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"Je vous donne un commandement nouveau : c'est de vous aimer les uns les autres.

 

Comme je vous ai aimés, vous aussi aimez-vous les uns les autres.

 

Ce qui montrera à tous les hommes que vous êtes mes disciples, c'est l'amour que vous aurez les uns pour les autres."

 

Evangile de Jésus-Christ selon  saint Jean 

   

 

Pentecôte

" Le Défenseur, l'Esprit Saint que le Père enverra en mon nom, lui, vous enseignera tout, et il vous fera souvenir de tout ce que je vous ai dit."

 

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean  

 

   

 

 El Papa es argentino. Jorge Bergoglio                 

Saint Père François

 

 

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1er mai 2011 Béatification de Jean-Paul II

Béatification du Serviteur de Dieu Jean-Paul II

 

 

  Béatification du Père Popieluszko

beatification Mass, in Warsaw, Poland

à Varsovie, 6 juin 2010, Dimanche du Corps et du Sang du Christ

 

 

presidential palace in Warsaw

Varsovie 2010

 

 

Basilique du Sacré-Cœur de Montmartre
Sanctuaire de l'Adoration Eucharistique et de la Miséricorde Divine

La miséricorde de Dieu est comme un torrent débordé. Elle entraîne les cœurs sur son passage.
(Saint Curé d'Ars)
 

 


Le côté du Christ a été transpercé et tout le mystère de Dieu sort de là. C’est tout le mystère de Dieu qui aime, qui se livre jusqu’au bout, qui se donne jusqu’au bout. C’est le don le plus absolu qui soit. Le don du mystère trinitaire est le cœur ouvert. Ce n’est pas une image, c’est une réalité. C’est la réalité la plus profonde qui soit, la réalité de l’amour.
Père Marie-Joseph Le Guillou




Dans le cœur transpercé
de Jésus sont unis
le Royaume du Ciel
et la terre d'ici-bas
la source de la vie
pour nous se trouve là.

Ce cœur est cœur divin
Cœur de la Trinité
centre de convergence
de tous les cœur humains
il nous donne la vie
de la Divinité.


Sainte Thérèse Bénédicte de la Croix
(Edith Stein)



Le Sacré-Cœur représente toutes les puissances d'aimer, divines et humaines, qui sont en Notre-Seigneur.
Père Marie-Eugène de l'Enfant Jésus

 



feuille d'annonces de la Basilique du Sacré-Coeur de Montmartre

 

 

 

 

 

 

 

     

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Ordinations du samedi 27 juin 2009 à Notre Dame de Paris


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... ma vocation, enfin je l’ai trouvée, ma vocation, c’est l’Amour !

 

 

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SALVE REGINA

21 décembre 2010 2 21 /12 /décembre /2010 20:00

Nous voyons par la deuxième Epître de Paul à Timothée que Priscille et  Aquila étaient à Ephèse en l'année 67, qui fut celle du martyre de saint Pierre et de saint Paul, et les documents sur lesquels s'appuie leur histoire donnent lieu de penser qu'ils achevèrent leur carrière en Orient.

 

Pierre eut aussi d'intimes relations avec un autre disciple de la foi chrétienne, romain et païen de naissance, mais déjà éprouvé dans la carrière des travaux apostoliques à la suite de Paul. Il se nommait Clément ; il était le fils d'un Faustinus, et avait vu le jour au pied du mont Caelius. La basilique chrétienne qui porte son nom, et qui existait déjà au quatrième siècle, d'après le témoignage de saint Jérôme, marque encore aujourd'hui l'emplacement de sa maison. Elle est située sur la pente inférieure du Caelius, et l'on sait que ce quartier était habité aussi par de nombreuses familles de l'aristocratie. Là vécurent Bruttius Praesens, Annius Verus ; là fut élevé Marc-Aurèle. De récentes fouilles dans les substructions de la basilique ont mis à découvert des restes importants de l'antique maison romaine.

 

 Quant à l'origine de Clément, nul doute qu'elle n'ait été patricienne. Le livre des Récognitions, composé au plus tard dans le deuxième siècle, le fait naître de race impériale. On a cherché le moyen de le rattacher aux Flavii, chez lesquels on trouve Flavius Clemens, dont nous aurons à parler ; mais tout autre argument fait défaut, et celui-ci est par trop faible. On aurait plus de motifs pour rattacher Clément aux Claudii, race véritablement impériale, puisqu'elle compte jusqu'à quatre Césars. Un manuscrit de la Vaticane du huitième siècle, reproduit par les Bollandistes et déjà cité, dit expressément que Clément fut épargné dans la persécution de Néron, parce qu'il était allié de César. L'épigraphie, en effet, nous fournit par Gruter plusieurs inscriptions de la gens Claudia, du même temps, sur lesquelles se rencontrent un Claudius Clemens, un Claudius Faustus,  un Claudius Faustinus.  D'autre part, Cicéron atteste que Tiberius Claudius Centumali résidait sur le  Caelius,  et ce fut aussi sur le Caelius que fut élevé le temple que l'on dédia à l'empereur Claude. Les Récognitions, que l'on n'a aucun motif de récuser lorsqu'il s'agit simplement du nom des parents de Clément, lui donnent pour mère une Matidia. La race de cette femme ne devait pas  être vulgaire,  car nous voyons un Matidius épouser la propre sœur de Trajan dans la seconde moitié du premier siècle.

 

 Toutes ces raisons autorisent à placer Clément parmi les membres de l'aristocratie romaine convertis au christianisme, et s'employant avec zèle à sa propagation. Si l'on avait à écrire en détail la vie de Clément, il serait peu sûr de prendre pour base les Récognitions, livre de parti,  où l'auteur a surtout en  but de recommander la secte ébionite ; mais on est en droit de conclure de ce roman que le souvenir des pérégrinations entreprises par le jeune patricien à la recherche de la vérité n'était pas encore effacé au deuxième siècle. C'est, en effet, dans ce but que Clément quitta Rome et passa dans l'Orient. Il y eut avec Pierre des relations intimes, dans l'intervalle qui s'écoula entre les deux séjours de celui-ci à Rome ; après quoi, devenu chrétien, il s'attacha durant quelque temps à la suite de Paul, qui parle de lui avec la plus haute estime. De retour à Rome, il revoyait Pierre, son ancien maître. Le vieillard l'accueillit en père, et nous verrons à quel degré s'éleva la confiance dont il l'honorait.

 

 L'augmentation du nombre des fidèles avait engagé Pierre à fixer désormais dans la ville même le centre de son action. Le cimetière Ostrianum était trop éloigné, et ne pouvait plus suffire aux réunions des chrétiens. Le motif qui avait porté l'apôtre à revêtir successivement Linus et Cletus du caractère épiscopal, pour les rendre capables de partager les sollicitudes d'une église dont l'extension était sans limites,  amenait naturellement à multiplier les lieux d'assemblée.

 

 La résidence particulière de Pierre était donc fixée au Viminal, c'est là que fut désormais établie la Chaire mystérieuse, symbole de puissance et de vérité. Le siège auguste que l'on vénérait sous les arceaux de l'hypogée Ostrien ne fut pas cependant déplacé. Pierre visitait encore ce berceau de l'église romaine, et, plus d'une fois, sans doute, il y aura exercé les fonctions saintes. Une seconde Chaire, exprimant le même mystère que la première,  fut dressée chez les Cornelii, et cette Chaire a traversé les siècles. Le Christ a voulu que ce signe visible de l'autorité doctrinale de son vicaire eût aussi sa part d'immortalité, cet humble siège a toute une histoire : on le suit de siècle en siècle dans les documents de l'église romaine. Tertullien atteste formellement son existence dans son livre de Praescriptionibus. L'auteur du poème contre Marcion, au troisième siècle, saint Optat de Milève, au quatrième, saint Ennodius de Pavie, au cinquième, le Missel gothico-gallican, au sixième, forment une  chaîne  indestructible  de témoignages  qui certifient la perpétuité de sa conservation.  On sait  par  d'autres  documents, également  sûrs, que saint Damase le plaça dans le baptistère qu'il construisit pour la basilique vaticane, que, durant de longs siècles, il servit à l'intronisation des papes, enfin qu'on l'exposait sur l'autel dans la fête commémorative qui lui était consacrée. Ce jour est désigné sous le nom de Natale Petri de Cathedra, sur le célèbre calendrier du quatrième siècle, qui fait partie de l'almanach de Furius Dionysius Philocalus, conservé à la bibliothèque impériale de Vienne.

