédicte de la Croix
(Edith Stein)



Le Sacré-Cœur représente toutes les puissances d'aimer, divines et humaines, qui sont en Notre-Seigneur.
Père Marie-Eugène de l'Enfant Jésus

 



feuille d'annonces de la Basilique du Sacré-Coeur de Montmartre

 

 

 

 

 

 

 

     

The Cambrai Madonna

Notre Dame de Grâce

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Ordinations du samedi 27 juin 2009 à Notre Dame de Paris


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... ma vocation, enfin je l’ai trouvée, ma vocation, c’est l’Amour !

 

 

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SALVE REGINA

6 mars 2010 6 06 /03 /mars /2010 17:00

II. JUDAS ET SA TROUPE


Judas ne s'attendait pas à ce que sa trahison eut les conséquences dont elle fut suivie. Il voulait mériter la récompense promise et se rendre agréable aux Pharisiens en leur livrant Jésus ; mais il ne pensait pas au résultat qui devait être la condamnation et le crucifiement du Sauveur. Ses vues n'allaient pas jusque-là. L'argent seul préoccupait son esprit, et depuis longtemps il s'était mis en relation avec quelques Pharisiens et quelques Sadducéens rusés qui l'excitaient à la trahison en le flattant. Il était las de la vie fatigante, errante et persécutée que menaient les apôtres. Dans les derniers mois il n’avait cessé de voler les aumônes dont il était dépositaire, et sa cupidité, irritée par la libéralité de Madeleine lorsqu'elle versa des parfums sur Jésus, le poussa au dernier des crimes. Il avait toujours espéré un royaume temporel de Jésus et un emploi brillant et lucratif dans ce royaume, ne le voyant pas paraître, il cherchait à amasser une fortune. Il voyait les peines et les persécutions s'accroître, et il pensait à se mettre bien avec les puissants ennemis du Sauveur avant l'approche du danger ; car il voyait que Jésus ne devenait pas roi, tandis que la dignité du grand prêtre et l’importance de ses affidés faisaient une vive impression sur lui. Il se rapprochait de plus en plus de leurs agents qui le flattaient sans cesse et lui disaient d'un ton très assuré que, dans tous les cas, on en finirait bientôt avec Jésus.

Récemment encore, ils étaient venus le trouver plusieurs fois à Béthanie. Il s’enfonça de plus en plus dans ses pensées criminelles, et il avait multiplié ses courses, dans les derniers jours, pour décider les princes des prêtres à agir. Ceux-ci ne voulaient pas encore commencer, et ils le traitèrent avec mépris. Ils disaient qu'il n'y avait pas assez de temps avant la fête, que cela y mettrait du désordre et du trouble. Le Sanhédrin seul donna quelque attention aux propositions de Judas. Après la réception sacrilège du Sacrement, Satan s’empara tout à fait de lui et il partit pour achever son crime. Il chercha d’abord les négociateurs qui l’avaient toujours flatté jusque-là, et qui l’accueillirent encore avec une amitié feinte. Il en vint d'autres, parmi lesquels Caïphe et Anne, ce dernier, toutefois, prit avec lui un ton hautain et moqueur. On était irrésolu, et on ne comptait pas sur le succès, parce qu'on ne se fiait pas à Judas.
 

Je vis l’empire infernal divisé : Satan voulait le crime des ennemis de Jésus, il désirait la mort de Jésus, le convertisseur, le saint docteur, le juste qu’il haïssait ; mais il éprouvait aussi je ne sais quelle crainte intérieure de la mort de cette innocente victime qui ne voulait pas se dérober à ses persécuteurs ; il lui portait envie de souffrir sans l'avoir mérité. Je le vis donc, d'un côté, exciter la haine et la fureur des ennemis de Jésus, et, d’un autre côté, insinuer à quelques-uns d'entre eux que Judas était un coquin, un misérable, qu'on ne pourrait pas rendre le jugement avant la fête, ni réunir un nombre suffisant de témoins contre Jésus.
 

Chacun mettait en avant une proposition différente ; et entre autres choses, ils demandèrent à Judas : “Pourrons nous le prendre ? n’a-t-il pas des hommes armés avec lui ?” Et le traître répondit : “non, il est seul avec onze disciples ; lui-même est tout découragé et les onze sont des hommes peureux.” Il leur dit aussi qu'il fallait s'emparer de Jésus maintenant ou jamais, qu'une autre fois il ne pourrait plus le leur livrer, qu’il ne retournerait peut-être plus près de lui, que depuis quelques jours les autres disciples et Jésus lui-même avaient évidemment des soupçons sur lui, qu'ils semblaient se douter de ses menées, et qu'ils le tueraient sans doute s'il revenait à eux. Il leur dit encore que s'ils ne prenaient pas Jésus actuellement, il s'échapperait et reviendrait avec une armée de ses partisans pour se faire proclamer roi. Ces menaces de Judas firent effet. On revint à son avis, et il reçut le prix de sa trahison, les trente pièces d'argent. Ces pièces avaient la forme d'une langue, elles étaient percées du côté arrondi et enfilées au moyen d'anneaux dans une espèce de chaîne, elles portaient certaines empreintes.

Judas, frappé du mépris et de la défiance qui perçaient dans leurs manières, fut poussé par l'orgueil à leur remettre cet argent pour l'offrir dans le Temple, afin de passer a leurs yeux pour un homme juste et désintéressé. Mais ils s’y refusèrent, parce que c'était le prix du sang qui ne pouvait être offert dans le Temple. Judas vit combien ils le méprisaient, et il en éprouva un profond ressentiment, il ne s'était pas attendu à goûter les fruits amers de sa trahison avant même qu'elle fût accomplie ; mais il s'était tellement engagé avec ces hommes qu’il était entre leurs mains et ne pouvait plus s'en délivrer. Ils l’observaient de très près et ne le laissèrent point partir qu'il n'eût exposé la marche a suivre pour s'emparer de Jésus. Trois Pharisiens l’accompagnèrent lorsqu'il descendit dans une salle où se trouvaient des soldats du Temple, qui n'étaient pas seulement des Juifs mais des hommes de toute nation. Lorsque tout fut arrangé et qu'on eût rassemblé le nombre de soldats nécessaire, Judas courut d'abord au Cénacle, accompagné d'un serviteur des Pharisiens, afin de leur faire savoir si Jésus y était encore, à cause de la facilité de le prendre là en s’emparant des portes. Il devait le leur faire dire par un messager.
 

Un peu auparavant, lorsque Judas eut reçu le prix de sa trahison, un Pharisien était sorti et avait envoyé sept esclaves chercher du bois pour préparer la croix du Christ, dans le cas où il serait jugé, parce que le lendemain on n'aurait pas eu assez de temps à cause du commencement de la Pâque. Ils prirent ce bois à un quart de lieue de là, près d'un grand mur où il y avait beaucoup d'autre bois appartenant au service du Temple, et le traînèrent sur une place derrière le tribunal de Caïphe, pour le façonner. La pièce principale de la croix avait été autrefois un arbre de la vallée de Josaphat, planté près du torrent de Cédron ; plus tard, étant tombé en travers, on en avait fait une espèce de pont. Lorsque Néhémie cacha le feu sacré et les saints vases dans l'étang de Bethsaïde, on le jeta par-dessus avec d'autres pièces de bois, plus tard, on l'en avait tiré et laissé de côté. La croix fut préparée d'une façon qui n'était pas ordinaire, soit parce qu'on voulait se moquer de la royauté de Jésus, soit par un hasard apparent, mais qui était dans les desseins de Dieu. Elle fut faite de cinq pièces de bois sans compter l'inscription. J'ai vu bien d'autres choses relatives à la croix, et j'ai su la signification des différentes circonstances, mais j'ai oublié tout cela.
 

Judas revint et dit que Jésus n'était plus dans le Cénacle, mais qu'il devait être certainement sur le Mont des Oliviers, au lieu où il avait coutume de prier. Il demanda qu'on n’envoyât avec lui qu'une petite troupe, de peur que les disciples qui étaient aux aguets ne s'aperçussent de quelque chose et n'excitassent une sédition. Trois cents hommes devaient occuper les portes et les rues d'Ophel, partie de la ville située au sud du Temple, et la vallée de Millo jusqu'à la maison d'Anne, au haut de Sion, afin d'envoyer des renforts si cela était nécessaire, car, disait-il, tout le petit peuple d'Ophel était partisan de Jésus. Le traître leur dit encore qu'ils devaient prendre garde qu'il ne leur échappât, lui qui, par des moyens mystérieux, s'était souvent dérobé dans la montagne et rendu tout à coup invisible à ceux qui l’accompagnaient. Il leur conseilla aussi de l'attacher avec une chaîne, et de se servir de certains moyens magiques pour l'empêcher de la briser. Les Pharisiens reçurent tous ces avis avec dédain et lui dirent : “Tu ne nous en imposeras pas ; si nous le tenons une fois, nous ne le laisserons pas s’échapper”.
 

Judas prit ses mesures avec ceux qui devaient l'accompagner : il voulait entrer dans le jardin avant eux, embrasser et saluer Jésus comme s'il revenait à lui en ami et en disciple après avoir fait ce dont il était chargé : alors les soldats accourraient et s'empareraient de Jésus. Il désirait qu'on crût qu'ils étaient venus là par hasard ; à leur vue il se serait enfui comme les autres disciples et on n'aurait plus entendu parler de lui. Il pensait aussi qu’il y aurait peut être du tumulte, que les apôtres se défendraient et que Jésus se déroberait comme il l'avait fait souvent, cette pensée lui venait par intervalles quand il se sentait blessé par les dédains des ennemis de Jésus, mais il ne se repentait pas, car il s'était donné tout entier à Satan.

Il ne voulait pas non plus que ceux qui viendraient derrière lui portassent des liens et des cordes : on eut l’air de lui accorder ce qu'il désirait, mais on en agit avec lui comme on fait avec un traître auquel on ne se fie pas, et qu'on repousse quand on s'en est servi. Les soldats avaient ordre de surveiller Judas de très près, et de ne pas le laisser aller qu'on ne se fût emparé de Jésus, car il avait reçu sa récompense. On pouvait craindre qu'il ne s’enfuit avec l'argent, et qu’on ne prit pas Jésus ou qu'on en prit un autre à sa place, ce qui n'aurait amené, pour tout résultat, que du désordre et des troubles pendant les fêtes de Pâques.

La troupe choisie pour accompagner Judas était de vingt soldats pris dans la garde du Temple et dans ceux qui étaient aux ordres d’Anne et de Caïphe. Ils étaient costumés à peu prés comme les soldats romains, ils portaient des morions et avaient comme eux des courroies pendantes autour des cuisses : ils s’en distinguaient principalement par la barbe, car les Romains a Jérusalem n’en portaient que sur les joues et avaient le menton et la lèvre rasés. Tous les vingt avaient des épées, quelques-uns étaient en outre armés de piques, ils portaient des bâtons avec des lanternes et des torches, mais lorsqu'ils partirent, ils n'en allumèrent qu'une seule. On avait d'abord voulu donner à Judas une escorte plus nombreuse, mais il fit observer qu'elle serait trop facile à apercevoir, parce que du Mont des Oliviers on avait vue sur la vallée. La plus grande partie resta donc à Ophel, et l'on plaça des postes de tous côtés pour comprimer tout soulèvement et toute tentative en faveur de Jésus. Judas partit avec les vingt soldats. mais il fut suivi à quelque distance par quatre archers, records de la dernière classe, qui portaient des cordes et des chaînes ; quelques pas derrière ceux-ci venaient ces six agents avec lesquels Judas s'était mis en rapport depuis quelque temps. C'était un prêtre, confident d'Anne, un affidé de Caïphe, deux employés pharisiens et deux employés sadducéens qui étaient aussi hérodiens. Ces hommes étaient des flatteurs d'Anne et de Caiphe, ils leur servaient d’espions, et Jésus n'avait pas d'ennemis plus acharnés.
 

Les soldats restèrent d'accord avec Judas jusqu’à l'endroit où le chemin sépare le jardin des Oliviers de celui de Gethsémani ; là ils ne voulurent pas le laisser aller seul en avant, ils prirent un autre ton avec lui et le traitèrent durement et insolemment.


III. JÉSUS EST FAIT PRISONNIER

Jésus se trouvant avec les trois apôtres sur le chemin entre Gethsémani et le jardin des Oliviers, Judas et sa troupe parurent à vingt pas de là, à l'entrée de ce chemin : il y eut contestation entre eux. parce que Judas voulait se séparer des soldats et aborder Jésus seul et en ami, de manière à ne pas paraître d'intelligence avec eux ; mais ceux-ci l'arrêtèrent et lui dirent : “Non pas ainsi, camarade, tu ne nous échapperas pas que nous n'ayons le Galiléen”. Et comme ils virent les huit apôtres qui accouraient au bruit, ils appelèrent à eux les quatre archers qui étaient à quelque distance. Judas ne voulait pas que ceux-ci intervinssent alors et, à cette occasion, il se disputa vivement avec eux.

