Crist-Pantocrator.jpg

"Je vous donne un commandement nouveau : c'est de vous aimer les uns les autres.

 

Comme je vous ai aimés, vous aussi aimez-vous les uns les autres.

 

Ce qui montrera à tous les hommes que vous êtes mes disciples, c'est l'amour que vous aurez les uns pour les autres."

 

Evangile de Jésus-Christ selon  saint Jean 

   

 

Pentecôte

" Le Défenseur, l'Esprit Saint que le Père enverra en mon nom, lui, vous enseignera tout, et il vous fera souvenir de tout ce que je vous ai dit."

 

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean  

 

   

 

 El Papa es argentino. Jorge Bergoglio                 

Saint Père François

 

 

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1er mai 2011 Béatification de Jean-Paul II

Béatification du Serviteur de Dieu Jean-Paul II

 

 

  Béatification du Père Popieluszko

beatification Mass, in Warsaw, Poland

à Varsovie, 6 juin 2010, Dimanche du Corps et du Sang du Christ

 

 

presidential palace in Warsaw

Varsovie 2010

 

 

Basilique du Sacré-Cœur de Montmartre
Sanctuaire de l'Adoration Eucharistique et de la Miséricorde Divine

La miséricorde de Dieu est comme un torrent débordé. Elle entraîne les cœurs sur son passage.
(Saint Curé d'Ars)
 

 


Le côté du Christ a été transpercé et tout le mystère de Dieu sort de là. C’est tout le mystère de Dieu qui aime, qui se livre jusqu’au bout, qui se donne jusqu’au bout. C’est le don le plus absolu qui soit. Le don du mystère trinitaire est le cœur ouvert. Ce n’est pas une image, c’est une réalité. C’est la réalité la plus profonde qui soit, la réalité de l’amour.
Père Marie-Joseph Le Guillou




Dans le cœur transpercé
de Jésus sont unis
le Royaume du Ciel
et la terre d'ici-bas
la source de la vie
pour nous se trouve là.

Ce cœur est cœur divin
Cœur de la Trinité
centre de convergence
de tous les cœur humains
il nous donne la vie
de la Divinité.


Sainte Thérèse Bénédicte de la Croix
(Edith Stein)



Le Sacré-Cœur représente toutes les puissances d'aimer, divines et humaines, qui sont en Notre-Seigneur.
Père Marie-Eugène de l'Enfant Jésus

 



feuille d'annonces de la Basilique du Sacré-Coeur de Montmartre

 

 

 

 

 

 

 

     

The Cambrai Madonna

Notre Dame de Grâce

Cathédrale de Cambrai

 

 

 

Cathédrale Notre Dame de Paris 

   

Ordinations du samedi 27 juin 2009 à Notre Dame de Paris


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Magnificat

     



Solennité de l’Immaculée Conception de la Vierge Marie à Notre-Dame de Paris


NOTRE DAME DES VICTOIRES

Notre-Dame des Victoires




... ma vocation, enfin je l’ai trouvée, ma vocation, c’est l’Amour !

 

 

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Voyages de Benoît XVI

 

SAINT PIERRE ET SAINT ANDRÉ

Saint Pierre et Saint André

 

BENOÎT XVI à CHYPRE 

 

Benedict XVI and Cypriot Archbishop Chrysostomos, Church of 

Salutation avec l'Archevêque Chrysostomos à l'église d' Agia Kyriaki Chrysopolitissa de Paphos, le vendredi 4 juin 2010

 

     

 

Benoît XVI en Terre Sainte  


 

Visite au chef de l'Etat, M. Shimon Peres
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Visite au mémorial de la Shoah, Yad Vashem




 






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SALVE REGINA

11 avril 2009 6 11 /04 /avril /2009 07:05

Elle pleurait, elle pleurait.

Comme aucune femme n’a jamais pleuré.

Nulle femme.

Voilà ce qu’il avait rapporté à sa mère.

Jamais un garçon n’avait coûté autant de larmes à sa mère.

Jamais un garçon n’avait autant fait pleurer sa mère.

Voilà ce qu’il avait rapporté à sa mère.

Depuis qu’il avait commencé sa mission.


Parce qu’il avait commencé sa mission.

Depuis trois jours elle pleurait.

Depuis trois jours elle errait, elle suivait.

Elle suivait le cortège.

Elle suivait les événements.

Elle suivait comme à un enterrement.

Mais c’était l’enterrement d’un vivant.

D’un vivant encore.

Elle suivait ce qui se passait.

Elle suivait comme si elle avait été du cortège.

De la cérémonie.

Elle suivait comme une suivante.

Comme une servante.

Comme une pleureuse des Romains.

Des enterrements romains.

Comme si ça avait été son métier.

De pleurer.

Elle suivait comme une pauvre femme.

Comme une habituée du cortège.

Comme une suivante du cortège.

Comme une servante.

Déjà comme une habituée.

Elle suivait comme une pauvresse.

Comme une mendiante.

Eux qui n’avaient jamais rien demandé à personne.

À présent elle demandait la charité.

Sans en avoir l’air elle demandait la charité.

Puisque sans en avoir l’air, sans même le savoir elle demandait la charité de la pitié.

D’une piété.

D’une certaine piété.

Pietas.

Voilà ce qu’il avait fait de sa mère.

Depuis qu’il avait commencé sa mission.

Elle suivait, elle pleurait.

Elle pleurait, elle pleurait.

Les femmes ne savent que pleurer.