 

 En 1663, Alexandre VII renferma la Chaire de saint Pierre dans le colossal et somptueux monument qu'il fit exécuter par le Bernin, et qui décore l'abside de la basilique vaticane. Elle a enfin revu la lumière, par l'ordre de Pie IX, qui dans l'année 1867, centenaire du martyre de saint Pierre, l'a fait exposer aux regards et à la vénération des fidèles.

 

Des idées inexactes s'étaient accréditées sur ce précieux témoin du séjour du prince des apôtres dans Rome. On se souvenait que ce siège était décoré d'ornements en ivoire, et on était incliné à y voir la chaise curule de Pudens, qui en aurait fait hommage à son hôte apostolique. L'étude du monument, accomplie avec autant de respect que de précision, a donné les résultats suivants : La Chaire de saint Pierre était en bois de chêne, ainsi qu'il est aisé d'en juger aujourd'hui par les pièces principales de la charpente primitive, telles que les quatre gros pieds, qui demeurent conservés à leur place, et portent la trace des pieux larcins que les fidèles y ont faits à plusieurs époques, enlevant des éclats pour les conserver comme reliques. La Chaire est munie sur les côtés de deux anneaux où l'on passait des bâtons pour la transporter ; ce qui se rapporte parfaitement au témoignage de saint Ennodius, qui l'appelle sedes gestatoria. Le dossier et les panneaux du siège ont été renouvelés, a une époque postérieure, en bois d'acacia de couleur sombre ; une rangée d'arcades à jour forme ce dossier, et est surmontée d'un tympan triangulaire

de même bois.

 

Des ornements d'ivoire ont été adaptés au devant et au dossier de la Chaire, mais seulement dans les parties qui sont en acacia.  Ceux qui couvrent le panneau de devant sont divisés en trois rangs superposés, contenant chacun six plaques d'ivoire, sur lesquelles ont été gravés divers sujets, entre autres les travaux d'Hercule. Quelques-unes de ces plaques sont posées à faux, et l'on reconnaît aisément que leur emploi a eu lieu dans un but d'ornementation, à l'époque où l'on adaptait les restes de l'antiquité aux objets que l'on voulait décorer, aux châsses de reliques, aux missels, etc., dans les huitième et neuvième siècles. Les ivoires qui décorent le dossier correspondent à son architecture, et semblent fabriqués exprès. Ce sont de longues bandes sculptées en relief, et représentant des combats d'animaux, de centaures et d'hommes. Le centre de la ligne horizontale du tympan est occupé par la figure d'un prince couronné, ayant le globe et le sceptre. Les traits et la tenue annoncent un empereur carlovingien. C'est ainsi que le monument primitif porte jusque dans ses décorations, plus ou moins intelligentes, les témoignages de la vénération des siècles qu'il a traversés.

 

L'apôtre qui présida dans cette Chaire exerçait sa sollicitude non seulement sur Rome, mais sur l'Eglise entière.  Pasteur des brebis et des agneaux de l'immense bergerie qu'il avait ouverte au jour de la Pentecôte à Jérusalem, c'était à lui de pourvoir par les règlements nécessaires à la bonne administration du troupeau. Un de ces règlements eut pour objet la célébration de la Pâque, question  de  la  plus  haute  importance pour  l'entière  émancipation  de  la  gentilité  à l'égard des coutumes juives. Il était aisé de reconnaître que, dans Rome principalement, l'élément israélite, qui avait été d'abord comme le noyau de la population chrétienne, s'effaçait de plus en plus par l'accession continue des gentils au baptême. Ce ne fut, au reste, que la faible minorité chez les juifs, tant à Jérusalem que dans les provinces de l'Empire, qui consentit à reconnaître en Jésus le Messie promis et attendu. Pierre jugea donc que le moment était arrivé de proclamer la scission  profonde qui  séparait pour jamais l'Eglise de la Synagogue.

 

Une fête, la plus solennelle des fêtes, était commune aux juifs et aux chrétiens, mais l'objet en était tout différent, car, en ce jour, les juifs célébraient la sortie d'Israël de l'Egypte, tandis que les chrétiens fêtaient le triomphe du Christ sur la mort. Le même nom désignait cette solennité dans les deux religions, et jusque-là le même jour avait réuni juifs et chrétiens dans la célébration des deux anniversaires, dont le premier ne rappelait qu'un événement de l'histoire d'un peuple isolé, tandis que le second intéressait la race humaine tout entière.

 

Pierre, selon le témoignage de Bède (Hist. eccl. Anglor., lib. III, cap. XXV), statua que l'église de Rome célébrerait désormais la Pâque le dimanche, et que ce dimanche serait toujours celui qui suivrait le quatorzième jour de la lune de mars. Les juifs au contraire avaient et ont toujours leur Pâque le propre jour du quatorze de cette lune, conformément aux prescriptions mosaïques. Jusqu'alors leur pratique avait régné dans le christianisme naissant, et le règlement, sanctionné par Pierre avec une souveraine prudence, fut observé de suite dans tout l'Occident. Il fut même accepté de bonne heure dans la plus grande partie des églises de l'Orient ; mais il rencontra de vives résistances en quelques autres, au sein desquelles un reste d'esprit judaïque vivait encore.

 

En suivant, comme nous le faisons, les progrès de l'Eglise chrétienne, nous avons perdu de vue l'affreux César que Dieu, dans sa colère, laissait dominer sur Rome païenne.

 

DOM GUÉRANGER

SAINTE CÉCILE ET LA SOCIÉTÉ ROMAINE AUX DEUX PREMIERS SIÈCLES (pages109 à 115) 

 

Cecilia

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20 décembre 2010 1 20 /12 /décembre /2010 20:00

Paul avait longtemps désiré voir l'église romaine; il l'avait vue, il l'avait illustrée par son séjour, il l'avait accrue et fortifiée par sa prédication; maintenant, il la quittait pour quelques années; mais il devait revenir pour l'illuminer des derniers rayons de son apostolat, et l'empourprer de son sang glorieux.

 

 L'année 57, qui avait vu Paul comparaître dans le prétoire, vit un autre jugement qui pouvait avoir les suites les plus graves pour celle qui en était l'objet. Pomponia Graecina, ainsi que le rapporte Tacite (Annal., XIII), fut traduite devant le tribunal de famille, pour répondre sur l'accusation d'avoir abandonné la religion de l'Empire et de professer "une superstition étrangère". Les relations de Pomponia, son zèle actif pour répandre la foi chrétienne, avaient fini par donner de l'ombrage aux amis et à certains membres de la parenté. Ce jugement domestique, autorisé par la loi romaine, pouvait se terminer par une sentence capitale décrétée contre la femme accusée. Plautius, mari de Pomponia, auquel appartenait, avec la présidence de ces assises domestiques, la décision souveraine, prononça la sentence d'absolution sur son épouse. La dignité et la grandeur d'âme de la matrone chrétienne avaient vaincu ; mais il n'avait pas été possible à Plautius de soustraire sa femme à cette étrange scène qui tourna à la confusion de ceux qui l'avaient provoquée, et n'eut d'autre suite que d'assurer à Pomponia un plus haut degré d'indépendance et de liberté.

 

 Sa carrière était loin encore d'être épuisée ; car nous savons par Tacite que Pomponia survécut quarante ans à la mort de Julie, qui se rapporte à l'année 43. La divine Providence l'avait destinée à être dans Rome la coadjutrice des apôtres. Au sein de l'Eglise chrétienne, la noble femme portait un nom devant lequel s'effaçait à ses yeux celui des Pomponii : elle était appelée Lucina. Ce cognomen mystérieux n'est point un dérivé féminin de Lucius, qui donnerait Lucia, Luciania ou Lucilla ; il est formé de Lux, Lucis, qui signifie Lumière. Les premiers chrétiens appelaient le baptême  illuminatio,  parce que ce sacrement dissipe les ténèbres de l'homme déchu, et l'établit dans le Christ, qui s'est dit la "Lumière du monde" (JOHAN., VIII.).

