Lorsque nous allons en pèlerinage en Terre Sainte, une autre dimension intervient : non plus celle du temps, mais celle
de l’espace, puisque nous retrouvons l’assise matérielle des lieux où se sont accomplis les événements fondateurs par lesquels Dieu a manifesté sa Parole.
Or l’espace est aussi fragile, sinon plus, que la parole et la mémoire humaines ! La preuve, tout change : on détruit pour construire des routes ; incendies, ravages de toutes sortes sévissent et
beaucoup de vestiges sont perdus, parfois retrouvés ; et le travail scientifique consiste à avancer et vérifier des hypothèses. Mais, une fois qu’on a pu restituer les lieux : "c’était là , ce
n’était pas là ; c’est beau !" que reste-t-il ? On ne visite pas la Terre Sainte comme un champ de bataille ! Nous ne pouvons comprendre ces lieux que si, en même temps, nous écoutons la
Parole de Dieu nous dire les événements dont ils sont le rappel, le point d’ancrage.
La lecture de la Parole de Dieu n’est ni un récit d’historien, ni la mémoire d’un grimoire. Cette Parole agit, et bien plus Jésus, Parole de Dieu, Christ-Messie qui nous parle, est présent
lui-même. Grâce à lui, nous sommes chrétiens et nous sommes en lui lorsque nous célébrons l’Eucharistie. Sa présence nous est donnée dans cet instant, en un lieu où non seulement son temps
devient le nôtre, mais notre temps le sien, à lui, Jésus, né à Bethléem de Judée, mort sous Ponce Pilate. Le temps de son histoire est attesté par les lieux de son histoire. Et ce lieu prend une
toute autre signification dès lors que nous-mêmes, par notre foi et notre prière en Eglise, manifestons l’acte accompli par Jésus et que nous en recevons la grâce par notre adhésion et notre
communion.
Notre pèlerinage aux lieux saints doit nous permettre de vérifier, par la confrontation du réel d’aujourd’hui et du réel de l’histoire, que nous ne sommes ni devant un mythe, ni devant un
imaginaire trompeur, mais bien devant la réalité humaine que vient transfigurer la Parole de Dieu brûlante et vive, la Parole faite chair. Sur la Terre où Dieu s’est livré et révélé, il nous fait
la grâce de se donner à nouveau à nous par le mystère de son Eglise, Corps de son fils.