On la voyait partout.

Dans le cortège mais un peu en dehors du cortège.

Sous les portiques, sous les arcades, dans les courants d’air.

Dans les temples, dans les palais.

Dans les rues.

Dans les cours et dans les arrière-cours.

Et elle était montée aussi sur le Calvaire.

Elle aussi elle avait gravi le Calvaire.

Qui est une montagne escarpée.

Et elle ne sentait seulement pas qu’elle marchait.

Elle ne sentait seulement pas ses pieds qui la portaient.

Elle ne sentait pas ses jambes sous elle.

Elle aussi elle avait gravi son calvaire.

Elle aussi elle avait monté, monté.

Dans la cohue, un peu en arrière.

Monté au Golgotha.

Sur le Golgotha.

Sur le faîte.

Jusqu’au faîte.

Où il était maintenant crucifié.

Cloué des quatre membres.

Comme un oiseau de nuit sur la porte d’une grange.

Lui le Roi de Lumière.

Au lieu appelé Golgotha.

C’est-à-dire la place du Crâne.

Voilà ce qu’il avait fait de sa mère.

Maternelle.

Une femme en larmes.

Une pauvresse.

Une pauvresse de détresse.

Une pauvresse en détresse.

Une espèce de mendiante de pitié.

Depuis qu’il avait commencé d’accomplir sa mission.

Depuis trois jours elle suivait elle suivait.

Accompagnée seulement de trois ou quatre femmes.

De ces saintes femmes.

Escortée, entourée seulement de ces quelques femmes.

De ces quelques saintes femmes.

Des saintes femmes.

Enfin.

Puisqu’éternellement on devait les nommer ainsi.

Qui gagnaient ainsi.

Qui assuraient ainsi leur part de paradis.

Et pour sûr elles auraient une bonne place.

Aussi bonne que celle qu’elles avaient en ce moment.

Puisqu’elles auraient la même place.

Car elles seraient aussi près de lui qu’en ce moment.

Je veux dire qu’elles seraient aussi près de lui qu’en ce moment.

Qu’en ce moment même.

Éternellement aussi près qu’en ce moment même.

Éternellement aussi près qu’en ce moment du temps.

Du temps de Judée.

Éternellement aussi près dans sa gloire.

Que dans sa passion.

Dans la gloire de sa passion.

Et toutes les quatre ensemble ou peut-être un peu plus ou moins.

Un peu plus un peu moins.

Elles formaient toujours un petit groupe à part.

Un petit cortège un peu derrière le grand cortège.

Un peu en arrière.

Et on les reconnaissait.

Elle pleurait, elle pleurait sous un grand voile de lin.

Un grand voile bleu.

Un peu passé.

Voilà ce qu’il avait fait de sa mère.

Elle pleurait comme jamais il ne sera donné ;

Comme jamais il ne sera demandé

À une femme de pleurer sur terre.

Éternellement jamais.

À aucune femme.

Voilà ce qu’il avait fait de sa mère.

D’une mère maternelle.

Ce qu’il y a de curieux c’est que tout le monde la respectait.

Les gens respectent beaucoup les parents des condamnés.

Ils disaient même : la pauvre femme.

Et en même temps ils tapaient sur son fils.

Parce que l’homme est comme ça.

L’homme est ainsi fait.

Le monde est comme ça.

Les hommes sont comme ils sont et on ne pourra jamais les changer.

Elle ne savait pas qu’au contraire il était venu changer l’homme.

Qu’il était venu changer le monde.

Elle suivait, elle pleurait.

Et en même temps ils tapaient sur son garçon.

Elle suivait, elle suivait.

Les hommes sont comme ça.

On ne les changera pas.

On ne les refera pas.

On ne les refera jamais.

Et lui il était venu pour les changer.

Pour les refaire.

Pour changer le monde.

Pour le refaire.

Elle suivait, elle pleurait.

Tout le monde la respectait.

Tout le monde la plaignait.

On disait la pauvre femme.

C’est que tous ces gens n’étaient peut-être pas méchants.

Ils n’étaient pas méchants au fond.

Ils accomplissaient les Écritures.

Ce qui est curieux, c’est que tout le monde la respectait.

Honorait, respectait, admirait sa douleur.

On ne l’écartait, on ne la repoussait que modérément.

Avec des attentions particulières.

Parce qu’elle était la mère du condamné.

On pensait : c’est la famille du condamné.

On le disait même à voix basse.

On se le disait, entre soi,

Avec une secrète admiration.

Et on avait raison, c’était toute sa famille.

Sa famille charnelle et sa famille élue.

Sa famille sur la terre et sa famille dans le ciel.

Elle suivait, elle pleurait.

Ses yeux étaient si brouillés que la lumière du jour ne lui paraîtrait jamais claire.

Plus jamais.

Depuis trois jours les gens disaient : Elle a vieilli de dix ans.

Je l’ai encore vue.

Je l’avais encore vue la semaine dernière.

En trois jours elle a vieilli de dix ans.

Jamais plus.

Elle suivait, elle pleurait, elle ne comprenait pas très bien.

Mais elle comprenait très bien que le gouvernement était contre son garçon.

Ce qui est une mauvaise affaire.

Que le gouvernement était pour le mettre à mort.

Toujours une mauvaise affaire.

Et qui ne pouvait pas bien finir.

Tous les gouvernements s’étaient mis d’accord contre lui.

Le gouvernement des Juifs et le gouvernement des Romains.