Lorsque Jésus et les trois apôtres reconnurent, à la lueur de la torche, cette troupe de gens armés, Pierre voulut les repousser par la force : “Seigneur, dit-il, les huit sont tout près d'ici, attaquons les archers.” Mais Jésus lui dit de rester tranquille, et il fit quelques pas en arrière sur un endroit couvert d'herbe, de l'autre côté du chemin. Quatre disciples étaient sortis du jardin de Gethsémani et demandaient ce qui arrivait : Judas voulait entrer en conversation avec eux et leur faire des mensonges, mais les gardes l'en empêchèrent. Ces quatre disciples étaient Jacques le Mineur, Philippe, Thomas et Nathanaël : ce dernier, un fils du vieux Siméon et quelques autres, étaient venus vers les huit apôtres à Gethsémani, soit envoyés pour avoir des nouvelles par les amis de Jésus, soit poussés par l'inquiétude et la curiosité. Les autres disciples erraient ça et là dans l'éloignement, se tenant aux aguets et prêts à s'enfuir.


Jésus fit quelques pas pour s'approcher de la troupe et dit à haute et intelligible voix : “Qui cherchez-vous ?” Les chefs des soldats répondirent : “Jésus de Nazareth”. - C'est  moi, réplique Jésus. A peine avait-il prononcé ces mots qu'ils reculèrent et tombèrent par terre comme frappés d'apoplexie. Judas qui était à côté d'eux fut encore plus déconcerté dans ses projets, et comme il semblait vouloir s'approcher de Jésus, le Seigneur étendit la main et dit : “Mon ami ! qu'es-tu venu faire ici ?” Et Judas balbutia quelques paroles sur une affaire dont il avait été chargé. Jésus lui répondit en peu de mots dont le sens était : “il voudrait mieux pour toi n'être jamais né” ! Je ne m'en souviens pas très distinctement. Pendant ce temps, les soldats s'étaient relevés et s'étaient rapprochés du Seigneur, attendant le signe de reconnaissance du traître, le baiser qu'il devait donner à Jésus. Pierre et les autres disciples entourèrent Judas et l'appelèrent voleur et traître ; il chercha à se débarrasser d'eux en leur faisant des mensonges, mais il ne put y réussir, parce que les archers cherchaient à le défendre contre les apôtres et par là même témoignaient contre lui.


Jésus dit encore une fois : “Qui cherchez-vous ?” Ils répondirent encore : Jésus de Nazareth. - “C'est moi, dit-il, je vous l'ai déjà dit, si c'est moi que vous cherchez laissez aller ceux-ci”. A ces paroles, les soldats tombèrent une seconde fois avec des contorsions semblables à celles de l'épilepsie, et Judas fut de nouveau entouré par les apôtres qui étaient exaspérés contre lui. Jésus dit aux soldats : “Levez-vous” ! Ils se relevèrent pleins de terreur ; mais comme les apôtres serraient Judas de près, les gardes le délivrèrent de leurs mains et le sommèrent avec menaces de leur donner le signal convenu, car ils avaient ordre de se saisir seulement de celui qu'il embrasserait. Alors Judas vint à Jésus et lui donna un baiser avec ces paroles : “Maître, je vous salue”. Jésus dit : “Judas tu trahis le Fils de l'homme par un baiser.” Alors les soldats entourèrent Jésus, et les archers qui s'étaient approchés mirent la main sur lui. Judas voulut s'enfuir, mais les apôtres le retinrent : ils s'élancèrent sur les soldats en criant : “Maître ! devons-nous frapper avec l'épée ?” Pierre, plus ardent, saisit l'épée, frappa Malchus, valet du grand prêtre, qui voulait repousser les apôtres, et le blessa à l'oreille : celui-ci tomba par terre et le tumulte fut alors à son comble.


Cependant Jésus avait été saisi par les archers, qui voulaient le lier : les soldats l'entouraient d'un peu plus loin, et c'était parmi eux que Pierre avait frappé Malchus. D'autres soldats étaient occupés à repousser ceux des disciples qui s'approchaient ou à poursuivre ceux qui fuyaient. Quatre disciples erraient aux environs et se montraient ça et là dans l'éloignement, les soldats n'étaient pas remis de la frayeur de leur chute, et d'ailleurs ils n'osaient guère s'écarter pour ne pas affaiblir la troupe qui entourait Jésus. Judas qui s'était enfui après avoir donné le baiser du traître fut arrêté à peu de distance par quelques-uns des disciples qui l'accablèrent d'injures ; mais les six employés pharisiens qui arrivèrent en ce moment le délivrèrent encore, et les quatre archers s'occupèrent d'entraîner le Seigneur qui était entre leurs mains.


Tel était l'état des choses lorsque Pierre renversa Malchus, et Jésus lui avait dit aussitôt : “Pierre, remets ton épée dans le fourreau, car celui qui tire l'épée périra par l'épée, crois-tu que je ne puisse pas prier mon père de m'envoyer plus de douze légions d'anges ? Ne dois-je pas vider le calice que mon père m'a donne à boire ? Comment l'Ecriture s'accomplirait-elle, si ces choses ne se faisaient pas”. Il dit encore : “Laisse-moi guérir cet homme”. Puis il s'approcha de Malchus, toucha son oreille, pria, et la guérit. Les soldats étaient autour de lui, ainsi que les archers et les six Pharisiens, et ceux-ci l'insultaient, disant à la troupe : “C'est un suppôt du diable, l'oreille a paru blessée par suite de ses enchantements, et c'est par ces mêmes enchantements qu'elle est guérie”.

Alors Jésus leur dit : “Vous êtes venus me prendre comme un assassin avec des pieux et des bâtons : j'ai enseigné tous les jours, parmi vous, dans le Temple, et vous n'avez pas mis la main sur moi : mais votre heure, l'heure de la puissance des ténèbres est venue. Ils ordonnèrent de l'attacher et ils l'insultèrent, disant : “Tu n'as pas pu nous renverser avec tes sortilèges”. Les recors lui dirent de leur côté : “Nous saurons bien mettre fin à tes pratiques”. Jésus fit une réponse dont je ne souviens pas bien, et les disciples s'enfuirent dans toutes les directions. Les quatre archers et les six Pharisiens n'étaient pas tombés, et, par conséquent, ne s'étaient pas relevés. C'était, ainsi qu'il me fut révélé, parce qu'ils étaient entièrement dans les liens de Satan aussi bien que Judas qui ne tomba pas quoiqu'il était à côté des soldats. Tous ceux qui tombèrent et se relevèrent se convertirent depuis et devinrent chrétiens : cela avait été la figure de leur conversion. Ces soldats avaient seulement entouré Jésus mais ils n'avaient pas mis la main sur lui : Malchus se convertit aussitôt après sa guérison, si bien qu'il ne continua son service que pour maintenir l'ordre, et que, pendant les heures qui suivirent, il servit souvent de messager à Marie et aux autres amis du Sauveur pour leur rapporter ce qui se passait.

Pendant que les Pharisiens prodiguaient à Jésus les insultes et les railleries. Les archers le garrottèrent avec une grande dureté et une brutalité de bourreaux. Ces hommes étaient des païens de la plus basse extraction. Ils avaient le cou, les bras et les jambes nus ; ils portaient une bande d'étoffe autour des reins et des jaquettes sans manches ; ils étaient petits, robustes, très agiles ; leur teint était d'un brun rougeâtre, et il ressemblaient a des esclaves égyptiens.


Ils garrottèrent les mains de Jésus devant sa poitrine, et cela de la manière la plus cruelle, car ils lui attachèrent le poignet droit au-dessous du coude du bras gauche et le poignet gauche au-dessous du coude du bras droit avec des cordes neuves, très dures et très serrées. Ils lui mirent autour du corps une espèce de large ceinture où étaient des pointes de fer et y assujettirent ses mains avec des liens d'osier. Ils lui passèrent autour du cou une sorte de collier où étaient encore des piquants ou d'autres corps propres à blesser, et d'où partaient deux courroies se croisant sur sa poitrine comme une étole et fortement attachées à la ceinture. A cette ceinture aboutissaient quatre longues cordes au moyen desquelles ils tiraient ça et là le Seigneur selon leurs caprices inhumains. Toutes ces cordes étaient neuves et paraissaient avoir été préparées tout exprès, depuis qu'on avait formé le projet de d'emparer de Jésus.


On se mit en marche après avoir allumé un plus grand nombre de torches. Dix hommes de la garde marchaient en avant, puis venaient les archers, qui traînaient Jésus avec leurs cordes, puis les Pharisiens qui l'accablaient d'injures, les dix autres soldats fermaient la marche. Les disciples erraient à quelque distance, poussant des sanglots et comme hors d'eux-mêmes ; Jean suivait d'un peu plus prés les soldats qui étaient en arrière, et les Pharisiens leur ordonnèrent d'arrêter cet homme. Quelques-uns se retournèrent en effet et coururent sur lui, mais il s'enfuit, laissant entre leurs mains son suaire par lequel ils l'avaient saisi. Il avait quitté son manteau et ne portait qu'un vêtement de dessous court et sans manches afin de pouvoir s'échapper plus facilement. Il avait roulé autour de son cou, de sa tête et de ses bras, cette longue bande d'étoffe que les Juifs portent ordinairement. Les archers tiraient et maltraitaient Jésus de la manière la plus cruelle : ils inventaient mille manières de le tourmenter, ce qu'ils faisaient surtout pour flatter bassement les six Pharisiens qui étaient pleins de haine et de rage contre le Sauveur.

Ils le menaient par les chemins les plus rudes, sur les pierres, dans la boue, en cherchant pour eux-mêmes des sentiers commodes, et tendaient les cordes de toutes leurs forces ; ils tenaient d'autres cordes à nœuds avec lesquelles ils le frappaient, comme un boucher frappe les bestiaux qu'il mène à la boucherie, et ils accompagnaient toutes ces cruautés d'insultes tellement ignobles que la décence ne permettrait pas de répéter leurs discours. Jésus était pieds nus ; il avait, outre le vêtement qui couvrait la peau, une tunique de laine sans couture et un autre vêtement par-dessus. Les disciples, comme, du reste, les Juifs en général, portaient immédiatement sur la peau un scapulaire composé de deux pièces d'étoffes qui se réunissaient sur les épaules, avec des ouvertures sur les côtés. Le bas du corps était recouvert d'une ceinture d'où pendaient quatre morceaux d'étoffe qui enveloppaient les reins et formaient une espèce de caleçon. Je dois ajouter que, lors de l'arrestation du Sauveur, je ne vis pas qu'on lui présentât aucun ordre, aucune écriture : on le traita comme s'il eût été hors la loi.


Le cortège marchait assez vite. Lorsqu'il eut quitté le chemin qui est entre le jardin des Oliviers et celui de Gethsémani, il tourna a droite et arriva bientôt à un pont jeté sur le torrent de Cédron. Jésus, allant au jardin des Oliviers, avec les apôtres, n'avait point passé sur ce pont ; il avait pris un chemin détourné par la vallée de Josaphat qui l'avait conduit à un autre pont placé plus au sud. Celui où on le traînait actuellement était très long, parce qu'il s'étendait plus loin que le lit du Cédron, par-dessus quelques inégalités du terrain. Avant qu'on n'y arrivât, je vis deux fois Jésus renversé à terre par les violentes secousses que lui donnaient les archers. Mais lorsqu'ils furent arrivés sur le milieu du pont, ils ne mirent pas de bornes à leurs cruautés : ils poussèrent brutalement Jésus enchaîné et le jetèrent de toute sa hauteur dans le torrent, lui disant de s'y désaltérer. Sans une assistance divine cela eut suffi pour le tuer. Il tomba sur les genoux, puis sur son visage, qui eut été grièvement blessé contre des rochers à peine couverts d'un peu d'eau, sil ne l'avait pas garanti avec ses mains liées ensemble. Elles s'étaient détachées de la ceinture, soit par une assistance d'en haut, soit parce que les archers les avaient déliées. Ses genoux, ses pieds, ses coudes et ses doigts s'imprimèrent miraculeusement sur le rocher où il tomba, et cette empreinte fut plus tard l'objet d'un culte. On ne croit plus à ces sortes de choses : mais j'ai vu souvent dans des visions historiques des empreintes de ce genre laissées dans la pierre par les pieds, les genoux et les mains des patriarches, des prophètes, de Jésus, de la sainte Vierge et de divers saints. Les rochers étaient moins durs et plus croyants que le cœur des hommes, et rendaient témoignage, dans ces terribles moments, de l'impression que la vérité faisait sur eux.


Je n'avais pas vu Jésus se désaltérer, malgré la terrible soif que suivit son agonie au jardin des Oliviers ; je le vis boire de l'eau du Cédron lorsqu'on l'y eut poussé, et j'appris que c'était l'accomplissement d'un passage prophétique des Psaumes, où il est dit qu'il boira dans le chemin l'eau du torrent (Psaume 109). Les archers tenaient toujours Jésus attaché au bout de leurs longues cordes. Mais ne pouvant lui faire traverser le torrent, à cause d'un ouvrage en maçonnerie qui était de l'autre côté, ils revinrent sur leurs pas, le traînant avec leurs cordes à travers le Cédron, puis ils descendirent et le firent remonter sur le bord. Alors ces misérables le poussèrent sur le pont, l'accablant d'injures, de malédictions et de coups. Son long vêtement de laine, tout imbibé d'eau se collait sur ses membres. Il pouvait à peine marcher, et de l'autre coté du pont, il tomba encore par terre. Ils le relevèrent violemment, le frappant avec leurs cordes, et rattachèrent à sa ceinture les bords de sa robe humide, au milieu des insultes les plus ignobles ; faisant allusion, par exemple, à la manière dont on relève ses habits pour manger l'agneau pascal.

