Jésus déclarait à la foule et à ses disciples:
Les scribes et les pharisiens enseignent dans la chaire de Moïse. Pratiquez donc et observez tout ce qu'ils peuvent vous dire. Mais n'agissez pas d'après leurs actes, car ils disent et ne font
pas. Ils lient de pesants fardeaux et en chargent les épaules des gens ; mais eux-mêmes ne veulent pas les remuer du doigt. Ils agissent toujours pour être remarqués des hommes : ils portent sur
eux des phylactères très larges et des franges très longues ; ils aiment les places d'honneur dans les repas, les premiers rangs dans les synagogues, les salutations sur les places publiques, ils
aiment recevoir des gens le titre de Rabbi.
Pour vous, ne vous faites pas donner le titre de Rabbi, car vous n'avez qu'un seul enseignant, et vous êtes tous frères. Ne donnez à personne sur terre le nom de père, car vous n'avez qu'un seul
Père, celui qui est aux cieux. Ne vous faites pas non plus appeler maîtres, car vous n'avez qu'un seul maître, le Christ.
Le plus grand parmi vous sera votre serviteur.
Qui s'élèvera sera abaissé, qui s'abaissera sera élevé.
Evangile de Jésus-Christ selon saint Matthieu
Les docteurs de la Loi sont encore assis sur la chaire de Moïse ; Jésus veut qu'on écoute leur enseignement. Mais cette chaire, qui est une
chaire de vérité, malgré l'indignité de ceux qui y sont assis, ne restera plus longtemps au sein d'Israël. Caïphe prophétisera encore, parce qu'il est pontife en cette année ; mais sa chaire,
qu'il a souillée par d'indignes passions, va bientôt être enlevée et transférée au milieu de la gentilité. Jérusalem, qui aura renié le divin libérateur, va perdre ses honneurs ; et bientôt Rome,
le centre de la puissance païenne, verra s'élever dans ses murs cette même chaire qui était la gloire d'Israël, du haut de laquelle se proclamaient les prophéties si visiblement accomplies en
Jésus.
Cette chaire ne sera plus ébranlée désormais, quelle que soit la fureur des portes de l'enfer ; elle sera toujours l'espoir fidèle des nations qui recevront d'elle l'indéfectible témoignage de la
vérité. C'est ainsi que le flambeau de la foi qui luisait dans Jacob a été déplacé, mais ne s'est pas éteint. Jouissons de sa lumière, et méritons par notre humilité que ses rayons viennent
toujours jusqu'à nous.
Quelle a été la cause de la perte d'Israël ? Son orgueil. Il s'est complu dans les dons que Dieu avait accumulés sur lui ; il n'a pas voulu reconnaître un Messie dépourvu de toute gloire humaine
; il s'est révolté d'entendre dire à Jésus que les Gentils participeraient au salut, et il a voulu, par le plus grand des forfaits, étouffer cette voix qui lui reprochait la dureté de son cœur. Ces hommes superbes, à la
veille du jour de la vengeance divine, que tout leur annonce être prochain, n'ont rien perdu de leur arrogance. C'est toujours le même faste, le même mépris impitoyable pour les pécheurs.
Le Fils de Dieu s'est fait le fils de l'homme ; il est notre maître, et c'est lui qui nous sert ; apprenons à cet exemple le prix de l'humilité.
Christ devant Anne par Dürer
Si on nous nomme Maître, si on nous appelle Père, n'oublions pas que nul n'est maître, que nul n'est père que par le Seigneur notre Dieu. Le maître digne de ce nom est celui par la bouche duquel
Jésus-Christ enseigne ; et celui-là seul est vraiment père qui reconnaît que son autorité paternelle ne vient que de Dieu ; car, comme le dit l'Apôtre, "c'est du Père de notre Seigneur
Jésus-Christ que découle toute paternité au ciel et sur la terre".
DOM GUÉRANGER
L'Année Liturgique