Le gouvernement des juges et le gouvernement des prêtres.

Le gouvernement des soldats et le gouvernement des curés.

Il n’en réchapperait sûrement pas.

Certainement pas.

Tout le monde était contre lui.

Tout le monde était pour sa mort.

Pour le mettre à mort.

Voulait sa mort.






























texte de Charles Péguy : Le mystère de la charité de Jeanne d’Arc

1er tableau : Deposition by DUCCIO di Buoninsegna

2e tableau : Entombment by TOURNIER, Nicolas

3e tableau : Deposition by BARTOLOMEO, Fra 

4e tableau : The Entombment of Christ by BADALOCCHIO, Sisto

5e tableau : Entombment of Christ by WEYDEN, Rogier van der

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10 avril 2009 5 10 /04 /avril /2009 14:33

Et lui poussa le cri qui retentira toujours, éternellement toujours, le cri qui ne s’éteindra éternellement jamais.

Dans aucune nuit. Dans aucune nuit du temps et de l’éternité.


Car le larron de gauche et le larron de droite

Ne sentaient que les clous dans le creux de la main.


Que lui faisait l’effort de la lance romaine ;

Que lui faisait l’effort des clous et le marteau ;

Le percement des clous, le percement de lance ;

Que lui faisaient les clous dans le creux de la main ;

Le percement des clous au creux de ses deux mains ;


Sa gorge qui lui faisait mal.

Qui lui cuisait.

Qui lui brûlait.

Qui lui déchirait.

Sa gorge sèche et qui avait soif.

Son gosier sec.

Son gosier qui avait soif.

Sa main gauche qui lui brûlait.

Et sa main droite.

Son pied gauche qui lui brûlait.

Et son pied droit.

Parce que sa main gauche était percée.

Et sa main droite.

Et son pied gauche était percé.

Et son pied droit.

Tous ses quatre membres.

Ses quatre pauvres membres.

Et son flanc qui lui brûlait.

Son flanc percé.

Son coeur percé.

Et son coeur qui lui brûlait.

Son coeur consumé d’amour.

Son coeur dévoré d’amour.

Le reniement de Pierre et la lance romaine ;

Les crachats, les affronts, la couronne d’épines ;

Le roseau flagellant, le sceptre de roseau ;

Les clameurs de la foule et les bourreaux romains.

Le soufflet. Car ce fut la première fois qu’il fut souffleté.

Il n’avait pas crié sous la lance romaine ;

Il n’avait pas crié sous le baiser parjure ;

Il n’avait pas crié sous l’ouragan d’injure ;

Il n’avait pas crié sous les bourreaux romains.

Il n’avait pas crié sous l’amertume et l’ingratitude.

Le goût de l’amertume dans la gorge.

Dans le gosier.

La gorge sèche et amère d’amertume.

Sèche de ravaler l’amertume.

Sèche, amère de ravaler l’ingratitude.

Des hommes.

Amère, suffoquée de ravaler.

Suffoquée des flots d’ingratitude.

Étranglée de ravaler.

Et il ne parlerait plus par (des) similitudes.

Il n’avait pas crié sous la face parjure ;

Il n’avait pas crié sous les faces d’injure ;

Il n’avait pas crié sous les faces des bourreaux romains.

Alors pourquoi cria-t-il ; devant quoi cria-t-il.

Tristis, tristis usque ad mortem ;

Triste jusqu’à la mort ; mais jusqu’à quelle mort ;

Jusqu’à faire une mort ; ou jusqu’à cette date

De la mort.

Il revoyait l’humble berceau de son enfance,

La crèche,

Où son corps fut couché pour la première fois ;

Il prévoyait le grand tombeau de son corps mort,

Le dernier berceau de tout homme,

Où il faut que tout homme se couche.

Pour dormir.

Censément.

Apparemment.

Pour enfin reposer.

Pour pourrir.

Son corps.

Entre quatre planches.

En attendant la résurrection des corps.

Jusqu’à la résurrection des corps.

Heureux quand les âmes ne pourrissent point.


Et il était homme ;

Il devait subir le sort commun ;

S’y coucher comme tout le monde ;

Il devait y passer comme tout le monde ;

Il y passerait.

Comme les autres.

Comme tout le monde.

Comme tant d’autres.

Après tant d’autres.

Son corps serait couché pour la dernière fois.

Mais il n’y resterait que deux jours, trois jours ; à cause de la résurrection.

Car il ressusciterait le troisième jour.

À cause de sa résurrection particulière et de son ascension.

À lui.

Qu’il fit avec son propre corps, avec le même corps.


Le linge de son ensevelissement ;

Blanc comme le mouchoir de cette nommée Véronique ;

Le linge blanc comme un lange.

Et que l’on entoure tout à fait comme un lange.

Mais plus grand, beaucoup plus grand.

Parce que lui-même il avait grandi.

Il était devenu un homme.

C’était un enfant qui avait beaucoup grandi.

Il serait enseveli par ces femmes.

Pieusement par les mains de ces femmes.

Comme un homme qui est mort dans un village.

Tranquillement dans sa maison dans son village.

Accompagné des derniers sacrements.

Pieusement enseveli et tranquillement par ces femmes.

Sans que personne les dérange.

Par les mains pieuses de ces femmes.

Par les doigts pieux de ces femmes.

C’est ce qu’on nommerait la descente de croix.

Parce que les Romains n’étaient pas méchants.

Tous ces Romains.