 

La conjecture de M. de Rossi, qui avait pressenti l'identité de Lucine et de Pomponia Graecina, a été confirmée jusqu'à l'évidence lorsque, le cimetière de Lucine interrogé conjointement avec celui de Calliste, les marbres funéraires ont répondu que là était la sépulture des Pomponii chrétiens et de leurs alliés. Mais nous reviendrons à loisir sur ces intéressants détails. Le nom de Lucine, sous lequel nous désignerons désormais Pomponia Graecina, fut conservé avec respect dans l'église romaine, et porté successivement par deux autres matrones chrétiennes, dont la première figure au milieu du troisième siècle, et la dernière vivait au temps de la persécution de Dioclétien.

 

 Cependant l'apostolat que Pierre exerçait dans les régions occidentales touchait à sa fin, et l'apôtre devait rentrer dans Rome, pour y fixer son séjour jusqu'à sa mort. Il serait impossible de préciser ici une date avec certitude ; mais il est à croire que les excursions de Pierre dans les régions qui devaient former autour de Rome le patriarcat d'Occident ne durèrent pas moins de quatre à cinq années. Dans la fondation des nouvelles églises, Pierre était à même d'employer l'expérience qu'il avait acquise en Orient, et, de retour à Rome, il ne perdit jamais de vue ces immenses provinces, qui étaient devenues comme l'apanage du premier siège. Les traditions très respectables de plusieurs églises, particulièrement dans les Gaules, attestent qu'il donna lui-même de Rome la mission à plusieurs des prédicateurs de l'Evangile qu'elles honorent comme leurs fondateurs.

 

 Quant aux deux représentants de l'autorité de Pierre à Alexandrie et à Antioche, l'apôtre dut apprendre vers l'époque de son retour à Rome que son fidèle Marc, après de longs et fructueux travaux, avait succombé sous les coups des païens d'Alexandrie, dans une fête de Sérapis. Cet événement eut lieu, au rapport d'Eusèbe dans sa Chronique, en la septième année de Néron, qui correspond à l'an 62. Anien remplaça Marc sur le second siège de la chrétienté. Vers le même temps,  l'église  d'Antioche  perdait  son  évêque Evodius,  auquel succéda le grand Ignace, qui figurera dans nos récits.

 

 A Rome, Linus eut à présenter aux regards de Pierre les nouvelles conquêtes de l'Eglise au sein de Babylone. Paul aussi n'avait pas travaillé en vain, et son apostolat, sous ses diverses formes, n'avait pas été moins fécond. Pierre jugea à propos, pour accroître encore le progrès des conversions, de soulager Linus en lui donnant un collègue, revêtu comme lui du caractère épiscopal. Il imposa donc les mains à un autre de ses disciples, nommé Cletus.

 

Ce nouveau vicaire était Romain, et avait vu le jour dans le vicus Patricius, quartier situé dans la vallée qui réunit l'Esquilin au Viminal, et habité de tout temps par les principales familles de l'aristocratie romaine. Le Liber pontificalis nous apprend que le père de Cletus appartenait à la gens Aemilia. Un monument de l'an 70, que nous mentionnons plus loin, offre les noms de sept Aemilii, qui avaient à ce moment leur habitation dans la région où se trouvait le vicus Patricius. Mais les Aemilii n'étaient pas seulement voisins de Cornélius Pudens ; ce cognomen Pudens semble avoir été, sous les empereurs, usité principalement dans les deux familles Cornelia et Aemilia, qui s'étaient unies étroitement, sous la république, dans les familles de Paul Emile et de Scipion l'Africain. On cite plusieurs personnages du nom d' Aemilius Pudens rappelés dans les auteurs de l'antiquité ; mais ce qui nous intéresse plus encore est un marbre chrétien découvert au cimetière de Lucine par M. de Rossi, et portant le nom d'Aemilia Pudentilla. L'inscription se rapporte au commencement du quatrième siècle, et elle rappelle tout naturellement celle dont nous avons parlé plus haut, trouvée aussi dans les catacombes de la voie Appienne, et sur laquelle se lit le nom d'une Cornelia Pudentianes. Il n'est pas hors de propos d'ajouter qu'on trouve dans Gruter un Aemilius Pudens  érigeant un  monument à son jeune fils Aemilius Pudentianus ; et comme il nous est, pour ainsi dire, impossible de remuer ces grands noms de l'ancienne Rome sans faire surgir un Caecilius, on nous permettra de rappeler ici, au troisième siècle de notre ère, Q. Caecilius Pudens, légat de Germanie (Steiner, Inscript, provinc. Rheni et Danub.).

 

L'origine du nouveau vicaire que Pierre s'était donné ne manquait donc pas d'illustration. Quant au nom de Cletus par lequel il est désigné dans les fastes de l'Eglise, il n'y a nulle difficulté d'y voir un cognomen chrétien, sous lequel il était connu dans l'Eglise, ainsi que nous venons d'en donner un exemple au sujet de Pomponia Graecina. Le mot grec cletos, latinisé cletus, signifiait vocatus, appelé : c'est un des noms par lesquels saint Paul désigne les chrétiens.

 

Les rapports de voisinage et de parenté entre les Cornelii et les Emilii expliquent aisément comment plusieurs d'entre eux ont pu se trouver unis de pensée et de sentiment à l'égard du christianisme. Depuis la conversion de Cornélius, l'événement de Césarée planait, pour ainsi dire, sur le Viminal, et c'est dans ce noble quartier que le christianisme était venu s'abattre sur la gentilité. La domus Pudentiana était désormais l'asile préféré de Pierre. Là il recevait les soins hospitaliers de Pudens et de Priscille, et leur fils grandissait à l'ombre de l'apôtre.

 

Leurs protégés, Aquila et Priscille, dont nous avons signalé le séjour dans la maison de l'Aventin, après le retour de Corinthe, ne terminèrent pas leurs jours à Rome. Nous voyons par la deuxième Epître de Paul à Timothée qu'ils étaient à Ephèse en l'année 67, qui fut celle du martyre de saint Pierre et de saint Paul, et les documents sur lesquels s'appuie leur histoire donnent lieu de penser qu'ils achevèrent leur carrière en Orient.

 

DOM GUÉRANGER

SAINTE CÉCILE ET LA SOCIÉTÉ ROMAINE AUX DEUX PREMIERS SIÈCLES (pages 102 à 108) 

 

Cecilia

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16 décembre 2010 4 16 /12 /décembre /2010 20:00

Après deux ans environ de captivité, vers la fin de l'année 57, on accorda enfin à Paul l’audience à laquelle lui donnait droit l'appel qu'il avait interjeté à César.

 

 Il comparut au prétoire, et il atteste lui-même, dans son Epître aux Philippiens, que sa présence produisit une véritable sensation. (Phil., 1.) Burrhus était à ce moment préfet du prétoire, et les consuls assistaient en personne aux audiences de cette nature. M. de Rossi a démontré, d'après un monument des frères Arvales, que Sénèque était consul durant le dernier semestre de l'année 37. Le philosophe fut donc à portée de connaître et d'entendre l'apôtre. Celui-ci, dans le prétoire, comme autrefois à Athènes dans l'aréopage, sut trouver des accents dignes de sa cause, et de nature à faire impression sur un éclectique du genre de Sénèque. Le nom de Paul pouvait être déjà connu du philosophe par ses relations avec son frère Gallion, proconsul d'Achaïe, devant lequel nous avons vu qu'une émeute de juifs à Corinthe avait entraîné l'apôtre.

