Le sentiment du beau dans les arts n’est donné qu’à un petit nombre d’esprits d’élite, et dans notre pays, qui a produit de grands
artistes, il est trop souvent faussé par la tyrannie de la mode. On doit de la reconnaissance aux hommes qui résistent aux entraînements de la foule, et qui, par leur persévérance, parviennent à
réformer ses jugements irréfléchis. À ce titre, Alexandre du Sommerard a bien mérité de ses contemporains, car personne plus que lui n’a contribué à rendre aux arts du moyen âge l’estime qui leur
est due.
Alexandre du Sommerard naquit en 1779, à Bar-sur-Aube. Soldat volontaire à quatorze ans, il prit part à la lutte généreuse de la
France contre l’étranger. Rarement l’éducation des camps développe le goût des arts : il fallait qu’il fût inné chez Alexandre du Sommerard, pour qu’au milieu des fatigues et des dangers de la
guerre, la vue des chefs-d’œuvre de l’Italie ait décidé de sa vocation.
Au commencement du siècle, l’antiquité grecque et romaine avait conservé ou retrouvé son prestige, mais le moyen âge et même la
renaissance passaient pour des temps de barbarie, et, sous le nom de gothique, on confondait dans un dédain général les plus beaux ouvrages créés dans notre France pendant une période de plus de
soixante années. Alexandre du Sommerard ne partageait pas les préjugés de son époque. Un des premiers, il distingua les caractères de cet art méprisé ; il en comprit les beautés, il en pénétra,
pour ainsi dire, les secrets. Il fallait une grande sagacité de critique, et un talent d’observation très subtil pour deviner les lois de cette archéologie encore inexplorée. C’était le temps où
l’on regardait l’octogone de Montmorillon comme un temple de druides, et où l’on montrait au Musée de l’artillerie une cuirasse du XVIe siècle pour l’armure de Roland. Du Sommerard observa les
rapports intimes qui existent entre les arts et l’industrie. Non seulement il s’initia à la vie intime et aux mœurs de nos aïeux en étudiant leurs meubles, leurs ustensiles, leurs procédés
de fabrication, mais encore il reconnut qu’il a existé à toutes les époques des ouvriers modestes, dignes du nom d’artistes, et dont les productions révèlent le goût et quelquefois le génie.
Découvrir leurs ouvrages, en faire ressortir les qualités, les proposer comme des modèles à nos fabricants, devint pour du Sommerard une constante préoccupation.
Rendu à la vie civile et attaché à la Cour des Comptes, d’abord en qualité de référendaire, puis de conseiller-maître, il employa
tous ses loisirs et la plus grande partie d’une fortune modeste à réunir, classer et publier une collection d’objets d’art du moyen âge et de la renaissance. Chaque jour son cabinet
s’enrichissait de meubles, de vases, d’ustensiles de toute espèce qu’il arrachait aux destructeurs ; car pendant longtemps, il fut presque le seul qui s’occupât à Paris de recueillir ces
curiosités si recherchées aujourd’hui. Peu à peu il eut des imitateurs, et bientôt des envieux. Personne ne visitait cette riche collection sans perdre quelques préjugés, sans gagner quelque
instruction utile. Toujours prêt à répondre aux questions des gens de goût et même à celles des curieux indiscrets, Alexandre du Sommerard faisait les honneurs de son cabinet avec une politesse
exquise, et, sans avoir l’air de professer, il donnait des leçons d’archéologie pratique qui intéressaient et qu’on n’oubliait point.