Au fond ils n’étaient pas méchants.

Ils ne cherchaient pas querelle à son corps pendu.

Et dépendu.

Ils ne feraient point des misères à sa dépouille.

Mortelle.

Ils ne chercheraient pas des disputes à ces pauvres femmes.

Aux saintes femmes.

Ni à ce vieux Joseph d’Arimathée.

Ce bon vieux.

Ce sage bon vieux.

Qui lui prêterait son sépulcre.

On peut se prêter beaucoup de choses dans l’existence.

Entre soi.

Dans son ménage.

On peut se prêter son âne pour aller au marché.

On peut se prêter son baquet pour faire la lessive.

Et son battoir.

On peut se prêter sa casserole.

Et son chaudron.

Et sa marmite pour faire bouillir la soupe.

Pour les enfants.

Pour toute la maisonnée.

Mais se prêter un sépulcre.

Ce n’est pas ordinaire.

Se prêter son sépulcre.

Son propre tombeau.

Ce vieux lui prêterait donc son sépulcre.

Ce sage vieux.

Ce vieux avisé.

Cet homme riche.

Ce vieil avisé ;

Cet homme à la barbe blanche.

Aux cheveux tout blancs.

Ce vieux sage.

Cet homme tout blanc.

Le sépulcre qu’il avait fait faire.

Qu’il s’était fait faire pour lui-même.

Puisque Dieu le père en avait décidé ainsi.

Que les jeunes mouraient souvent avant les vieux.

Et qu’il y avait tant de vieillards qui ne mouraient point.

Et que lui mourait dans la jeunesse maigre de ses trente et trois ans.


Or comme il s’était fait le soir.

Vint un certain homme riche d’Arimathée.

Nommé Joseph.

Qui lui-même était disciple de Jésus.

Celui-ci alla trouver Pilate.

Car il faut toujours demander un jour quelque chose aux puissances.

Quand on est vivant on les brave.

Le héros, le saint, le martyr les brave.

Mais quand on est mort.

Les autres ne les bravent pas pour vous dans les questions d’enterrement.

Cela prouve que ce Joseph d’Arimathée n’avait pas peur d’aller trouver les puissances.

De causer aux puissances.

Il savait parler. Il savait causer.

Évidemment c’était un homme qui savait causer.

Il n’avait pas peur de causer.

Il savait quoi dire.

Il n’avait pas peur.

Même à Pilate.

Il savait se présenter.

Celui-ci alla trouver Pilate.

Et demanda le corps de Jésus.

Alors Pilate ordonna de rendre le corps.

Ce n’était pas plus difficile que ça.

Décidément ce Pilate n’était pas un mauvais homme.

C’était un fonctionnaire.

Un préfet.

Romain.

Il n’en voulait pas particulièrement à Jésus.

Il n’en voulait pas au corps de Jésus.

Le lendemain il n’y pensait même plus.

Il n’en voulait pas personnellement à Jésus.

Il n’en voulait pas au corps de Jésus.

Il avait bien autre chose à penser.

Le lendemain il n’y pensait même plus.

Et toute l’humanité y pense éternellement.

Et ayant reçu le corps.

Joseph l’enveloppa dans un blanc linceul.

Dans un linceul propre.

In sindone munda.

Dans un linceul blanc.

Et il le plaça dans son monument neuf.

Dans son sépulcre neuf.

Posuit illud. Il le posa.

Qu’il avait fait tailler dans la pierre.

Dans le roc.

Et il roula une grande pierre.

Il fit rouler un grand rocher.

À la porte du monument.

À l’entrée du sépulcre.

Et s’en alla.

On aime à penser qu’ensuite il chercha pour son propre corps un autre monument.


Le grand tombeau de son ensevelissement.

Le saint sépulcre.

Le sépulcre de sa grande sépulture.


Il avait dit à Jean : Jean, voici votre mère.

Et voici votre fils.

Il ne pleurait point Jean, Marie et Madeleine ;

Il ne les quittait plus que de quelques années ;

Un jour ils remonteraient au séjour de son père ;

La séparation n’avait qu’un temps humain.



Charles Péguy
Le mystère de la charité de Jeanne d’Arc









Deposition by Rogier van der Weyden

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3 avril 2009 5 03 /04 /avril /2009 02:03

Tous les gouvernements s’étaient mis d’accord contre lui.
Le gouvernement des Juifs et le gouvernement des Romains.
Le gouvernement des juges et le gouvernement des prêtres.
Le gouvernement des soldats et le gouvernement des curés.

Il n’en réchapperait sûrement pas.
Certainement pas.

Tout le monde était contre lui.
Tout le monde était pour sa mort.
Pour le mettre à mort.
Voulait sa mort.

Des fois on avait un gouvernement pour soi.
Et l’autre contre soi.
Alors on pouvait en réchapper.
Mais lui tous les gouvernements.
Tous les gouvernements d’abord.
Et le gouvernement et le peuple.
C’est ce qu’il y avait de plus fort.
C’était ça surtout qu’on avait contre soi.
Le gouvernement et le peuple.
Qui d’habitude ne sont jamais d’accord.
Et alors on en profite.
On peut en profiter.
Il est bien rare que le gouvernement et le peuple soient
d’accord.
Et alors celui qui est contre le gouvernement.
Est avec le peuple.
Pour le peuple.
Et celui qui est contre le peuple.
Est avec le gouvernement.
Pour le gouvernement.
Celui qui est appuyé par le gouvernement.
N’est pas appuyé par le peuple.
Celui qui est soutenu par le peuple.
N’est pas soutenu par le gouvernement.
Alors en s’appuyant sur l’un ou sur l’autre.
Sur l’un contre l’autre.
On pouvait quelquefois en réchapper.
On pourrait peut-être s’arranger.

