Les Halles de Paris - La Fontaine des Innocents

La suppression du charnier des Innocents, qui, comme tout cimetière situé dans l’intérieur d’une ville, était devenu un danger permanent pour la santé publique, donna aux halles une certaine extension. Par arrêt du conseil en date du 9 novembre 1785, Louis XVI avait décidé que le terrain occupé par le charnier servirait à établir un marché aux herbes et légumes.

 

L’année suivante, la place fut nivelée, les ossements portés aux catacombes, la fontaine construite par Jean Goujon au coin de la rue aux Fers et de la rue Saint-Denis fut démolie avec soin, transportée pièce par pièce et rétablie au centre du nouveau marché, où les vendeuses n’étaient couvertes que par des abris mobiles, sortes d’immenses parapluies qu’on ouvrait le matin et qu’on fermait le soir. En 1813, la condition de ces pauvres femmes parut trop pénible à l’autorité municipale ; elle leur fit construire des galeries en bois qui ont subsisté jusqu’au jour où les halles furent modifiées d’après un plan nouveau. Ce plan ne date pas d’hier, mais il fallut attendre de longs jours avant qu’il ne fût mis à exécution.

 

Napoléon s’était fort préoccupé des halles ; il les avait parcourues souvent et y avait même entendu parfois d’assez vertes vérités. Il savait combien elles répondaient peu aux besoins qu’elles avaient mission de satisfaire. Ne pouvant plus littéralement contenir toutes les denrées que chaque jour on y apportait et que l’amélioration successive de la viabilité française rendait de plus en plus abondantes, elles débordaient dans les rues voisines, dont la chaussée devenait ainsi une succursale du marché, au grand détriment de la circulation, du bon état des denrées et de la surveillance qu’on doit exercer sur des transactions de cette espèce. Par deux décrets du 20 février et du 11 mai 1811, il prescrivit la reconstruction complète des halles, et l’on put croire que Paris allait enfin posséder un marché digne de la capitale d’un grand empire. Il n’en fut rien cependant ; 1812 arrivait, apportant la guerre de Russie, et l’empire, entraîné vers d’autres soucis, abandonna le projet formé avant même qu’on eût pu lui donner un commencement d’exécution.

 

La Restauration se souvenait avec trop d’amertume du rôle joué pendant la révolution par les gens des halles pour porter grand intérêt à leur bien-être ; rien ne fut fait alors, ni pendant les premières années du règne de Louis-Philippe, quoique le percement de la rue de Rambuteau, emprunté au projet impérial de 1811, pût faire croire qu’on allait se mettre sérieusement à l’œuvre. Un mauvais génie semblait toujours faire différer une reconstruction complète que chaque année rendait plus indispensable.

 

Une ordonnance royale du 18 janvier 1817 prescrivit en principe l’établissement de halles centrales en rapport avec la population et ses besoins. A cet effet, une loi du 1er août de la même année autorisait un emprunt dont le produit fut promptement détourné de sa destination, car il fallut faire face aux nécessités créées par la disette de 1847 et par la révolution de 1848.

 

Un second emprunt, approuvé par la loi du 4 août 1851, permit enfin de commencer les travaux.

 

 

Maxime Du Camp, Les Halles de Paris, Revue des Deux Mondes, 1868

 

Le Marché et la Fontaine des Innocents, John James Chalon, 1822, Musée Carnavalet, Paris

Le Marché et la Fontaine des Innocents, John James Chalon, 1822, Musée Carnavalet, Paris

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