LA RÉSURRECTION : Madeleine et ses compagnes

Les trois Marie au Tombeau par Duccio di Buoninsegna

 

Hier, Madeleine et ses compagnes, lorsque le coucher du soleil vint annoncer que, selon l'usage des Juifs, le grand Samedi faisait place au Dimanche, sont allées par la ville acheter des parfums, pour embaumer de nouveau le corps de leur cher maître, aussitôt que la lumière du jour leur permettra d'aller lui rendre ce pieux devoir.

 

La nuit s'est passée sans sommeil ; et les ombres ne sont pas encore totalement dissipées, que Madeleine, avec Marie, mère de Jacques, et Salomé,est déjà sur le chemin qui conduit au Calvaire, près duquel est le sépulcre où repose Jésus. Dans leur préoccupation, elles ne s'étaient pas même demandé quels bras elles emploieraient pour déranger la pierre qui ferme l'entrée de la grotte ; moins encore ont-elles songé au sceau de la puissance publique qu'il faudrait auparavant briser, et aux gardes qu'elles vont rencontrer près du tombeau. Aux premiers rayons du jour, elles arrivent au terme de leur pieux voyage ; et la première chose qui frappe leurs regards, c'est la pierre qui fermait l'entrée, ôtée de sa place, et laissant pénétrer le regard dans les profondeurs de la chambre sépulcrale.

 

L'Ange du Seigneur, qui avait eu mission de déranger cette pierre et qui s'était assis dessus comme sur un trône, ne les laisse pas longtemps dans la stupeur qui les a saisies : "Ne craignez pas, leur dit-il ; je sais que vous cherchez Jésus ; il n'est plus ici ; il est ressuscité, comme il l'avait dit ; pénétrez vous-mêmes dans le tombeau, et reconnaissez la place où il a reposé".

 

C'était trop pour ces âmes que l'amour de leur maître transportait, mais qui ne le connaissaient pas encore par l'esprit. Elles demeurent «consternées », nous dit le saint Evangile. C'est un mort qu'elles cherchent, un mort chéri ; on leur dit qu'il est ressuscité ; et cette parole ne réveille chez elles aucun souvenir. Deux autres Anges se présentent à elles dans la grotte tout illuminée de l'éclat qu'ils répandent. Eblouies de cette lumière inattendue, Madeleine et ses compagnes, nous dit saint Luc, abaissent vers la terre leurs regards mornes et étonnés. "Pourquoi cherchez-vous chez les morts, leur disent les Anges, celui qui est vivant ? Rappelez-vous donc ce qu'il vous disait en Galilée : qu'il serait crucifié, et que, le troisième jour, il ressusciterait". Ces paroles font quelque impression sur les saintes femmes ; et au milieu de leur émotion, un léger souvenir du passé semble renaître dans leur mémoire. "Allez donc, continuent les Anges ; dites aux disciples et à Pierre qu'il est ressuscité, et qu'il les devancera en Galilée".

 

 Elles sortent en hâte du tombeau et se dirigent vers la ville, partagées entre la terreur et un sentiment de joie intérieure qui les pénètre comme malgré elles. Cependant elles n'ont vu que les Anges, et un sépulcre ouvert et vide. A leur récit, les Apôtres, loin de se laisser aller à la confiance, attribuent, nous dit encore saint Luc, à l'exaltation d'un sexe faible tout ce merveilleux qu'elles s'accordent à raconter. La résurrection prédite si clairement, et à plusieurs reprises, par leur maître, ne leur revient pas non plus en mémoire. Madeleine s'adresse en particulier à Pierre et à Jean ; mais que sa foi à elle est faible encore ! Elle est partie pour embaumer le corps de son cher maître, et elle ne l'a pas trouvé ; sa déception douloureuse s'épanche encore devant les deux Apôtres : "Ils ont enlevé, dit-elle, le Seigneur du tombeau ; et nous ne savons pas où ils l'ont mis".

 

 Pierre et Jean se déterminent à se rendre sur le lieu. Ils pénètrent dans la grotte ; ils voient les linceuls disposés en ordre sur la table de pierre qui a reçu le corps de leur maître ; mais les Esprits célestes qui font la garde ne se montrent point à eux. Jean cependant, et c'est lui-même qui nous en rend témoignage, reçoit en ce moment la foi : désormais il croit à la résurrection de Jésus. Nous ne faisons que passer rapidement sur des récits que nous aurons occasion de méditer plus tard, lorsque la sainte Liturgie les ramènera sous nos yeux. En ce moment, il s'agit seulement de suivre dans leur ensemble les événements de ce jour, le plus grand  des jours.

 

 Jusqu'à cette heure, Jésus n'a encore apparu qu'à sa Mère : les femmes n'ont vu que des Anges qui leur ont parlé. Ces bienheureux Esprits leur ont commandé d'aller annoncer la résurrection de leur maître aux disciples et à Pierre. Elles ne reçoivent pas cette commission pour Marie ; il est aisé d'en saisir la raison : le fils s'est déjà réuni a sa mère ; et la mystérieuse et touchante entrevue se poursuit encore durant ces préludes. Mais déjà le soleil brille de tous ses feux, et les heures de la matinée avancent : c'est l'Homme-Dieu qui va proclamer lui-même le triomphe que le genre humain vient de remporter en lui sur la mort. Suivons avec un saint respect l’ordre de ces manifestations, et efforçons-nous respectueusement d'en découvrir les mystères.

 

 DOM GUÉRANGER
L'Année Liturgique

 

 

Retour à l'accueil
Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article