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"Je vous donne un commandement nouveau : c'est de vous aimer les uns les autres.

 

Comme je vous ai aimés, vous aussi aimez-vous les uns les autres.

 

Ce qui montrera à tous les hommes que vous êtes mes disciples, c'est l'amour que vous aurez les uns pour les autres."

 

Evangile de Jésus-Christ selon  saint Jean 

   

 

Pentecôte

" Le Défenseur, l'Esprit Saint que le Père enverra en mon nom, lui, vous enseignera tout, et il vous fera souvenir de tout ce que je vous ai dit."

 

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean  

 

   

 

 El Papa es argentino. Jorge Bergoglio                 

Saint Père François

 

 

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1er mai 2011 Béatification de Jean-Paul II

Béatification du Serviteur de Dieu Jean-Paul II

 

 

  Béatification du Père Popieluszko

beatification Mass, in Warsaw, Poland

à Varsovie, 6 juin 2010, Dimanche du Corps et du Sang du Christ

 

 

presidential palace in Warsaw

Varsovie 2010

 

 

Basilique du Sacré-Cœur de Montmartre
Sanctuaire de l'Adoration Eucharistique et de la Miséricorde Divine

La miséricorde de Dieu est comme un torrent débordé. Elle entraîne les cœurs sur son passage.
(Saint Curé d'Ars)
 

 


Le côté du Christ a été transpercé et tout le mystère de Dieu sort de là. C’est tout le mystère de Dieu qui aime, qui se livre jusqu’au bout, qui se donne jusqu’au bout. C’est le don le plus absolu qui soit. Le don du mystère trinitaire est le cœur ouvert. Ce n’est pas une image, c’est une réalité. C’est la réalité la plus profonde qui soit, la réalité de l’amour.
Père Marie-Joseph Le Guillou




Dans le cœur transpercé
de Jésus sont unis
le Royaume du Ciel
et la terre d'ici-bas
la source de la vie
pour nous se trouve là.

Ce cœur est cœur divin
Cœur de la Trinité
centre de convergence
de tous les cœur humains
il nous donne la vie
de la Divinité.


Sainte Thérèse Bénédicte de la Croix
(Edith Stein)



Le Sacré-Cœur représente toutes les puissances d'aimer, divines et humaines, qui sont en Notre-Seigneur.
Père Marie-Eugène de l'Enfant Jésus

 



feuille d'annonces de la Basilique du Sacré-Coeur de Montmartre

 

 

 

 

 

 

 

     

The Cambrai Madonna

Notre Dame de Grâce

Cathédrale de Cambrai

 

 

 

Cathédrale Notre Dame de Paris 

   

Ordinations du samedi 27 juin 2009 à Notre Dame de Paris


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Magnificat

     



Solennité de l’Immaculée Conception de la Vierge Marie à Notre-Dame de Paris


NOTRE DAME DES VICTOIRES

Notre-Dame des Victoires




... ma vocation, enfin je l’ai trouvée, ma vocation, c’est l’Amour !

 

 

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Voyages de Benoît XVI

 

SAINT PIERRE ET SAINT ANDRÉ

Saint Pierre et Saint André

 

BENOÎT XVI à CHYPRE 

 

Benedict XVI and Cypriot Archbishop Chrysostomos, Church of 

Salutation avec l'Archevêque Chrysostomos à l'église d' Agia Kyriaki Chrysopolitissa de Paphos, le vendredi 4 juin 2010

 

     

 

Benoît XVI en Terre Sainte  


 

Visite au chef de l'Etat, M. Shimon Peres
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Visite au mémorial de la Shoah, Yad Vashem




 






Yahad-In Unum

   

Vicariat hébréhophone en Israël

 


 

Mgr Fouad Twal

Patriarcat latin de Jérusalem

 

               


Vierge de Vladimir  

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SALVE REGINA

13 juillet 2010 2 13 /07 /juillet /2010 15:00

Le 12 juillet 1794, parvenait à Compiègne l'ordre du Comité de salut public de transférer les Carmélites à Paris.

 

Escorté de deux gendarmes et de neuf dragons, le cortège prit la direction de Paris, et parvint le lendemain 13 juillet, vers trois heures de l'après-midi, à la Conciergerie.

 

 Malgré leurs liens et leur extrême fatigue, les Carmélites durent descendre de la haute charrette sans aucune aide. Seule, une religieuse octogénaire et infirme, Sœur Charlotte de la Résurrection, ne pouvait descendre de la charrette. Impatientés, les gardes la saisirent et la jetèrent brutalement sur le pavé. On la releva tout en sang, elle se contenta de dire à ceux qui venaient de la traiter ainsi : "Croyez bien que je ne vous en veux pas. Je vous ai au contraire bien de la reconnaissance de ce que vous ne m'avez pas tuée, parce que si je fusse morte j'aurais été ravie au bonheur et à la gloire du martyre."

 

A la Conciergerie comme à Compiègne, les seize Carmélites continuèrent à observer leur Règle : un témoin digne de foi, Denis Blot, élargi le 9 thermidor, déclare qu'on les entendait toutes les nuits, à deux heures du matin, récitant leur Office.

La Conciergerie

A Paris il est possible encore de suivre leur dernier trajet

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13 juillet 2010 2 13 /07 /juillet /2010 05:00

Henri de Germanie, deuxième  du nom quant à la royauté, premier quant à l'empire,  fut  le dernier représentant couronné de cette maison de Saxe issue d'Henri l'Oiseleur,  à laquelle Dieu, au dixième siècle,  confia la mission de relever l'œuvre de Charlemagne et de saint Léon III.  Noble  tige, où l'éclat des fleurs de sainteté qui brillent en ses rameaux l'emporte encore sur la puissance dont elle parut douée, quand elle implanta dans le sol allemand les racines des fortes institutions qui lui donnèrent consistance pour de longs siècles.

 

 L'Esprit-Saint, qui divise comme il veut ses dons, appelait alors aux plus hautes destinées la terre où, plus que nulle part, s'était montrée l'énergie de son action divine dans la transformation des peuples. Acquise au Christ par saint Boniface et les continuateurs de son œuvre, la vaste contrée qui s'étend au delà du Rhin et du  Danube était devenue le boulevard de l'Occident,  sur lequel durant tant d'années elle avait versé la dévastation et la ruine. Loin de songer à soumettre à ses lois les redoutables tribus qui l'habitaient, Rome païenne, au plus haut point de sa puissance, avait eu pour suprême ambition la pensée d'élever entre elles et l'Empire un mur de séparation éternelle ; Rome chrétienne, plus véritablement souveraine du monde, plaçait dans ces régions le siège même du Saint-Empire Romain reconstitué par ses Pontifes. Au nouvel Empire de défendre les droits de la Mère commune, de protéger la chrétienté contre les barbares nouveaux, de conquérir à l'Evangile ou de briser les hordes hongroises et slaves, mongoles, tartares et ottomanes qui successivement viendront heurter ses frontières. Heureuse l'Allemagne, si toujours elle avait su comprendre sa vraie gloire, si surtout la fidélité de ses princes au vicaire de l'Homme-Dieu était restée à la hauteur de la foi de leurs peuples !

 

 Dieu, en ce qui était de lui, avait soutenu magnifiquement les avances qu'il faisait à la Germanie. La fête présente marque le couronnement de la période d'élaboration féconde où l'Esprit-Saint, l'ayant créée comme à nouveau dans les eaux de la fontaine sacrée, voulut la conduire au plein développement de l'âge parfait qui convient aux nations. C'est dans cette période de formation véritablement créatrice que l'historien doit s'attacher principalement à étudier les peuples, s'il veut savoir ce qu'attend d'eux la Providence. Quand Dieu crée en effet, dans l'ordre de la vocation surnaturelle des hommes ou des sociétés dans celui de la nature elle-même, il dépose dès l'abord en son œuvre le principe de la vie plus ou moins supérieure qui doit être la sienne : germe précieux dont le développement, s'il n'est contrarié, doit lui faire atteindre sa fin ; dont par suite aussi la connaissance, pour qui sait l'observer avant toute déviation, manifeste clairement à l'endroit de l'œuvre en question la pensée divine. Or, maintes fois déjà nous l'avons constaté depuis  l'avènement  de l'Esprit sanctificateur, le principe de vie des nations chrétiennes est la sainteté de leurs origines : sainteté multiple, aussi variée que la multiforme Sagesse de Dieu dont elles doivent être  l'instrument, aussi distincte pour chacune d'elles que le  seront  leurs destinées ; sainteté le plus souvent descendant du trône, et douée par  là du caractère social  que trop de fois plus tard revêtiront aussi les crimes des princes, en raison même de ce titre de princes qui les fait devant Dieu représentants de leurs peuples.  Déjà aussi nous l'avons vu, au nom de Marie, devenue dans  sa divine maternité  le canal de toute vie pour le monde, c'est à la femme qu'est dévolue la mission  d'enfanter devant Dieu les familles des nations qui seront l'objet de ses prédilections les plus chères ; tandis que les princes, fondateurs apparents des empires,  occupent par leurs hauts faits l'avant-scène de l'histoire, c'est elle qui, dans  le  douloureux secret de ses larmes et de  ses prières, féconde leurs œuvres, élève leurs desseins au-dessus  de la terre et leur obtient la durée.

 

 L'Esprit ne craint point de se répéter dans cette glorification de la divine Mère ; aux Clotilde, Radegonde et Bathilde, qui pour elle donnèrent en des temps laborieux les Francs à l'Eglise, répondent sous des cieux différents, et toujours à l'honneur de la bienheureuse Trinité, Mathilde, Adélaïde et Chunégonde, joignant sur leurs fronts la couronne des saints au diadème de la Germanie. Sur le chaos du dixième siècle, d'où l'Allemagne devait sortir, plane sans interruption leur douce figure, plus forte contre l'anarchie que le glaive des Othon, rassérénant dans la nuit de ces temps l'Eglise et le monde. Au commencement enfin de ce siècle onzième qui devait si longtemps encore attendre son Hildebrand, lorsque les anges du sanctuaire pleuraient partout sur des autels souillés, quel spectacle que celui de l'union virginale dans laquelle s'épanouit cette glorieuse succession qui, comme lasse de donner seulement des héros à la terre, ne veut plus fructifier qu'au ciel ! Pour la patrie allemande, un tel dénouement n'était pas abandon, mais prudence suprême ; car il engageait Dieu miséricordieusement au pays qui, du sein de l'universelle corruption, faisait monter vers lui ce parfum d'holocauste : ainsi, à l'encontre des revendications futures de sa justice, étaient par avance comme neutralisées les iniquités des maisons de Franconie et de Souabe, qui succédèrent à la maison de Saxe et n'imitèrent pas ses vertus.