Mais ils n’avaient pas de chance.
Elle [Marie] voyait bien que tout le monde était contre lui.
Le gouvernement et le peuple.
Ensemble.
Et qu’ils l’auraient.

Qu’ils auraient sa peau.


Tout le monde était contre lui.
Tout le monde voulait sa mort.

C’est curieux.
Des mondes qui d’habitude n’étaient pas ensemble.
Le gouvernement et le peuple.
De sorte que le gouvernement lui en voulait comme le dernier des charretiers.
Autant que le dernier des charretiers.
Et le dernier des charretiers comme le gouvernement.
Autant que le gouvernement.
C’était jouer de malheur.
Quand on a l’un pour soi, l’autre contre soi quelquefois on en réchappe.
On s’en tire.
On peut s’en tirer.
On peut en réchapper.

Mais il n’en réchapperait pas.

Sûrement il n’en réchapperait pas.
Quand on a tout le monde contre soi.
Qu’est-ce qu’il avait donc fait à tout le monde.

Je vais vous le dire :
Il avait sauvé le monde.


Il avait été arrêté au jardin des Oliviers.
Qui était un lieu de promenade.
Pour les gens le dimanche.
Il avait été arrêté la veille au soir au jardin des Oliviers.

Elle [Marie] se rappelait bien.
Elle se rappelait très bien.
Mais il lui semblait.
Elle croyait qu’il y avait trois jours.
Au moins.
Et même plus.
Beaucoup plus.
Des jours et des jours.
Et des années.

Il lui semblait qu’il y avait presque toujours.
Pour ainsi dire toujours.
Il lui semblait.
Que ça avait toujours été comme ça.
Il y a dans la vie des événements comme ça.

Tout le monde était contre lui.
Depuis Ponce Pilate jusqu’au dernier des charretiers.
Tout le monde était contre lui.
Depuis Ponce Pilate.
Ce Ponce Pilate.
Pontius Pilatus.
Sub Pontio Pilato passus.
Et sepultus est.

Un brave homme.
Du moins on le disait un brave homme.
Bon.
Pas méchant.
Un Romain.
Qui comprenait les intérêts du pays.
Et qui avait beaucoup de mal à gouverner ces Juifs.
Qui sont une race indocile.
Seulement, voilà, depuis trois jours une folie les avait pris contre son garçon.
Une folie. Une espèce de rage.
Oui ils étaient enragés.
Après lui.

Qu’est-ce qu’ils avaient.
Il n’avait pourtant pas fait tant de mal que ça.
Tous.
Lui en tête Ponce Pilate.
L’homme qui se lavait les mains.
Le procurateur.
Le procurateur pour les Romains.
Le procurateur de Judée.
Tous. Et Caïphe le grand-prêtre.
Les généraux, les officiers, les soldats.
Les sous-officiers, centeniers, centurions, décurions.
Les prêtres et les princes des prêtres.
Les écrivains.
C’est-à-dire les scribes.
Les pharisiens, les publicains, les péagers.
Les Pharisiens et les Sadducéens.
Les publicains qui sont comme qui dirait les percepteurs.
Et qui ne sont pas pour ça des hommes plus mauvais que les autres.

On lui avait dit aussi qu’il avait des disciples.
Des apôtres.
Mais on n’en voyait point.
Ça n’était peut-être pas vrai.
Il n’en avait peut-être pas.
Il n’en avait peut-être jamais eu.
On se trompe, des fois, dans la vie.
Si il en avait eu on les aurait vus.
Parce que si il en avait eu, ils se seraient montrés.
Hein, c’étaient des hommes, ils se seraient montrés.


Non seulement il avait contre lui le peuple.
Mais les deux peuples.
Tous les deux peuples.
Le peuple des pauvres.
Qui est sérieux.
Et respectable.
Et le peuple des misérables.
Des miséreux.
Qui n’est pas sérieux.
Ni pas respectable.
Il avait contre lui ceux qui travaillaient et ceux qui ne faisaient rien.
Ceux qui travaillaient et ceux qui ne travaillaient pas.
Ensemble.
Également.
Le peuple des ouvriers.
Qui est sérieux.
Et respectable.
Et le peuple des mendiants.
Qui n’est pas sérieux.
Mais qui est peut-être respectable tout de même.
Parce qu’on ne sait pas.
La tête se trouble.
La tête se dérange.
Les idées se dérangent quand on voit des choses comme ça.
Il avait contre lui les ouvriers des villes.
De la ville.
Ceux qui travaillent en ville.
Chez les patrons.
Chez les bourgeois.
Et aussi, également, ensemble les ouvriers des champs.
Également aussi.
Les paysans qui viennent au marché.
Il n’avait tout de même pas fait du mal à tout ce monde.
À tout ce monde-là.
Enfin on exagère.
On exagère toujours.
Le monde est mauvaise langue.
On exagérait.
Enfin il n’avait pas fait du mal à tout le monde.

Il était trop jeune.
Il n’avait pas eu le temps.
D’abord il n’aurait pas eu le temps.
Quand un homme est tombé, tout le monde est dessus.

