La Messe de la Nativité de Saint Jean Baptiste est composée de divers passages de l'Ancien et du Nouveau Testament. L'Eglise, disent les auteurs liturgistes, veut ainsi nous rappeler que Jean forme le trait d'union des deux alliances et participe de chacune. Il est l'agrafe précieuse qui fixe le double manteau de la loi et de la grâce sur la poitrine du Pontife éternel.
La suite du saint Evangile selon saint Luc :
Le temps d'Elisabeth arriva, et elle mit au monde un fils. Ses voisins et ses proches ayant donc appris que le Seigneur avait fait éclater sur elle sa miséricorde, l'en félicitaient. Le huitième jour, ils vinrent pour circoncire l'enfant, et ils le nommaient Zacharie, du nom de son père. Mais sa mère répondit : Nullement ; il s'appellera Jean. Ils lui dirent : Il n'y a personne dans votre famille qui porte ce nom. En même temps, ils faisaient signe au père de marquer comment il voulait qu'on le nommât. Or lui, demandant des tablettes, écrivit : Jean est son nom. Et tout le monde fut dans l'étonnement. Au même instant sa bouche s'ouvrit, sa langue se délia, et il parlait en bénissant Dieu. Tous les voisins de Zacharie et d'Elisabeth furent remplis de crainte, et le bruit de tant de merveilles se répandit sur toutes les montagnes de Judée. Ceux qui les apprenaient les gardaient en leur cœur, et ils disaient : Que pensez-vous que sera cet enfant ? Car la main du Seigneur était avec lui. Et Zacharie son père fut rempli du Saint-Esprit, et il prophétisa, disant : Béni soit le Seigneur Dieu d'Israël, car il a visité et racheté son peuple.
Après les lieux sanctifiés par le passage en ce monde du Verbe fait chair, il n'en est point, dans la Palestine, qui doive intéresser plus l'âme chrétienne que celui où se sont accomplis les événements racontés dans notre Evangile. La ville qu'illustra la naissance du Précurseur se trouve à deux lieues de Jérusalem vers le couchant, comme Bethléhem, où naquit le Sauveur, est à deux lieues au midi de la Ville sainte. Sorti par la porte de Jaffa, le pèlerin qui se dirige vers Saint-Jean-de-la-Montagne rencontre d'abord le monastère grec de Sainte-Croix, élevé sur l'emplacement où furent coupés les arbres dont fut faite la croix du Seigneur. Puis, continuant sa marche à travers le massif des montagnes de Juda, il atteint un sommet d'où se découvre à ses yeux la Méditerranée. La maison d'Obed-Edom qui abrita trois mois l'arche sainte, s'élevait en cet endroit, d'où un sentier rapide conduit au lieu où Marie, la véritable arche d'alliance, passa elle-même trois, mois de bénédictions chez sa cousine Elisabeth.
Deux sanctuaires, éloignés d'environ mille pas l'un de l'autre, consacrent les grands souvenirs qui viennent de nous être rappelés par saint Luc : dans l'un fut conçu et naquit Jean-Baptiste ; dans l'autre eut lieu la circoncision du Précurseur, huit jours après sa naissance. Le premier remplace la maison de ville de Zacharie ; il remonte, dans sa forme actuelle, à une époque antérieure aux croisades. C'est une belle église à trois nefs et à coupole, mesurant trente-sept pas en longueur. L'autel majeur est dédié à saint Zacharie, celui de droite à sainte Elisabeth. Sur la gauche, sept degrés de marbre conduisent à une chapelle souterraine creusée dans le roc, et qui n'est autre que l'appartement le plus reculé de la maison primitive : c'est le sanctuaire de la Nativité de saint Jean. Quatre lampes tempèrent l'obscurité de cette crypte vénérable, tandis que six autres, suspendues sous la table même de l'autel, éclairent cette inscription gravée sur le marbre du pavé : HIC PRAECURSOR DOMINI NATUS EST.
Les traditions locales placent à quelque distance de ce premier sanctuaire, ainsi que nous l'avons dit, le souvenir de la circoncision du Précurseur. Outre sa maison de ville en effet, Zacharie en possédait une autre plus isolée. Elisabeth s'y était retirée durant les premiers mois de sa grossesse, pour goûter dans le silence le don de Dieu. C'était là que Notre-Dame venant de Nazareth l'avait rencontrée, là que s'était produit le sublime tressaillement des enfants et des mères, là que le Magnificat avait prouvé au ciel que la terre désormais l'emportait sur lui dans la louange et l'amour.
Il convenait que le chant de Zacharie, le Cantique du matin, retentit lui-même, pour la première fois, au lieu d'où celui du soir était monté comme un encens de si suave odeur. Les récits des anciens pèlerins signalent en cet endroit deux sanctuaires superposés, avec un escalier conduisant de l'un à l'autre : en bas avait eu lieu la rencontre de Marie et d'Elisabeth ; ce fut au-dessus, à l'étage supérieur de la maison de campagne de Zacharie, que se passa la plus grande partie du récit qui vient de nous être proposé par la sainte Eglise.
DOM GUÉRANGER
L'Année Liturgique