 

 Que la terre donc s'unisse au ciel pour célébrer aujourd'hui l'homme qui donna leur consécration dernière aux desseins de l'éternelle Sagesse à cette heure de l'histoire ; il résume en lui l'héroïsme et la sainteté de la race illustre dont la principale gloire est de l'avoir, tout un siècle, préparé dignement pour les hommes et pour Dieu. Il fut grand pour les hommes, qui, durant un long règne, ne surent qu'admirer le plus de la bravoure ou de l'active énergie grâce auxquelles, présent à la fois sur tous les points de son vaste empire, toujours heureux, il sut comprimer les révoltes du dedans, dompter les Slaves à sa frontière du Nord, châtier l'insolence grecque au midi de la péninsule italique ; pendant que, politique profond, il aidait la  Hongrie  à  sortir  par  le christianisme de la barbarie, et tendait au delà de la Meuse à notre Robert le Pieux une main amie qui eût voulu sceller, pour le bonheur des siècles à venir, une alliance éternelle entre l'Empire et la fille aînée de la sainte Eglise.

 

 Epoux vierge de la vierge Chunégonde, Henri fut grand aussi pour Dieu qui n'eut jamais de plus fidèle lieutenant sur la terre. Dieu dans son Christ était à ses yeux l'unique Roi, l'intérêt du Christ et de l'Eglise la seule inspiration de son gouvernement, le service de l'Homme-Dieu dans ce qu'il a de plus parfait sa suprême ambition. Il comprenait que la vraie noblesse, aussi bien que le salut du monde, se cachait dans ces cloîtres où les âmes d'élite accouraient pour éviter l'universelle ignominie et conjurer tant de ruines. C'était la pensée qui, au lendemain de son couronnement impérial, l'amenait à Cluny, et lui faisait remettre à la garde de l'insigne abbaye le globe d'or, image du monde dont la défense venait de lui être confiée comme soldat du vicaire de Dieu ; c'était l'ambition qui le jetait aux genoux de l'Abbé de Saint-Vannes de Verdun, implorant la grâce d'être admis au nombre de ses moines, et faisait qu'il ne revenait qu'en gémissant et contraint par l'obéissance au fardeau de l'Empire.

 

 

 Voici la notice, forcément  incomplète,  consacrée par l'Eglise à saint Henri :

 Henri surnommé le Pieux fut d'abord duc de Bavière, puis roi de Germanie et ensuite empereur des Romains. Portant ses désirs au delà des bornes étroites d'un royaume temporel, il ambitionna la couronne de l'immortalité, et pour l'obtenir se fit le serviteur zélé du Roi éternel. Promu donc à l'Empire, il mit tous ses soins à accroître la religion, relevant avec une magnificence plus grande qu'auparavant les églises que les infidèles avaient détruites, et les enrichissant de nombreuses largesses et de biens-fonds. Des monastères, d'autres lieux de dévotion, furent établis par lui ou le virent augmenter leurs revenus. Il fit tributaire de saint Pierre et du Pontife romain l'évêché de Bamberg, qu'il avait fondé de ses biens patrimoniaux. Benoît VIII, qui lui avait donné la couronne impériale, ayant dû prendre la fuite, trouva près de lui asile et fut par lui rétabli sur son siège.

 

 Saint Benoît le guérit par un insigne miracle dans le monastère du Cassin où une grave maladie le faisait souffrir. L'Eglise Romaine fut l'objet de ses libéralités consignées dans un important diplôme ; il entreprit pour la défendre une guerre contre les Grecs, et leur reprit la Pouille qu'ils occupaient depuis longtemps. La prière était la compagne habituelle de toutes ses entreprises; aussi vit-il plus d'une fois l'Ange du Seigneur et les saints  Martyrs combattre pour sa défense en tête des armées. A l'aide de cette protection divine, ce fut par ses prières plus que par les armes qu'il vainquit les nations barbares. Il amena à la Foi de Jésus-Christ la Hongrie jusque-là infidèle, en mariant sa sœur au roi Etienne qui reçut le baptême. Il donna le rare exemple de la virginité dans la vie conjugale, et, près de mourir, rendit Chunégonde son épouse à la famille de celle-ci telle qu'il l'avait reçue.

 

 Ce fut avec une prudence souveraine qu'il disposa toutes choses à l'honneur et l'utilité de l'Empire. La Gaule, l'Italie, la Germanie gardèrent partout les traces illustres de sa religieuse munificence. De tous côtés se répandait au loin le très suave parfum de son héroïque vertu. Plus illustre par sa sainteté que par le sceptre, ayant achevé les labeurs de sa vie, il fut enfin appelé par le Seigneur aux récompenses du royaume des cieux l'an du salut mil vingt-quatre.

 

 On ensevelit son corps dans l'église des saints Apôtres Pierre et Paul à Bamberg, et aussitôt Dieu qui voulait le glorifier permit que de nombreux miracles éclatassent à cette tombe, lesquels ayant été prouvés par la fuite,  Eugène III l'inscrivit au nombre des Saints.

 

 

 Par moi  règnent les rois, par moi les princes exercent l’empire.  Cette parole descendue des cieux, vous l'avez comprise, ô  Henri ! En des temps pleins de crimes, vous avez su où étaient pour vous le conseil et la force. Comme Salomon vous ne  vouliez que la Sagesse,  et comme lui vous avez expérimenté qu'avec elle se trouvaient aussi les richesses et la gloire et la magnificence ; mais plus heureux que le fils de David, vous ne vous êtes point  laissé détourner de la Sagesse vivante par ces dons inférieurs qui, dans sa divine pensée, étaient plus  l'épreuve de votre amour que le témoignage de celui qu'elle-même vous portait. L'épreuve, ô Henri, a été convaincante : c'est jusqu'au bout que vous avez marché dans les voies bonnes, n'excluant dans votre âme loyale aucune des conséquences de l'enseignement divin ; peu content de choisir comme tant d'autres des meilleurs les pentes plus adoucies du chemin qui mène au ciel, c'est par le milieu des sentiers de  la justice que, suivant de plus près l'adorable Sagesse, vous  avez fourni la carrière en compagnie des parfaits.

 

 Qui donc pourrait trouver mauvais ce qu'approuve Dieu, ce que conseille le Christ, ce que l'Eglise a canonisé en vous et dans votre noble épouse ? La condition des royautés de la terre n'est pas lamentable à ce point que l'appel de l'Homme-Dieu ne puisse parvenir à leurs trônes ; l'égalité chrétienne veut que les princes ne soient pas moins libres que leurs sujets de porter leur ambition au delà de ce monde. Une fois de plus, au reste, les faits ont montré dans votre personne, que pour le monde même la science des saints est la vraie prudence. En revendiquant votre droit d'aspirer aux premières places dans la maison du Père qui est aux cieux, droit fondé pour tous les enfants de ce Père souverain sur la commune noblesse qui leur vient du baptême, vous avez brillé comme un phare éclatant sous le ciel le plus sombre qui eût encore pesé sur l'Eglise, vous avez relevé les âmes que le sel de la terre, affadi, foulé aux pieds, ne préservait plus de la corruption. Ce n'était pas à vous sans doute qu'il appartenait de réformer directement le sanctuaire ; mais, premier serviteur de la Mère commune, vous saviez faire respecter intrépidement ses anciennes lois, ses décrets nouveaux toujours dignes de l'Epoux, toujours saints comme l'Esprit qui  les dicte à tous les âges : en attendant la lutte formidable que l'Epouse allait engager bientôt, votre règne interrompit la prescription odieuse que déjà Satan invoquait contre elle.

 

 En cherchant premièrement pour vous le royaume de Dieu et sa justice, vous étiez loin également de frustrer votre patrie d'origine et le pays qui vous avait appelé à sa tête. C'est bien à vous entre tous que l'Allemagne doit l'affermissement chez elle de cet Empire qui fut sa gloire parmi les peuples, jusqu'à ce qu'il tombât dans nos temps pour ne plus se relever nulle part. Vos œuvres saintes eurent assez de poids dans la balance des divines justices pour l'emporter, lorsque depuis longtemps déjà vous aviez quitté la terre, sur les crimes d'un Henri IV et d'un Frédéric II, bien faits pour compromettre à tout jamais l'avenir de la Germanie.

 

Du trône que vous occupez dans les cieux, jetez un regard de commisération sur ce vaste domaine du Saint-Empire, qui vous dut de si beaux accroissements, et que l'hérésie a désagrégé pour toujours ; confondez les constructeurs nouveaux venus  d'au delà de  l'Oder,  que l'Allemagne des  beaux temps ne connut pas, et qui voudraient sans le ciment de l'antique foi relever à leur profit les grandeurs du passé ; préservez d'un affaissement plus douloureux encore que celui dont nous sommes les témoins attristés, les nobles parties de l'ancien édifice restées à grand'peine debout parmi les ruines.

 

Revenez, ô empereur des grands âges, combattre pour  l'Eglise ; ralliez les débris de la chrétienté sur le terrain traditionnel des intérêts  communs à toute nation catholique ; et cette alliance, que votre haute politique avait autrefois conclue, rendra au monde la sécurité, la paix, la prospérité que ne lui donnera point l'instable équilibre avec lequel il reste à la merci de tous les coups de la force.

 

DOM GUÉRANGER
L'Année Liturgique

 

Heinrich II

HENRI II LE PIEUX

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12 juillet 2010 1 12 /07 /juillet /2010 05:00

Depuis le jour où Simon le Mage se fit baptiser à Samarie, jamais l'enfer ne s'était vu si près d'être maître dans l'Eglise qu'au temps où nous ramène à l'occasion de la fête présente le Cycle sacré. Repoussé par Pierre avec malédiction, Simon, s'adressant aux princes, leur avait dit comme autrefois aux Apôtres : "Donnez-moi pour argent ce pouvoir qu'à quiconque j'imposerai les mains, celui-là ait le Saint-Esprit" ( Act. VIII.). Et les princes, heureux à la fois de supplanter Pierre et d'augmenter leurs trésors, s'étaient arrogé le droit d'investir les élus de leur choix du gouvernement des Eglises ; et les évêques à leur tour avaient vendu au plus offrant les divers ordres de la sainte hiérarchie ; et s'introduisant à la suite de la concupiscence des yeux, la concupiscence de la chair avait rempli le sanctuaire d'opprobres sans nom.