Il n'était pas encore minuit lorsque je vis Jésus de l'autre côté du Cédron, traîné inhumainement par les quatre archers sur un étroit sentier, parmi les pierres, les fragments de rochers, les chardons et les épines. Les six méchants Pharisiens se tenaient aussi près de lui que le chemin le permettait, et, avec des bâtons de formes différentes, ils le poussaient, le piquaient ou le frappaient quand les pieds nus et saignants de Jésus étaient déchirés par les pierres et les épines, ils l'insultaient avec une cruelle ironie. “Son précurseur, Jean-Baptiste, disaient-ils ne lui a pas préparé ici un bon chemin” ; ou bien : “Le mot de Malachie : J'envoie devant toi mon ange pour te préparer le chemin, ne s'applique pas ici”, ou bien encore : “Pourquoi ne ressuscite-t-il pas Jean d'entre les morts pour lui préparer la voie”. Et chaque moquerie de ces hommes, accompagnée d'un rire insolent, était comme un aiguillon pour les archers, qui redoublaient leurs mauvais traitements envers le pauvre Jésus.

Bientôt cependant ils remarquèrent que plusieurs personnes se montraient ici et là dans l'éloignement ; car, le bruit s'était répandu que Jésus était arrêté, plusieurs disciples arrivaient de Bethphagé et d'autres endroits où ils s'étaient cachés, voulant savoir ce qui allait advenir de leur Maître. Les ennemis de Jésus, craignant quelque attaque, donnèrent avec leurs cris, dans la direction d'Ophel, le signal de leur envoyer du renfort. Ils étaient encore à quelques minutes d'une porte située au midi du Temple, et qui conduit, à travers un petit faubourg nommé Ophel, sur la montagne de Sion où demeuraient Anne et Caïphe. Je vis sortir de cette porte une troupe de cinquante soldats. Ils étaient divisés en trois groupes, le premier de dix, le dernier de quinze, car je les ai bien comptés ; celui du milieu était donc de vingt-cinq hommes. Ils avaient plusieurs torches avec eux ; ils étaient insolents, bruyants, et poussaient des cris pour annoncer leur approche et féliciter ceux qui arrivaient de leur victoire. Lorsque le premier groupe se fut joint à l'escorte de Jésus, je vis Malchus et quelques autres profiter du désordre excité par cette réunion pour quitter l'arrière-garde et s'enfuir vers le mont des Oliviers.


Quand cette nouvelle troupe sortit d'Ophel, je vis les disciples qui s'étaient montrés à quelque distance se disperser. La sainte Vierge et neuf des saintes femmes avaient été poussées de nouveau par leur inquiétude dans la vallée de Josaphat. C'étaient Marthe, Madeleine, Marie de Cléophas, Marie Salomé, Marie, mère de Marc, Suzanne, Jeanne Chusa, Véronique et Salomé. Elles se trouvaient plus au midi que Gethsémani, en face de cet endroit de la montagne des Oliviers où est une autre grotte dans laquelle Jésus allait quelquefois prier. Lazare, Jean-Marc, le fils de Véronique et celui de Siméon étaient avec elles. Le dernier s'était trouvé à Gethsémani avec Nathanaël et les huit apôtres, et il s'était enfui à travers les soldats. Ils apportaient des nouvelles aux saintes femmes. Dans le même moment, on entendait les cris et on voyait les torches des deux troupes qui se réunissaient. La sainte Vierge perdit connaissance et tomba dans les bras de ses compagnes. Celles-ci se retirèrent avec elle pour la ramener dans la maison de Marie, mère de Marc.


Les cinquante soldats étaient détachés d'une troupe de trois cents hommes qui avaient occupé à l'improviste les portes et les rues d'Ophel ; car le traître Judas avait fait observer aux princes des prêtres que les habitants d'Ophel pauvres journaliers pour la plupart, porteurs d'eau et de bois pour le Temple, étaient les partisans les plus déterminés de Jésus, et qu'on pouvait craindre qu'ils ne tentassent de le délivrer. Le traître savait bien que Jésus avait consolé, enseigné, secouru ou guéri un grand nombre de ces pauvres ouvriers. C'était aussi à Ophel que le Seigneur s'était arrêté lors de son voyage de Béthanie à Hébron après le meurtre de Jean-Baptiste, et qu'il avait guéri beaucoup de maçons blessés par la chute du grand bâtiment et de la tour de Siloé : la plupart de ces pauvres gens, après la Pentecôte se réunirent à la première communauté chrétienne. Lorsque les chrétiens se séparèrent des Juifs, et qu'on établit des demeures pour la communauté, des tentes et des cabanes furent tendues depuis ici jusqu'au mont des Oliviers, à travers la vallée. C'était aussi là qu'alors s'était établi saint Etienne. Ophel couvre une colline entourée de murs et située au midi du Temple.

Les bons habitants d'Ophel furent réveillés par les cris des soldats. Ils sortirent de leurs maisons et coururent dans les rues et aux portes pour savoir ce qui arrivait. Mais les soldats les repoussèrent brutalement dans leurs demeures. “Jésus, le malfaiteur, votre faux prophète, leur disaient-ils, va être amené prisonnier. Le grand prêtre ne peut plus le laisser continuer le métier qu'il fait : il sera mis en croix. A cette nouvelle, on n'entendit que gémissements et sanglots. Ces pauvres gens, hommes et femmes, couraient çà et là en pleurant, ou se jetaient à genoux, ou étendus, et criaient vers le ciel en rappelant les bienfaits de Jésus. Mais les soldats les poussaient, les frappaient, les faisaient rentrer de force dans leurs maisons, et se répandaient en injures contre Jésus, disant : “Voici bien la preuve que c'est un agitateur du peuple.” Ils ne voulaient pourtant pas exercer de trop grandes violences contre les habitants d'Ophel, de peur de les pousser à une résistance ouverte, et ils cherchaient seulement à les écarter du chemin que Jésus devait parcourir.


Pendant ce temps, la troupe inhumaine qui amenait le Sauveur s'approchait de la porte d'Ophel. Jésus était de nouveau tombé par terre, et il ne paraissait pas pouvoir aller plus loin. Alors un soldat compatissant profita de cette occasion pour dire aux autres : “Vous voyez que ce malheureux homme ne peut plus marcher. Si nous devons l'amener vivant aux princes des Prêtres, desserrez un peu les cordes qui lui lient les mains afin qu'il puisse s'appuyer quand il tombera”. La troupe s'étant arrêtée un instant et les archers ayant relâché ses liens, un autre soldat miséricordieux lui apporta de l'eau d'une fontaine située dans le voisinage. Il puisa cette eau dans un cornet d'écorce roulée, tel que les soldats et les voyageurs en portent sur eux dans ce pays. Jésus lui adressa quelques paroles de remerciement, et cita, à cette occasion, un passage des prophètes où il est question de sources d'eau vive, ce qui lui attira beaucoup d'injures et de moqueries de la part des Pharisiens. Ils l'accusaient de forfanterie et de blasphème, lui disant de laisser là ces vains discours et qu'il ne donnerait plus à boire, même à un animal, bien loin de désaltérer les hommes. Je vis ces deux hommes, celui qui avait fait relâcher les liens de Jésus et celui qui lui avait donné à boire, favorisés d'une illumination intérieure de la grâce. Ils se convertirent avant la mort de Jésus, et se réunirent ensuite à ses disciples. J'ai su leurs noms actuels, ceux qu'ils portèrent plus tard comme disciples et toutes les circonstances de leur conversion ; mais on ne peut pas retenir tout cela, il y a trop de choses.


Le cortège se remit en marche au milieu des mauvais traitements prodigués à Jésus, et arriva à la porte d'Ophel, où il fut accueilli par les cris douloureux des habitants, que la reconnaissance attachait à Jésus. Les soldats avaient beaucoup de peine à retenir les hommes et les femme qui se pressaient de tous les côtés. Ils joignaient les mains, se jetaient à genoux, et criaient : “Délivrez-nous cet homme ! délivrez-nous cet homme ! Qui nous aidera, qui nous consolera et nous guérira ? Rendez-nous cet homme !” C'était un spectacle déchirant de voir Jésus pâle, défait, meurtri, avec sa chevelure en désordre, sa robe humide et souillée, traîné avec des cordes et poussé avec des bâtons comme un pauvre animal qu'on mène au sacrificateur, conduit par d'ignobles archers demi nus et des soldats grossiers et insolents, à travers la foule affligée des habitants d'Ophel qui tendaient vers lui des mains qu'il avait guéries de la paralysie, faisaient entendre en suppliant ses bourreaux la voix qu'il leur avait rendue, le suivaient de leurs yeux pleins de larmes qui lui devaient la lumière.


Déjà, dans la vallée du Cédron, beaucoup de gens de la dernière classe du peuple, et poussés par les ennemis de Jésus, s'étaient joints à l'escorte, maudissant et injuriant le Seigneur. Ils concouraient actuellement à repousser et à insulter les bons habitants d'Ophel. Ophel est bâti sur une colline ; sur le point le plus élevé est une place, où je vis beaucoup de bois de construction entassé. Le cortège alla ensuite en descendant, et passa par une porte pratiquée dans une muraille. Quand il eut traversé Ophel, on empêcha le peuple de le suivre. Ils descendirent encore un peu, laissant à droite un grand édifice, reste des ouvrages de Salomon, si je ne me trompe, et à gauche l'étang de Bethsaïde ; puis ils allèrent encore au couchant, suivant une rue en pente appelée Millo. Alors ils tournèrent un peu au midi en montant vers Sion par de grands escaliers, et ils arrivèrent à la maison d'Anne. Sur toute cette route, on ne cessa de maltraiter Notre Seigneur ; la canaille qui venait de la ville et qui grossissait sans cesse était pour les bourreaux de Jésus l'occasion d'un redoublement d'insultes. Depuis le mont des Oliviers jusqu'à la maison d'Anne, Jésus tomba sept fois.


Les habitants d'Ophel étaient encore remplis d'effroi et d'affliction lorsqu'un nouvel incident vint exciter leur pitié. La Mère de Jésus fut ramenée par les saintes femmes, à travers Ophel, vers la maison de Marie, mère de Marc, qui était au pied de la montagne de Sion. Lorsqu'ils la reconnurent, ils donnèrent de nouvelles marques de douleur et de compassion, et ils se pressèrent tellement autour de Marie, qu'elle était presque portée par la foule. Marie était muette de douleur. Arrivée chez Marie, mère de Marc, elle ne parla qu'à l'arrivée de Jean, qui lui raconta tout ce qu'il avait vu depuis la sortie du Cénacle. Plus tard on conduisit la sainte Vierge dans la maison de Marthe, qui était dans la partie occidentale de la ville, près du château de Lazare. On lui fit faire plusieurs détours, en évitant les chemins par lesquels Jésus avait été conduit, pour ne pas trop augmenter son chagrin. Pierre et Jean, qui avaient suivi Jésus de loin, coururent chez quelques serviteurs des princes et prêtres que Jean connaissait, afin de pouvoir entrer dans les salles du tribunal où leur maître était conduit. Ces hommes de la connaissance de Jean étaient des espèces de messagers de chancellerie, lesquels devaient actuellement courir toute la ville pour réveiller les anciens du peuple et plusieurs autres personnes convoquées pour le jugement ; ils désiraient rendre service aux deux apôtres, mais ils ne trouvèrent pas d'autre moyen que de revêtir Pierre et Jean d'un manteau semblable aux leurs, et de se faire aider par eux à porter des convocations, afin qu'ils pussent ensuite rentrer, à la faveur de leur costume, dans le tribunal de Caïphe, où se trouvaient rassemblés des soldats et des faux témoins, et d'ou on faisait sortir toute autre personne.


Nicomède, Joseph d'Arimathie, et d'autres gens bien intentionnés étant membres du conseil, les apôtres se chargèrent de les avertir, et ils firent venir ainsi quelques amis de leur maître que peut-être les Pharisiens auraient volontairement oubliés de convoquer. Pendant ce temps-là, Judas errait comme un criminel fou de désespoir que le démon obsède au pied des escarpements qui terminent Jérusalem au midi parmi les décombres et les immondices entassés en ce lieu.



LA DOULOUREUSE PASSION DE NOTRE SEIGNEUR JESUS CHRIST
d'après les méditations de la Bienheureuse Anne-Catherine Emmerick
Traduction de l'Abbé de Cazalès
Gallica

Anna Katharina Emmerick
'Die ekstatische Jungfrau Katharina Emmerick' par Gabriel von Max,  München, Neue Pinakothek 

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5 mars 2010 5 05 /03 /mars /2010 22:00

I. JESUS SUR LE MONT DES OLIVIERS

Lorsque Jésus, après l'institution du Saint-Sacrement de l'autel, quitta le Cénacle avec les onze Apôtres, son âme était déjà dans le trouble et sa tristesse allait toujours croissant. Il conduisit les onze, par un sentier détourné, dans la vallée de Josaphat, en se dirigeant vers la montagne des Oliviers.

