A 31 ans, il retrouve, pour la première fois, ce qu’il avait connu à Sept Fons : une vie communautaire, douze compagnons, aussi démunis que lui. L’ambiance n’y est a priori, ni à l’esprit d’adoration, ni à la tendresse fraternelle.
Benoît est malmené, moqué, insulté ; cependant, il s’intègre totalement à cette vie communautaire, assumant les tâches qui lui
sont imparties, et se pliant, sans problèmes, au règlement interne. Il entraîne ses compagnons d’errance à prier aux temps prescrits, avec la même fidélité que celle qu’il montre à rendre les
divers services. S’il passe ses journées en allant se recueillir d’église en église, en redistribuant les quelques victuailles reçues à la porte de tel ou tel couvent, comme les quelques
piécettes qu’on l’oblige à accepter, à ceux qu’il estime plus indigents que lui, on le retrouve, chaque soir, à l’heure exacte, aux portes de l’hospice.
Bien que ne se sentant "d’aucune paroisse", puisqu’il est de toutes, il instaure un lien privilégié avec l’église Sainte Marie des Monts dans laquelle il passe des heures, à genoux, face au Saint Sacrement. Au point de finir par être connu et reconnu dans le quartier. La beauté de son visage, la force spirituelle qui émane de son attitude, lors de ses longs temps d’adoration, vont le faire remarquer de deux peintres : un compatriote lyonnais, pour qui Benoît finira par accepter d’être "croqué", puisque cela lui rend service, et à condition de ne pas être payé.
Et plusieurs mois plus tard, le célèbre peintre Antonio Cavalucci qui, se cachant dans l’ombre au fond de l’église, fixera les traits de Benoît et tout ce qui en émane, avec le génie qui lui est propre.
Ceci expliquera qu’au début du XXème siècle, le peintre Maurice Denis, l’un des pères du mouvement "Nabis", demandera que Benoît-Joseph puisse devenir aussi le Patron des modèles pour les artistes, comme il l’était déjà des chemineaux et des exclus, des adolescents en difficulté et des prisonniers, des brancardiers de Lourdes et des marginaux.
Nous nous trouvons en Carême ; ses amis craignent pour lui, le voyant chanceler à chaque pas et n’avancer qu’en se tenant aux murs. Passant outre, Benoît se fait très présent aux offices de la Semaine Sainte. Le Mercredi Saint 16 avril, et peut-être pour la première fois, il formule un souhait précis : échanger la branche sur laquelle il s’appuie pour un bâton suffisamment solide, afin de se soutenir, et c’est ainsi qu’une nouvelle fois il arrive à Sainte Marie des Monts.
Ruisselant de transpiration et livide, il "entend" deux messes qu’il poursuit, selon son habitude, d’une profonde oraison. Brutalement pris de vertige, il vacille et se laisse tomber sur un banc, avant de se reprendre et de sortir. A peine se trouve-t-il sur le seuil, qu’il s’effondre à nouveau ; beaucoup se précipitent pour lui porter secours et le conduire à l’hôpital. Benoît refuse, mais accepte la proposition de son ami Zaccarelli d’aller se reposer chez lui. C’est là, qu’allongé sur un grabat, Benoît va rendre son âme à Dieu dans une grande douceur.
A cet instant précis, toutes les cloches de Rome invitent au chant du Salve Regina. Benoît venait d’avoir 35 ans.
L’annonce de sa mort se répand comme une traînée de poudre. De bouche à oreille, les enfants courent la ville, annonçant : "
Le saint est mort, le saint est mort ! " Nombreux sont ceux, en effet, qui se bousculent pour toucher son corps, s’emparer d’une parcelle du vêtement de celui que les Romains appelaient
: "le petit saint français".
Frères et Sœurs de Saint Benoît-Joseph Labre
À Rome, en 1783, saint Benoît-Joseph Labre. Né à Ameth au diocèse de Boulogne, attiré dès son enfance par le désir d’une vie austère, mais malheureux dans ses essais de vie monastique, il entreprit des pèlerinages pénibles aux sanctuaires les plus réputés, vêtu seulement d’un habit grossier et en loques, se nourrissant de ce qu’il mendiait et donnant partout des exemples de piété et de pénitence. Il fit de Rome la dernière étape de son parcours et mourut, un mercredi saint, près de l’église Sainte-Marie des Monts, où il priait assidûment.