 

 Le dixième siècle avait assisté à l'humiliation même du pontificat souverain ; le onzième, au tiers de son cours, voyait le débordement du fleuve maudit changer en marais les derniers pâturages encore saufs des brebis du Seigneur. L'œuvre du salut s'élaborait à l'ombre du cloître ; mais l'éloquence de Pierre Damien n'avait point jusque-là franchi le désert, et la rencontre d'Hugues de Cluny, de Léon IX et d'Hildebrand devait se faire attendre plus encore. Or voici que dans le silence de mort qui planait sur la chrétienté, un cri d'alarme a retenti soudain, secouant la léthargie des peuples : cri d'un moine, vaillant homme d'armes jadis, vers qui s'est penchée la tête du Christ en croix pour reconnaître l'héroïsme avec lequel un jour il sut épargner un ennemi. Chassé par le flot montant de la simonie qui vient d'atteindre son monastère de San-Miniato, Jean Gualbert est entré dans Florence, et trouvant là encore le bâton pastoral aux mains d'un mercenaire, il a senti le zèle de la maison de Dieu dévorer son cœur ; en pleine place publique, il a dénoncé l'ignominie de l'évêque et de son propre abbé, voulant ainsi du moins délivrer son âme.

 

A la vue de ce moine qui, dans son isolement, se dressait ainsi contre la honte universelle, il y eut un moment de stupeur au sein de la foule assemblée. Bientôt les multiples complicités qui trouvaient leur compte au présent état de choses regimbèrent sous l'attaque, et se retournèrent furieuses contre le censeur importun qui se permettait de troubler la bonne foi des simples. Jean n'échappa qu'à grand'peine à la mort ; mais, dès ce jour, sa vocation spéciale était fixée : les justes qui n'avaient point cessé d'espérer, saluèrent en lui le vengeur d'Israël ; leur attente ne devait pas être confondue.

 

 Comme toujours cependant pour les œuvres authentiquement marquées du sceau divin, l'Esprit-Saint devra mettre un long temps à former l'élu de sa droite. L'athlète a jeté le gant aux puissances de ce monde ; la guerre sainte est ouverte : ne semble-t-il pas que dès lors il faille avant tout donner suite à la déclaration des hostilités, tenir campagne sans trêve ni repos jusqu'à pleine défaite de l'ennemi ? Et néanmoins le soldat des combats du Seigneur, allant au plus pressé, se retirera dans la solitude pour y améliorer sa vie, selon l'expression si fortement chrétienne de la charte même qui fonda Vallombreuse. Les tenants du désordre, un instant effrayés de la soudaineté de l'attaque et voyant sitôt disparaître l'agresseur, se riront de ce qui ne sera plus à leurs yeux qu'une fausse entrée dans l'arène ; quoi qu'il en coûte au brillant cavalier d'autrefois, il attendra humble et soumis, pour reprendre l'assaut, ce que le Psalmiste appelle le temps du bon plaisir de Dieu.

 

 Peu à peu, de toutes les âmes que révolte la pourriture de cet ordre social en décomposition qu'il a démasqué, se recrute autour de lui l'armée de la prière et de la pénitence. Des gorges des Apennins elle étend ses positions dans la Toscane entière, en attendant qu'elle couvre l'Italie et passe les monts. Septime à sept milles de Florence, Saint-Sauve aux portes de la ville, forment les postes avancés où, en 1063, reprend l'effort de la guerre sainte. Un autre simoniaque, Pierre de Pavie, vient d'occuper par droit d'achat le siège des pontifes. Jean et ses moines ont résolu de plutôt mourir que de porter en silence l'affront nouveau fait à l'Eglise de Dieu. Mais le temps n'est plus où la violence et les huées d'une foule séduite accueillaient seules la protestation courageuse du moine fugitif de San-Miniato. Le fondateur de Vallombreuse est devenu, par le crédit que donnent les miracles et la sainteté, l'oracle des peuples. A sa voix retentissant de nouveau dans Florence, une telle émotion s'empare du troupeau, que l'indigne pasteur, sentant qu'il n'a plus à dissimuler, rejette au loin sa peau de brebis et montre en lui le voleur qui n'est venu que pour voler, pour égorger et pour perdre. Une troupe armée à ses ordres fond sur Saint-Sauve ; elle met le feu au monastère, et se jette sur les moines qui, surpris au milieu de l'Office de la nuit, tombent sous le glaive, sans interrompre la psalmodie jusqu'au coup qui les frappe. De Vallombreuse, à la nouvelle du martyre ennoblissant ses fils, Jean Gualbert entonne un chant de triomphe. Florence, saisie d'horreur, rejette la communion de l'évêque assassin, Pourtant quatre années encore séparaient ce peuple de la délivrance, et les grandes douleurs pour Jean n'étaient pas commencées.

 

 L'illustre ennemi de tous les désordres de son temps, saint Pierre Damien, venait d'arriver de la Ville éternelle. Investi de l'autorité du Pontife suprême, on était assuré d'avance qu'il ne pactiserait point avec la simonie, et l'on pouvait croire qu'il ramènerait la paix dans cette Eglise désolée. Ce fut le contraire qui eut lieu. Les plus grands saints peuvent se tromper, et, dans leurs erreurs, devenir les uns pour les autres un sujet d'épreuve d'autant plus acerbe que leur volonté, moins sujette aux changements capricieux des autres hommes, reste plus ferme dans la voie qu'ils se sont une fois tracée en vue des intérêts de Dieu et de son Eglise. Peut-être le grand évêque d'Ostie ne se rendit pas assez compte de la situation toute d'exception que faisaient aux victimes de Pierre de Pavie sa simonie notoire, et la violence avec laquelle il massacrait lui-même sans autre forme de procès les contradicteurs. Partant de l'incontestable principe que ce n'est point aux inférieurs à déposer leurs chefs, le légat réprouva la conduite de ceux qui s'étaient séparés de l'évêque; et, arguant de certaines paroles extrêmes échappées à quelques-uns dans une indignation trop peu contenue, il retourna sur ceux qu'il appelait "ses confrères les moines" l'accusation d'hérésie portée par eux contre le prélat simoniaque.

 

 L'accès du Siège apostolique restait ouvert aux accusés ; ils y portèrent intrépidement leur cause. Cette fois du moins, on ne pouvait soulever d'argument d'exception contre la canonicité de leur procédure. Mais là, dit l'historien, beaucoup craignant pour eux-mêmes se mirent à s'élever contre eux ; et lorsque presque tous, exhalant leur fureur, jugeaient dignes de mort ces moines dont la témérité osait faire la guerre aux prélats de l'Eglise, alors derechef, en plein concile romain, Pierre Damien prenant la parole alla jusqu'à dire au Pontife suprême : "Seigneur et Père saint, ce sont là les sauterelles qui dévorent la verdure de la sainte Eglise ; que le vent du midi se lève et les emporte à la mer Rouge !" Mais le saint et très glorieux Pape Alexandre II, répondant avec douceur à ces excès de langage, prenait les moines en sa défense et rendait hommage à la droiture de leurs intentions. Cependant il n'osa donner suite à leur demande de passer outre, parce que la plus grande partie des évêques favorisait Pierre de Pavie, et que seul l'archidiacre Hildebrand soutenait en tout l'abbé de Vallombreuse.

 

 L'heure néanmoins allait venir où Dieu même prononcerait ce jugement qu'on ne pouvait obtenir de la terre. Assaillis de menaces, traités comme des agneaux au milieu des loups, Jean Gualbert et  ses  fils criaient  au ciel avec le Psalmiste : "Levez-vous, Seigneur, aidez-nous ; levez-vous, pourquoi dormez-vous,  Seigneur ? levez-vous, ô Dieu : jugez votre cause". A Florence, les sévices continuaient. Saint-Sauveur de Septime était devenu le refuge des clercs que la persécution bannissait  de  la ville ; le fondateur de Vallombreuse,  qui résidait alors en ce lieu, multipliait pour eux les ressources de sa charité. Mais la situation devint telle enfin, qu'un jour du Carême de l'année 1067, le reste du clergé et la ville entière, laissant le simoniaque à la solitude de son palais désert, accourut à Septime. Ni la longueur du chemin détrempé par les pluies, ni la rigueur du jeûne observé par tous, dit la relation adressée dans les jours mêmes au Pontife souverain par le peuple et le clergé de Florence, ne purent arrêter les matrones les plus délicates, les femmes prêtes d'être mères ou les enfants. L'Esprit-Saint planait visiblement sur cette foule ; elle demandait le jugement de Dieu. Jean Gualbert, sous l'impulsion du même Esprit divin, permit l'épreuve ; et en témoignage de la vérité de l'accusation portée par lui contre l'évêque de Florence, Pierre, un de ses moines, nommé depuis Pierre Ignée, traversa lentement sous les yeux de la multitude un brasier immense qui ne lui fit aucun mal. Le ciel avait parlé ; l'évêque fut déposé par Rome, et termina ses jours, heureux pénitent, dans ce même monastère de Septime.

 

 En 1073, année de l'élévation d'Hildebrand son ami au Siège apostolique, Jean s'en allait à Dieu. Son action contre la simonie s'était étendue bien au delà de la Toscane. La république Florentine ordonna de chômer le jour de sa fête ; et l'on grava sur la pierre qui protégeait ses reliques sacrées : A JEAN GUALBERT, CITOYEN DE FLORENCE, LIBÉRATEUR DE L'ITALIE.

 

 

 Lisons la notice consacrée avec quelques différences de détail à sa mémoire sainte : 

Jean  Gualbert  naquit à Florence de noble race. Pour répondre aux  désirs de son père, il s'adonna aux armes.  Or  il arriva  que Hugues, son unique frère, fut tué par un parent. Jean, armé  et  accompagné  de soldats, rencontra le meurtrier seul et sans armes dans un endroit où  ils ne pouvaient s'éviter : c'était le Vendredi saint, et par respect  pour  la sainte  Croix que celui-ci près de mourir représentait par ses bras étendus, Jean lui  accorda la vie. S'étant ainsi fait bénignement de  son  ennemi un  frère,  il entra  pour y prier dans l'Eglise de San-Miniato qui  était  voisine ; là, adorant l'image du Christ en croix,  il  le vit pencher vers lui la tête.  Emu du miracle, Jean décide qu'il ne militera plus désormais que pour Dieu ; et, au lieu même, malgré son père, il se coupe les cheveux de ses propres mains et se revêt de l'habit monastique. Bientôt sa  piété, ses vertus religieuses jettent un tel éclat, qu'il devient pour beaucoup un modèle et une règle de perfection. L'Abbé du monastère étant  mort,  il  est désigné d'un vote unanime comme  supérieur.  Mais  le serviteur de Dieu  désirait plus obéir que commander, et la divine volonté le réservait pour de plus grandes choses ; il s'en alla au désert de Camaldoli, où Romuald qui l'habitait lui transmit du ciel l'annonce de ce qu'il devait faire ; en suite de quoi il fonda son Ordre sous la règle de saint Benoît à Vallombreuse.