 

 Le succès du plaidoyer de Paul dans le prétoire amena son acquittement, et l'apôtre, débarrassé de ses liens, put se livrer, avec plus d'aisance encore, à la prédication de l'Evangile. La persuasion assez générale a été, dans la haute antiquité chrétienne, que Paul et Sénèque ont eu ensemble des relations au dehors du prétoire. On ne saurait, il est vrai, apporter en preuve la correspondance de l'un et de l'autre qui avait cours au quatrième siècle, et qui fait partie du cycle des apocryphes chrétiens ; mais il faut avouer en même temps que ces relations entre l'apôtre et le philosophe ont leur vraisemblance, lorsque, sans appuyer davantage sur la rumeur si ancienne qui les atteste, on rencontre dans les écrits de Sénèque un nombre si considérable de passages reproduisant les textes mêmes des livres juifs et chrétiens, et quelquefois jusqu'aux propres paroles des Epîtres de Paul. Ces emprunts, qui ont fait dire à Tertullien, dans son livre de Anima, ce mot significatif : Seneca saepe noster, ne sauraient tous s'expliquer par la lecture assidue que Sénèque avait faite des philosophes, chez lesquels on rencontre parfois des passages empreints de spiritualisme et d'une morale pure, à côté d'autres sentences qui les neutralisent. Les traits de Sénèque auxquels nous faisons allusion retracent trop expressément le style employé dans les saintes écritures chrétiennes pour qu'il soit possible de n'y voir que des centons de Cicéron et autres moralistes, grecs ou latins, qui n'ont ni cette allure ni cette couleur.

 

Personne ne songe à revendiquer Sénèque pour le christianisme ; ce que l'on peut dire seulement sans invraisemblance, c'est qu'il aurait reconnu dans le juif Paul un homme avec lequel on pouvait, sans déroger, lier quelques relations, et en cela Sénèque aurait imité bon nombre de personnes de distinction qui, ainsi qu'on a pu le remarquer, goûtaient les entretiens de l'apôtre.

 

 Que ces rapports aient amené Sénèque à lire nos livres sacrés, avec assez de soin pour en extraire certains passages qu'il encadre dans ses écrits, sans en indiquer la provenance, rien n'a lieu d'étonner, et d'autant moins, que le philosophe n'a pas coutume d'indiquer les sources où il puise ses sentences de morale, trop souvent contradictoires. Nous laissons donc bien volontiers au stoïcisme le philosophe qui, avec son ami Burrhus, eut le courage de faire, en plein sénat, l'apologie du meurtre d'Agrippine par Néron, leur élève, et qui ensuite eut le lâche orgueil de s'ouvrir les veines sur l'ordre de César. Nous tenons seulement à prendre acte d'un fait qui fournit une nouvelle preuve de l'attention que la société romaine portait de plus en plus au christianisme.

 

 La famille Annea, à laquelle appartenait Sénèque, semble avoir eu dans la suite quelques membres agrégés à l'Eglise chrétienne, si c'est à cette gens qu'il faut attribuer un marbre du commencement du troisième siècle, découvert à Ostie en 1867. L'inscription funéraire, publiée par M. de Rossi, est ainsi conçue :

 D. M.

M. ANNEO

PAVLO PETRO

M. ANNEVS PAVLVS

FILIO CARISSMO

 

 On voit ici un personnage nommé M. Anneus Paulus, et son fils appelé M. Anneus Paulus Petrus. Le surnom de Paulus, que portent à la fois le père et le fils, ne déciderait rien à lui seul ; mais le cognomen surajouté de Petrus, nom entièrement inconnu dans l'épigraphe latine, annonce visiblement une intention chrétienne, et semble même donner un sens à l'emploi du surnom de Paulus. Ne serait-ce pas le vestige d'une tradition de famille chez les Annei, selon laquelle leur aïeul aurait eu des rapports avec l'apôtre Paul ?

 

Nous avons dit que Paul avait annoncé son acquittement aux Philippiens. Auparavant, durant le cours de sa captivité, il écrivit aux Ephésiens et aux Colossiens. C'est aussi à la même époque qu'il faut placer la lettre si touchante à Philémon, en faveur de l'esclave Onésime. L'Epître aux Hébreux, qui se termine par une salutation au nom des frères "qui sont en Italie", se rapporte également au séjour de l'apôtre dans Rome. Son ardeur pour l'extension de la foi chrétienne ne lui permettait pas d'oublier, au milieu de ses labeurs dans la capitale de l'Empire, ces chères églises de l'Asie et de la Grèce, qu'il avait fondées avec tant d'efforts et au prix de tant d'épreuves. Il lui tardait de les revoir. Avant de repartir pour l'Orient, visita-t-il l'Espagne, comme il en avait annoncé l'intention ? Plusieurs écrivains de l'antiquité l'affirment ; il est néanmoins étonnant que pas une des églises d'Espagne n'ait revendiqué l'honneur d'avoir été fondée par l'apôtre des gentils.

 

Quoi qu'il en soit, Paul ne dut pas beaucoup tarder à retourner en Orient. Nous l'y retrouvons occupé aux travaux apostoliques dans cette dernière période de sa vie si laborieuse. Il remplit les promesses qu'il avait faites durant sa captivité, en visitant de nouveau Colosses et même Ephèse, où il établit évêque son disciple Timothée. Il évangélisa la Crète, où il laissa son disciple Tite pour pasteur, le chargeant d'organiser l'église dans cette île.

 

Paul avait longtemps désiré voir l'église romaine ; il l'avait vue, il l'avait illustrée par son séjour, il l'avait accrue et fortifiée par sa prédication ; maintenant, il la quittait pour quelques années ; mais il devait revenir pour l'illuminer des derniers rayons de son apostolat, et l'empourprer de son sang glorieux.

 

DOM GUÉRANGER

SAINTE CÉCILE ET LA SOCIÉTÉ ROMAINE AUX DEUX PREMIERS SIÈCLES (pages 97 à 101) 

 

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15 décembre 2010 3 15 /12 /décembre /2010 20:00

Pierre n'était point rentré dans Rome pour y jouir d'une résidence tranquille, et ce ne fut qu'après avoir consacré ainsi à la prédication plusieurs années qu'il revit cette ville, où devait se terminer sa glorieuse carrière.

 

 Nous avons laissé Paul à Césarée, où le gouverneur Félix continuait à le retenir en captivité, l'entourant d'ailleurs de considération ; mais pardessus tout il craignait d'irriter les juifs en le rendant à la liberté. En 55, Félix eut pour successeur Portius Festus, devant lequel Paul ne tarda pas à être poursuivi par ses ennemis. L'apôtre voyant que Festus, pour en finir, parlait déjà de l'envoyer à Jérusalem, forma appel à César. Cette démarche de Paul le conduisait naturellement à Rome, où son zèle l'appelait depuis si longtemps : Dieu avait dirigé toutes choses.

 

Festus, afin de se débarrasser des clameurs des juifs, fit accélérer le départ de Paul pour l'Italie. Ce départ cependant ne fut pas tellement précipité, que l'apôtre n'eût l'occasion de rendre raison de sa foi et de sa mission devant le roi Agrippa et sa sœur Julia Bérénice, qui, étant venus à Césarée, l'entendirent avec une sorte d'intérêt.

 

 Paul, ayant été placé sous la garde d'un centurion nommé Julius, prit la mer vers la fin de l'été, avec ses disciples Luc et Aristarque. Après une longue et périlleuse navigation, il aborda en Italie au commencement de l'année 56. Des chrétiens de Rome, instruits de son arrivée, allèrent au-devant de lui jusqu'au Forum d'Appius, ville située sur la voie Appienne, à quarante-trois milles de Rome, et d'autres seulement jusqu'au lieu appelé Tres tabernae, qui n'en était qu'à trente-trois milles. Enfin l'apôtre des gentils fit son entrée dans Rome. L'appareil d'un triomphateur ne l'entourait pas : c'était un humble prisonnier juif que l'on conduisait au dépôt où s'entassaient les prévenus qui avaient appelé à César. Mais Paul était ce juif qui avait eu le Christ lui-même pour conquérant sur le chemin de Damas.