On sait avec quelle déplorable insouciance les administrations municipales de Paris ont laissé détruire tant de monuments qui
faisaient la gloire de notre capitale. L’Hôtel de Cluny, seul reste des palais du moyen âge, autrefois si nombreux à Paris, dut sa conservation à du Sommerard, qui vint y établir son
domicile et y placer sa collection comme une espèce de sauvegarde. C’est là qu’il termina son grand ouvrage, les Arts au moyen âge (Paris, 1838-1846, 5 vol. et 510 planches), résumé de ses
voyages, de ses longues études, de ses immenses lectures. On peut regretter que l’auteur n’ait pas adopté un plan plus didactique ; mais du Sommerard, par un sentiment de modestie exagérée, n’a
pas voulu enseigner ce qu’il savait mieux que personne. Il s’est borné à exposer ses impressions personnelles, à décrire les monuments qu’il a vus, à signaler à l’attention leurs singularités,
leurs caractères, leurs défauts et leurs beautés. Bien loin de faire rentrer des faits choisis dans une théorie quelconque, il s’est appliqué surtout à rassembler des observations exactes, et ce
n’est qu’avec une certaine timidité qu’il y joint parfois des considérations très élevées sur l’art et l’archéologie. Il avait préludé à ce grand travail par une notice sur la ville de
Provins (Vues de Provins, sans nom d’auteur, 1822, 1 vol. in-4°). Ce fut une des premières applications de la lithographie à la description des monuments. Des explications intéressantes
accompagnent des planches qui représentent les nombreuses antiquités de Provins. Bien que destinées surtout aux gens du monde, elles renferment d’utiles renseignements historiques et
archéologiques. On lui doit également une description et une notice historique sur l’Hôtel de Cluny et les Thermes, qui attirèrent l’attention publique sur ces deux monuments.
Entouré d’une famille nombreuse et unie, recherchée et aimée de tout le monde, Alexandre du Sommerard ne connut qu’une pensée
pénible, c’est qu’après lui sa collection pourrait être dispersée et perdue pour le pays. Il avait refusé les offres avantageuses d’un ambassadeur d’Angleterre, espérant que tôt ou tard le
gouvernement français formerait un musée national de toutes les productions des arts et de l’industrie. Ce vœu ne devait être exaucé qu’après sa mort. Les Chambres, avec un honorable
empressement, votèrent des fonds pour l’acquisition de son cabinet et de l’Hôtel de Cluny, et le ministre de l’intérieur voulut que le directeur de ce nouveau musée fût un fils d’Alexandre du
Sommerard, instruit par ses leçons et compagnon de ses voyages et de ses travaux archéologiques.
Tout en se consacrant à la réhabilitation du moyen âge, du Sommerard n’était point insensible aux efforts de l’art contemporain. Il
aimait les artistes, et était heureux de les encourager et de les soutenir à leurs débuts. Habile à découvrir le talent ignoré, il parvint souvent à le signaler à l’attention du public, si
difficile à captiver. Un seul trait peindra cet excellent homme. Il avait acheté à un de nos meilleurs peintres, encore inconnu, un tableau auquel personne n’avait fait attention. Dans le
cabinet d’Alexandre du Sommerard, il fut remarqué. Un financier voulut l’avoir, parce qu’il le voyait chez un connaisseur, et offrit de le payer le double de ce qu’il avait coûté. Du Sommerard
accepte le marché avec empressement, reçoit l’argent et court aussitôt le porter à l’artiste : "Gardez tout, lui dit-il ; quand vous aurez le temps, vous me ferez une copie". La vie
d’Alexandre du Sommerard est pleine de semblables traits.
Il mourut à Paris le 19 août 1842, à la suite d’une douloureuse maladie. Il consacrait ses journées aux devoirs de son emploi et ses
nuits à ses études chéries. Sa forte constitution succomba à l’excès du travail, et il fut enlevé à soixante-trois ans, au moment même où il venait d’achever son grand ouvrage.
P. MÉRIMÉE
NOTICE SUR LA VIE ET LES TRAVAUX D’ALEXANDRE DU SOMMERARD
Fondateur des collections de l’Hôtel de Cluny
Décédé le 19 août 1842
par Prosper MÉRIMÉE
Membre de l’Académie française, Inspecteur général des Monuments historiques
1843
Le Musée National du Moyen-Âge
" En 1832, la fantaisie d’un amateur, collecteur depuis longtemps d’objets d’art d’époques analogues à celles de la
construction de l’hôtel de Cluny, lui suggéra l’idée d’ajouter à l’effet de sa collection par l’harmonie du cadre."