 

 La renommée de sa sainteté faisait qu'on accourait à lui de toutes  parts. En  la compagnie de ses nombreux disciples, il  déclara une guerre d'extermination à l'hérésie et à  la lèpre  simoniaque, mettant tout son zèle à propager la foi apostolique. Sans nombre furent les épreuves qu'il attira ainsi  sur lui  et  les siens. Pour le perdre lui et ses compagnons, ses adversaires envahissent de nuit à l'improviste le monastère de Saint-Sauve, brûlent l'église, renversent les édifices, et blessent à mort tous les moines, que l'homme de Dieu guérit aussitôt d'un seul signe de croix. Pierre, un de ses moines, traversa miraculeusement sans aucun mal un brasier immense, et ainsi fut acquise pour Jean et les siens la tranquillité : la pourriture simoniaque fut extirpée de Toscane, et toute l'Italie rendue à l'intégrité de la foi primitive.

 

 Il bâtit depuis les fondements de nombreux monastères, répara en d'autres les édifices et l'observance régulière, et leur donna à tous le rempart de saintes lois. Il aliéna pour nourrir les indigents les trésors des églises. Il vit les éléments à son service pour la répression des méchants ; la croix lui était comme une épée pour repousser les démons. Epuisé enfin d'abstinences, de veilles, de jeûnes, de macérations autant que de vieillesse, il répétait sans cesse sous le poids de la maladie ces paroles de David : "Mon âme a soif du Dieu fort et vivant : quand viendrai-je et apparaîtrai-je devant la face de Dieu ?" Déjà proche de la mort, ayant rassemblé ses disciples, il les exhorta  à la concorde fraternelle ; puis, sur un billet avec lequel il voulut être enseveli  il fit écrire ces mots : "Moi Jean, je crois et confesse la foi que les saints Apôtres  ont prêchée, et les saints Pères confirmée  en quatre conciles". Il fut honoré trois jours durant de l'assistance des Anges, et passa au Seigneur dans sa soixante-dix-huitième année, à Passignano, où il est entouré de la vénération la plus grande. C'était l'an du  salut mil soixante-treize,le quatre des ides de juillet. Il éclata par d'innombrables miracles, et Célestin III le mit au nombre des Saints.

 

  

Vous avez été un vrai disciple de la loi nouvelle, ô vous qui sûtes épargner un ennemi en considération de la Croix sainte. Apprenez-nous à conformer comme vous nos actes aux leçons que nous donne l'instrument du salut ; et il deviendra pour nous, comme il le fut pour vous, une arme toujours  victorieuse  contre l'enfer. Pourrions-nous, à sa vue, refuser d'oublier une injure venant de nos frères, quand c'est un Dieu qui, non content d'oublier nos offenses autrement criminelles à sa souveraine Majesté, se dévoue sur ce bois pour les expier lui-même ? Si  généreux  qu'il puisse être jamais, le pardon de la créature n'est qu'une ombre lointaine de celui que nous octroie chaque jour le Père qui est aux cieux. A bon droit pourtant l'Evangile que l'Eglise chante à votre  honneur nous  montre, dans l'amour des ennemis, le caractère de ressemblance qui nous rapproche le plus de la perfection de ce Père céleste, et le signe même de la filiation divine en nos âmes.

 

 Vous l'avez eu, ô Jean, ce caractère de ressemblance auguste ; Celui qui en vertu de sa génération éternelle est le propre Fils de Dieu par nature, a reconnu en vous ce cachet d'une incomparable noblesse qui vous faisait son frère. En inclinant vers vous sa tête sacrée, il saluait la race divine qui venait de se déclarer dans ce fils de la terre et allait éclipser mille fois l'illustration que vous teniez des aïeux d'ici-bas. Quel germe puissant l'Esprit-Saint alors déposait en vous ; et combien Dieu parfois récompense la générosité d'un seul acte ! Votre sainteté, la part glorieuse qui fut la vôtre dans la victoire de l'Eglise, et cette fécondité qui vous donne de revivre jusqu'à nos jours dans l'Ordre illustre qui plonge en vous ses racines ; toutes ces grâces de choix pour votre âme et tant d'autres âmes, ont dépendu de l'accueil que vous alliez faire au malheureux que sa fatalité ou la justice du ciel, auraient dit vos contemporains, jetait sur vos pas. Il était digne de mort ; et dans ces temps où chacun plus ou moins se faisait justice lui-même, votre bonne renommée n'aurait point souffert, elle n'eût fait que grandir, en lui infligeant le châtiment qu'il avait mérité. Mais si l'estime de vos contemporains vous restait acquise, la seule gloire qui compte devant Dieu, la seule qui dure devant les hommes eux-mêmes, n'eût point été votre partage. Qui maintenant vous connaîtrait ? qui surtout prononcerait votre nom avec l'admiration et la reconnaissance qu'il excite aujourd'hui parmi les enfants de l'Eglise ?

  

Le Fils de Dieu, voyant vos dispositions conformes aux sentiments de son cœur sacré, a versé dans le vôtre son amour jaloux pour la cité sainte au rachat de laquelle il a voué tout son sang. Ô zélateur de la beauté de l'Epouse, veillez sur elle toujours ; éloignez d'elle les mercenaires qui prétendraient tenir de l'homme le droit de représenter l'Epoux à la tête des Eglises. Que l'odieuse vénalité de vos temps ne se transforme point dans les nôtres en  compromissions d'aucune sorte à l'égard des pouvoirs de la terre. La simonie la plus dangereuse n'est point celle qui s'escompte à prix d'or ; il est des obséquiosités, des hommages, des avances, des engagements implicites, qui ne tombent pas moins sous l'anathème des saints canons que les transactions pécuniaires et qu'importerait, de fait, l'objet ou la forme adoucie du contrat simoniaque,  si la complicité achetée du pastorat laissait les princes charger l'Eglise à nouveau des chaînes que vous avez tant contribué à briser ? Ne permettez pas, ô Jean Gualbert, un tel malheur qui serait l'annonce de désastres terribles. Que la Mère commune continue de sentir l'appui de votre bras puissant. Sauvez une seconde fois en dépit d'elle-même votre patrie de la terre. Protégez, dans nos temps malheureux, le saint Ordre dont vous êtes la gloire et le père ; que sa vitalité  résiste aux confiscations, aux violences de cette même Italie qui vous proclama autrefois son libérateur. Obtenez aux chrétiens de toute condition le courage nécessaire pour soutenir la lutte qui s'offre à tout homme ici-bas.

 

  

Toute l'Eglise fait écho en ce jour au solennel hommage que Milan continue de rendre, après seize siècles, à deux vaillants témoins du Christ. "Nos martyrs Félix et Nabor, dit saint Ambroise, sont le grain de sénevé de l'Evangile. Ils possédaient la bonne odeur de la foi, mais sans qu'elle fût manifestée ; vint la persécution, ils déposèrent leurs armes, inclinèrent la tête, et frappés du glaive, ils répandirent jusqu'aux confins du monde entier la grâce qui se cachait en eux, en sorte que maintenant on peut dire à bon droit que leur voix a éclaté par toute la terre."

 

Honorons-les, et méritons leurs suffrages par la prière que l'Eglise adresse aujourd'hui à Dieu en mémoire de leurs glorieux combats.

 

Faîtes, nous vous en supplions, Seigneur, que de même que la naissance de vos saints Martyrs Nabor et Félix ne nous prive point de son glorieux anniversaire, elle nous accompagne toujours de son puissant suffrage.

Par Jésus-Christ

 

 

DOM GUÉRANGER
L'Année Liturgique

 

Saint Michel et l'Abbé Jean Gualbert, San Giovanni Gualberto, par Andrea del Sarto

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10 juillet 2010 6 10 /07 /juillet /2010 05:30

Trois fois en quelques jours, à la gloire de la Trinité, le septénaire va marquer dans la sainte Liturgie le règne de l'Esprit aux sept dons. Félicité, Symphorose, la Mère des Machabées, échelonnent sur la route qui conduit au mois de l'éternelle Sagesse le triple bataillon des sept fils que leur donna le ciel. L'Eglise, que Pierre et Paul viennent de quitter par la mort, poursuit sans crainte ses destinées ; car les martyrs font de leur corps un rempart au dépôt sacré du témoignage apostolique. Vivants, ils sont la force de l'Epouse ; leur trépas ne saurait l'appauvrir : semence de chrétiens, leur sang versé dans les tourments multiplie l'immense famille des fils de Dieu.

 

Mystère sublime du monde des âmes ; c'est donc au temps où la terre pleure l'extinction de ses races les plus généreuses, qu'elles font souche dans les cieux pour les siècles sans fin. Ainsi en sera-t-il toujours ; devenue plus rare avec la suite des âges, la consécration du martyre laissera en ce point sa vertu à l'holocauste de la virginité dans la voie des conseils.

 

 La foi d’Abraham fut grande d'avoir espéré, contre toute espérance, qu'il serait le père des nations en cet Isaac qu'il reçut l'ordre un jour d'immoler au Seigneur ; la foi de Félicité aujourd'hui est-elle moindre, lorsqu'à l'immolation sept fois renouvelée des fruits de son sein, elle reconnaît le triomphe de la vie et la bénédiction suprême donnée à sa maternité ? Honneur à elle, comme à ses devancières, comme aux émules que suscitera son exemple ! Nobles sources, épanchant l'abondance de leurs eaux sur le sable aride du désert, elles recueillent le dédain des sages de ce siècle ; mais c'est par elles que la stérile gentilité se transforme à cette heure en un paradis du Seigneur, par elles encore qu'après le défrichement du premier âge le monde verra sa fertilité maintenue.

 

 Marc Aurèle venait de monter sur le trône impérial, où dix-neuf ans de règne n'allaient montrer en lui que le médiocre écolier des rhéteurs sectaires du second siècle. En politique comme en philosophie, le trop docile élève ne sut qu'épouser les étroites et haineuses idées de ces hommes pour qui la lumineuse simplicité du christianisme était l'ennemie. Devenus par lui préfets et proconsuls, ils firent de ce règne si vanté le plus froidement persécuteur que l'Eglise ait connu. Le scepticisme du césar philosophe ne l'exemptait pas au reste de la loi qui, chez tant d'esprits forts, ne dépossède le dogme que pour mettre en sa place la superstition. Par ce côté la foule, tenue à l'écart des élucubrations de l'auteur des Pensées, retrouvait son empereur ; césar et peuple s'entendaient pour ne demander de salut, dans les malheurs publics, qu'aux rites nouveaux venus d'Orient et à l'extermination des chrétiens. L'allégation que les massacres d'alors se seraient perpétrés en dehors du prince, outre qu'elle ne l'excuserait pas, ne saurait se soutenir ; c'est un fait aujourd'hui démontré : parmi les bourreaux de tout ce que l'humanité eut jamais de plus pur, avant Domitien, avant Néron lui-même, stigmatisé plus qu'eux de la tache du sang des martyrs, doit prendre place Marc Aurèle Antonin.