Vous savez, chrétiens, ce qu’il avait fait.
Il avait fait ceci.
Qu’il avait sauvé le monde.


Charles Péguy
Le mystère de la charité de Jeanne d’Arc













Eglise Saint-Martin
Cormeilles-en-Parisis



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28 mars 2009 6 28 /03 /mars /2009 13:56

Celui qui aime se met, par cela même,
Par cela seulement, dès par cela dans la dépendance,
Celui qui aime tombe dans la servitude de celui qui est aimé.
C'est l'habitude, c'est la loi commune.
C'est fatal.
Celui qui aime tombe, se met sous la servitude, sous un joug de servitude. Il dépend de celui qu'il aime.
C'est pourtant cette situation-là, mon enfant, que Dieu s'est faite, en nous aimant.
Dieu a daigné espérer en nous, puisqu'il a voulu espérer de nous, attendre de nous.
Situation misérable, (en) récompense de quel amour,
Gage, rançon de quel amour.
Singulière récompense. Et qui était dans la condition, dans l'ordre même, dans la nature de cet amour.
Il s'est mis dans cette singulière situation, retournée, dans cette misérable situation que c'est lui qui attend de nous, du plus misérable pécheur.
Qui espère du plus misérable pécheur.
Qui ainsi dépend du plus misérable pécheur.
Et nous.
Voilà où il s'est laissé conduire, par son grand amour, voilà où il s'est mis, où il a été mis, où enfin il s'est laissé mettre.
Voilà où il en est, où il est.
Où nous devons être, c'est lui qui s'est mis,
A ce point, sur ce pied.
Qu'il a à craindre, à espérer, enfin à attendre du dernier des hommes.
Qu'il est aux mains du dernier des pécheurs.
(Maïs le corps de Jésus, dans toute église, n'est-il pas aux mains du dernier des pécheurs.
A la merci du dernier des soldats)
Qu'il a à redouter, tout, de nous.
(Qu'il ait à redouter, c'est déjà trop, c'est déjà tout),
(Si peu que ce fût, et ici c'est tout)
(Si peu que ce fût, quand ce ne serait presque rien, rien pour ainsi dire)
Telle est la situation où Dieu par la vertu de l'espérance
Pour faire le jeu de l'espérance.
S'est laissé mettre
En face du pécheur.
Il craint de lui, puisqu'il craint pour lui.
Tu comprends, je dis : Dieu craint du pécheur, puisqu'il craint pour le pécheur.
Quand on craint pour quelqu'un, on craint de ce quelqu'un.
C'est à cette loi commune que Dieu s'est laissé mettre.
Et soumettre.
A ce niveau commun.
C'est à cette loi commune qu'il a souffert d'être mis.
Il faut qu'il attende le bon plaisir du pécheur.
Il s'est mis sur ce pied.
Il faut qu'il espère dans le pécheur, en nous.
Il faut, c'est insensé, il faut qu'il espère que nous nous sauvions.
Il ne peut rien faire sans nous.
Il faut qu'il écoute nos fantaisies.
Il faut qu'il attende que monsieur le pécheur veuille bien un peu penser à son salut.


Voilà la situation que Dieu s'est faite.


Charles Péguy
Le Porche du mystère de la deuxième vertu

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27 mars 2009 5 27 /03 /mars /2009 14:18

Jésus-Christ, mon enfant, n'est pas venu pour nous conter des fariboles,
Pendant le peu de temps qu'il avait.
Qu'est-ce que trois ans dans la vie d'un monde.
Dans l'éternité de ce monde.
Il n'avait pas de temps à perdre, il n'a pas perdu son temps à nous conter des fariboles et à nous donner des charades à deviner.
Des charades très spirituelles.
Très ingénieuses.
Des devinettes de sorcier.
Avec des mots à double entente et des malices et de misérables finesses de finasseries.
Non, il n'a pas perdu son temps et sa peine,
Il n'avait pas le temps,
Ses peines, sa grande, sa très grande peine.
Il n'a pas perdu, il n'a pas dépensé tout cela, tout son être, tout.
Il ne s'est pas dépensé, tout, lui-même, il n'a pas fait cette énorme, cette effroyable dépense
De soi, de son être, (de) tout,
Pour venir après ça, avec ça, moyennant ça, à ce prix,
Pour venir à ce prix-là nous donner de la tablature
A déchiffrer.
Des malices, de pauvres niaiseries, des quiproquos, des roueries spirituelles comme un devin de village.
Comme un farceur de campagne.
Comme un saltimbanque ambulant, un charlatan dans sa voiture.
Comme le malin du bourg, comme le gars le plus malin au cabaret.