C’est Alexandre Simon Nicolas Du Sommerard qui s’exprime ainsi en 1834 dans ses Notices sur l’hôtel de Cluny. Certes,
l’originalité du personnage tient essentiellement à cette invention d’amateur-collectionneur, "d’antiquaire", et son œuvre d’historien se mesure au succès de sa publication monumentale, Les
Arts au Moyen Âge. Ses collections personnelles mises à la disposition du public en sont la justification combien originale. Il s’en explique : "Sacrifiant au goût du jour, l’ardeur pour le
Moyen Âge s’est étendue du prestige historique aux objets matériels", il n’a pas l’intention de publier "un ouvrage didactique sur l’art mais de livrer des idées et des sentiments personnels avec
accompagnement de notes explicatives".
Sa formation est entièrement autodidacte. Il n’a pas plus fait d’études de droit pour mener sa carrière de fonctionnaire que
d’études classiques pour se former le goût. Parallèlement à une carrière tracée par son père, il s’occupe activement d’histoire nationale. Très jeune, à peine âgé de 14 ans, au détriment d’études
commencées au collège de Chaumes-en-Brie, et suivant l’exemple de son frère Sébastien, il s’engage comme volontaire national dans les guerres de Vendée. Un peu plus tard, il prend part à la
campagne d’Italie. C’est peut-être alors que s’éveillent en lui les goûts artistiques et historiques et que se développe son instinct de collection. Peut-être aussi que, témoin d’actes de
vandalisme, il se résout à œuvrer pour la sauvegarde des monuments et des œuvres d’art… Il écrit, dans la préface des Vues de Provins : "Écrasons l’infâme tandis que notre sol est à la veille
d’être dépouillé de ses produits". Il reconnaît "avoir concouru, dès son jeune âge, au mouvement réactionnaire qui fait aujourd’hui presque un culte nouveau de l’étude de nos vieux
monuments". Installé à Paris, il débute une carrière de fonctionnaire ouverte par son père dans l’administration
financière. Son mariage avec Adélaïde Simon, issue d’une famille de la bourgeoisie champenoise, lui assure une situation confortable. Les époux s’installent rue Ménars dans l’appartement du
beau-père. Une gravure de 1823 par Xavier Leprince montre le salon cossu, tapissé de tableaux et de grandes glaces reflétant d’imposants lustres de cristal.
Son esprit curieux et sa jovialité naturelle lui font rechercher la compagnie des hommes. Il participe à la création des
nombreuses sociétés savantes qui fleurissent en cette période romantique et d’ardeur nationale : Société des amis des arts, Société de l’histoire de France, Société des antiquaires de France…
Autodidacte mais résolu, c’est au contact des historiens, des hommes de lettres, des artistes qu’il crée et développe son goût et sa ferveur pour l’histoire nationale. Sa fréquentation assidue
des réunions savantes lui donne l’occasion de rencontrer archéologues, historiens, collectionneurs. Son nom apparaît régulièrement dans les procès-verbaux des séances du jeune Comité historique
créé par François Guizot, ministre de l’Intérieur, et auquel il participe avec ponctualité, défendant l’héritage des temps anciens et notamment médiévaux.
L’inventaire des objets laissés après sa mort ne donne pas trace de sa bibliothèque, mais il paraît vraisemblable qu’il a connu
Xavier Willemin, qui fait publier à partir de 1818 les Monuments français pour servir à l’histoire des arts. Il eut en sa possession les albums des Peintures et Ornements des
manuscrits écrits par le comte Bastard d’Estang que lui offrit le jeune ministre Adolphe Thiers lors de la visite de son cabinet en 1832. Certaines des vignettes de ses propres planches s’en
inspirent. Achille Jubinal lui dédicace un exemplaire des Anciennes Tapisseries historiées, paru en 1838. Il rend hommage à l’érudit Toussaint-Bernard Émeric-David, grand initiateur en
fait de l’histoire et de l’archéologie, dont il loue "la science profonde enfouie dans les discours historiques sur l’art". Les manuscrits laissés au musée montrent l’énorme travail de lecture
réalisé tant des sources (Recueil des ordonnances des rois de France) que des publications anciennes ou contemporaines (Bernard de Montfaucon, Jean-Baptiste de Lacurne de Sainte-Palaye,
Jules Michelet, abbé Lebeuf…).