 

La condamnation des sept fils de sainte Félicité fut la première satisfaction donnée par le prince à la philosophie de son entourage, à la superstition populaire, et, pourquoi donc hésiter à le dire si l'on ne veut en plus faire de lui le plus lâche des hommes, à ses propres sentiments. Ce fut lui qui, personnellement, donna l'ordre au préfet Publius d'amener à l'apostasie cette noble famille dont la piété irritait les dieux ; ce fut lui encore qui, sur le compte rendu de la comparution, prononça la sentence et arrêta qu'elle serait exécutée par divers juges en divers lieux, pour notifier solennellement les intentions du nouveau règne. L'arène, en effet, s'ouvrait à la fois sur tous les points, non de Rome seule, mais de l'empire ; l'intervention directe du souverain signifiait aux magistrats hésitants la ligne de conduite qui ferait d'eux les bienvenus du pouvoir. Bientôt Félicité suivait ses fils ; Justin le Philosophe expérimentait la sincérité de l'amour apporté par César à la recherche de la vérité ; toutes les classes fournissaient leur appoint aux supplices que le salut de l'empire réclamait de la haute sagesse du maître du monde : jusqu'à ce que sur la fin de ce règne qui devait se clore, comme il avait commencé, comme il s'était poursuivi, dans le sang, un dernier rescrit  du doux empereur amenât les hécatombes où Blandine l'esclave et Cécile la patricienne réhabilitaient par leur courage l'humanité, trop justement humiliée des flatteries données jusqu'à nos temps à ce triste prince.

 

 Jamais encore le vent du midi n'avait à ce point fait de toutes parts couler la myrrhe et les parfums dans le jardin de l'Epoux ; jamais contre un effort aussi prolongé de tous ses ennemis, sous l'assaut combiné du césarisme et de la fausse science donnant la main aux hérésies du dedans, jamais pareillement l'Eglise ne s'était montrée invincible dans sa faiblesse comme une armée rangée en bataille. L'espace nous manque pour exposer une situation qui commence à être mieux étudiée de nos jours, mais reste loin d'être pleinement comprise encore. Sous le couvert de la prétendue modération antonine, la campagne de l'enfer contre le christianisme atteint son point culminant d'habileté à l'époque même qui s'ouvre par le martyre des sept Frères honorés aujourd'hui. Les attaques furibondes des césars du troisième siècle, se jetant sur l'Eglise avec un luxe d'atrocités que Marc Aurèle ne connut pas, ne seront plus qu'un retour de bête fauve qui sent lui échapper sa proie.

 

 Les choses étant telles, on ne s'étonnera pas que l'Eglise ait dès l'origine honoré d'un culte spécial le septénaire de héros qui ouvrit la lutte décisive dont le résultat fut la preuve qu'elle était bien désormais invincible à tout l'enfer. Et certes, le spectacle que les saints de la terre ont pour mission de donner au monde eut-il jamais scène plus sublime ? S'il fut combat auquel purent applaudir de  concert et  les anges et les  hommes, n'est-ce pas celui du 10 juillet 162, où, sur quatre points à la fois des abords de la Ville éternelle, conduits par leur héroïque mère, ces sept fils de l'antique patriciat engagèrent l'assaut qui devait, dans leur sang, arracher Rome aux parvenus du césarisme et la rendre à ses immortelles destinées ? Quatre cimetières, après le triomphe, obtinrent l'honneur d'accueillir dans leurs cryptes sacrées les dépouilles des martyrs ; tombes illustres, qui devaient en nos temps fournir à l'archéologie chrétienne l'occasion des plus belles découvertes et l'objet des plus doctes travaux. Aussi loin qu'il est possible de remonter à la lumière des plus authentiques monuments, le VI des ides de juillet apparaît, dans les fastes de l'Eglise Romaine, comme un jour célèbre entre tous, en raison de la quadruple station conviant les fidèles aux tombeaux de ceux que par excellence on nommait les Martyrs. L'âge de la paix maintint aux sept Frères une dénomination d'autant plus glorieuse, au sortir de la mer de sang où sous Dioclétien l'Eglise s'était vue plongée ; des inscriptions relevées dans les cimetières mêmes qui n'avaient pas eu la faveur de garder leurs restes, désignent encore au IVe siècle le 11 juillet sous l'appellation de lendemain du jour des Martyrs.

 

En cette fête de la vraie fraternité qu'exalte l'Eglise, deux sœurs vaillantes partagent l'honneur rendu aux sept Frères. Un siècle avait passé sur l'empire. Les Antonins n'étaient plus. Valérien, qui d'abord sembla vouloir comme eux mériter pour sa modération les éloges de la postérité, venait de glisser sur la pente sanglante à son tour : frappant à la tête, il décrétait du même coup l'extermination sans jugement des chefs de l'Eglise, et l'abjuration sous les peines les plus graves de tout chrétien d'une illustre origine.

 

Rufine et Seconde durent aux édits nouveaux de croiser leurs palmes avec celles de Sixte et de Laurent, de Cyprien et d'Hippolyte. Elles étaient de la noble famille des Turcii Asterii que de modernes découvertes ont également remis en lumière. En s'en tenant aux prescriptions de Valérien, qui n'ordonnait contre les femmes chrétiennes que la confiscation et l'exil, elles eussent paru devoir échapper à la mort ; mais leur crime de fidélité au Seigneur était aggravé par le vœu de la sainte virginité qu'elles avaient embrassée : leur sang mêla sa pourpre à la blancheur du lis qui avait leur amour. La Basilique Mère et Maîtresse garde, près du baptistère de Constantin, les reliques des deux sœurs ; le second siège cardinalice des princes de la sainte Eglise est placé sous leur protection puissante, et joint à son titre de Porto celui de Santa-Rufina.

 

 Lisons l'abrégé des Actes de leur martyre que nous offre aujourd'hui la sainte Liturgie, en le faisant précéder de celui des sept Frères : 

Sept Frères, fils de sainte Félicité, furent à Rome, sous la persécution de Marc Aurèle Antonin, traduits devant le préfet Publius. Celui-ci, par caresses d'abord, par menaces ensuite, tenta de les amener à renier le Christ et honorer les dieux. Mais leur courage et les exhortations de leur mère les ayant maintenus fermes dans la confession de la foi, ils furent mis à mort en diverses manières. Janvier mourut sous les fouets garnis de plomb ; Félix et Philippe sous le bâton ; Silvain fut précipité d'un lieu élevé ; Alexandre, Vital et Martial eurent la tête tranchée. Quatre mois après, la mère obtenait comme ses fils la palme du martyre ; pour eux, ce fut le six des ides de juillet qu'ils rendirent leur âme au Seigneur.

 

Rufine et Seconde,  vierges de   Rome,   étaient sœurs.  Fiancées par leurs parents   à   Armentarius  et Vérinus, elles repoussèrent cette alliance, comme ayant consacré à Jésus-Christ leur virginité. Arrêtées sous l'empire de Valérien et de Gallien,  le préfet Junius ne put ni par  promesses, ni par menaces, les faire changer de résolution. En conséquence,  il  fait d'abord battre de verges Rufine. Pendant qu'on la frappe, Seconde interpelle ainsi le juge : "Pourquoi l'honneur à ma sœur, et  à moi la honte ? fais-nous frapper toutes deux, puisque toutes deux nous confessons le Christ  Dieu". A  ces paroles, le juge enflammé de colère  ordonne qu'on les plonge dans un cachot ténébreux et infect ;  une lumière éclatante et la plus suave  odeur  remplissent soudain ce lieu. Enfermées dans un bain aux ardeurs embrasées, elles en sortent saines et sauves. Jetées dans le Tibre une pierre au cou, elles sont délivrées par un Ange. Enfin elles sont décapitées hors de la Ville, au dixième mille de la voie Aurélia.

 

Une dame nommée Plautilla ensevelit leurs corps dans sa propriété ; transportés à Rome plus tard, ils reposent dans la Basilique de Constantin, près du Baptistère.

  

DOM GUÉRANGER
L'Année Liturgique

 

Basilique de Constantin

Ruines de la Basilique de Constantin

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9 juillet 2010 5 09 /07 /juillet /2010 05:30

Sainte Véronique Giuliani, Abbesse des Clarisses capucines, naquit à Mercatello, dans Les Marches, le 27 décembre 1660.Cette Clarisse tient une place d'honneur dans la mystique franciscaine, Son Journal en huit gros volumes - 22 000 pages dans l'édition italienne - contient le récit le plus détaillé des états mystiques qu'on peut trouver dans toute l'hagiographie chrétienne.

 

 Véronique fut saisie très jeune par le désir de Dieu. À six ans elle perdit sa mère, la pieuse Benedetta Mancini : montrant à ses cinq filles encore vivantes le crucifix qu'elle tenait en main, elle légua à chacune une plaie du Crucifié, pour s’y cacher. Véronique reçut la plaie du cœur.

 

À dix-sept ans, elle entra chez les Clarisses de Città di Castello, y recevant le nom de Véronique, comme la femme charitable de la Via dolorosa. Elle vécut 50 ans en ce monastère, dont 34 comme maîtresse des novices, onze comme Abbesse.

 

> lire la suite sur le site des Franciscains du Canada

 

 

Santa Veronica Giuliani Vergine

Santa Veronica Giuliani

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8 juillet 2010 4 08 /07 /juillet /2010 05:30

 

Verbum Domini manet in aeternum - La Parole du Seigneur demeure pour l'éternité.

 

L'exclamation du Chant à l'Evangile nous ramène aux fondements mêmes de la foi. Face au temps qui passe et aux bouleversements permanents de l'histoire, la révélation que Dieu nous a offerte dans le Christ demeure immuable et ouvre sur notre chemin terrestre un horizon d'éternité.

 

Contemplant le Christ présent dans l'Eucharistie et la Passion salvifique, le Père Pierre Vigne fut conduit à être un véritable disciple et un missionnaire fidèle à l'Eglise.

 

Que son exemple donne aux fidèles le désir de puiser dans l'amour de l'Eucharistie et dans l'adoration du Saint-Sacrement l'audace pour la mission ! Demandons-lui de toucher le coeur de jeunes, pour qu'ils acceptent, s'ils sont appelés par Dieu, de se consacrer totalement à Lui dans le sacerdoce ou la vie religieuse.