Lorsqu'ils furent devant la porte, je vis la lune, qui n'était pas encore tout à fait pleine, se lever sur la montagne. Le Seigneur, errant avec eux dans la vallée, leur disait qu'il reviendrait en ce lieu pour juger le monde ; mais non pauvre et languissant comme aujourd'hui ; qu'alors d'autres trembleraient et crieraient : “Montagnes, couvrez-nous !” Ses disciples ne le comprirent pas, et crurent, ce qui leur arriva souvent dans cette soirée, que la faiblesse et l’épuisement le faisaient délirer. Ils marchaient le plus souvent, et de temps en temps ils s'arrêtaient, s'entretenant avec lui. Il leur dit encore : “Vous vous scandaliserez tous à mon sujet cette nuit ; car il est écrit : Je frapperai le berger, et les brebis seront dispersées. Mais quand je serai ressuscité, je vous précéderai en Galilée”.

Les Apôtres conservaient encore quelque chose de l'enthousiasme et du recueillement que leur avaient donnés la réception du Saint-Sacrement et les discours solennels et affectueux de Jésus. Ils se pressaient autour de lui, lui exprimaient leur amour de différentes manières, protestaient qu'ils ne l'abandonneraient jamais. Mais Jésus continuant de parler dans le même sens, Pierre lui dit : “Quand tous se scandaliseraient à votre égard, je ne me scandaliserai jamais”, et le Seigneur lui prédit qu'il le renierait trois fois avant le chant du coq. Mais Pierre insista encore, et dit : “Quand je devrais mourir avec vous, je ne vous renierai point.” Ainsi parlèrent aussi les autres. Ils marchaient et s'arrêtaient tour à tour, et la tristesse de Jésus devenait de plus en plus grande. Pour eux, ils voulaient le consoler d'une manière toute humaine, en lui assurant que ce qu'il prévoyait n'arriverait pas. Ils se fatiguèrent dans cette vaine tentative, commencèrent à douter, et la tentation vint sur eux.
 

Ils traversèrent le torrent de Cédron, non sur le pont où plus tard fut conduit Jésus prisonnier, mais sur un autre, car ils avaient fait un détour. Gethsémani, où ils allaient, est situé près de la montagne des Oliviers, à peu près à une demi-lieue du Cénacle, il y a du Cénacle à la porte de la vallée de Josaphat un quart de lieue, et environ autant de la à Gethsémani. Ce lieu, où dans les derniers jours Jésus avait quelquefois enseigné ses disciples et passé la nuit avec eux, se composait de quelques maisons vides et ouvertes et d'un grand jardin entouré d'une haie, où il ne croissait que des plantes d'agrément et des arbres fruitiers. Les Apôtres et plusieurs autres personnes avaient une clef de ce jardin, qui était un lieu de récréation et de prière. Quelquefois des gens qui n'avaient pas de jardins à eux y donnaient des fêtes et des repas. Il s'y trouvait des cabanes de feuillage, où restèrent huit des Apôtres auxquels se joignirent plus tard d'autres disciples.

Le jardin des Oliviers est séparé par un chemin de celui de Gethsémani, et s'étend plus haut vers la montagne. Il est ouvert, entouré seulement d'un mur de terre, et plus petit que le jardin de Gethsémani. On y voit des cavernes, des terrasses et beaucoup d'oliviers. Il est plus soigné dans une de ses parties où l'on trouve des sièges, des bancs de gazon bien entretenus et des grottes fraîches, et spacieuses. Il est facile d'y trouver un endroit propre à la prière et à la méditation. C'est dans la partie la plus sauvage que Jésus alla prier.

Il était environ neuf heures quand Jésus vint à Gethsémani avec ses disciples. Il faisait encore obscur sur la terre, mais la lune répandait déjà sa lumière dans le ciel. Jésus était très triste et annonçait l'approche du danger. Les disciples, en étaient troublés, et il dit à huit de ceux qui l'accompagnaient de rester dans le jardin de Gethsémani, dans un endroit où il y a une espèce de cabinet de verdure. “Restez ici, leur dit-il, pendant que je vais prier à l'endroit que j'ai choisi.” Il prit avec lui Pierre, Jacques et Jean, monta plus haut, et, franchissant un chemin, poussa plus avant dans le jardin des Oliviers jusqu'au pied de la montagne. Il était indiciblement triste, car il sentait l'angoisse et l'épreuve qui approchaient. Jean lui demanda comment lui, qui les avait toujours consolés, pouvait être si abattu. “Mon âme est triste jusqu'à la mort”, répondit-il. Et, regardant autour de lui, il vit de tous côtés l'angoisse et la tentation s'approcher comme des nuages chargés de figures effrayantes. C'est alors qu'il dit aux trois Apôtres : “Restez là et veillez avec moi ; priez afin que vous ne tombiez pas en tentation.” Il avança encore quelques pas ; mais les terribles visions l'assaillirent de telle sorte que, dans son angoisse, Il descendit un peu à gauche, et se cacha sous un rocher, dans une grotte d'environ six pieds de profondeur, au-dessus de laquelle les Apôtres se tenaient dans une espèce d'enfoncement. Le terrain s'abaissait doucement dans cette grotte, et les plantes suspendues au rocher qui surplombait formaient un rideau devant l'entrée, en sorte qu'on ne pouvait y être vu.
 

Lorsque Jésus s'éloigna des disciples, je vis autour de lui un large cercle d'images effrayantes qui se resserrait de plus en plus. Sa tristesse et son angoisse croissaient ; il se retira tout tremblant dans la grotte afin d'y prier, semblable à un homme qui cherche un abri contre un orage soudain ; mais les visions menaçantes l’y poursuivirent et devinrent de plus en plus distinctes. Hélas ! cette étroite caverne semblait renfermer l'horrible spectacle de tous les péchés commis depuis la première chute jusqu'à la fin du monde, et celui de leur châtiment. C'était ici, sur le mont des Oliviers, qu'étaient venus Adam et Eve, chassés du paradis sur la terre inhospitalière ; ils avaient gémi et pleuré dans cette même grotte. J'eus le sentiment que Jésus, s'abandonnant aux douleurs de sa Passion qui allait commencer et se livrant à la justice divine en satisfaction pour les péchés du monde, faisait rentrer en quelque façon sa divinité dans le sein de la sainte Trinité ; sous l'impulsion de sa charité infinie, il se renfermait, pour ainsi dire, dans sa pure, aimante, innocente humanité, et, armé seulement de l'amour qui enflammait son coeur d'homme, il la dévouait, pour les péchés du monde, à toutes les angoisses et à toutes les souffrances. Voulant satisfaire pour la racine et le développement de tous les péchés et de tous les mauvais penchants, le miséricordieux Jésus prit dans son coeur, par amour pour nous autres pécheurs, la racine de toute expiation purificatrice et de toute peine sanctifiante, et il laissa cette souffrance infinie, afin de satisfaire pour des péchés infinis, s'étendre comme un arbre de douleur aux mille branches et pénétrer tous les membres de son corps sacré, toutes les facultés de sa sainte âme. Ainsi laissé tout entier à sa seule humanité, implorant Dieu avec une tristesse et une angoisse inexprimables, il tomba sur son visage, et tous les péchés du monde lui apparurent sous des formes infinies avec toute leur laideur intérieure : il les prit tous sur lui, et s'offrit, dans sa prière, à la justice de son Père céleste pour payer cette effroyable dette. Mais Satan, qui, sous une forme effrayante, s'agitait au milieu de toutes ces horreurs avec un rire infernal, montrait une fureur toujours croissante contre Jésus, et, faisant passer devant son âme des tableaux de plus en plus affreux, criait sans cesse à l'humanité de Jésus : “Comment ! prends-tu aussi celui-ci sur toi, en souffriras-tu la peine ? veux-tu satisfaire pour tout cela ?”


Cependant il partit, de ce côté du ciel où le soleil se montre entre dix et onze heures du matin, un rayon semblable à une voie lumineuse : c'était une ligue d'anges qui descendaient jusqu'à Jésus, et je vis qu'ils le ranimaient et le fortifiaient. Le reste de la grotte était plein d'affreuses visions de nos crimes et de mauvais esprits qui insultaient et assaillaient Jésus ; il prit tout sur lui ; mais son coeur, le seul qui aimât parfaitement Dieu et les hommes au milieu de ce désert plein d'horreur, se sentit cruellement torturé et déchiré sous le poids de tant d'abominations. Hélas ! je vis alors tant de choses qu'une année ne suffirait pas pour les raconter. Lorsque cette masse de forfaits eut passé sur son âme comme un océan et que Jésus, s'étant offert comme victime expiatoire, eut appelé sur lui-même toutes les peines et les châtiments dus à tous ces crimes, Satan lui suscita. comme autrefois dans le désert, des tentations innombrables; il osa même présenter contre celui qui était la pureté même une suite d'accusations : “Comment, disait-il, tu veux prendre tout cela sur toi, et tu n'es pas pur toi même ! Regarde ceci ! et cela ! et cela encore.” Alors il déroula devant lui, avec une impudence infernale, une foule de griefs imaginaires, il lui reprochait les fautes de ses disciples, les scandales qu'ils avaient donnés, le trouble qu'il avait apporté dans le monde en renonçant aux anciens usages. Satan se fit le pharisien le plus habile et le plus sévère, il lui reprocha d'avoir été l'occasion du massacre des Innocents, ainsi que des souffrances de ses parents en Egypte, de n'avoir pas sauvé Jean-Baptiste de la mort, d'avoir désuni des familles, d'avoir protégé des hommes décriés, de n'avoir pas guéri plusieurs malades, d'avoir fait tort aux habitants de Gergesa en permettant aux possédés, de renverser leurs cuves et aux démons de précipiter leurs porcs dans la mer ; il lui imputa les fautes de Marie-Madeleine parce qu'il ne l'avait pas empêchée de retomber dans la péché ; il l'accusa d'avoir abandonné sa famille, d'avoir dilapidé le bien d'autrui ; en un mot, Satan présenta devant l'âme de Jésus, pour l'ébranler, tout ce que le tentateur eût reproché au moment de la mort à un homme ordinaire qui eût fait toutes ces actions sans des motifs supérieurs ; car il lui était caché que Jésus fût le Fils de Dieu, et il le tentait seulement comme le plus juste des hommes. Notre divin Sauveur laissa tellement prédominer en lui sa sainte humanité, qu'il voulut souffrir jusqu'à la tentation dont les hommes qui meurent saintement sont assaillis sur le mérite de leurs bonnes oeuvres. Il permit, pour vider tout le calice de l'agonie, que le mauvais esprit auquel sa divinité était cachée, lui présentât toutes ses oeuvres de charité comme autant d'actes coupables que la grâce de Dieu ne lui avait pas encore remis. Il lui reprocha de vouloir effacer les fautes d'autrui tandis que lui-même, dépourvu de tout mérite, avait encore à satisfaire à la justice divine pour beaucoup de prétendues bonnes oeuvres. La divinité de Jésus souffrit que l'ennemi tentât son humanité comme il pourrait tenter un homme qui voudrait attribuer à ses bonnes oeuvres une valeur propre, outre la seule qu'elles puissent avoir par leur union aux mérites de la mort du Sauveur.


Ainsi le tentateur lui présenta les oeuvres de son amour comme des actes dépourvus de mérite et qui le constituaient débiteur envers Dieu : il fit comme si Jésus en eût, en quelque manière, prélevé le prix à l'avance sur celui de sa Passion qui n'était pas consommée et dont Satan ne connaissait pas encore le prix infini, et par conséquent comme s'il n'eût pas satisfait pour les grâces données à l'occasion de ces oeuvres. Il lui mit sous les yeux, pour toutes ses bonnes oeuvres, des contrats où elles étaient inscrites comme des dettes, et il disait en les montrant du doigt : “Tu es encore redevable pour et pour cette autre, etc.” Enfin, il déroula devant lui un contrat portant que Jésus  avait reçu de Lazare et dépensé le prix de vente de la propriété de Marie-Madeleine à Magdala et lui dit : “Comment as-tu osé dissiper le bien d'autrui et faire ce tort à cette famille ?” J'ai vu la représentation de tous les péchés pour l'expiation desquels le Seigneur s'offrit et j'ai senti avec lui tout le poids des nombreuses accusations que la tentateur éleva contre lui, car parmi les péchés du monde dont le Sauveur se chargea, je vis aussi les miens qui sont si nombreux, et du cercle de tentation qui l'entourait, il sortit vers moi comme un fleuve où toutes mes fautes me furent montrées. Pendant ce temps, j'avais toujours les yeux fixés sur mon fiancé céleste, je gémissais et priais avec lui, je me tournais avec lui vers les anges consolateurs. Hélas ! le Seigneur se tordait comme un ver sous le poids de sa douleur et de ses angoisses. Pendant les accusations de Satan contre Jésus, j'avais peine à retenir ma colère ; mais lorsqu'il parla de la vente du bien de Madeleine, il me fut impossible de me contenir, et je criai : "Comment peux-tu lui reprocher comme un péché la vente de ce bien ? n'ai-je pas vu le Seigneur employer cette somme donnée par Lazare à des œuvres de miséricorde, et délivrer à Thirza vingt-sept pauvres prisonniers pour dettes ?”


