Par un pèlerin
24 avril 1945
Je suis allé à Fresnes de bonne heure. Comme j'attendais un client dans la première division, un gardien m'a demandé de me garer derrière une porte. On avait vidé les couloirs, un grand silence régnait. Au fond de l'énorme corridor, j'aperçus une masse noire. Des gendarmes, des policiers, des fonctionnaires allaient chercher un misérable condamné à mort qu'on allait exécuter. Il avait dénoncé des Français et appartenu à la Gestapo.
Un groupe compact s'avança. Le condamné marchait en tête, encadré de deux gendarmes, accompagné d'un prêtre suivi d'une trentaine de personnes. Il était pâle, blanc comme s'il était mort déjà. On allait vite. Il y avait comme une hâte d'en finir. Pas un mot. Sur le passage, les gardiens se découvraient comme au passage d'un enterrement. Atroce vision. Si les juges devaient voir cela, ils ne condamneraient pas.
Maurice Garçon, Journal (1939-1945)
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