 

Que l'Eglise en France trouve dans le Père Vigne un modèle, pour que se lèvent de nouveaux semeurs de l'Evangile.

   

Jean-Paul II

(extrait de l'Homélie de la béatification de Pierre Vigne)

 

 

Béatification 1

 

Pierre Vigne naquit le 20 août 1670 à Privas (France), une petite ville encore profondément marquée par les séquelles des guerres de religion du siècle précédent, entre catholiques et protestants. Son père Pierre Vigne, honnête commerçant en textiles, et sa mère, Françoise Gautier, firent baptiser leurs cinq enfants à la paroisse catholique Saint-Thomas de Privas. Deux filles moururent en bas âge. Pierre et ses deux aînés, Jean-François et Eléonore, vivaient avec leurs parents dans une relative aisance.

 

 A 11 ans Pierre fut remarqué par le curé de la paroisse qui le fit signer comme témoin dans les registres paroissiaux, les actes de baptême, de mariage ou de sépulture. Après avoir reçu une éducation et une instruction de bon niveau, sa vie fut soudainement transformée à la fin de l'adolescence par la prise de conscience de la présence de Jésus Christ dans l'Eucharistie. Il entra, en 1690, au séminaire sulpicien de Viviers. Ordonné prêtre, le 18 septembre 1694, à Bourg Saint-Andéol, par l'Evêque de Viviers, il fut envoyé comme vicaire à Saint-Agrève où il exerça, pendant six ans, son ministère sacerdotal, en bonne entente avec son curé et en étant proche des paroissiens.

 

 Toujours attentif à discerner, à travers les événements, la volonté du Seigneur concernant sa vie, il se sentit appelé ailleurs. Son désir d'être missionnaire parmi les personnes de condition modeste le poussa à entrer, en 1700, chez les Lazaristes, à Lyon. Il y reçut une solide formation à la pauvreté et aux "missions populaires" et commença à parcourir villes et villages, avec des confrères, pour évangéliser le peuple chrétien. En 1706, il quitta de son plein gré les Lazaristes. Il avait plus que jamais la passion du salut des âmes, en particulier des populations pauvres de la campagne. Après une brève période de recherche, sa vocation se dessina clairement. Il devint "missionnaire itinérant", appliquant sa propre méthode pastorale, mais en soumettant toutefois son ministère à l'autorisation de ses supérieurs hiérarchiques.

 

 Pendant plus de trente ans, inlassablement, il sillonna, à pied ou à cheval, les chemins du Vivarais et du Dauphiné, et même au-delà. Afin de faire connaître, aimer et servir Jésus Christ, il affronta la fatigue des déplacements, les rigueurs du climat. Il prêcha, visita les malades, catéchisa les enfants, administra  les sacrements, allant jusqu'à transporter sur son dos "son" confessionnal pour être toujours prêt à offrir la miséricorde de Dieu. Il célébrait la Messe, exposait le Saint Sacrement, apprenant aux fidèles à l'adorer. Marie "Beau Tabernacle de Dieu parmi les hommes" tint aussi une place de choix dans sa prière et son enseignement.

 

 Au cours d'une de ses missions, il arriva, en 1712, à Boucieu-le-Roi dont le site lui permit d'ériger un chemin de Croix. Avec l'aide des paroissiens des environs, il construisit 30 stations qui, à travers le village et la campagne, apprenaient aux chrétiens à suivre Jésus de la Cène à Pâques et à la Pentecôte. Boucieu devient son lieu de résidence entre deux missions. Il y réunit quelques femmes qu'il chargea d'accompagner les pèlerins du chemin de Croix pour les aider à méditer et prier. 

 

C'est là qu'il fonda la Congrégation des Soeurs du Saint-Sacrement. Le 30 novembre 1715, dans l'église de Boucieu, il leur remit la croix et l'habit religieux, les invitant à se succéder pour adorer Jésus présent dans l'Eucharistie et à vivre fraternellement ensemble. Il leur confia la tâche d'enseigner aux jeunes. Soucieux d'instruire les enfants pour leur permettre d'accéder à la foi et de vivre une vie chrétienne, Pierre Vigne ouvrit des écoles et créa un "séminaire de Régentes", comme l'on nommait alors les maîtresses d'école.

 

 Une vie aussi intense avait besoin d'être soutenue. Ainsi Pierre Vigne ne manqua jamais, lorsqu'il allait à Lyon pour faire des achats, de se rendre chez ses anciens maîtres de Saint-Sulpice afin de rencontrer son confesseur et son directeur spirituel. Attiré par la spiritualité eucharistique des Prêtres du Saint-Sacrement fondés par Monseigneur d'Authier de Sisgaud, il fut admis comme associé dans cette société sacerdotale le 25 janvier 1724, à Valence, et bénéficia de leur aide spirituelle et temporelle.

 

 Tout en assurant l'accompagnement de sa jeune Congrégation, Pierre Vigne continua ses missions apostoliques et trouva la possibilité, pour prolonger les fruits de la mission, d'écrire des livres :  des règlements de vie, des ouvrages de spiritualité et surtout les "méditations sur le plus beau livre qui est Jésus Christ souffrant et mourant sur la Croix". La vigueur de ce marcheur de Dieu, l'intensité de son activité apostolique, ses longues heures d'adoration, sa vie de pauvreté, témoignent par-dessus tout d'un amour passionné pour Jésus Christ qui a aimé les siens jusqu'à la fin.

 

 A 70 ans cependant, il ressentit les effets de la fatigue. Au cours d'une mission à Rencurel, dans les montagnes du Vercors, pris d'un malaise, il fut obligé d'interrompre sa prédication. Malgré tous ses efforts pour célébrer encore l'Eucharistie et exhorter les fidèles à l'amour de Jésus, il sentit que sa fin approchait et se recueillit alors en prière.

 

Un prêtre, puis deux Soeurs venues en hâte, accompagnèrent ses derniers moments. Le 8 juillet 1740, il rejoignit Celui qu'il avait tant aimé, adoré et servi. Son corps fut ramené à Boucieu où il repose encore dans la petite église.

 

 

Pierre Vigne (1670-1740) biographie du Vatican

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6 juillet 2010 2 06 /07 /juillet /2010 09:45

La ville de Bollène appartenait avant 1789 au diocèse de Saint-Paul-Trois-Châteaux. Il s'y trouvait deux couvents de religieuses, l'un de Sainte-Ursule, l'autre du Saint-Sacrement. Une religieuse sacramentine a laissé le récit qu'on va lire. On y trouvera mentionnées quelques religieuses d'autres maisons : une bénédictine de Caderousse, trois ursulines du Pont-Saint-Esprit, deux bernardines d'Avignon, une ursuline de Carpentras, une de Fernes, une de Sisteron.

 

 L'esprit de recueillement, de mortification, de pauvreté, d'obéissance, d'oraison, en un mot toutes les vertus religieuses qui animaient nos anciennes mères et soeurs, faisait l'édification du public, et la bonne odeur de leurs vertus s'étendait au loin. Elles jouissaient elles-mêmes de la paix et de l'union la plus parfaite, cimentée par les liens de la charité de notre divin Sauveur.

 

 Bientôt des édits cruels furent publiés de toute part pour signifier aux religieuses de sortir de leurs monastères. A cette époque, la communauté du Saint-Sacrement comptait 23 religieuses choristes, 5 soeurs converses et 2 soeurs tourières ; elles avaient à leur tête la Révérende Mère du Coeur de Marie, de la Fare, personne d'une rare vertu et douée de tous les talents propres à une supérieure accomplie.

 

 On peut concevoir combien fut douloureux pour notre bonne mère supérieure le coup fatal de la suppression de son monastère, et de la dispersion de ses chères filles. Si chaque religieuse en pareille circonstance doit mourir de douleur, la pauvre supérieure meurt autant de fois qu'elle a de religieuses. Quelle ne fut donc pas son affliction quand elle se vit elle-même forcée à obliger ses filles de sortir de leur Jérusalem bien-aimée pour rentrer dans la Babylone ! Son coeur palpitait de crainte en voyant que ces vierges dont elle avait pris tant de soins allaient tomber dans la gueule des loups prêts à les dévorer ; mais ranimée par sa foi, elle ne laissa pas abattre son courage, et comme un autre Abraham, elle prit en main le glaive de la force et se mit en devoir d'obéir. Elle pria, elle exhorta, elle dit à ses saintes filles que Dieu veut qu'elles sortent de leur monastère, qu'il est temps plus que jamais de se faire une retraite intérieure qu'on ne puisse leur ravir, car pour le couvent qu'elles habitent il ne faut plus penser d'y demeurer. Quelle triste annonce pour des religieuses qui avaient un si grand attachement à leur sainte vocation ! Aussi, malgré leur soumission aveugle aux ordres de leur supérieure, elles ne purent s'empêcher cette fois d'opposer des résistances à sa volonté ; elles voyaient bien qu'elle ne commandait que malgré elle.

 

 Elles crurent donc qu'il leur était permis d'employer les prières et les larmes pour obtenir de la bonté de Dieu la révocation de la sentence que des hommes iniques avaient portée. Quel crève-coeur pour notre Révérende mère, si fortement attachée à son Dieu, de se trouver dans l'indispensable nécessité non seulement de sortir de ce saint asile, mais encore d'en faire sortir ces épouses de Jésus-Christ malgré elles. Le Seigneur vint à son aide, en lui envoyant dans ce moment décisif une religieuse visitandine, grande servante de Dieu, conduite par des voies extraordinaires. Cette vertueuse fille eut grâce pour décider nos soeurs à ce sacrifice. "C'est la volonté de Dieu que vous quittiez le voile, leur dit-elle, pourquoi voudriez-vous le garder ? Vous me voyez hors de mon cloître, il faut que liées au même époux vous subissiez le même sort". Ces paroles furent si efficaces qu'elles consentirent enfin à se séparer. Mais il fut convenu qu'elles ne céderaient qu'à la force.

 

 Depuis quelque temps on avait enlevé à nos soeurs leurs propriétés. Tous les jours elles s'attendaient à recevoir l'ordre fatal de quitter leur saint asile. Ce fut le 9 octobre 1792 que quatre municipaux de Bollène se présentèrent à la porte du couvent pour les obliger à en sortir. La supérieure obtint un délai de trois jours. Pendant cet intervalle, elles eurent la douleur de voir profaner les vases sacrés, leur monastère fut envahi par une troupe de brigands, qui sous prétexte de faire l'inventaire du mobilier de la maison, emportaient ce qui était à leur convenance. On permit seulement aux religieuses d'enlever ce qu'elles avaient dans leurs cellules, ce qui se réduisait à bien peu de choses. Elles purent cependant, avec l'assistance d'amis dévoués, sauver quelques ornements d'église, et quelques meubles qu'on fit sortir de nuit par des portes dérobées ; les tables du réfectoire furent cachées par maître Linsolas, menuisier, qui les démonta et en fit un plancher à son grenier à foin avec l'intention de les rendre dans un temps plus heureux ; ce qu'il a fait lorsque nos soeurs sont rentrées dans leur maison.

