Les Hôpitaux de Paris et le nouvel Hôtel-Dieu - Le vestiaire s’appelait autrefois la pouillerie

Lorsqu’un homme est admis dans un hôpital, il est inscrit sur le registre des entrées et il est conduit dans une salle qui, sauf de bien rares exceptions, est placée sous le vocable d’un saint.

 

Là le malade est déshabillé par les infirmiers et couché sur un fort bon lit en fer, entouré de rideaux blancs sur toutes les faces, et composé d’un sommier élastique, d’un matelas, d’un traversin, d’un oreiller. De l’impériale pend une forte corde, munie à l’extrémité inférieure d’un morceau de bois en forme de manche de vrille, qui, tombant à la portée du malade, lui permet de prendre un point d’appui, de se hâler, c’est le mot, lorsqu’il veut se soulever. Au-dessus de sa tête s’allonge une planche qui sert de vide-poche ; à côté du lit une table de nuit supporte l’écuelle, le pot à tisane et divers autres ustensiles en vaisselle d’étain.

 

Dés qu’un individu, homme ou femme, est entré dans la salle qui lui a été désignée, il quitte son linge, ses vêtements, et jusqu’à l’heure de sa sortie il ne doit plus porter que la livrée de l’hôpital ; s’il meurt, celui-ci hérite de ses hardes, à moins qu’elles ne soient réclamées par sa famille ; comme on l’a vu plus haut, elles serviront à habiller un indigent.

 

Tous ces vêtements, qui bien souvent ne sont que des guenilles, sont réunis dans un vestiaire spécial ou empaquetés isolément dans des serpillières ; ils sont étiquetés après avoir été secoués, lavés, savonnés, soufrés, désinfectés de tout germe de contagion et purgés des parasites qui les habitaient. Cet usage hygiénique est fort ancien et remonte peut-être aux origines mêmes de l’Hôtel-Dieu. Le vestiaire s’appelait autrefois la pouillerie, du latin pullum, avec le sens de vêtement. Dans le Livre de la Vie active, dont j’ai rappelé une miniature, on lit : Et adoncques Pénitence hucha une de ses seurs nommée Desplaisance, pouillère de la Maison-Dieu, qui les malades despouille de leurs vielz et salles vestements et les porte à Compunction, maistresse de la grant lavenderie, qui les blanchit et nettoye en lexive.

 

Le costume réglementaire est fort simple : une capote en drap bleu et le classique bonnet de coton ; les femmes ont un jupon, une casaque de molleton, et portent une coiffe de cotonnade blanche ornée d’une petite garniture plissée. Certes, c’est là une bien modeste coiffure, mais lorsqu’elles se savent ou se croient jolies, elles trouvent moyen, surtout à Lourcine, de donner à cette espèce de cornette toutes les formes imaginables, dont quelques-unes sont vraiment charmantes de crânerie et d’imprévu.

 

 

Maxime Du Camp, Les Hôpitaux de Paris et le nouvel Hôtel-Dieu, Revue des Deux Mondes, 1870

 

Les malades sur la terrasse de l'Hôtel-Dieu, Paul Renouard, Paris, 1897, Musée du Louvre

Les malades sur la terrasse de l'Hôtel-Dieu, Paul Renouard, Paris, 1897, Musée du Louvre

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