Mais quand le Fils de Dieu, mon enfant, s'est dérangé du Ciel et de la droite de son Père.
Quand il s'est dérangé d'être assis à la droite.
Il n'a point fait, il n'a point fourni cette grande dépense.
Il n'a point fait ce grand dérangement pour venir nous conter des balivernes
De quatre sous.
Des paroles en l'air.
Et des emberlificotages à n'y rien comprendre.
Mais, à ce prix-là, il est venu nous dire ce qu'il avait à nous dire.
N'est-ce pas.
Tout tranquillement.
Tout simplement, tout honnêtement.
Tout directement. Tout premièrement.
Tout ordinairement.
Comme un honnête homme parle à un honnête homme.
D'homme à hommes.
Il ne s'est pas amusé à entortiller tout ça.
Il avait quelque chose à nous dire, il nous a dit ce qu'il avait à nous dire.
Il ne nous a pas dit autre chose.
Et il ne nous l'a pas dit autrement qu'il n'avait à nous le dire.
Comme il avait à dire, il a parlé.
Ce sont les imbéciles qui font le malin.
Et qui cherchent toujours midi à quatorze heures.
Toi quand ta mère t'envoie faire une commission chez le boulanger,
Quand tu vas chez le boulanger,
Tu ne te mets pas tout d'un coup à raconter des choses extraordinaires au boulanger.
Tu fais ta commission et puis tu t'en reviens.
Tu prends ton pain, tu payes, et tu t'en vas.
Lui c'est la même chose il est venu pour nous faire une commission.
Il avait une commission à nous faire de la part de son père.
Il nous a fait sa commission et il s'en est retourné.
Il est venu, il a payé, (quel prix!), et il s'en va.
Il ne s'est pas mis à nous raconter des choses extraordinaires.
Rien n'est aussi simple que la parole de Dieu.


Charles Péguy
Le Porche du mystère de la deuxième vertu

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26 mars 2009 4 26 /03 /mars /2009 17:50

Jésus-Christ, mon enfant, n'est pas venu pour nous dire des fariboles.
Tu comprends, il n'a pas fait le voyage de venir sur terre,
Un grand voyage, entre nous,
(Et il était si bien où il était).
(Avant de venir.
Il n'avait pas tous nos soucis).
II n'a pas fait le voyage de descendre sur terre
Pour venir nous conter des amusettes
Et des blagues.
On n'a pas le temps de s'amuser.
Il n'a pas mis, il n'a pas employé, il n'a pas dépensé
Les trente-trois ans de sa vie terrestre.
De sa vie charnelle,
Les trente ans de sa vie privée.
Les trois ans de sa vie publique.
Les trois jours de sa passion et de sa mort,
(Et dans les limbes les trois jours de son sépulcre).
Il n'a pas mis, il n'a pas employé, il n'a pas dépensé tout ça.
Ses trente ans de travail et ses trois ans de prédication et ses trois jours de passion et de mort.
Ses trente-trois ans de prière,
Son incarnation, qui est proprement son encharnement,
Sa mise en chair et en charnel, sa mise en homme et sa mise en croix et sa mise au tombeau.
Son encharnellement et son supplice,
Sa vie d'homme et sa vie d'ouvrier et sa vie de prêtre et sa vie de saint et sa vie de martyr,
Sa vie de fidèle.
Sa vie de Jésus,
Pour venir ensuite (en même temps) nous débiter des sornettes.

Il n'a pas mis, il n'a pas employé, il n'a pas dépensé tout ça,
Il n'a pas fait toute cette dépense
Considérable
Pour venir nous donner, pour nous donner ensuite
Des devinettes
A deviner
Comme un sorcier.
En faisant le malin.
Non, non, mon enfant, et Jésus non plus ne nous a point donné des paroles mortes
Que nous ayons à renfermer dans des petites boîtes
(Ou dans des grandes).
Et que nous ayons à conserver dans (de) l'huile rance
Comme les momies d'Egypte.
Jésus-Christ, mon enfant, ne nous a point donné des conserves de paroles
A garder.
Mais il nous a donné des paroles vivantes
A nourrir.
Ego sum via, Veritas et vita,
Je suis la voie, la vérité et la vie.