 

 Prévoyant les blâmes qu'on voulait faire tomber sur les communautés religieuses, la Révérende mère supérieure déclara aux municipaux, avant de sortir de son monastère, par un acte authentique signé de toutes les religieuses, que c'est la force seule et non tout autre motif qui les obligeait à rentrer dans le monde. Le soir du 13 octobre 1792, nos soeurs se virent forcées de quitter leur chère solitude. Que de larmes ! Que de sanglots, lorsqu'il fallut se séparer et sortir de cette maison de paix sur laquelle le Seigneur s'était plu à verser par torrents ses grâces et ses bénédictions. Elles ne purent aller toutes ensemble ; les unes furent reçues par des amis de la communauté, d'autres allèrent chez leurs parents qui s'empressèrent de venir les prendre dans des voitures à la porte du monastère.

 

 Hors de l'arche sainte, Mme de la Fare ne les abandonna pas ; elle les retira auprès d'elle dans une maison de Bollène louée à cet effet, et leur procura autant qu'il fut possible les secours de la religion par le ministère de M. l'abbé Tavernier de Courtines. Ce vertueux ecclésiastique était depuis quelque temps aumônier de la communauté. Son zèle, sa foi, sa piété excitèrent contre lui la haine des révolutionnaires qui le cherchaient pour l'immoler à leur fureur. Nommé par Pie VI administrateur du diocèse de Saint-Paul-Trois-Châteaux, M. Tavernier s’acquitta de cette tâche avec beaucoup de zèle. Nos soeurs furent l'objet de sa constante sollicitude. Il les encourageait, les soutenait, leur procurait les sacrements et même la consolation d'avoir la sainte réserve enfermée dans une armoire, où tour à tour elles venaient faire leur adoration.

 

 Nos soeurs étaient obligées de travailler pour se procurer une honnête subsistance ; elles faisaient des ouvrages de couture, de broderie, de tricotage. La digne supérieure travaillait comme les autres et pourvoyait aux. besoins de chacune. Cette position, quoique pénible, était néanmoins bien consolante, puisqu'elle lui procurait la joie de rester avec ses chères filles. Mais le moment des; consolations n'était plus, il ne devait plus y avoir pour elle que des tribulations.

 

 Elle fut enlevée à l'amour de ses enfants par la malice d'un municipal qui la contraignit de quitter Bollène. Elle se réfugia au Pont-Saint-Esprit chez Madame sa mère, emmenant avec elle Madeleine Cluse, de Bouvante, soeur converse. Là, elle apprit avec une douleur qu'on ne pourrait décrire l'arrestation de ses compagnes, leur réclusion à Orange. Son coeur était déchiré chaque fois qu'on lui apprenait la mort de quelqu'une d'entre elles. Souvent on lui a entendu dire qu'elle avait ressenti le coup de la mort autant de fois que le feu de la guillotine avait frappé une de ses enfants. Enfermée elle-même dans les prisons du Pont-Saint-Esprit, elle en supporta les incommodités avec une patience admirable, encourageant par ses paroles et par ses exemples les religieuses détenues avec elle. La soeur Madeleine Cluse qui l'avait suivie, partagea ses peines et sa prison. Plus tard, quand la communauté se rétablit, elle se réunit nos soeurs. Elle nous disait souvent qu'elle regrettait beaucoup de n'être pas restée à Bollène avec les religieuses qui eurent le bonheur de donner leur vie pour la défense de la foi, au nombre desquelles était sa tante Marie-Anne Beguin et sa soeur Marie Cluse.

 

 Séparées de leur mère, nos soeurs restèrent fermes ; inébranlables au milieu des épreuves. Leur position cependant était des plus tristes. Malgré un travail opiniâtre, elles avaient beaucoup de peine pour subvenir à leur frugale nourriture et à leur modeste entretien. Impossible de dire ce qu'elles souffrirent de la faim et du froid. Elles allaient le long des chemins, sur les montagnes, ramasser du bois et de la paille pour faire leur soupe et leur lessive ; la privation où elles étaient des choses les plus nécessaires à la vie fut cause que plusieurs d'entre elles se décidèrent à rentrer dans leurs familles. Celles de nos soeurs qui continuèrent à vivre en communauté attiraient sur elles les regards du divin Epoux par leur ferveur et leur générosité à supporter toutes les privations auxquelles leur triste et pénible position les soumettait. Le Seigneur qui les destinait presque toutes à la gloire du martyre, les préparait à cette grâce par les sacrifices de chaque jour ; elles menèrent cette vie pénible pendant dix-huit mois ne sachant quelle en serait la fin.

 

 Dans la même ville se trouvaient aussi des religieuses de différents ordres, vivant les unes chez leurs parents, les autres réunies dans la même maison sous la conduite de Mme de Roquard, toutes servant le Seigneur conformément à leurs saintes règles et faisant l'édification des fidèles. Le 2 mai 1794, elles furent conduites dans les prisons d'Orange au nombre de quarante-deux. On les mit sur des charrettes, et on les conduisit ainsi que des agneaux qu'on mène à la boucherie.

 

 Le lendemain de leur entrée dans la prison, ne doutant plus qu'elles ne fussent destinées au martyre, elles se réunissent dans la même chambre pour concerter ensemble les exercices de leur préparation au sacrifice de leur vie pour la cause de la religion. Leur première pensée fut de n'avoir qu'une seule règle et de suivre toutes le même plan de vie, puisqu'elles avaient la même destinée ; elles poussèrent l'esprit d'union jusqu'à mettre tout en commun, linge et assignats. Les religieuses qu'on amena dans la suite s'associèrent à cette admirable confraternité.

 

 Chaque jour ces saintes filles commençaient ensemble, dès cinq heures du matin, leurs pieux exercices par une heure de méditation ; après quoi elles récitaient l'office de la sainte Vierge et les prières de la messe ; à sept heures elles prenaient un peu de nourriture ; à huit heures elles disaient les litanies des saints. Quand cette prière attendrissante était achevée, chacune faisait à haute voix la confession de ses fautes et se disposait à la réception intentionnelle du saint Viatique. Lorsque approchait l'heure où elles pouvaient être appelées au tribunal, elles disaient les prières de l'Extrême-Onction, renouvelaient leurs voeux de baptême et de profession religieuse. Quelques-unes, dans le mouvement de leur ferveur, s'écriaient : "Oui, je suis religieuse, j'ai une grande consolation de l'être, je vous remercie, Seigneur, de m'avoir accordé cette grâce." A neuf heures, avait lieu ordinairement l'appel de celles qui devaient comparaître devant les juges. Toutes ne furent pas appelées le même jour. Celles qui voyaient différer leur sacrifice éprouvaient une grande peine, tant était vif leur désir de donner leur vie pour Jésus-Christ. Elles ne voyaient plus leurs compagnes parce qu'après leur condamnation elles étaient conduites dans la cour du Cirque (on appelait ainsi l'ancien théâtre romain), en attendant l'heure de l'exécution.

 

Tout le temps que durait l'audience, les religieuses de la prison se tenaient à genoux pour obtenir à celles qui étaient jugées les lumières du Saint-Esprit et la force nécessaire au moment d'un tel combat, elles imploraient le secours de la Sainte Vierge par la récitation de mille Ave Maria, disaient des litanies sans nombre, faisaient des prières sur les paroles de Jésus-Christ en croix ; enfin, il n'y avait presque point de relâche jusqu'au soir cinq heures où l'on reprenait l'office de la sainte Vierge. Lorsqu'à six heures du soir, le bruit sinistre du tambour et les cris de Vive la Nation ! Vive la République ! retentissaient autour de la prison, annonçant le départ des victimes pour l'échafaud, les soeurs prosternées récitaient les prières des agonisants et de la recommandation de l'âme, et gardaient ensuite un profond silence, restant toujours à genoux, jusqu'à ce qu'elles présumassent que leurs compagnes avaient subi leur jugement. Elles se levaient alors, se félicitant réciproquement (surtout celles qui étaient de la même communauté), de ce que quelques-unes d'entre elles avaient été admises aux noces de l'agneau sans tache ; elles chantaient avec joie le Te Deum et le psaume Laudate Dominum omnes gentes ; et elles s'exhortaient mutuellement à mourir de même le lendemain.

 

 Chaque victime de ce troupeau d'élite se préparait à son sacrifice par la plus grande pureté de conscience, s'accusant à la Supérieure de ses moindres fautes, gardant un silence continuel ; la prison était pour elles un cloître animé de la plus grande ferveur ; les exercices de la vie religieuse s'y faisaient avec une ponctualité parfaite. Joignant à des exemples si touchants une sorte d'apostolat, ces saintes filles contribuèrent, autant que les saints prêtres prisonniers comme elles, à ramener au Seigneur les autres détenus et quelques ecclésiastiques, coupables d'avoir prêté le serment, ne tardèrent pas à se repentir, et à se jeter aux pieds des ministres fidèles qui recevaient leur rétractation. Quand ils voyaient nos saintes religieuses aller au martyre, ils se prosternaient devant elles, disant dans toute la vivacité du repentir le plus sincère : "Nous avons reconnu notre erreur et nous l'abjurons de nouveau à vos pieds. Pardon, mille fois pardon, du scandale que nous avons donné aux faibles ; nous voulons mourir comme vous, non seulement dans le sein de l'Eglise catholique, apostolique et romaine, mais encore pour la foi qu'elle professe."

 

 Le président du tribunal après avoir interrogé la victime qui lui était livrée, sur son nom, son âge, sa profession, lui demandait si elle avait prêté ou si elle voulait prêter le serment de Liberté-Egalité. Les religieuses comme les prêtres répondaient successivement : "Ce serment est contraire à ma conscience, mes principes religieux se le défendent". Souvent le président insistait avec le grossier tutoiement alors en usage : "Tu es encore à temps de le prêter, et tu peux à ce prix être acquittée", et chacune de répondre : "Je ne puis sauver ma vie aux dépens de ma foi". A cette réponse, l'arrêt de mort était aussitôt prononcé.

 

 Toutes allèrent au supplice avec une céleste allégresse, et comme à un festin de noces, suivant l'expression d'un témoin oculaire. Le peuple grossier ne pouvait comprendre cette joie ; les gendarmes ne cessaient de répéter dans leur brutal langage : "Ces bougresses-là meurent toutes en riant".