Au commencement, Jésus était agenouillé et priait avec assez de calme ; mais plus tard son âme fut épouvantée à l'aspect des crimes innombrables des hommes et de leur ingratitude envers Dieu : il fut en proie à une angoisse et à une douleur si violentes qu'il s'écria, tremblant et frissonnant : “Mon Père, si c'est possible, que ce calice s'éloigne de moi ! mon Père tout vous est possible ; éloignez ce calice !” Puis il se recueillit et dit : “Cependant que votre volonté se fasse et non la mienne.” Sa volonté et celle de son Père étaient une ; mais, livré par son amour aux faiblesses de l'humanité, il tremblait à l'aspect de la mort. Je vis la caverne autour de lui remplie de formes effrayantes ; je vis tous les péchés, toute la méchanceté, tous les vices, tous les tourments, toutes les ingratitudes qui l'accablaient : les épouvantements de la mort, la terreur qu'il ressentait comme homme à l'aspect de ses souffrances expiatoires le pressaient et l'assaillaient sous la forme de spectres hideux. Il tombait çà et là, se tordait les mains, la sueur le couvrait, il tremblait et frémissait. Il se releva ; ses genoux chancelaient et le portaient à peine, il était tout à fait défait et presque méconnaissable, ses lèvres étaient pâles, ses cheveux se dressaient sur sa tête. Il était environ dix heures et demie lorsqu'il se leva ; puis, tout chancelant, tombant à chaque pas, baigné d'une sueur froide, il se traîna jusqu'auprès des trois Apôtres. Il monta à gauche de la caverne jusqu'à une plate-forme où ceux-ci s’étaient endormis, couchés les uns à côté des autres, accablés qu'ils étaient de fatigue, de tristesse et d'inquiétude, Jésus vint à eux, semblable à un homme dans l'angoisse, que la terreur pousse vers ses amis, et semblable encore à un bon pasteur qui, profondément bouleversé lui-même, vient visiter son troupeau qu'il sait menacé d'un péril prochain : car Il n'ignorait pas qu'eux aussi étaient dans l'angoisse et la tentation.

Les terribles visions l'entouraient, même pendant ce court chemin. Lorsqu'il les trouva dormants, il joignît les mains, tomba près d'eux plein de tristesse et d'inquiétude, et dit : “Simon, dors-tu ?” Ils s'éveillèrent, le relevèrent, et il leur dit dans son délaissement : “Ne pouviez-vous veiller une heure avec moi ?” Lorsqu'ils le virent défait, pâle, chancelant, trempé de sueur, tremblant et frissonnant, lorsqu'ils entendirent sa voix altérée et presque éteinte, ils ne surent plus ce qu'ils devaient penser, et s'il ne leur était pas apparu entouré d'une lumière bien connue, ils n'auraient jamais retrouvé Jésus en lui. Jean lui dit : “Maître, qu'avez-vous ? dois-je appeler les autres disciples ! ci devons-nous fuir ?” Jésus répondit : “Si je vivais, enseignais et guérissais encore trente-trois ans, cela ne suffirait pas pour faire ce qui me reste à accomplir d'ici à demain. N'appelle pas les huit ; je les ai laissés, parce qu'ils ne pourraient me voir dans cette détresse sans se scandaliser : ils tomberaient en tentation, oublieraient beaucoup et douteraient de moi. Pour vous, qui avez vu le Fils de l'homme transfiguré, vous pouvez le voir aussi dans son obscurcissement et son délaissement ; mais veillez et priez pour ne pas tomber en tentation, l'esprit est prompt, mais la chair est faible.”
Il parlait ainsi par rapport à eux et à lui-même. Il voulait par là les engager à la persévérance et leur faire connaître le combat de sa nature humaine contre la mort et la cause de sa faiblesse. Il leur parla encore, toujours accablé de tristesse, et resta près d'un quart d'heure avec eux. Il retourna dans la grotte, son angoisse croissant toujours : pour eux, ils étendaient les mains vers lui, pleuraient, tombaient dans les bras les uns des autres, se demandaient : “Qu'est-ce donc ? que lui arrive-t-il ? il est dans un délaissement complet !” Ils se mirent à prier, la tête couverte, pleins de trouble et de tristesse.

Tout ce qui vient d'être dit remplit à peu près une heure et demie depuis que Jésus était entré dans le jardin des Oliviers. Il dit à la vérité dans l’Ecriture : “N'avez-vous pu veiller une heure avec moi ?” mais cela ne doit point se prendre à la lettre, et d'après notre manière de compter. Les trois Apôtres qui étaient avec Jésus avaient d'abord prié, puis ils s'étaient endormis, car ils étaient tombés en tentation par leur manque de confiance. Les huit autres qui étaient postés à l’entrée, ne dormaient pas : la tristesse qui respirait dans les derniers discours de Jésus les avait laissés très inquiets ; ils erraient sur la mont des Oliviers pour y chercher quelque lieu de refuge en cas de danger.

Ce soir-là, il y avait peu de bruit dans Jérusalem, les Juifs étaient dans leurs maisons, occupés des préparatifs de la fête ; les campements des étrangers venus pour la Pâque n'étaient pas dans le voisinage de la montagne des Oliviers. En errant de côté et d'autre, je vis çà et là des amis et des disciples de Jésus qui marchaient et s'entretenaient ensemble, ils paraissaient inquiets et dans l'attente de quelque événement. La mère du Seigneur, Madeleine, Marthe, Marie, fille de Cléophas, Marie-Salomé et Salomé étaient allées du Cénacle dans la maison de Marie, mère de Marc ; puis Marie, effrayée des bruits qui couraient, avait voulu venir devant la ville avec ses amies pour savoir des nouvelles de Jésus. Lazare, Nicodème, Joseph d'Arimathie et quelques parents d'Hébron vinrent la trouver et essayèrent de la tranquilliser ; car ayant eu connaissance par eux-mêmes ou par les disciples des tristes prédictions faites par Jésus dans le Cénacle, ils avaient été prendre des informations chez des pharisiens de leur connaissance et n'avaient point appris qu'on dût faire des tentatives prochaines contre le Sauveur : ils disaient que le danger ne pouvait être encore très grand, qu'on n'attaquerait pas le Seigneur si près de la fête ; mais ils ne savaient rien encore de la trahison de Judas. Marie leur parla du trouble de celui-ci dans les derniers jours, de la manière dont il avait quitté le Cénacle ; Il était sûrement allé trahir ; elle l'avait souvent averti qu'il était un fils de perdition. Les saintes femmes retournèrent ensuite dans la maison de Marie, mère de Marc.

Lorsque Jésus fut revenu dans la grotte et toutes ses douleurs avec lui, il se prosterna sur le visage, les bras étendus, et pria son Père céleste ; mais il y eut dans son âme une nouvelle lutte qui dura trois quarts d'heure. Des anges vinrent lui montrer dans des séries de visions tout ce qu'il devait embrasser de douleurs afin d'expier le péché ; ils lui montrèrent quelle était avant la chute, la beauté de l’homme, image de Dieu, et combien cette chute l'avait altéré et défiguré. Il vit l'origine de tous les péchés dans le premier péché, la signification et l'essence de la concupiscence, ses terribles effets sur les forces de l’âme humaine ; et aussi l'essence et la signification de toutes les peines correspondant à la concupiscence. Ils lui montrèrent dans la satisfaction qu'il devait donner à la justice divine, une souffrance du corps et de l'âme comprenant toutes les peines dues à la concupiscence de l'humanité tout entière ; et comment la dette du genre humain devait être payée par la seule nature humaine exempte de péché, celle du fils de Dieu, lequel, afin de prendre sur lui la dette et le châtiment de l'humanité tout entière, devait aussi combattre et surmonter la répugnance humaine pour la souffrance et la mort. Les anges lui montraient tout cela sous des formes diverses, et j'avais la perception de ce qu'ils disaient quoique sans entendre leurs voix. Aucune langue ne peut exprimer quelle épouvante et quelle douleur vinrent fondre sur l'âme de Jésus à la vue de ces terribles expiations ; l'horreur de cette vision fut telle qu'une sueur de sang sortit de son corps.


Pendant que l'humanité du Christ était écrasée sous cette effroyable masse de souffrances, j'aperçus un mouvement de compassion dans les anges ; il me sembla qu'ils désiraient ardemment le consoler et qu'ils priaient à cet effet devant le trône de Dieu. Il y eut comme un combat d'un instant entre la miséricorde et la justice de Dieu, et l'amour qui se sacrifiait. Une image de Dieu me fut montrée, non comme d'autres fois sur un trône, mais dans une forme lumineuse ; je vis la nature divine du Fils dans la personne de son Père, et comme retirée dans son sein ; la personne du Saint-Esprit procédait du Père et du Fils ; elle était comme entre eux, et tout cela n'était pourtant qu'un seul Dieu ; mais ces choses sont inexprimables. J'eus moins une vision avec des figures humaines qu'une perception intérieure où il me fut montré par des images que la volonté divine du Christ se retirait davantage dans le Père pour laisser peser sur son humanité toutes ces souffrances que la volonté humaine de Jésus priait le Père de détourner de lui. Je vis cela dans le moment de la compassion des anges, lorsqu'ils désirèrent consoler Jésus, et en effet il reçut en cet instant quelque soulagement. Alors tout disparut, et les anges abandonnèrent le Seigneur dont l'âme allait avoir à souffrir de nouvelles attaques.
Jésus, dans sa détresse, éleva la voix, et fit entendre quelques cris douloureux. Les trois Apôtres se réveillèrent ; ils prêtèrent l'oreille, levant les mains avec effroi, et voulaient aller le rejoindre ; mais Pierre retint Jacques et Jean, et leur dit : “Restez, je vais aller vers lui.” Je le vis courir et entrer dans la grotte : “Maître, dit-il, qu'avez-vous ?” Et il se tenait là, tremblant à la vue de Jésus tout sanglant et frappé de terreur. Jésus ne lui répondit pas et ne parut pas faire attention à lui. Pierre revint vers les deux autres ; il leur dit que le Seigneur ne lui avait pas répondu, et qu'il ne faisait que gémir et soupirer. Leur tristesse augmenta, ils voilèrent leur tète, s'assirent et prièrent en pleurant.

Je vis le sang rouler en larges gouttes sur le pâle visage du Sauveur ; ses cheveux étaient collés ensemble et dressés sur sa tête, sa barbe sanglante et en désordre comme si on eût voulu l'arracher, il s'enfuit en quelque sorte hors de la caverne, et revint vers ses disciples. Mais sa démarche était comme celle d'un homme couvert de blessures et courbé sous un lourd fardeau, qui trébucherait à chaque pas. Lorsqu'il vint vers les trois Apôtres, ils ne s'étaient pas couchés pour dormir comme la première fois ; ils avaient la tête voilée et affaissée sur leurs genoux, dans une position où je vois souvent les gens de ce pays-là lorsqu'ils sont dans le deuil ou qu'ils veulent prier. Ils s'étaient assoupis, vaincus par la tristesse et la fatigue. Jésus, tremblant et gémissant, s’approcha d'eux, et ils se réveillèrent. Mais, lorsqu'à la clarté de la lune ils le virent debout devant eux, avec son visage pâle et sanglant et sa chevelure en désordre, leurs yeux fatigué ne le reconnurent pas d'abord tout de suite, car il était indiciblement défiguré. Comme il joignait les mains, ils se levèrent, le prirent sous les bras, le soutinrent avec amour, et il leur dit avec tristesse qu'on le ferait mourir le lendemain, qu'on s'emparerait de lui dans une heure, qu'on le mènerait devant un tribunal, qu'il serait maltraité, outragé, flagellé, et enfin livré à la mort la plus cruelle. Il les pria de consoler sa mère, et aussi de consoler Madeleine. Il leur parla ainsi pendant quelques minutes ; pour eux, ils ne lui répondirent pas, car ils ne savaient que dire, tant son aspect et ces discours les avaient troublés ; ils croyaient même qu'il était en délire. Mais lorsqu'il voulut retourner à la grotte, il n'eut pas la force de marcher. Je vis Jean et Jacques le conduire, et revenir lorsqu'il fut entré dans la grotte. Il était à peu près onze heures et un quart du soir.

Pendant cette agonie de Jésus, je vis la sainte Vierge accablée aussi de tristesse et d'angoisses dans la maison de Marie, mère de Marc. Elle se tenait avec Madeleine et Marie dans le jardin de la maison ; elle était là, courbée en deux sur une pierre et affaissée sur ses genoux. Plusieurs fois elle perdit connaissance, car elle vit intérieurement plusieurs choses de l'agonie de Jésus. Elle avait déjà envoyé des messagers pour avoir de ses nouvelles ; mais, ne pouvant pas attendre leur retour, elle s'en fut, toute inquiète, avec Madeleine et Salomé, jusqu'à la vallée de Josaphat. Elle marchait voilée, et étendait souvent les bras vers le mont des Oliviers ; car elle voyait en esprit Jésus baigné d'une sueur de sang, et il semblait qu'elle voulût de ses mains étendues essuyer le visage de son fils. Je vis ces élans de son âme aller jusqu'à Jésus, qui pensa à elle et regarda de son côté comme pour y chercher du secours. Je vis cette communication entre eux sous forme de rayons qui allaient de l'un à l'autre. Le Seigneur pensa aussi à Madeleine, et fut touché de sa douleur ; c'est pourquoi il recommanda aux disciples de la consoler ; car il savait que son amour était le plus grand après celui de sa mère, et il avait vu qu'elle souffrirait encore beaucoup pour lui, et qu’elle ne l'offenserait plus jamais.