Après avoir collectionné, très jeune, dessins, tableaux et gravures dont il se sépare en deux ventes publiques, il se découvre une
passion pour les œuvres d’art du passé et, en quelques années, il constitue une collection nombreuse de "vieilleries", dont la plupart des pièces datent des XVe et XVIe siècles. Il aime les
replonger dans leur histoire qu’il étudie avec sérieux – ces notes de lectures en font foi. Il ne dédaigne pas les objets très modestes, ce qui les fait considérer parfois par ses contemporains
comme un "brocanteur". Le portrait-charge en buste par Dantan le Jeune, en 1836, le représente en costume solennel de conseiller-maître mais les bras chargés de toutes sortes d’objets
hétéroclites.
S’il prend comme devise More Majorum, c’est qu’il veut redonner vie au passé mais n’hésite pas le recomposer. Il adapte
texte historique et objet historique. Il se plaît à retrouver des provenances illustres pour ses "reliques". Dans l’hôtel de Cluny où il s’installe en 1832, il met en scène ses collections, la
chambre de François Ier, la chapelle : "Dans la chapelle de l’hôtel furent rangés avec ordre tous les objets qui
avaient eu jadis une destination religieuse, tels les reliquaires, chasses, livres d’église, etc. Les coupes, les faïences, les poteries trouvèrent leur place dans la salle à manger, les objets
d’ameublement tels que lits, sièges, tapis, candélabres, etc. servirent à orner une vaste chambre qui, de l’époque même de ses meubles, prit le nom de François Ier."
Il propose à ses contemporains un discours historique justifié "par une collection méthodique des brillantes dépouilles de nos
aïeux", qui peut être ajouté à la lecture de l’histoire elle-même. Toutefois, il peut arriver que la représentation de l’histoire outrepasse sa réalité. Il affirme ainsi dans le prologue de sa
publication "qu’il ne conviendrait à aucun égard de reprendre, dans un ouvrage aussi positif que le nôtre, des scènes quelque dramatiques qu’elles soient, sur lesquelles l’histoire contemporaine
se tait ; aussi renvoyons-nous le lecteur avide d’émotions au curieux ouvrage de M. Lacroix". Il fait allusion à un épisode du Roi des ribauds, roman écrit par Paul Lacroix en 1831, et
que l’auteur situe dans la chapelle de l’hôtel de Cluny. Malgré cet avertissement, il ne peut s’empêcher de faire graver par Achille Devéria une vignette qui illustre la scène de capitulation de
Marie, la Reine blanche, veuve de Louis XII, sommée d’épouser son amant par François d’Angoulême, futur François Ier, et menacée par le roi des ribauds armé d’une hache !
L’annonce de la publication Les Arts au Moyen Âge. En ce qui concerne le palais romain de Paris, l’hôtel de Cluny issu de ses
ruines et les objets d’art de la collection classée dans cet hôtel explique clairement le propos, le plan et la conduite de l’ouvrage. La réunion des pièces de la collection de Du Sommerard
dans des bâtiments historiques sert de support à une histoire du Moyen Âge dont il constate qu’elle n’existe pas spécialement pour la France. L’auteur veut produire un choix d’illustrations qui
puisse évoquer la vie médiévale. Il y ajoute les descriptions de "monuments encore debout de notre vieille monarchie". Il reprend l’œuvre d’Aubin-Louis Millin, de Xavier Willemin et s’inspire des
planches du Voyage de l’ancienne France édité par le baron Taylor, Charles Nodier et Alphonse de Cailleux, futur directeur des musées. Comme eux, il use de la lithographie, technique que
pratiquait Godard, l’un des habitants de l’hôtel de Cluny. Il fait appel à des artistes avec lesquels il entretient de bonnes relations, notamment par la Société des amis des arts. Son fils
Edmond, qui suit des études artistiques, donne vingt-huit planches. Des peintres, dessinateurs, lithographes, plus ou moins connus, y participent, tels Achille Devéria, Eugène-Hyacinthe Langlois,
Nicolas Chapuy, Charles Fichot, Henry et Victor Petit, Charles Renoux, Émile Sagot. Beaucoup avaient déjà collaboré à d’autres recueils de ce type, comme le Voyage pittoresque du baron
Taylor (1842-1845) ou Le Moyen Âge monumental et archéologique publié par Nicolas Chapuy (1840-1842).