 

Il n'était pas Saul le Benjamite ; il se présentait sous le nom romain de Paul, et ce nom n'était pas un larcin chez celui qui, après Pierre, devait être la seconde gloire de Rome et le second gage de son immortalité. Il n'apportait pas avec lui, comme Pierre, la primauté que le Christ n'avait confiée qu'à un seul ; mais il venait rattacher au centre même de l'évangélisation des gentils la délégation divine qu'il avait reçue en leur faveur, comme un affluent verse ses eaux dans le cours du fleuve qui les confond avec les siennes et les entraîne à l'océan. Paul ne devait pas avoir de successeur dans sa mission extraordinaire ; mais l'élément qu'il venait déposer dans l'église mère et maîtresse représentait une telle valeur, que, dans tous les siècles, on entendra les pontifes romains, héritiers du pouvoir monarchique de Pierre, faire appel encore à un autre souvenir, et commander au nom des "bienheureux apôtres Pierre et Paul".

 

Une bienveillance particulière accueillit Paul à son arrivée, sans doute par l'influence du centurion Jules, qui lui avait dû son salut, ainsi que tout l'équipage du navire de traversée, lorsqu'une tempête après les avoir longtemps ballottés, les avait fait échouer à Malte. Au lieu d'attendre en prison le jour où sa cause serait appelée, l'apôtre eût la liberté de louer un logement dans la ville, obligé seulement d'avoir jour et nuit la compagnie d'un soldat représentant la force publique, et auquel, selon l'usage en pareil cas, il était lié par une chaîne qui l'empêchait de fuir, mais laissait libre tous ses mouvements. Hérode Agrippa avait subi ce mode d'emprisonnement, qu'on appelait custodia militaris, durant les six derniers mois de Tibère. On montre à Rome, dans l'église Sainte-Marie in via Lata, l'emplacement de l’hospitium qu'habita l'apôtre. Une colonne de marbre de laquelle pend une grosse chaîne et sur laquelle sont gravées ces paroles de Paul : Verbum Dei non est alligalum, est le symbole de la captivité qu'il subit en ce lieu ; mais elle n'a pas pour intention d'exprimer que l'apôtre aurait été enchaîné à la manière dont les malfaiteurs l'étaient dans leurs cachots. Le récit de saint Luc est formel pour exclure cette interprétation.

 

Paul passa deux ans dans le genre de captivité que nous venons de décrire, et il y jouit d'une assez grande liberté pour annoncer la parole de Dieu. Dès le troisième jour, il trouva moyen d'appeler auprès de lui les principaux d'entre les juifs de Rome. Il leur déclara la situation, et leur raconta comment les mauvais traitements qu'il avait à craindre des juifs de Palestine l'avaient contraint d'appeler à César pour se tirer de leurs mains, ajoutant que, si en ce moment encore il portait une chaîne, c'était pour "l'espérance d'Israël",  c'est-à-dire pour le Messie, qu'il la portait. Les juifs lui répondirent avec plus ou moins de franchise qu'ils n'avaient reçu de Jérusalem aucun mauvais renseignement sur lui ; mais que la secte à laquelle sans doute il appartenait était de toutes parts l'objet d'une vive opposition.

 

Paul prit jour avec eux pour une discussion sérieuse. Ils vinrent et, après l'avoir entendu, ils furent partagés de sentiments ; les uns se montrant favorables à l'interprétation que l'apôtre donnait des prophéties, les autres refusant de reconnaître en Jésus de Nazareth les caractères du Messie attendu d'Israël. Paul termina l'entretien en déclarant que le salut envoyé de Dieu était aussi pour les gentils et que les gentils l'accepteraient. Les juifs se retirèrent divisés d'opinion. Pour Paul, ce n'était là qu'un prélude à sa carrière apostolique dans Rome. Saint Luc nous apprend qu'il fut visité dans sa retraite par un grand nombre de personnes, et qu'il avait la liberté d'admettre tous ceux qui se présentaient, annonçant le Christ avec assurance et sans éprouver la moindre entrave.

 

 Les chrétiens sortis de la gentilité devaient avoir à cœur d'approcher d'un apôtre si célèbre déjà dans toute l'Eglise. Nul d'entre eux n'ignorait que Paul était l'auteur de cette Epître adressée avec tant d'autorité aux chrétiens de Rome, durant l'absence de Pierre. Ses autres Epîtres circulaient partout ; son éloquence et la dignité de son caractère étaient le bien commun de tous les fidèles, il est donc naturel de penser que les chrétiens illustres  qui  nous  sont déjà connus furent des premiers à venir saluer Paul à son arrivée. Nous verrons plus loin qu'il ne fut pas sans relations directes avec les Flavii.

 

En attendant, le récit de saint Luc nous le montre comme ayant joui dans sa retraite d'une complète liberté quant à l'accès des personnes qui voulaient traiter avec lui, et toute l'histoire de Paul montre que sa parole, ardente et vive, avait un entraînement particulier. Si la lassitude du  polythéisme,  le dégoût de la philosophie, le désir d'une vie plus élevée,  avaient entraîné précédemment un nombre assez notable de personnes du plus haut rang à s'agréger au judaïsme en qualité de prosélytes, doit-on s'étonner que les mêmes tendances en aient attiré d'autres, et en plus grand nombre, vers le christianisme, qui donnait la plénitude d'une doctrine dont le mosaïsme ne fournissait que l'ébauche, et qui n'exigeait point la pratique minutieuse et gênante des rites juifs, auxquels étaient astreints les vrais prosélytes ?

 

 Un mot de Paul, dans l'Epître qu'il écrivit de Rome aux Philippiens, éclaire jusqu'à un certain point l'étendue de ses conquêtes durant son séjour dans la capitale de l'Empire. Assurément, sa règle de conduite fut toujours celle qu'il a énoncée dans l'Epître aux Romains  : "Je me dois à tous : aux esprits cultivés comme aux ignorants" ; mais il n'est pas permis de laisser passer, sans les avoir remarquées, ces paroles qu'il adresse aux chrétiens de Philippes : "Tous les fidèles vous saluent, et particulièrement ceux qui sont de la maison de César". Il est visible que Paul veut donner ici une idée du progrès que l'Evangile faisait à Rome dans la classe la plus élevée. Si les chrétiens de la maison de César, dont il est ici question, eussent été simplement des employés d'un rang inférieur, il est à croire que Paul n'en eût pas fait cette mention spéciale : on connaît assez la sainte fierté de son caractère. Sans remonter non plus jusqu'aux premières dignités de la cour de Néron, on est en droit d'entendre ces paroles de certains officiers qui occupaient dans cette cour un rang important et remplissaient des services supérieurs.

 

Il n'est pas hors de propos de noter ici, d'après Tacite, que Flavius Sabinus, gendre de Pomponia Graecina, avait été élevé par Néron à la charge de préfet de Rome, vers l'année 56. Nous relèverons plus loin les raisons qui ont donné lieu de penser qu'il aurait professé le christianisme, comme tant d'autres membres de sa famille. En ce cas, on aurait peut-être lieu de le compter parmi ces chrétiens qui approchaient de César.

 

Après deux ans environ de captivité, vers la fin de l'année 57, on accorda enfin à Paul l’audience à laquelle lui donnait droit l'appel qu'il avait interjeté à César.

 

DOM GUÉRANGER

SAINTE CÉCILE ET LA SOCIÉTÉ ROMAINE AUX DEUX PREMIERS SIÈCLES (pages 91 à 96) 

 

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14 décembre 2010 2 14 /12 /décembre /2010 20:00

Durant l'absence de Pierre, l'heureuse famille de Cornelius avait été favorisée de la fécondité, et les parents purent présenter aux bénédictions du prince des apôtres un jeune Pudens, que nous ne tarderons pas à faire connaître.

 

 Pomponia Grsecina, toujours protégée par son deuil, auquel elle devait une si heureuse indépendance, revit avec bonheur le père de la chrétienté, et elle eut à lui rendre compte des résultats de ce zèle qui l'anima toute sa vie, et qui fut au moment de lui procurer la couronne du martyre. Nous avons dit quel intérêt elle portait, ainsi que son mari Plautius, à la récente famille des Flavii. Un instinct supérieur semblait lui avoir révélé les destinées étonnantes de cette race, et elle la convoitait pour le Christ. On ne peut voir qu'avec étonnement et admiration les dévouements qui s'y produisirent lorsque l'heure de confesser la foi fut arrivée.