Vers ce moment, à onze heures un quart à peu près, les huit Apôtres revinrent dans la cabane de feuillage de Gethsémani ; ils s'y entretinrent et finirent par s'endormir. Ils étaient très ébranlés, très découragés, et violemment assaillis par la tentation. Chacun avait cherché un lieu où il pût se réfugier, et ils se demandaient avec inquiétude : “Que ferons-nous lorsqu'on l'aura fait mourir ? Nous avons tout quitté pour le suivre ; nous sommes pauvres et le rebut de ce monde, nous nous sommes entièrement abandonnés à lui, et le voilà maintenant si languissant, si abattu, qu'on ne peut trouver en lui aucune consolation.” Les autres disciples avaient d'abord erré de côté et d'autre ; puis, ayant appris quelque chose des effrayantes prophéties de Jésus, ils s'étaient retirés pour la plupart à Bethphagé.


Je vis Jésus priant encore dans la grotte et luttant contre la répugnance de la nature humaine à souffrir. Il était épuisé de fatigue et abattu, et il disait : “Mon père, si c'est votre volonté, éloignez de moi ce calice. Cependant, que votre volonté se fasse et non pas la mienne.” Mais alors l'abîme s'ouvrit devant lui, et les premiers degrés des Limbes lui apparurent comme à l'extrémité d'une vole lumineuse. Il vit Adam et Eve, les patriarches, les prophètes, les justes, les parents de sa mère et Jean-Baptiste attendant son arrivée dans le monde inférieur avec un désir si violent, que cette vue fortifia et ranima son coeur plein d'amour. Sa mort devait ouvrir le ciel à ces captifs ; elle devait les tirer de la prison où ils languissaient dans l'attente. Lorsque Jésus eut regardé avec une profonde émotion ces saints de l'ancien monde, les anges lui présentèrent toutes les cohortes des bienheureux à venir qui, joignant leurs combats aux mérites de sa passion, devaient s'unir par lui au Père céleste. C'était une vision inexprimablement belle et consolante. Tous rangés, suivant leur date, leur classe et leur dignité, passèrent devant le Seigneur, parés de leurs souffrances et de leurs oeuvres. Il vit le salut et la sanctification sortant à flots intarissables de la source de rédemption ouverte par sa mort. Les Apôtres, les disciples, les vierges et les saintes femmes, tous les martyrs, les confesseurs et les ermites. les papes et les évêques, des troupes nombreuses de religieux, en un mot l'armée entière des bienheureux s'offrit à sa vue. Tous portaient sur la tête des couronnes triomphales, et les fleurs de leurs couronnes différaient de forme, de couleur, de parfum et de vertu suivant la différence des souffrances, des combats et des victoires qui leur avaient valu la gloire éternelle. Toute leur vie et tous leurs actes, tous leurs mérites et toute leur force, ainsi que toute la gloire de leur triomphe, venaient uniquement de leur union aux mérites de Jésus-Christ.

L'action et l'influence réciproque que tous ces saints exerçaient les uns sur les autres, la manière dont ils puisaient à une source unique, au saint Sacrement et à la passion du Seigneur, offraient un spectacle singulièrement touchant et merveilleux. Rien ne paraissait fortuit en eux ; leurs oeuvres, leur martyre, leurs victoires, leur apparence et leur vêtement, tout cela, quoi que bien divers, se fondait dans une harmonie et une unité infinies ; et cette unité dans la diversité était produite par les rayons d'un soleil unique, par la passion du Seigneur, du Verbe fait chair, en qui la vie était la lumière des hommes qui luit dans les ténèbres et que les ténèbres n'ont pas comprise.


C'était la communauté des Saints futurs qui passait devant l’âme du Sauveur, lequel se trouvait placé entre le désir des patriarches et le cortège triomphal des bienheureux à venir ; ces deux troupes s’unissant et se complétant en quelque sorte l'une l'autre, entouraient le coeur aimant du Rédempteur comme d'une couronne de victoire. Cette vue inexprimablement touchante donna à l'âme de Jésus un peu de consolation et de force. Ah ! il aimait tellement ses frères et ses créatures, qu'il aurait accepté avec joie toutes les souffrances auxquelles il se dévouait pour la rédemption d'une seule âme. Comme ces visions se rapportaient à l'avenir, elles planaient à une certaine hauteur.

Mais ces images consolantes s'évanouirent, et les anges lui montrèrent sa Passion tout près de terre, parce qu'elle était proche. Ces anges étaient en grand nombre. Je vis toutes les scènes s’en présenter très distinctement devant lui, depuis le baiser de Judas jusqu’aux dernières paroles sur la croix : je vis là tout ce que je vois dans mes méditations de la Passion, la trahison de Judas, la fuite des disciples, les insultes devant Anne et Caïphe, le reniement de Pierre, le tribunal de Pilate, les dérisions d'Hérode, la flagellation et le couronnement d'épines, la condamnation à mort, le portement de la croix, la rencontre de la Sainte Vierge, son évanouissement, les insultes que les bourreaux lui prodiguaient, le suaire de Véronique, le crucifiement, les outrages des Pharisiens, les douleurs de Marie, de Madeleine et de Jean, le coup de lance dans le côté : en un mot, tout lui fut présenté avec les plus petites circonstances. Je vis comment le Seigneur, dans son angoisse, voyait tous les gestes, entendait toutes les paroles, percevait tout ce qui se passait dans les âmes. Il accepta tout volontairement, il se soumit à tout par amour pour les hommes. Ce qui le contrista le plus douloureusement fut de se voir attaché a la croix dans un état de nudité complète, pour expier l'impudicité des hommes : il pria instamment pour que cela lui fût épargné et qu'il lui fût au moins accordé d'avoir une ceinture autour des reins : je vis qu'il serait assisté en cela, non par ses bourreaux, mais par un homme compatissant. Il vit et ressentit aussi la douleur actuelle de sa mère que l’union à ses souffrances avait fait tomber sans connaissance dans les bras de ses deux amies.


A la fin des visions de la Passion, Jésus tomba sur le visage, comme un mourant : les Anges disparurent, la sueur de sang coula plus abondante, et je la vis traverser son vêtement. La plus profonde obscurité régnait dans la caverne. Je vis alors un ange descendre vers Jésus : il était plus grand, plus distinct et plus semblable à un homme que ceux que j'avais vus auparavant. Il était revêtu comme un prêtre d'une longue robe flottante, ornée de franges, et portait dans ses mains devant lui, un petit vase de la forme du calice de la sainte Cène. A l'ouverture de ce calice, se montrait un petit corps ovale, de la grosseur d'une fève, et qui répandait une lumière rougeâtre. L’ange, sans se poser à terre, étendit la main droite vers Jésus, qui se releva ; il lui mit dans la bouche cet aliment mystérieux, et le fit boire du petit calice lumineux. Ensuite il disparut.


Jésus, ayant accepté librement le calice de ses souffrances reçut une nouvelle force, resta encore quelques minutes dans la grotte, plongé dans une méditation tranquille et rendant grâces à son Père céleste. Il était encore affligé mais réconforté  surnaturellement, au point de pouvoir aller vers les disciples sans chanceler et sans plier sous le poids de sa douleur. Il était toujours pâle et défait mais son pas était ferme et décidé. Il avait essuyé son visage avec un suaire, et remis en ordre ses cheveux qui pendaient sur ses épaules, humides de sang et de sueur et colles ensemble.

Quand il sortit de la grotte, je vis la lune comme auparavant, avec la tache singulière qui en occupait le centre et le  cercle qui l'entourait, mais sa clarté et celle des étoiles étaient autres que précédemment, lors des grandes angoisses du Seigneur. La lumière maintenant était plus naturelle. Lorsque Jésus vint vers ses disciples, ils étaient couchés, comme la première fois, contre le mur de la terrasse ; ils avaient la tète voilée et dormaient. Le Seigneur leur dit que ce n’était pas le temps de dormir, qu'ils devaient se réveiller et prier. “Voici l'heure où le Fils de l'homme sera livré dans les mains des pécheurs. dit-il ; levez-vous et marchons : le traître est proche : mieux vaudrait pour lui qu’il ne fût jamais né”. Les Apôtres se relevèrent tout effrayés, et regardèrent autour d'eux avec inquiétude. Lorsqu'ils se furent un peu remis, Pierre lui dit avec chaleur : “Maitre, je vais appeler les autres, afin que nous vous défendions”.

Mais Jésus à quelque distance dans la vallée, vit de l’autre côté du torrent de Cédron, une troupe d’hommes armés, qui s'approchaient avec des flambeaux, et il leur dit qu’un d’entre eux l'avait trahi. Les Apôtres regardaient la chose comme impossible. Il leur parla encore avec calme, leur recommanda de nouveau de consoler sa mère, et dit : “Allons au-devant d'eux, je me livrerai sans résistance entre les mains de mes ennemis.” Il sortit alors du jardin des Oliviers avec les trois Apôtres, et vint au-devant des archers sur le chemin qui était entre ce jardin et celui de Gethsémani.

Lorsque la sainte Vierge reprit connaissance entre les bras de Madeleine et de Salomé, quelques disciples, qui avaient vu les soldats s'approcher, vinrent à elle et la ramenèrent dans la maison de Marie, mère de Marc. Les archers prirent un chemin plus court que celui qu'avait suivi Jésus en venant du Cénacle.


La grotte dans laquelle Jésus avait prié aujourd'hui n'était pas celle où il avait coutume de prier sur le mont des Oliviers. Il allait ordinairement dans une caverne plus éloignée où, un jour, après avoir maudit le figuier stérile, il avait prié dans uns grande affliction, les bras étendus et appuyé contre un rocher.


Les traces de son corps et de ses mains restèrent imprimées sur la pierre et furent honorées plus tard ; mais on ne savait plus à quelle occasion ce prodige avait eu lieu. J’ai vu plusieurs fois de semblables empreintes laissées sur la pierre, soit par les prophètes de l'Ancien Testament, soit par Jésus, Marie, ou quelques-uns des apôtres : j'ai vu aussi celles du corps de sainte Catherine d'Alexandrie sur le mont Sinaï. Ces empreintes ne paraissaient pas profondes, mais semblables à celles qu'on laisserait en appuyant la main sur une pâte épaisse.



LA DOULOUREUSE PASSION DE NOTRE SEIGNEUR JESUS CHRIST
d'après les méditations de la Bienheureuse Anne-Catherine Emmerick
Traduction de l'Abbé de Cazalès
Gallica

Anna Katharina Emmerick
'Die ekstatische Jungfrau Katharina Emmerick' par Gabriel von Max,  München, Neue Pinakothek

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5 mars 2010 5 05 /03 /mars /2010 16:58
Israeli border police officers take position during clashes ...
Israeli border police officers take position during clashes on the compound known to Muslims as al-Haram al-Sharif and to Jews as the Temple Mount in Jerusalem's Old City March 5, 2010.
Israeli police officers stand behind riot shields during clashes ...


A Palestinian throws a stone at Israeli police during clashes ...
A Palestinian throws a stone at Israeli police during clashes on the compound known to Muslims as al-Haram al-Sharif and to Jews as the Temple Mount in Jerusalem's Old City March 5, 2010.

An Israeli border police officer aims a tear gas launcher towards ...
An Israeli border police officer aims a tear gas launcher towards Palestinian stone-throwers during clashes on the compound known to Muslims as al-Haram al-Sharif and to Jews as the Temple Mount in Jerusalem's Old City March 5, 2010

Palestinian stone-throwers react as tear gas is fired by Israeli ...
Palestinian stone-throwers react as tear gas is fired by Israeli border police during clashes on the compound known to Muslims as al-Haram al-Sharif and to Jews as the Temple Mount in Jerusalem's Old City March 5, 2010.

An Israeli police officer aims a tear gas launcher towards Palestinian ...
An Israeli police officer aims a tear gas launcher towards Palestinian stone-throwers during clashes on the compound known to Muslims as al-Haram al-Sharif and to Jews as the Temple Mount in Jerusalem's Old City March 5, 2010

A stun grenade lands near Palestinian stone-throwers during ...
A stun grenade lands near Palestinian stone-throwers during clashes on the compound known to Muslims as al-Haram al-Sharif and to Jews as the Temple Mount in Jerusalem's Old City March 5, 2010.

A Palestinian throws a stone at Israeli police during clashes ...
A Palestinian throws a stone at Israeli police during clashes on the compound known to Muslims as al-Haram al-Sharif and to Jews as the Temple Mount in Jerusalem's Old City March 5, 2010

Palestinian medical workers run past Israeli police to evacuate ...
Palestinian medical workers run past Israeli police to evacuate an injured Palestinian stone-thrower during clashes on the compound known to Muslims as al-Haram al-Sharif and to Jews as the Temple Mount in Jerusalem's Old City March 5, 2010




Israeli police and border police detain a Palestinian stone-thrower ...
Israeli police and border police detain a Palestinian stone-thrower during clashes in Jerusalem's Old City March 5, 2010




Palestinian medical workers evacuate an injured Palestinian ...
Palestinian medical workers evacuate an injured Palestinian stone-thrower following clashes on the compound known to Muslims as al-Haram al-Sharif and to Jews as the Temple Mount in Jerusalem's Old City March 5, 2010.
Palestinian medical workers evacuate an injured Palestinian ...
Palestinian medical workers evacuate an injured Palestinian stone-thrower following clashes on the compound known to Muslims as al-Haram al-Sharif and to Jews as the Temple Mount in Jerusalem's Old City March 5, 2010

Israeli police officers detain a Palestinian youth during clashes ...
Israeli police officers detain a Palestinian youth during clashes in Jerusalem's Old City March 5, 2010.