Les paroles de (la) vie, les paroles vivantes ne peuvent se conserver que vivantes,
Nourries vivantes.
Nourries, portées, chauffées, chaudes dans un cœur vivant.
Nullement conservées moisies dans des petites boîtes en bois ou en carton.
Comme Jésus a pris, a été forcé de prendre corps, de revêtir la chair
Pour prononcer ces paroles (charnelles) el pour les faire entendre,
Pour pouvoir les prononcer,
Ainsi nous, pareillement nous, à l'imitation de Jésus,
Ainsi nous, qui sommes chair, nous devons en profiter,
Profiter de ce que nous sommes charnels pour les conserver, pour les réchauffer, pour les nourrir en nous vivantes et charnelles,
(Voilà ce que les anges mêmes ne connaissent pas, mon enfant, voilà ce qu'ils n'ont point éprouvé).
Comme une mère charnelle nourrit, et fomente sur son cœur son dernier-né.
Son nourrisson charnel, sur son sein,
Bien posé dans le pli de son bras.
Ainsi, profitant de ce que nous sommes charnels,
Nous devons nourrir, nous avons à nourrir dans notre cœur,
De notre chair et de notre sang.
De notre cœur.
Les Paroles charnelles.
Les Paroles éternelles, temporellement, charnellement prononcées.
Miracle des miracles, mon enfant, mystère des mystères.
Parce que Jésus-Christ est devenu notre frère charnel
Parce qu'il a prononcé temporellement et charnellement les paroles éternelles.
In monte, sur la montagne.
C'est à nous, infirmes, qu'il a été donné.
C'est de nous qu'il dépend, infirmes et charnels.
De faire vivre et de nourrir et de garder vivantes dans le temps
Ces paroles prononcées vivantes dans le temps.
Mystère des mystères, ce privilège nous a été donné,
Ce privilège incroyable, exorbitant,
De conserver vivantes les paroles de vie.
De nourrir de notre sang, de notre chair, de notre cœur
Des paroles qui sans nous retomberaient décharnées.
D'assurer, (c'est incroyable), d'assurer aux paroles éternelles
En outre comme une deuxième éternité,
Une éternité temporelle et charnelle, une éternité de chair et de sang.
Une nourriture, une éternité de corps.
Une éternité terrienne.
Ainsi les paroles de Jésus, les paroles éternelles sont les nourrissonnes, les vivantes nourrissonnes de notre sang et de notre cœur
De nous qui vivons dans le temps.
Comme la dernière des paysannes, si la reine dans son palais ne peut pas nourrir le dauphin
Parce qu'elle manque de lait.
Alors la dernière paysamie de la dernière paroisse peut être appelée au palais,
Pourvu qu'elle soit une bonne nourrice.
Et elle peut être appelée à nourrir un fils de France,
Ainsi nous toutes enfants de toutes les paroisses
Nous sommes appelées à nourrir la parole du fils de Dieu.
O misère, ô malheur, c'est à nous qu'il revient.
C'est à nous qu'il appartient, c'est de nous qu'il dépend
De la faire entendre dans les siècles des siècles.
De la faire retentir.
O misère, ô bonheur, c'est de nous qu'il dépend,
Tremblement de bonheur,
Nous qui ne sommes rien, nous qui passons sur terre quelques années de rien,
Quelques pauvres années misérables,
(Nous âmes immortelles),
O danger, péril de mort, c'est nous qui sommes chargées.
Nous qui ne pouvons rien, qui ne sommes rien, qui ne sommes pas assurées du lendemain,
Ni du jour même, qui naissons et mourons comme des créatures d'un jour.
Qui passons comme des mercenaires,
C'est encore nous qui sommes chargés,
Nous qui le matin ne sommes pas sûres du soir,
Ni même du midi,
Et qui le soir ne sommes pas sûres du matin.
Du lendemain matin,
C'est insensé, c'est encore nous qui sommes chargées, c'est uniquement de nous qu'il dépend
D'assurer aux Paroles une deuxième éternité
Etemelle.
Une perpétuité singulière
C'est à nous qu'il appartient, c'est de nous qu'il dépend d'assurer aux paroles
Une perpétuité éternelle, une perpétuité charnelle,
Une perpétuité nourrie de viande, de graisse et de sang.
Nous qui ne sommes rien, qui ne durons pas,
Qui ne durons autant dire rien
(Sur terre)
C'est insensé, c'est encore nous qui sommes chargées de conserver et de nourrir éternelles
Sur terre
Les paroles dites, la parole de Dieu.

 

Charles Péguy
Le Porche du mystère de la deuxième vertu

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23 mars 2009 1 23 /03 /mars /2009 16:19
Il n’y a point de révélations particulières. Il n’y a qu’une révélation pour tout le monde ; et c’est la révélation de Dieu et de Notre-Seigneur-Jésus-Christ. De Dieu par lui-même et par Notre-Seigneur-Jésus-Christ. C’est une révélation pour tous les bons chrétiens, pour tous les chrétiens, même pour les mauvais, et pour les pécheurs, pour tous les bons paroissiens. Pour tout homme et toute femme, pour toute personne de la paroisse. On fait savoir aux personnes de la paroisse. Qu’il y a promesse de salut... Entre Dieu et sa créature. On fait assavoir. Quand on sonne, quand on bat le ban de moisson, on le bat pour tout le monde, pour tous les moissonneurs. Et après la moisson quand on bat le ban de glanage, on le bat pour tout le monde, le ban de glanée, pour toutes les glaneuses, pour toutes les pauvres femmes qui vont glaner, ramasser les épis dans les champs, les épis qui sont tombés des gerbes. Quand on bat le ban de vendange, on le bat pour tout le monde, pour tous les vendangeurs. Et après la vendange, quand on bat le ban de grappillage, on le bat pour toutes les pauvres bonnes femmes qui vont grappiller, pour toutes les vieilles bonnes femmes qui vont ramasser ce qui reste sur le bois, et qui n’était pas encore bien mûr au temps de la vendange. Tout ce qui était encore un peu vert, un peu verduret. Or il y a quatorze siècles que l’on a fait battre le ban du salut. Pour toutes les paroisses. Pour toutes les personnes de toutes les paroisses. C’est la révélation commune. La révélation chrétienne. La révélation paroissiale. Le bon Dieu a appelé tout le monde, il a convoqué tout le monde, il a nommé tout le monde. Sa Providence pourvoit. Sa Providence prévoit. Sa Providence veille sur tout le monde, voit sur tout le monde, voit pour tout le monde. Il a vue sur tout le monde. Il conduit tout le monde par la main. Il nous a toutes désignées. Nous sommes toutes entrées au couvent de chrétienté. Nous nous sommes toutes réfugiées au grand couvent, de chrétienté. Dieu nous a toutes instruites, convoquées, il nous a toutes commandées. Nous sommes tous de la maison, de la même maison, et c’est Dieu qui conduit toute la maisonnée. Il nous a toutes appelées par notre nom, qui est notre nom de baptême. Il nous a toutes fait la même révélation, qui est que nous irons en paradis si nous vivons en bons chrétiens. Il nous a toutes fait la même vocation, d’aller à notre tour en paradis si nous vivons en bons chrétiens. Il n’y en a point qui communiquent avec Dieu de plus près que les autres. Toute parole d’homme et de femme, du père, de la mère et des enfants arrive directement aux oreilles de Dieu, toute prière humaine, toute prière chrétienne arrive, monte directement à l’oreille de Dieu.

Charles Péguy
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