 

 Ce fut en l'année 47 que Plautius revint victorieux de l'expédition de Bretagne, ramenant avec lui les trois Flavii qui avaient combattu sous ses ordres. Titus Flavius Sabinus, l'aîné de Vespasien, d'un caractère rempli de douceur et peu porté à l'ambition, ne tarda pas à recevoir la plus grande marque d'estime de Plautius et de Pomponia. Ils accordèrent en mariage à cet homme nouveau leur propre fille Plautia. On a toute raison de penser que l'influence de sa mère dut ouvrir tôt ou tard à Plautia la porte du christianisme. Quoi qu'il en soit, sa fille Plautilla nous apparaîtra bientôt au nombre des disciples les plus fervents de l'apôtre des gentils.

 

 Pour Vespasien, il épousa une Flavia Domitilla, qui n'est pas autrement connue, à moins qu'elle n'ait appartenu, par sa mère, à la famille Domitia, qui avait eu le triste honneur de produire Néron. Vespasien eut de cette Domitilla, outre ses deux fils Titus et Domitien, une fille appelée comme sa mère, et qui elle-même eut pour fille la troisième Flavia Domitilla, que nous verrons plus tard exilée pour la foi. Il serait difficile de ne pas reconnaître dans la conversion de cette dernière l'action de la zélée chrétienne à laquelle Plautilla dut l'avantage de connaître le Christ.

 

 Une jeune fille qui tenait aussi à la famille Flavia fut l'objet d'un tendre intérêt de la part de Pomponia Graecina. Elle se nommait Petronilla, et sa protectrice la mit en rapport avec Pierre. Au moyen âge, on alla jusqu'à voir en elle la propre fille de l'apôtre, qui était marié lorsque le Sauveur l'appela à sa suite. Le nom de Petronilla, qui dérive tout naturellement de celui de Flavius Petro, souche des Flavii (Petro, Petronius, Petronilla), était regardé par les naïfs légendaires de ces temps comme formé de celui de Petrus.

 

 Les Actes des saints Nérée et Achillée racontent que Petronilla fut initiée à la foi chrétienne par saint Pierre lui-même, et qu'elle fut de sa part l'objet des soins les plus paternels. Sans admettre tous les détails que renferme ce document trop tardivement rédigé, on en peut extraire les notions qui s'encadrent avec l'ensemble des faits que nous racontons, et rien n'oblige à repousser la tradition si antique qui attribue à Petronilla l'honneur d'avoir été la première des vierges chrétiennes dans l'église de Rome. Les Actes nous disent que, pour rester fidèle au Christ, elle refusa l'alliance d'un chevalier romain nommé Flaccus. Ce Flaccus ne serait-il pas le fils de Pomponius Flaccus Graccinus, que nous voyons consul en l'an 17, avec C. Caecilius Rufus, et le cousin de Pomponia Graecina ? Etant à même de rencontrer les Flavii dans la société de la noble femme, il est possible que l'alliance de Plautia avec Flavius Sabinus ait déterminé le jeune Romain à songer aussi à une Flavia ; cette conjecture n'offre rien que de vraisemblable, si l'on tient compte de l'intimité que le mariage de Plautia dut accroître encore entre les deux familles.

 

 Quoi qu'il en soit, nous savons que le sarcophage de Petronilla reposa jusqu'au huitième siècle dans une salle particulière du cimetière de Flavia Domitilla, qui fut la catacombe des Flavii chrétiens, et que l'inscription funéraire portait ces mots : 

 AVRELIAE PETRONILLAE FILIAE DVLCISSIMAE

 

L'importance de cette sépulture fut telle, que la région du cimetière de la voie Ardéatine, où elle se trouvait, est plusieurs fois appelée Ad sanctam Petronillam, sur les anciens documents de Rome souterraine. Vers l'an 760, le pape saint Paul Ier transféra le corps de la vierge et le sarcophage lui-même dans la chapelle de Sainte-Pétronille, attenante à la basilique vaticane. Sixte IV, dans un bref à Louis XI, publié par dom Martène, atteste l'existence du sarcophage dans ce sanctuaire, probablement sous l'autel, et nous apprend que son couvercle était orné de quatre dauphins.

 

Les détails que nous venons de donner sur la circulation du christianisme dans les familles influentes de Rome donnent légitimement à penser que ce mouvement ne devait pas se borner aux quelques personnes dont nous pouvons encore aujourd'hui assigner le rôle ; la suite de nos récits le montrera d'ailleurs suffisamment. Le retour de Pierre allait puissamment avancer la propagation de l'Evangile au sein d'une population qui était un composé de l'humanité tout entière ; mais avant de s'asseoir d'une manière stable dans ce centre de l'Empire et de l'Eglise, l'apôtre se sentait un devoir à remplir. Durant de longues années, l'Orient avait entendu sa voix ; il était juste que les provinces de l'Occident connussent à leur tour le vieillard sur lequel le Christ avait  édifié  son  Eglise.

 

Avant  d'ouvrir le cours de ses pérégrinations, Pierre voulut se constituer un vicaire dans Rome, et il imposa les mains à Linus, comme au plus digne de ses coopérateurs, comme à celui dont les travaux passés et l'influence méritaient le mieux ce poste de confiance. Nous savons, par l'ancien catalogue des papes, dont la première partie remonte au troisième siècle, mais dont le texte, tel que nous l'avons sur un manuscrit du quatrième, a malheureusement souffert, la date de la consécration épiscopale de Linus. Elle eut lieu sous le consulat de Q. Volusius Saturninus et de P. Cornélius Scipion : ce qui donne l'année 56. Cette date, mal comprise par un copiste du catalogue, lui a fait attribuer douze années de pontificat à Linus, qui ne fit que passer sur la Chaire de saint Pierre ; tandis qu'il n'eût fallu voir dans ces consulats de l'an 56 que l'indication du commencement de l'épiscopat du vicaire Linus, durant lequel le prince des apôtres continuait le cours de son pontificat.

 

Ayant ainsi pourvu au service du troupeau, Pierre commença son apostolat dans nos régions. Plusieurs villes de l'Italie entendirent d'abord sa parole ; puis il franchit les Alpes, et pénétra dans les Gaules. Le vénérable Bède, un biographe grec du huitième siècle reproduit par les Bollandistes, un auteur syriaque du sixième publié par le cardinal Maï, nous montrent l'apôtre évangélisant jusqu'à la Grande-Bretagne, qui depuis l'expédition de Plautius était devenue d'un accès facile comme toute autre province de l'Empire. L'Espagne le vit aussi, et il est probable qu'avant de rentrer à Rome il visita la côte d'Afrique, en sorte que tout ce qui devait former le patriarcat d'Occident aurait été parcouru et sanctifié par les pas de celui qui, comme dit Eusèbe, au deuxième livre de son Histoire, "étant le vaillant chef de la milice divine, couvert de l'armure céleste, était venu apporter de l'Orient à ceux qui habitaient vers le Couchant la lumière précieuse des intelligences ."

 

Expérimenté dans la carrière apostolique, Pierre dut procéder dans nos contrées comme il l'avait fait en Orient, s'arrêtant plus ou moins longtemps dans certaines villes, demeurant peu de temps dans quelques-unes, et évangélisant les autres localités par ses disciples. Ce labeur était l'œuvre apostolique, et sa qualité de chef suprême n'en dispensa l'apôtre ni en Orient ni en Occident.

 

Pierre n'était point rentré dans Rome pour y jouir d'une résidence tranquille, et ce ne fut qu'après avoir consacré ainsi à la prédication plusieurs années qu'il revit cette ville, où devait se terminer sa glorieuse carrière.

 

DOM GUÉRANGER

SAINTE CÉCILE ET LA SOCIÉTÉ ROMAINE AUX DEUX PREMIERS SIÈCLES (pages 85 à 90) 

 

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13 décembre 2010 1 13 /12 /décembre /2010 20:00

La nuit suivante, le Christ apparut à Paul, et lui dit : " Sois ferme ; car il te faudra rendre de moi à Rome le même témoignage que tu me rends en ce moment à Jérusalem."

 

 Cependant la conjuration juive formée contre la vie de l'apôtre allait éclater, lorsque Lysias, averti à temps, le fit partir, sous une forte escorte, pour Césarée, où il le renvoyait par-devant Félix, gouverneur de la Judée. Félix était le frère de l'affranchi Pallas, affranchi lui-même, et comblé des faveurs de Claude. Il avait épousé Drusilla, sœur des princesses Marianne et Bérénice.

