La Seine à Paris - L’eau de la Seine est-elle bonne à boire ?

Si Paris était une circonférence, la Seine en serait l’axe, car elle le traverse dans sa plus grande largeur sur une étendue de 11 kilomètres et demi ; la vitesse moyenne de son cours entre les quais qui la pressent et accélèrent sa marche est de 0m,65 par seconde, ce qui donne 2,340 mètres à l’heure, un peu plus d’une demi-lieue ; une épave abandonnée au fil de l’eau mettrait donc environ cinq heures pour franchir Paris depuis le pont Napoléon jusqu’au pont du Point-du-Jour.

 

A son entrée à Paris, la Seine est large de 165 mètres et de 136 à sa sortie. Vers le pont Saint-Michel, resserrée dans son bras le plus étroit, elle n’a que 49 mètres ; mais au-dessous du Pont-Neuf elle obtient toute son amplitude, et parvient à 263 mètres de largeur. Quant à sa limpidité, elle est aussi variable que le temps ; un spécialiste qui fait autorité dans la matière, M. Poggiale a calculé que la Seine était en moyenne trouble pendant 179 jours de l’année.

 

L’eau de la Seine est-elle bonne à boire ? Grave question sur laquelle on a écrit des volumes ; la chimie s’est chargée de répondre, et voici ce qu’elle dit : Dans les temps de pluie et de fonte de neige, le résidu limoneux des eaux de la Seine s’élève à 1 et 2 grammes par litre, de plus elle contient environ 2 ou 3 pour 100 de matières organiques ; en général, dans la saison normale, l’eau prise au centre de Paris renferme par litre 16 centigrammes de carbonate de chaux, 2 de carbonate de magnésie, 2 de sulfate de chaux et quelques milligrammes de chlorurés alcalins et de nitrates. — Certes une telle boisson est potable ; mais est-ce bien l’eau de la Seine qui abreuve Paris ? Les Parisiens de la rive gauche boivent l’eau de la Seine, les Parisiens de la rive droite boivent l’eau de la Marne.

 

Des expériences sérieuses et concluantes ne laissent aucun doute à cet égard. Les deux rivières se côtoient sans se mêler pendant qu’elles traversent Paris entre les mêmes bords, sur le même lit ; c’est en vain qu’elles se heurtent entre les piles des ponts, qu’elles sont agitées par les bateaux à vapeur : elles se conservent presque pures malgré leur contact forcé. Il faut qu’elles soient attirées et comme barattées dans le grand coude que la Seine fait en face de Meudon pour perdre leurs qualités distinctes et devenir réellement une. A Sèvres seulement, le mélange est complet, et l’eau est enfin absolument uniforme.

 

 

Maxime Du Camp, La Seine à Paris, Revue des Deux Mondes, 1867

 

La Seine et Notre-Dame de Paris, Johan Barthold Jongkind, Musée d'Orsay

La Seine et Notre-Dame de Paris, Johan Barthold Jongkind, Musée d'Orsay

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