Par un pèlerin
L’étymologie du mot hôpital (hospes) indique tout d’abord la destination de ce genre d’établissement.
A l’époque où l’absence de routes ne permettait de cheminer qu’à cheval ou à pied, où les mœurs primitives des peuples nomades subsistaient encore, où les pèlerinages étaient incessants, le cubiculum hospitale, la chambre d’hospitalité, existait dans la demeure des personnages riches ; les municipes, les congrégations religieuses, par charité autant que par intérêt, pour attirer et retenir les étrangers, firent construire des maisons où les pèlerins et les voyageurs trouvaient le gîte et parfois même la nourriture.
Ceux qui étaient arrêtés par la fatigue, la misère, la souffrance, par un accident quelconque, y prolongeaient leur séjour. Il est probable que pendant une de ces famines et de ces épidémies si fréquentes au moyen âge, le caractère de l’institution se modifia ; les hôtes firent place aux malades, et plus d’une maison d’hospitalité devint une maladrerie avec le double caractère d’hospice et d’hôpital. Ce dernier mot a subsisté, quoiqu’il ait aujourd’hui singulièrement dévié de son acception première.
Il est à peu près certain que l’hôpital parisien par excellence, l’Hôtel-Dieu, traversa ces différentes phases. Ce fut d’abord, au VIIe siècle, un couvent de femmes sous l’invocation de saint Christophe. On sait qu’en 829 c’était déjà un refuge hospitalier où les chanoines de Notre-Dame allaient à Pâques laver les pieds des pauvres. Le moment précis où l’Hôtel-Dieu cessa d’être une hôtellerie analogue aux caravanséraïs d’Orient ne peut être parfaitement précisé ; mais ce doit être vers le milieu ou vers la fin du XIIe siècle qu’il fut exclusivement et pour toujours consacré aux malades. S’il était encore ouvert aux étrangers, c’était seulement lorsqu’ils étaient blessés ou souffrants. Il devint ainsi et resta l’infirmerie centrale du peuple de Paris.
La religion, la royauté, le prirent sous leur protection immédiate ; on lui accorda des privilèges, des dotations, on lui fit des legs, on l’enrichit à l’envi. Dès lors il ouvrit ses portes à tous les infirmes de la grande ville, et parfois on peut être surpris de la qualité des personnes qui lui demandèrent un abri, car en 1793 il reçut et vit mourir sur l’un de ses grabats la trente-septième et dernière abbesse de Fontevrault, Julie-Sophie-Gillette de Gondrin de Pardaillan d’Antin, descendante directe du seul fils légitime de Mme de Montespan.
Maxime Du Camp, Les Hôpitaux de Paris et le nouvel Hôtel-Dieu, Revue des Deux Mondes, 1870
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