 

 Félix reçut Paul avec intérêt, et ne dédaigna pas d'avoir avec lui de fréquentes conférences. Drusilla, qui était juive, autant que pouvait être juive une fille d'Hérode Agrippa, rechercha aussi avec l'apôtre des entretiens intimes. Elle voulut l'entendre parler du Christ et de sa doctrine ; mais ces relations furent stériles, et la malheureuse femme, après une vie peu honorable, périt en l'an 79, dans la célèbre éruption du Vésuve, avec un fils qu'elle avait eu de Félix. Saint Luc rapporte que Paul parlant un jour devant Félix de la justice, de la chasteté et du jugement à venir, le gouverneur fut saisi de terreur, et renvoya l'apôtre en lui disant : "Maintenant, retire-toi ; je te manderai quand il sera temps". Quant à la cause de Paul, Félix avait été à même de reconnaître, par les débats qui avaient eu lieu en sa présence, que l'agitation de la Synagogue contre l'apôtre ne se calmerait pas de longtemps. Il le retint prisonnier à Césarée, où Paul demeura sous la garde de la puissance publique.

 

 Nous apprenons du livre des Actes qu'un certain motif de cupidité n'était pas étranger non plus aux égards que Félix témoignait à son prisonnier, espérant qu'un jour ou l'autre les amis de celui-ci présenteraient une riche offrande pour sa rançon.

 

 La captivité de Paul à Césarée durait encore, lorsque la mort de Claude, en l'année 54, ouvrit à Néron l'accès du trône impérial. Les débuts de l'élève de Burrhus et de Sénèque semblèrent promettre à l'Empire un prince destiné à faire oublier par ses qualités les détestables Césars qui l'avaient précédé ; mais le fils d'Agrippine ne devait pas tarder à démentir les espérances qu'avaient fait concevoir ses premiers jours. En attendant, la mort de Claude faisait tomber les édits arbitraires et tyranniques que son caprice avait produit ou qui avaient été arrachés à son imbécillité. Celui de l'année 47, qui bannissait de Rome les juifs, était déjà plus ou moins oblitéré, et il est aisé de constater par les faits qu'il ne survécut pas à son auteur. Le moment était donc favorable pour le retour de Pierre à Rome, dont il avait été absent, huit années entières.

 

 Durant ce long intervalle l'apôtre, que nous avons vu présider l'assemblée de Jérusalem dès les premiers temps qui suivirent son départ de Rome, semble avoir eu pour quartier général la ville d'Antioche, où d'abord il avait établi sa résidence après le baptême de Cornélius. De là Pierre, désirant remplir à la lettre le précepte du Sauveur, paraît avoir rayonné dans les provinces d'Asie qu'il avait déjà évangélisées avant son départ pour Rome ; il y fonda de nouvelles églises et confirma les anciennes. Cette action du prince des apôtres fut si efficace dans les contrées dont nous parlons,  que les païens eux-mêmes la constatèrent ; témoin Lucien, dans son Pseudomantis, qui atteste, au deuxième siècle, que le Pont est rempli d'athées et de chrétiens. Ce n'est pas la dernière fois que l'on voit les chrétiens confondus avec les athées, les gentils ne pouvant pas autrement se rendre compte de l'abstention des chrétiens à l'égard du culte des dieux et des déesses. Pline le Jeune, dans sa lettre à Trajan, attestait déjà que la Bithynie était remplie de chrétiens.

 

Il serait impossible de déterminer avec certitude les autres régions que Pierre évangélisa dans le cours de cette période ; mais nous savons par une lettre du pape saint Agapet (535) qu'il fonda des églises dans la Thrace. Enfin le moment arriva où il dut songer à revoir les contrées de l'Occident. Rome en particulier avait besoin de lui. Pierre apprenait que l'ivraie était semée dans le champ qu'il avait cultivé. L'hérésiarque Simon le Mage, qu'autrefois il avait confondu à Samarie, et qui, en diverses circonstances, s'était attaché à ses pas, après avoir essayé de répandre ses impies systèmes et ses pratiques impures dans les chrétientés de l'Orient, venait d'aborder à Rome. Son but était d'y faire des prosélytes à son hérésie, qui réunissait en faisceau un christianisme tronqué, un débris de la mythologie grecque, avec les rêveries panthéistiques de l'Orient. Plus tard, ces éléments se condensèrent, et formèrent la prétendue gnose, qui couvrit tant d'ignobles mystères. Simon avait tout préparé, et il se promettait, en employant quelques termes chrétiens et en flattant la curiosité superstitieuse par l'appât d'initiations secrètes, d'attirer à sa suite un nombre plus ou moins grand des disciples de Pierre, dont il se posait comme le rival. Pierre ne voulait être que le vicaire du Christ : Simon se donnait pour la vertu même de Dieu. Pierre venait purifier les mœurs du genre humain, en relevant la famille et en faisant revivre la dignité de la femme : Simon traînait après lui sa prostituée Hélène, à laquelle il faisait rendre, comme à lui-même, les honneurs divins. Au reste, il avait plus d'une ressource : indépendamment de l'appel qu'il faisait aux passions honteuses, les sciences occultes lui étaient familières. Dès longtemps les esprits infernaux le trompaient, en secondant ses désirs pervers ; mais le jour devait venir où il serait trahi par eux sous les yeux mêmes de Pierre.

 

En attendant, la majesté de l'apôtre, l'énergie divine qu'il avait reçue en sa qualité de pêcheur d'hommes, la pureté et la sagesse de son enseignement neutralisèrent les résultats que le faux apostolat de Simon avait pu produire, et s'il parvint à séduire quelques chrétiens, c'est qu'ils étaient de ceux dont parle saint Jean, qui montrent assez par leur défection "qu'ils n'étaient pas des nôtres". (I Johan., II.)

 

Pierre put se réjouir, en rentrant à Rome, de l'avancement de son œuvre dans cette immense ville. Si la renommée de la foi romaine avait retenti déjà aux oreilles de Paul, la réalité qui frappa les regards de Pierre lui révéla mieux encore la vigueur que l'Esprit-Saint conférait toujours plus à cette nouvelle église, appelée à être le centre de toutes les autres. Sur la partie juive,  Aquila et Priscille étaient en mesure de le renseigner et de lui faire connaître les nouvelles conquêtes au sein d'Israël. Ils purent lui dire que la lettre de Paul avait amené la pacification entre les deux peuples, en rappelant à tout chrétien, de quelque origine qu'il fût, l'humilité envers  Dieu et le  devoir de  la charité envers des frères également redevables de leur adoption à la miséricorde céleste.

 

Quant à la nombreuse fraction de l'église romaine appartenant d'origine à la gentilité,  le nom de Cornélius continuait d'être sa gloire. La joie de Pudens et de la noble Priscille dut être au comble, lorsqu'ils eurent de nouveau à exercer l'hospitalité envers l'envoyé du ciel. Il est indubitable qu'à son second séjour de Rome, Pierre fixa son domicile permanent au Viminal. Le quartier juif du Transtévère, où s'étaient élevées les agitations qui avaient amené l'édit de Claude, n'offrait pas à l'apôtre la sécurité qu'il trouvait dans le centre aristocratique de Rome.

 

Durant son absence, l'heureuse famille de Cornelius avait été favorisée de la fécondité, et les parents purent présenter aux bénédictions du prince des apôtres un jeune Pudens, que nous ne tarderons pas à faire connaître.

 

DOM GUÉRANGER

SAINTE CÉCILE ET LA SOCIÉTÉ ROMAINE AUX DEUX PREMIERS SIÈCLES (pages 78 à 84) 

 

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9 décembre 2010 4 09 /12 /décembre /2010 20:00

Juifs et gentils, oubliant leur passé, n'avaient qu'à s'embrasser dans la fraternité d'une même foi, et à témoigner leur reconnaissance à Dieu, qui les avait appelés par sa grâce les uns et les autres.

