C’est pendant la visite ou immédiatement après, suivant la gravité des cas, que les pansements sont faits, soit par le chirurgien lui-même, soit par les élèves, soit par l’infirmier.
Ils sont fréquents, nombreux, renouvelés dans la journée, lorsqu’il y a lieu, et ont exigé en 1869 l’emploi de 4 389 kil. 50 grammes de charpie et la quantité énorme de 103 179 kil. de farine de grain de lin. En dehors des heures consacrées à la visite, les malades ne sont point abandonnés à eux-mêmes : les internes de service se tiennent jour et nuit dans une chambre particulière qu’on nomme la salle de garde, et où l’on est certain de les rencontrer pour porter secours à un malade, ou pour recevoir les individus amenés d’urgence.
Ils appartiennent à l’hôpital, y demeurent, et, tout en perfectionnant leurs études, apportent un peu de jeunesse et de gaieté à ces milieux lamentables. Ils vivent en bonne intelligence avec les religieuses qui desservent tous les hôpitaux de Paris, sauf la Maternité, le Midi et les Cliniques, où, pour des causes qu’il est facile de comprendre, elles sont remplacées par des surveillantes relevant directement de l’administration.
Six communautés se sont réparti nos maisons hospitalières : les Augustines veillent sur l’Hôtel-Dieu, la Charité, Saint-Louis et La Riboisière ; les sœurs de Sainte-Marthe, un ordre janséniste d’une extrême mansuétude, occupent Saint-Antoine, la Pitié et Beaujon ; les filles de Saint-Vincent-de-Paul ont Necker et Sainte-Eugénie ; les religieuses de la Compassion, qui dans ce cas sont bien nommées, ont pris Lourcine ; les sœurs de Sainte-Marie sont à Cochin et les dames de Saint-Thomas-de-Villeneuve aux Enfants malades. Elles se distribuent dans les hôpitaux proprement dits de Paris, selon l’importance de chacun d’eux, en un personnel de 259 femmes, qui forment, avec l’Assistance publique et le corps médical, un ensemble très précieux, très imposant, où la charité, la science et la religion se donnent la main. Elles ont la haute direction pour la discipline des salles, et il est bien rare qu’elles ne soient pas très respectées par les malades.
Cependant à Lourcine leur patience et leur pudeur sont parfois mises à de rudes épreuves, et plus d’une s’est sauvée en se signant et en se bouchant les oreilles pour ne point entendre des refrains que ne désavouerait pas un zouave en goguette.
Maxime Du Camp, Les Hôpitaux de Paris et le nouvel Hôtel-Dieu, Revue des Deux Mondes, 1870