Outre des objets d’art et du mobilier, Du Sommerard fait représenter des édifices religieux et civils français et parfois
italiens. Sa collection personnelle est mise à contribution mais aussi nombre d’autres collections publiques ou privées, celles d’Édouard Gatteaux, de Debruge-Duménil, de Louis-Hilaire Carrand,
de Charles Sauvageot, de Guy de Pourtalès, du marquis de Trivulce, etc.
Ainsi, "les planches comprenaient les produits de l’inspiration religieuse comme les caprices de l’art profane, le vitrail
légendaire et la vitre armoriée, le missel et le roman de chevalerie, les chartes et les horoscopes de nos princes et de leurs maîtresses, les diptyques et les miroirs, les éperons et étriers
royaux, comme le bâton pastoral et la chaise épiscopale, l’ostensoir et le bouclier, la crosse et l’estocade, le ciboire et le hanap, la chasuble et la cuirasse, choses d’ailleurs très
conciliables dans les mœurs chevaleresques". L’ouvrage entend faire saisir le développement des arts mais dans une effervescence toute romantique, pour ne pas dire romanesque ! L’exhibition (sic)
de sa collection dans l’hôtel de Cluny reproduit cette même aimable confusion. Après son installation dans l’hôtel de Cluny, en 1832, Du Sommerard prend plaisir à faire les honneurs de sa demeure
et, jusqu’à sa mort, cette dernière fut un point de réunion pour les artistes et les archéologues.
Cette recherche d’atmosphère, véritable méthode muséographique, ne cache pas un authentique intérêt pour les monuments et les
produits de l’art. Mais comme tout collectionneur, Du Sommerard attache chaque objet à une illustre origine – ainsi pour l’échiquier de saint Louis, la porte d’Anet, le lit de François Ier, et
c’est de cette manière que sont légendées les lithographies de ses albums – ou à un artiste illustre, Jean de Bologne, Bernard Palissy ou Jean Goujon. Son idéal résolument monarchiste n’est pas
étranger à cette manie. Achille Devéria le portraiture, en 1838, dans sa galerie des Contemporains, tenant une statuette de Jeune femme que "l’antiquaire" attribue à Jean de Bologne. Le charme
pittoresque de sa demeure séduit les visiteurs de l’époque. Maints témoignages en subsistent : celui d’Achille Jubinal (L’Artiste, 1834), de Michelet en 1835, de Mme de Saint-Surin
(L’Hôtel de Cluny, 1835) ou les hommages de Jules Janin, après sa mort en 1842, dans Le Journal des débats et de Prosper Mérimée dans une Notice sur la vie et les travaux
d’Alexandre Dusommerard : "Il faisait les honneurs de son cabinet avec une politesse exquise, et sans l’air de professer, il donnait des leçons d’archéologie pratiques qui intéressaient et
que l’on n’oubliait point" (1843).
Du Sommerard croyait que c’était "le caractère d’étrangeté et l’aspect insolite de cette exhibition" qui faisaient le succès de ce
spectacle gratis. Il avait aussi conscience que son geste augmentait l’intérêt de conservation "de ces débris échappés au naufrage". Les arts du Moyen Âge et de la Renaissance avaient pour lui
valeur actuelle. Il désirait que la connaissance exacte du passé servît de guide au présent. À la mort du collectionneur, ces arguments vont servir pour l’acquisition par l’État de la collection
et des bâtiments qui l’abritaient, afin de faciliter et rendre populaire l’étude de l’histoire nationale. Poursuivant son œuvre, l’État achète donc la collection et l’hôtel de Cluny, en le
réunissant aux thermes antiques. Le fils d’Alexandre, Edmond, est le premier conservateur du musée ainsi créé, tandis qu’Albert Lenoir, fils du fondateur du musée des Monuments français, est
désigné comme l’architecte chargé de la restauration des bâtiments.
Viviane Huchard †, ancienne directrice du musée national du Moyen Âge et des Thermes de Cluny
Institut National d’Histoire de l’Art - Notice : DU SOMMERARD,
Alexandre
Portrait d'Alexandre Du Sommerard