 

 Dans cette lettre adressée aux chrétiens de la capitale de l'Empire, Paul juge à propos d'aborder la question politique qui devait surgir tôt ou tard, comme résultat de l'accroissement indéfini de l'Eglise chrétienne. Les règles de conduite qu'il leur assigne sont les mêmes que Pierre avait déjà intimées. Il faut que tout chrétien sache qu'à ce moment, ce n'est pas un parti politique qui se forme, c'est la véritable religion qui s'élève. La victoire viendra plus tard à l'Eglise ; mais il faut auparavant qu'elle ait transformé le monde. Pour cela, trois siècles d'oppression et de souffrance seront nécessaires ; mais le triomphe qui en sera la suite demeurera jusqu'à la fin des siècles l'invisible argument de la divinité du christianisme.

 

 Ces leçons des deux apôtres furent prises à la lettre par les chrétiens durant toute la longue période de l'épreuve, et déjà, au début du troisième siècle, Tertullien pouvait adjurer les païens de déclarer si jamais un chrétien avait trempé dans quelqu'une des nombreuses conspirations qui avaient débarrassé l'Empire de tant d'indignes chefs.  La même  soumission  passive et bienveillante s'affirme dans les apologies  présentées  aux empereurs  en  faveur du christianisme, ainsi que dans les Actes des Martyrs. Elle reposait sur ces axiomes politiques que Paul affirme avec tant d'autorité, et qui devaient refaire le monde : "Toute puissance procède de Dieu, et celles qui existent, c'est Dieu qui les a établies. Celui donc qui résiste à la puissance résiste à l'ordre établi de Dieu, et s'attire la damnation. Demeurez donc soumis, parce qu'il est nécessaire ; soumis non seulement par le sentiment de la crainte, mais aussi par le devoir de la conscience". (Rom., XIII.)

 

 Ainsi, selon l'enseignement des deux apôtres de Rome, l'obéissance politique n'était pas la servitude envers l'homme : le chrétien ne pouvait servir que Dieu. Le pouvoir n'était point la résultante d'une combinaison humaine qui l'aurait fait émaner d'en bas ; il procédait de la volonté divine, et Dieu ne pouvant pas être contraire à lui-même, s'il arrivait que la puissance déléguée par lui vînt à commander le mal, c'était alors à Dieu et non plus à l'homme que le chrétien devait obéir. La résistance passive des martyrs dégagea la notion véritable du pouvoir politique, qui, en définitive, n'a droit à l'obéissance que lorsque ses prescriptions ne violent pas la loi de Dieu.  Rien  n'était plus puissant pour dissoudre à la longue l'idée césarienne,  selon laquelle la volonté d'un homme était substituée à la notion du bien et du mal.  La doctrine de Pierre et Paul interdisait aux chrétiens le droit de prendre part aux incessantes conspirations par lesquelles on  faisait et on  défaisait sans cesse les empereurs ; mais, en retour, elle préparait de longue main  l'avènement d'un  nouveau droit social. L'Empire païen comprit vite la portée de cette soumission éclairée du chrétien.  Il pressentit qu'une révolution  immense en  sortirait un jour, et il déclara promptement la guerre à une religion qui, se bornant à réclamer l'indépendance de la conscience, anéantissait le droit brutal de la force.

 

 L'ancienne Rome, la Rome du sénat, devait se partager, à l'avènement du césarisme, sur l'application des théories sociales. Le plus grand nombre, par l'effet de cette lâcheté qu'enfante toujours  l'affaiblissement  des  mœurs, accepta tout  et  sanctionna  tout. Une  minorité  essaya d'opposer aux Césars le rempart du stoïcisme ; elle succomba vite et ne laissa rien après elle. Une autre minorité, prise dans les débris des plus illustres races, goûta l'enseignement des apôtres. Accoutumée à tous les dévouements dans le passé, façonnée à toutes les gloires, elle connut et comprit la grandeur et la sainteté du Christ que les deux juifs, Pierre et Paul, étaient venus révéler au sein même de Babylone. Par cette élite de ses siècles de gloire, Rome, sans s'en douter d'abord, passa insensiblement  sous le joug  de l'Evangile, et lorsque, après les Antonins, les empereurs asiatiques crurent en finir avec le christianisme par la violence,  ils se trouvèrent en face d'une Rome chrétienne, complète, à la formation de  laquelle n'avaient  manqué ni  les grandes races ni le peuple, et qui, par la seule résistance passive unie au nombre, était en mesure de braver jusqu'au plus formidable des assauts, la persécution finale, celle de Dioclétien.

 

 L'Epître de Paul aux Romains se terminait par des salutations à divers chrétiens de Rome, tous juifs, qu'il avait connus en Orient, et il rappelle avec complaisance ses relations antérieures avec eux. Il n'a garde d'oublier Aquila et Priscille, auxquels il se reconnaît redevable des plus généreux services ; il atteste même qu'ils ont été jusqu'à exposer leur vie pour sauver la sienne. Les circonstances auxquelles Paul fait allusion sont demeurées inconnues ; mais le fait sert à montrer toujours plus le caractère de ces deux chrétiens du premier âge. L'apôtre envoie un salut particulier à "l'église, qui est dans leur maison". Il est aisé de reconnaître ici l'assemblée chrétienne qui se réunissait dans la maison du mont Aventin, à laquelle les noms d'Aquila et de Priscille sont demeurés attachés, et où vivaient les deux époux sous les auspices de Cornélius Pudens.

 

En attendant le jour où Paul pourrait enfin contempler de ses propres yeux cette église de Rome  qui,  fondée par le  prince des  apôtres, n'avait cessé de s'étendre, il avait encore à accomplir, par suite d'un vœu, le pèlerinage de Jérusalem, et il se proposait d'arriver en cette ville pour la fête de la Pentecôte. Il n'est point aisé non plus de faire cadrer avec le soi-disant hellénisme de Paul cette pérégrination toute judaïque, pas plus que le voeu de Nazaréen qui l'avait déjà précédemment appelé à Jérusalem, pas plus que la circoncision, qu'il imposa à son disciple Timothée. Ainsi  que nous l'avons dit ci-dessus, à propos de quelques repas de saint Pierre à Antioche avec les chrétiens juifs de Jérusalem,  les deux apôtres étaient parfaitement libres de se conduire en cette manière ; mais le roman germanique, accepté si naïvement  en France par un de nos historiens de renom, n'en croule pas moins de toutes parts. Paul fut l'apôtre des gentils ; mais il ne renonça jamais à son droit de suivre les usages mosaïques, lorsqu'il lui sembla à propos de le faire, et on est fondé à affirmer sur les faits les plus évidents que Pierre, qu'on a osé accuser de judaïsme invétéré, Pierre, l'initiateur de Cornélius et l'apôtre de Rome, a plus agi que Paul dans l'émancipation des gentils. Il nous a semblé nécessaire de revenir une dernière fois sur un système dont l'intention est visible, et qui, grâce à l'ignorance et à la futilité d'aujourd'hui, a pu séduire certains esprits qui n'étaient pas assez sur leurs gardes.

 

En se rendant à Jérusalem, Paul évita de passer par Ephèse, où la fureur des païens était encore soulevée contre lui, et il arriva au terme de son voyage en mai de l'année 53, après avoir touché les îles de Rhodes et de Chypre, et débarqué enfin à Césarée de Palestine. La rage des juifs de Jérusalem se déchaîna jusqu'au dernier excès. Leur orgueil en voulait surtout à cet ancien disciple de Gamaliel, à ce complice du meurtre d'Etienne, qui maintenant conviait les gentils à s'unir aux fils d'Abraham sous la loi de Jésus de Nazareth.

 

Le tribun Lysias l'arracha des mains de ces acharnés, qui allaient le mettre en pièces. La nuit suivante, le Christ apparut à Paul, et lui dit : "Sois ferme; car il te faudra rendre de moi à Rome le même témoignage que tu me rends en ce moment à Jérusalem."

 

DOM GUÉRANGER

SAINTE CÉCILE ET LA SOCIÉTÉ ROMAINE AUX DEUX PREMIERS SIÈCLES (pages 73 à 77) 

 

Cecilia

SAINTE CÉCILE - Santa Cecilia in Trastevere, Rome

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