Israeli border police officers stand guard as an injured Palestinian ...
Israeli border police officers stand guard as an injured Palestinian youth is evacuated during clashes in Jerusalem's Old City March 5, 2010




Israeli border police clash with Palestinian stone throwers ...
Israeli border police clash with Palestinian stone throwers at Jerusalem's Al-Aqsa Mosque compound. Israeli police battled Muslim protesters in Jerusalem's Old City after storming the Al-Aqsa Mosque compound -- Jerusalem's Old City March 5, 2010


http://news.yahoo.com/
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5 mars 2010 5 05 /03 /mars /2010 10:00

Jésus disait aux chefs des prêtres et aux pharisiens : Écoutez cette parabole :

Un homme était propriétaire d'un domaine ; il planta une vigne, l'entoura d'une clôture, y creusa un pressoir et y bâtit une tour de garde. Puis il la donna en fermage à des vignerons, et partit en voyage. Quand arriva le moment de la vendange, il envoya ses serviteurs auprès des vignerons pour se faire remettre le produit de la vigne. Mais les vignerons se saisirent des serviteurs, frappèrent l'un, tuèrent l'autre, lapidèrent le troisième.

De nouveau, le propriétaire envoya d'autres serviteurs plus nombreux que les premiers ; mais ils furent traités de la même façon. Finalement, il leur envoya son fils, en se disant : 'Ils respecteront mon fils.' Mais, voyant le fils, les vignerons se dirent entre eux : 'Voici l'héritier : allons-y ! tuons-le, nous aurons l'héritage !' Ils se saisirent de lui, le jetèrent hors de la vigne et le tuèrent.

Eh bien, quand le maître de la vigne viendra, que fera-t-il à ces vignerons ?

On lui répond : "Ces misérables, il les fera périr misérablement. Il donnera la vigne en fermage à d'autres vignerons, qui en remettront le produit en temps voulu."

Jésus leur dit : "N'avez-vous jamais lu dans les Écritures : La pierre qu'ont rejetée les bâtisseurs est devenue la pierre angulaire. C'est là l'oeuvre du Seigneur, une merveille sous nos yeux ! Aussi, je vous le dis : Le royaume de Dieu vous sera enlevé pour être donné à un peuple qui lui fera produire son fruit."

Les chefs des prêtres et les pharisiens, en entendant ces paraboles, avaient bien compris que Jésus parlait d'eux.

Tout en cherchant à l'arrêter, ils eurent peur de la foule, parce qu'elle le tenait pour un prophète.


Evangile de Jésus-Christ selon saint Matthieu





Ce ne sont plus ici les ombres et les figures de l'antique alliance, qui ne nous montraient notre Rédempteur que dans le lointain et sous des traits empruntés ; nous sommes en face de la réalité même. Encore un peu de temps, et la victime trois fois sainte aura succombé sous les coups de ses envieux. Qu'elle est terrible et solennelle la parole de Jésus dans ces dernières heures !

Ses ennemis en sentent tout le poids ; mais, dans leur orgueil, ils veulent lutter jusqu'à la fin contre celui qui est la Sagesse du Père, s'obstinant à ne pas reconnaître en lui cette pierre redoutable qui brise celui qui la heurte, et qui écrase celui sur lequel elle tombe. Cette Vigne, c'est la Vérité révélée, la règle de la foi et des mœurs, l'attente du Messie Rédempteur, l'ensemble des moyens du salut ; c'est aussi la famille des enfants de Dieu, son héritage, son Eglise.

Dieu avait choisi la Synagogue pour être dépositaire d'un tel trésor ; il voulait que sa vigne fût gardée fidèlement,
qu'elle fructifiât entre les mains des vignerons, qu'ils la reconnussent toujours pour son bien à lui, l'objet de ses complaisances. Mais dans son cœur sec et avare, la Synagogue a voulu s'approprier la Vigne du Seigneur. En vain a-t-il envoyé à diverses reprises ses Prophètes pour revendiquer ses droits : les vignerons infidèles les ont fait périr. Le Fils de Dieu, l'héritier, vient lui-même en personne. Le recevront-ils du moins avec honneur et déférence ? rendront-ils hommage à son divin caractère ? Non ; ils ont formé l'affreux projet de le tuer, et, après l'avoir expulsé comme un étranger sacrilège, ils le mettront à mort.

Accourez donc, ô Gentils ! venez exercer la vengeance du Père ; ne laissez pas pierre sur pierre dans cette ville coupable qui a crié : "Que son sang retombe sur nous et sur nos enfants !" Mais vous ne serez pas seulement les ministres de la justice céleste ; vous êtes devenus l'objet de la prédilection du Seigneur. La réprobation de ce peuple ingrat vous ouvre les portes du salut. Soyez désormais les gardiens de la vigne jusqu'à la fin des siècles ; nourrissez-vous de ses fruits ; ils sont à vous.

De l'Orient à l'Occident, du Midi à l'Aquilon, venez à la grande Pâque qui se prépare ; il y a place pour vous tous. Descendez dans la piscine du salut, peuple nouveau formé de tous les peuples qui sont sous le ciel. Soyez la joie de L'Eglise votre Mère, qui ne cesse d'enfanter, jusqu'à ce que le nombre des élus étant rempli, son Époux descende comme un juge formidable pour condamner "ceux qui n'auront pas connu le temps de sa visite".


DOM GUÉRANGER
L'Année Liturgique




Christ cloué sur la Croix par Dürer

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4 mars 2010 4 04 /03 /mars /2010 20:51

Au cœur d'une nuit ordinaire, sans doute plus bruyante qu'à l'accoutumée, sur ce littoral vendéen où la mer et le vent sont le quotidien des habitants, les éléments se sont conjugués révélant la fragilité des hommes, de leurs vies et de leurs entreprises.

En cette fin de semaine, des familles vivaient en paix et aucun vent même violent ne pouvait troubler ceux qui ont connu bien des bourrasques et des marées. Et puis, au cœur de la nuit, l'inattendu est survenu, engloutissant les vies, séparant les familles, terrassant les plus faibles.

Au cœur de cette nuit d'angoisse, de silence et de froid, dans la profondeur des ténèbres, dans le déferlement d'une force inconnue et aveugle, la mer a pénétré brutalement dans ces maisons que l'on avait bâties pour la paix, fracassant les lieux d'intimité conçus pour la vie en y faisant entrer la mort.

Cette terre de paix et de tranquillité a été dévastée.

Comment ne pas entendre en écho la parole angoissée du Psalmiste :
« Les flots s'élèvent, Seigneur
les flots élèvent leur voix,
les flots élèvent leur fracas. »

... et celle de ceux qui, à l'approche des Ténèbres nous confient, avec affection : "dites bien combien j'ai aimé cette terre".

Puis, pour ceux et celles qui ont pu échapper à la mort, dans le silence et le froid, ce fut l'attente. Blottis sur de fragiles refuges, le temps est devenu interminable dans l'incertitude du sort des êtres aimés.

Quelques jours après ce drame, nous pensons en tout premier lieu aux victimes en priant le Dieu des miséricordes de les accueillir dans sa demeure de lumière et de paix.

Nous prions aussi pour les familles éprouvées dans leur cœur et dans leur chair. Si la mort de celui que l'on aime paraît toujours injuste, nous savons que la brutalité d'une catastrophe ajoute au bouleversement. La perte du conjoint, de l'enfant, du père, de la mère ou de l'ami désoriente, comme si le sol se dérobait. Elle rend vivante cette parole du Livre des lamentations : "Toute mon assurance a disparu" ... "Quand je reviens sur cette misère où je m'égare, c'est l'amertume".

Comment ne pas ressentir également de la compassion envers ceux et celles qui ont tout perdu. Leur maison, leur outil de travail, les souvenirs d'une vie, l'espoir d'une retraite méritée et heureuse.

Comment ne pas mentionner également ces villes meurtries, ces rivages dévastés, ces paysages façonnés par le travail de plusieurs générations anéantis en peu de temps.

Comment pourrions-nous exprimer notre profonde reconnaissance à tous ceux et celles qui se sont dressés, faisant face avec courage et refusant la fatalité du drame. Permettez-moi de saluer les élus, les pouvoirs publics, la gendarmerie, les pompiers, les sauveteurs et les associations qui ont montré et qui montrent un solide sens de l'organisation, de l'abnégation mais aussi une capacité à accueillir et à accompagner les personnes dans ces circonstances tragiques.

Je vous invite également à remercier par anticipation ceux et celles qui sauront soutenir les sinistrés dans la durée.

De l'éprouvante recherche des victimes à l'immense élan de solidarité de ceux et celles qui ont accueilli avec générosité, apporté du réconfort ou donné de leur temps, c'est un même mouvement qui a révélé la grandeur de l'homme. La Vendée a forgé son identité dans l'épreuve et l'attention fraternelle. Les jours qui s'écoulent lui permettent d'écrire avec dignité une nouvelle page tragique de son histoire.

La communauté chrétienne ne vit pas à l'écart des autres hommes. Comme eux, dans le malheur, dans l'épreuve, atteinte par cette souffrance qui mine le fond de l'être, elle interroge son créateur, comme au jour du Vendredi Saint : "Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné".

Le cri de Marie, la sœur de Lazare mêlant confiance et angoisse, devient le sien : "Seigneur, si tu avais été là, mon frère ne serait pas mort".

La force du mystère d'iniquité, la puissance du mal qui survient et terrasse, ébranle jusqu'à faire naître ce cri de révolte qui est le signe d'une humanité blessée : "Si tu avais été là !" "Où est-il ce Dieu qui permet l'inacceptable ?"


Aujourd'hui, Jésus se rend chez des amis. Lazare, l'un de ses proches, vient de mourir. Par ses paroles, ses attitudes et ses actes, le Seigneur nous révèle le visage d'un Dieu humain, d'un Dieu qui sait compatir, d'un Dieu blessé par l'injustice de la mort de l'être aimé.

Le Dieu des Chrétiens n'est pas un Dieu froid et lointain dont l'absence ou l'irritation permettrait les détresses. Il demeure à nos côtés, victime lui-même du mal jusqu'à subir l'injustice et le supplice de la croix.

Devant le tombeau de Lazare, Jésus est "bouleversé d'une émotion profonde" qui s'exprime dans les larmes. Aujourd'hui, nous entrons dans son intimité, Il entre dans la nôtre, proche compagnon de nos détresses.

Il est l'icône d'un Dieu qui écoute, s'émeut et comprend.

Repris par l'émotion, à l'entrée du tombeau, Il révèle un Dieu qui aime jusqu'à ne pas laisser le dernier mot à la mort. Il n'accepte pas sa loi implacable. La mort n'est pas une fatalité.

Tel est le sens de cette parole forte, proférée avec autorité : "Lazare, Viens dehors !"

Cette parole est adressée à chacun et à chacune d'entre nous, avant de l'être à l'ami qui se relève. A chacun le Seigneur dit : "Viens dehors !", ne reste pas dans les ténèbres de la mort et de la crainte, "viens dehors !", la vie est toujours victorieuse.

Si nous acceptons cette parole, les liens de la peur qui nous retiennent se brisent et l'espérance nous illumine, révélant par-delà l'épreuve, la justesse de ce verset du livre des Lamentations : "Les bontés du Seigneur ne sont pas épuisées, ses miséricordes ne sont pas finies."

Ainsi, au cœur du carême se profile déjà le triomphe de Pâques, une nuit de Lumière qui vient transfigurer la nuit de ténèbres que nous avons vécue.

Alors en ce jour, à la lumière des cierges résonnera le chant de l'Exultet :
"Ô nuit dont il est écrit : 
' La nuit comme le jour illumine,
la ténèbre autour de moi devient lumière pour ma joie' 
Ô nuit bienheureuse, où se rejoignent le ciel et la terre,
où s'unissent l'homme et Dieu."


Frères et sœurs, chères familles éprouvées par le deuil et la séparation, après les bouleversements légitimes, un horizon nouveau s'ouvre à nous, laissant entrevoir la certitude d'une rencontre nouvelle par-delà le seuil éprouvant de la mort.

Telle est la foi des chrétiens, telle est l'espérance qu'ils proclament.

Cette espérance est la force et la grandeur des saints.


Amen



Mgr Alain Castet, évêque de Luçon

Église Catholique en France

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4 mars 2010 4 04 /03 /mars /2010 19:00

VIII. INSTITUTION DE LA SAINTE EUCHARISTIE


Sur l'ordre du Seigneur, le majordome avait de nouveau dressé la table, qu'il avait quelque peu exhaussée ; il la couvrit d'un tapis sur lequel il étendit une couverture rouge, et par-dessus celle-ci une couverture blanche ouvrée à jour. Ayant ensuite replacé la table au milieu de la salle, il mit dessous une urne pleine d'eau et une autre pleine de vin. Pierre et Jean allèrent dans la partie de la salle où se trouvait le foyer de l'agneau pascal pour y prendre le calice qu'ils avaient apporté de chez Séraphia (Véronique), et qui était dans son enveloppe.