 

 Il serait difficile de dire combien leur ministère fut utile aux prisonniers qui étaient jugés, condamnés et jetés avec elles dans la cour du Cirque en attendant l'heure du supplice. Elles encourageaient ceux que consternait l'approche de la mort, en leur faisant entrevoir des espérances plus pures et plus solides que celles de la terre. A ceux que la séparation de leurs familles et le préjudice causé à leurs enfants par la confiscation de leurs biens temporels affligeaient outre mesure, elles leur montraient dans le ciel des parents, des amis, des trésors impérissables. Le père d'une nombreuse famille était tombé dans une espèce de désespoir en pensant que ses enfants allaient devenir orphelins ; une des religieuses, touchée de compassion, tombe à genoux, priant Dieu pour lui, reste pendant une heure les bras élevés vers le ciel ; sa prière fut exaucée. Le père de famille sentit renaître sa confiance en Dieu et marcha à l'échafaud avec une parfaite résignation.

 

 Parmi les quarante-deux religieuses qui s'étaient vouées volontairement à la mort, par refus de prêter le serment de la liberté et de l'égalité, le divin Epoux en a choisi trente-deux. Les dix qui sont restées gémissent de n'avoir pu suivre leurs compagnes à la salle des noces. Les juges en ont absous cinq pour contenter le peuple ; et le tribunal ayant été cassé, les cinq dernières n'ont point été jugées.

 

 L'allégresse que l'on voyait peinte sur le visage de ces saintes filles après leur jugement, encourageait les autres condamnés, et leur faisait désirer la mort. Plusieurs même qui étaient accablés de soucis à cause de leurs femmes et de leurs enfants, en faisaient le sacrifice de tout leur coeur, par les douces et pieuses exhortations de ces religieuses. Elles ont une fois passé demi-heure en oraison, les bras en croix, pour obtenir les forces au père d'une nombreuse famille, qui se livrait au désespoir ; et elles eurent la consolation de l'accompagner au supplice dans les sentiments les plus chrétiens. — "Nous n'avons pu dire nos vêpres, observèrent quelques-unes, nous les chanterons au ciel". — "Oh ! c'est trop beau, s'écriait la soeur des Anges Rocher ; peut-être que ceci ne sera pas vrai". — La soeur converse, Saint-André-Sage, tomba la veille de sa mort dans une grande tristesse, et dit à une de ses compagnes : "Je crains que Dieu ne me juge pas digne du martyre". — La soeur Saint-Bernard Roumillon faisait depuis longtemps une prière à la sainte Vierge pour mourir le samedi ou un jour consacré par une de ses fêtes. Elle a obtenu cette grâce ayant été immolée le jour de Notre-Dame du Mont Carmel. — La soeur du Saint-Sacrement Just, avait aussi fait la même demande à la sainte Vierge pendant quinze ans : elle eut le bonheur de consommer son sacrifice le même jour. "Nous avons, dit-elle en présence de ses gardes, nous avons plus d'obligations à nos juges, qu'à nos pères et mères, puisque ceux-ci ne nous ont donné qu'une vie temporelle, au lieu que nos juges nous procurent une vie éternelle". L'un des gardes en fut attendri jusqu'aux larmes, et un paysan voulut lui toucher la main. L'amour divin dont son coeur était embrasé, la faisait s'écrier : "Ô quel bonheur ! Je suis bientôt au ciel. Je ne puis contenir les sentiments de ma joie". — La soeur Sainte-Françoise, ursuline de Carpentras, disait la veille de son martyre : "Quel bonheur ! nous allons voir notre époux !" —Quelques-unes éprouvèrent d'abord la terreur de la mort ; mais à mesure que le jour du supplice approchait, elles jouissaient du calme le plus parfait et de la paix la plus profonde. Des gens d'armes, témoins de leur constance, dirent à d'autres, d'un ton d'ironie et de blasphème : "Regardez, ces filles meurent toutes en riant". — "Qui es-tu ?" dit le juge à la soeur Thérèse Consolant. — "Je suis fille de l'Eglise". — "Qui es-tu ?" dit-il à la soeur Claire du Bas. "Je suis religieuse et la serai jusqu'à la mort".

 

 La soeur Gertrude d'Alausier remercia ses juges du bonheur qu'ils lui procuraient, et baisa la guillotine en y montant. Le jour de sa mort, elle se trouva à son réveil, inondée d'une joie extraordinaire, qui lui fit répandre des larmes. "Je suis dans l'enthousiasme, disait-elle, je suis hors de moi-même ; il est sûr que je mourrai aujourd'hui". Mais craignant ensuite que ce ne fût un effet d'orgueil, on fut obligé de la rassurer et de la tranquilliser. — La soeur Sainte-Pélagie Bès, après son jugement, sortit de sa poche une boîte de dragées, qu'elle distribua à toutes les condamnées comme elle : "Ce sont, ajoutait-elle, les bonbons de mes noces" ; et chacune les mangeait avec la joie la plus pure. — La soeur des Anges de Rocher était encore chez son père, voyant approcher le moment où on pouvait la mettre en arrestation, demanda conseil à ce vénérable vieillard âgé de 80 ans, pour savoir si elle devait se soustraire à cette peine : "Ma fille, lui répondit-il, il vous est facile de vous cacher ; mais auparavant, examinez bien devant Dieu si vous ne vous écartez pas de ses desseins adorables sur vous, dans le cas qu'il vous ait destinée pour être une des victimes qui doivent apaiser sa colère. Je vous dirai comme Mardochée à Esther : "Vous n'êtes pas sur le trône pour vous, mais pour votre peuple". Un conseil si chrétien, inspiré de Dieu même, fit la plus vive impression sur l'esprit et le coeur de cette sainte fille. Elle part avec joie et, en récompense de sa fidélité, le Seigneur lui fit connaître intérieurement le jour de la consommation de son sacrifice. En effet, la veille de sa mort, à la prière du soir, elle demanda pardon à toutes ses compagnes, et leur recommanda instamment de bien prier pour elle, parce que le lendemain elle serait immolée. Après la lecture de sa sentence de mort, elle remercia avec une grande satisfaction ses juges, de ce qu'ils lui procuraient le bonheur d'aller se réunir aux saints Anges.

 

 

Martyrologe des trente-deux religieuses guillotinées à Orange
 

6 juillet. Suzanne-Agathe DELOYE, bénédictine, soeur Marie-Rose, 53 ans

 

7 juillet. Marie-Suzanne DE GAILLARD, sacramentine, soeur Iphigénie de Saint-Matthieu, 32 ans

 

9 juillet. Marie-Anne DE GUILHERMIER, ursuline, soeur Sainte-Mélanie, 61 ans

9 juillet. Marie-Anne DE ROCHER, ursuline, soeur des Anges, 39 ans

 

10 juillet. Marie-Gertrude DERIPERT D'ALAUZIER, Ursuline, soeur Sainte-Sophie, 36 ans 

10 juillet. Sylvie-Agnès DE ROMILLON, ursuline, soeur Agnès de Jésus, 44 ans

 

11 juillet. Rosalie-Clotilde BÈS, sacramentine, soeur Sainte-Pélagie, 42 ans

11 juillet. Marie-Elisabeth PÉLISSIER, sacramentine, soeur Saint-Théotiste, 53 ans

11 juillet. Marie-CIaire BLANC, sacramentine, soeur Saint-Martin, 52 ans

11 juillet, Marie-Marguerite d'ALBARÈDE, ursuline, soeur Sainte-Sophie, 54 ans

 

12 juillet. Madeleine-Thérèse TALIEU, sacramentine, soeur Rose de Saint-Xavier, 48 ans

12 juillet. Marie CLUSE, converse sacramentine, soeur du Bon Ange, 32 ans

12 juillet. Marguerite DE JUSTAMOND, bernardine, soeur Saint-Henri, 48 ans

12 juillet. Jeanne DE ROMILLON, ursuline, soeur Saint-Bernard, 41 ans

 

13 juillet. Marie-Anastasie DE ROQUARD, ursuline, soeur Saint-Gervais, 45 ans 

13 juillet. Marie-Anne LAMBERT, ursuline, soeur Saint-François, 52 ans

13 juillet. Marie-Anne DEPEYRE, converse ursuline, soeur Sainte-Françoise, 38 ans

13 juillet. Elisabeth VERCHIÈRE, sacramentine, soeur Madeleine de la Mère de Dieu, 25 ans

13 juillet. Thérèse-Marie FAURIE, sacramentine, soeur de l'Annonciation, 24 ans

13 juillet. Anne-Andrée MINUTTE, sacramentine, soeur Saint-Alexis, 54 ans

 

16 juillet. Marie-Rose DE GORDON, sacramentine, soeur Aimée de Jésus, 61 ans

16 juillet. Marguerite-Thérèse CHARRANSOL, sacramentine, soeur Marie de Jésus, 36 ans

16 juillet. Marie-Anne BEGUIN-ROYAL, converse sacramentine, soeur Saint-Joachim, 58 ans

16 juillet. Marie-Anne DOUX, converse ursuline, soeur Saint-Michel, 55 ans

16 juillet. Marie-Rose LAYE, converse ursuline, soeur Saint-André, 65 ans

16 juillet. Dorothée DE JUSTAMONT, ursuline, soeur Madeleine du Saint-Sacrement, 51 ans

16 juillet. Madeleine DE JUSTAMONT, bernardine, soeur du Coeur de Marie, 40 ans

 

26 juillet. Marie-Marguerite BONNET, sacramentine, soeur Saint-Augustin, 75 ans

26 juillet. Marie-Madeleine DE JUSTAMONT, ursuline, soeur Catherine de Jésus, 70 ans

26 juillet. Anne CARTIER, ursuline, soeur Saint-Basile, 61 ans

26 juillet. Marie-Claire DU BAC, ursuline, soeur Claire de Sainte-Rosalie, 68 ans

26 juillet. Elisabeth -Thérèse CONSOLIN, ursuline, soeur du Coeur de Jésus, 58 ans

 

 

LES MARTYRS

par le R. P. DOM H. LECLERCQ

 

 

ORANGE théâtre antique

Le théâtre antique d'Orange aujourd'hui

" Elles ne voyaient plus leurs compagnes parce qu'après leur condamnation elles étaient conduites dans la cour du Cirque (on appelait ainsi l'ancien théâtre romain), en attendant l'heure de l'exécution."

 

Le récit détaillé : LES BIENHEUREUSES TRENTE-DEUX MARTYRES D'ORANGE  de M. l'Abbé Jules Méritan

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