La cathédrale Notre-Dame de Paris - Peu d'entreprises furent plus populaires que celle de la restauration de Notre-Dame

D'autres monuments consacraient aussi certains faits importants dont la vieille église avait été le témoin.

 

Les drapeaux enlevés par les armées françaises étaient suspendus au niveau des galeries hautes ; mais, par une attention qui fait honneur à notre pays, ces signes de victoires étaient enlevés pendant la paix. Si les piliers de Notre-Dame de Paris avaient une voix, ils raconteraient toute notre histoire, depuis le règne de Philippe Auguste jusqu'à nos jours. De combien d'événements n'ont-ils pas été les témoins ! C'est sous les voûtes de cette église que saint Dominique prêcha, après une apparition de la Vierge, dit la légende ; que le comte de Toulouse, Raymond VII, vint abjurer l'hérésie, nu, en chemise auprès de l'autel. C'est là que Henri VI d'Angleterre fut couronné roi de France, en 1431 ; qu'en 1436 fut chanté le Te Deum à l'occasion de la reprise de Paris par les troupes de Charles VII.

 

Pendant la domination des Seize, les galeries de l'église servaient d'habitation aux troupes populaires de la Ligue, qui, à la voix des clercs, sortaient de ce casernement d'un nouveau genre pour courir sus aux Politiques et entretenir la terreur parmi les bourgeois paisibles.

 

Mariages, baptêmes, obsèques, serments et vœux éternels, bientôt démentis par d'autres vœux et d'autres serments ; fêtes populaires, fêtes royales ; chants d'allégresse et de deuil; apologies et anathèmes; oraisons funèbres pour les rois et pour les morts à l'attaque de la Bastille ; culte de la déesse Raison et des théophilanthropes ; réinstallation du culte, en 1802 ; sacre de Napoléon Ier et baptême de princes au berceau, qui ne devaient point régner ; la vieille église, impassible, fut un abri protecteur pour tant de misères et de splendeurs, pour les espérances et les malheurs de la population parisienne. Aussi ne faut-il pas s'étonner si le peuple de Paris a conservé pour ces pierres séculaires une vénération qui ne se démentit jamais. C'est le lien visible qui le rattache à un passé plein de grandeur, même pendant la tourmente ; ce sont ses titres de noblesse.

 

Peu d'entreprises furent plus populaires que celle de la restauration de Notre-Dame. Les travaux, commencés sous le règne du roi Louis-Philippe, en 1845, à la suite d'un vote des Chambres, furent continués pendant la République, conduits avec des ressources plus étendues et achevés sous le règne de Napoléon III. Des souscriptions, recueillies avec un esprit de suite et un zèle peu communs par les archevêques de Paris, la fabrique et l'archiprêtre actuel de la cathédrale, ont permis de rendre à l'intérieur de l'église son lustre ancien. Les chapelles ont été peintes, le mobilier a été renouvelé, le trésor s'est enrichi d'objets précieux par le travail et la matière, si bien qu'après tant de mutilations et de spoliations, Notre-Dame redevient l'église métropolitaine digne, d'un grand pays.

 

Bientôt isolée au milieu de larges espaces, de jardins, de promenades, ayant sous son ombre l'Hôtel-Dieu reconstruit à neuf, l'archevêché et les services nécessaires au culte, au centre du Paris nouveau, elle montrera que ces premiers constructeurs prévoyaient les destinées futures de la grande ville, puisqu'ils avaient su lui donner cette grandeur et ce noble aspect.

 

 

Eugène-Emmanuel VIOLLET-LE-DUC, Les églises de Paris, NOTRE-DAME, Éditeur : C. Marpon et E. Flammarion, Paris, 1883

 

Sacre de l'empereur Napoléon Ier et couronnement de l'impératrice Joséphine dans la cathédrale Notre-Dame de Paris, le 2 décembre 1804, Jacques-Louis David, Musée du Louvre

Sacre de l'empereur Napoléon Ier et couronnement de l'impératrice Joséphine dans la cathédrale Notre-Dame de Paris, le 2 décembre 1804, Jacques-Louis David, Musée du Louvre

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