Ils le portèrent entre eux deux comme s’ils eussent porté un tabernacle, et le placèrent sur la table devant Jésus. Il y avait là une assiette ovale avec trois pains azymes blancs et minces, qui étaient rayés de lignes régulières ; il y avait trois de ces lignes dans la largeur, et chaque pain était à peu près une fois plus long que large. Ces pains, où Jésus avait déjà fait de légères incisions pour les rompre plus facilement furent placés sous un linge auprès du demi pain déjà mis de côté par Jésus lors du repas pascal : il y avait aussi un vase d'eau et de vin, et trots boites, l'une d'huile épaisse, l'autre d'huile liquide, et la troisième vide avec une cuiller à spatule.


Dès les temps anciens, on avait coutume de partager le pain et de boire au même calice à la fin du repas c'était un signe de fraternité et d'amour usité pour souhaiter la bienvenue et pour prendre congé ; je pense qu'il doit y avoir quelque chose à ce sujet dans l'Ecriture sainte. Jésus, aujourd'hui, éleva à la dignité du plus saint des sacrements cet usage qui n'avait été jusqu'alors qu'un rite symbolique et figuratif. Ceci fut un des griefs portés devant Caiphe par suite de la trahison de Judas : Jésus fut accusé d'avoir ajouté aux cérémonies de la Pâque quelque chose de nouveau : mais Nicodème prouva par les Ecritures que c'était un ancien usage.


Jésus était placé entre Pierre et Jean : les portes étaient fermées, tout se faisait avec mystère et solennité. Lorsque le calice fut tiré de son enveloppe, Jésus pria et parla très solennellement. Je vis Jésus leur expliquer la Cène et toute la cérémonie : cela me fit l'effet d'un prêtre qui enseignerait aux autres à dire la sainte Messe.


Il retira du plateau sur lequel se trouvaient les vases une tablette à coulisse, prit un linge blanc qui couvrait le calice et l'étendit sur le plateau et la tablette. Je le vis ensuite ôter de dessus le calice une plaque ronde qu'il plaça sur cette même tablette. Puis il retira les pains azymes de dessous le linge qui les couvrait, et les mit devant lui sur cette plaque ou patène. Ces pains, qui avaient la forme d'un carré oblong, dépassaient des deux cotés la patène, dont les bords cependant étaient visibles dans le sens de la largeur Ensuite il rapprocha de lui le calice, en retira un vase plus petit qui s'y trouvait, et plaça à droite et à gauche les six petits verres dont il était entouré. Alors il bénit le pain, et aussi les huiles, à ce que je crois : il éleva dans ses deux mains la patène avec les pains azymes, leva les yeux, pria, offrit, remit de nouveau la patène sur la table et la recouvrit. Il prit ensuite le calice, y fit verser le vin par Pierre, et l'eau qu'il bénit auparavant, par Jean, et y ajouta encore un peu d'eau qu'il versa dans une petite cuillère : alors il bénit le calice, l'éleva en pliant, en fit l'offrande et le replaça sur la table.

Jean et Pierre lui versèrent de l'eau sur les mains au-dessus de l'assiette où les pains azymes avaient été placés précédemment : il prit avec la cuiller, tirée du pied du calice, un peu de l'eau qui avait été versée sur ses mains, et qu'il répandit sur les leurs ; puis l'assiette passa autour de la table, et tous s'y lavèrent les mains. Je ne me souviens pas si tel fut l'ordre exact des cérémonies : ce que je sais, c'est que tout me rappela d'une manière frappante le saint sacrifice de la Messe et me toucha profondément.

Cependant Jésus devenait de plus en plus affectueux ; il leur dit qu'il allait leur donner tout ce qu'il avait, c’est-à-dire lui-même : c'était comme s'il se fût répandu tout entier dans l'amour. Je le vis devenir transparent ; il ressemblait à une ombre lumineuse, se recueillant dans une ardente prière, il rompit le pain en plusieurs morceaux, qu'il entassa sur la patène en forme de pyramide ; puis, du bout des doigts, il prit un peu du premier morceau, qu'il laissa tomber dans le calice. Au moment où il faisait cela, il me sembla voir la sainte Vierge recevoir le sacrement d'une manière spirituelle, quoiqu’elle ne fût point présente là. Je ne sais comment cela se fit, mais je crus la voir qui entrait sans toucher la terre, et venait en face du Seigneur recevoir la sainte Eucharistie, puis je ne la vis plus, Jésus lui avait dit le matin, à Béthanie, qu'il célébrerait la Pâque avec elle d'une manière spirituelle, et il lui avait indiqué l’heure où elle devait se mettre en prière pour la recevoir en esprit.


Il pria et enseigna encore : toutes ses paroles sortaient de sa bouche comme du feu et de la lumière, et entraient dans les apôtres, à l'exception de Judas. Il prit la patène avec les morceaux de pain, en même temps, il étendit sa main droite comme pour bénir, et, pendant qu'il faisait cela, une splendeur sortit de lui ; ses paroles étaient lumineuses : le pain l'était aussi et se précipitait dans la bouche des apôtres comme un corps brillant : c'était comme si lui-même fût entré en eux. Je les vis tous pénétrés de lumière.
Judas seul était ténébreux. 

Jésus présenta d'abord le pain à Pierre, puis à Jean : ensuite il fit signe à Judas de s'approcher ; celui-ci fut le troisième auquel il présenta le sacrement, mais ce fut comme si la parole du Sauveur se détournait de la bouche du traître et revenait à lui. J'étais tellement troublée, que je ne puis rendre les sentiments que j'éprouvais. Jésus lui dit : “Fais vite ce que tu veux faire”. Il donna ensuite le sacrement au reste des apôtres, qui s'approchèrent deux à deux, tenant tour à tour l'un devant l'autre, un petit voile empesé et brodé sur les bords qui avait servi à recouvrir le calice.


Jésus éleva le calice par ses deux anses jusqu'à la hauteur de son visage, et prononça les paroles de la consécration : pendant qu'il le faisait, il était tout transfiguré et comme transparent ; il semblait qu'il passât tout entier dans ce qu'il allait leur donner. Il fit boire Pierre et Jean dans le calice qu'il tenait à la main, et le remit sur la table. Jean, à l'aide de la petite cuiller, versa le sang divin du calice dans les petits vases, et Pierre les présenta aux apôtres, qui burent deux dans la même coupe. Je crois, mais sans en être bien sûre, que Judas prit aussi sa part du calice, il ne revint pas à sa place, mais sortit aussitôt du Cénacle les autres crurent, comme Jésus lui avait fait un signe, qu'il l'avait charge de quelque affaire. Il se retira sans prier et sans rendre grâces, et vous pouvez voir par là combien l'on a tort de se retirer sans actions de grâces après le pain quotidien et après le pain éternel.

Pendant tout le repas, j'avais vu prés de Judas une hideuse petite figure rouge, qui avait un pied comme un os desséché, et qui quelquefois montait jusqu’à son cœur ; lorsqu'il fut devant la porte, je vis trois démons autour de lui : l'un entra dans sa bouche, l'autre le poussait, le troisième courait devant lui. Il était nuit, et on aurait cru qu'ils l'éclairaient ; pour lui, il courait comme un insensé.


Le Seigneur versa dans le petit vase dont j'ai déjà parlé un reste du sang divin qui se trouvait au fond du calice, puis il plaça ses doigts au-dessus du calice, et y fit verser encore de l'eau et du vin par Pierre et Jean. Cela fait, il les fit boire encore dans le calice, et le reste, versé dans les coupes, fut distribué aux autres apôtres. Ensuite Jésus essuya le calice, y mit le petit vase où était le reste du sang divin, plaça au-dessus la patène avec les fragments du pain consacré, puis remit le couvercle, enveloppa le calice et le replaça au milieu des six petites coupes. Je vis, après la résurrection, les apôtres communier avec le reste du saint Sacrement.


Je ne me souviens pas d'avoir vu que le Seigneur ait lui-même mangé et bu le pain et le vin consacrés, à moins qu'il ne l'ait fait sans que je m'en sois aperçue. En donnant l’Eucharistie, il se donna de telle sorte qu'il m'apparut comme sorti de lui-même et répandu au dehors dans une effusion d'amour miséricordieux. C'est quelque chose qui ne peut s'exprimer. Je n'ai pas vu non plus que Melchisédech lorsqu'il offrit le pain et le vin y ait goûté lui-même. J'ai su pourquoi les prêtres y participent, quoique Jésus ne l'ait point fait.

Pendant qu'elle parlait, elle regarda tout à coup autour d'elle comme si elle écoutait. Elle reçut une explication dont elle ne put communiquer que ceci : “ Si les anges l'avaient distribué, ils n'y auraient point participé ; si les prêtres n'y participaient pas, l'Eucharistie se serait perdue : c'est par là qu'elle se conserve”.

Il y eut quelque chose de très régulier et de très solennel dans les cérémonies dont Jésus accompagna l'institution de la sainte Eucharistie, quoique ce fussent en même temps des enseignements et des leçons. Aussi je vis les apôtres noter ensuite certaines choses sur les petits rouleaux qu'ils portaient avec eux. Tous ses mouvements à droite et à gauche étaient solennels comme toujours lorsqu'il priait. Tout montrait en germe le saint sacrifice de la Messe. Pendant la cérémonie, je vis les apôtres, à diverses reprises, s'incliner l'un devant l'autre, comme font nos prêtres.


LA DOULOUREUSE PASSION DE NOTRE SEIGNEUR JESUS CHRIST
d'après les méditations de la Bienheureuse Anne-Catherine Emmerick
Traduction de l'Abbé de Cazalès
Gallica

Anna Katharina Emmerick
'Die ekstatische Jungfrau Katharina Emmerick' par Gabriel von Max,  München, Neue Pinakothek

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4 mars 2010 4 04 /03 /mars /2010 05:00

Parole du Seigneur.

Maudit soit l'homme qui met sa confiance dans un mortel, qui s'appuie sur un être de chair, tandis que son coeur se détourne du Seigneur.

Il sera comme un buisson sur une terre désolée, il ne verra pas venir le bonheur. Il aura pour demeure les lieux arides du désert, une terre salée et inhabitable.

Béni soit l'homme qui met sa confiance dans le Seigneur, dont le Seigneur est l'espoir.

Il sera comme un arbre planté au bord des eaux, qui étend ses racines vers le courant : il ne craint pas la chaleur quand elle vient, et son feuillage reste vert ; il ne redoute pas une année de sécheresse, car elle ne l'empêche pas de porter du fruit.

Le coeur de l'homme est compliqué et malade ! Qui peut le connaître ?

Moi, le Seigneur, qui pénètre les cœurs et qui scrute les reins, afin de rendre à chacun selon ses actes, selon les fruits qu'il porte.


Livre de Jérémie




Les lectures de ce jour sont consacrées à fortifier dans nos cœurs les principes de la morale chrétienne. Détournons un instant les yeux du triste spectacle que nous offre la malice des ennemis du Sauveur ; reportons-les sur nous-mêmes, afin de connaître les plaies de nos âmes et d'en préparer le remède.

Le prophète Jérémie nous présente aujourd'hui le tableau de deux situations pour l'homme ; laquelle des deux est la nôtre ? Il y a l'homme qui met sa confiance dans un bras de chair, c'est-à-dire qui ne considère sa vie que dans les conditions du présent, qui voit tout dans les créatures, et se trouve par là même entraîné à violer la loi du Créateur. Tous nos péchés sont venus de cette source ; nous avons perdu  de vue 
nos fins éternelles, et la triple concupiscence nous a séduits. Hâtons-nous de revenir au Seigneur notre Dieu : autrement, nous aurions à craindre le sort dont le Prophète menace le pécheur : Quand le bien arrivera, il ne le verra pas.

La sainte Quarantaine avance dans son cours ; les grâces les plus choisies se multiplient à chaque heure ; malheur à l'homme qui, distrait par la vaine figure de ce monde qui passe, ne s'aperçoit de rien, et demeure, en ces saints jours, stérile pour le ciel, comme la bruyère du désert l'est pour la terre ! Qu'il est grand, le nombre de ces aveugles volontaires, et que leur insensibilité est effrayante ! Enfants fidèles de la sainte Eglise, priez pour eux, priez sans cesse ; offrez au Seigneur à leur intention les œuvres de votre pénitence, les largesses de votre charité. Chaque année, plusieurs d'entre eux rentrent au bercail, dont la porte leur a été ouverte par les pieux suffrages de leurs frères ; faisons violence à la divine miséricorde.

Le Prophète nous dépeint ensuite l'homme qui met sa confiance dans le Seigneur, et qui, n'ayant pas d'autre espérance que lui, veille sans cesse à lui être fidèle. C'est un bel arbre au bord des eaux, dont le feuillage est toujours vert, et dont les fruits sont abondants. "Je vous ai établis, dit le Sauveur, afin que vous portiez du fruit et que votre fruit demeure."

Devenons cet arbre béni et toujours fécond. L'Eglise, en ce saint temps, répand sur ses racines l'eau de la componction ; laissons agir cette eau bienfaisante. Le Seigneur pénètre nos cœurs ; il sonde nos désirs de conversion ; et, quand la Pâque sera venue, "il rendra à chacun selon sa voie".


DOM GUÉRANGER
L'Année Liturgique



Christ lavant les pieds de Pierre par Dürer

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