La sainte la plus grande après sainte Marie

Les armes de Satan c’est la paix et la guerre,
Les peuples éventrés, les sacrements par terre,
La honte, la terreur, la rage militaire ;


Les armes de Jésus c’est la guerre et la paix,
Les peuples respectés et les derniers harnais
De guerre suspendus aux frontons des palais ;


Les armes de Satan c’est l’horreur de la guerre,
Les peuples affolés, Jésus sur le Calvaire,
Le sang, le cri de mort, le meurtre volontaire ;


Les armes de Jésus c’est l’honneur de la guerre,
Les peuples rétablis, Jésus sur le Calvaire,
Le sang, le sacrifice et la mort volontaire


Pour qu’elle vît venir sous un tel étendard
De Jésus-Christ soldat contre Satan soudard,
Vers le vieux saint Etienne et le vieux saint Médard ;


Pour qu’elle vît venir par un chemin de terre,
Comme une jeune enfant qui vient vers sa grand-mère,
Par les bois de Puteaux, par les champs de Nanterre ;


Pour qu’elle vît venir ardente et militaire,
Obéissante et ferme et douce et volontaire,
Sur Boulogne et Neuilly, sur Puteaux et Nanterre ;


Hauturière et docile, alerte et droiturière,
Et prompte à la manoeuvre et peu procédurière,
Destinée à périr comme une aventurière ;


Bien en selle en avant de sa cavalerie,
Masquant ses bombardiers et sa bombarderie,
Traînant comme un réseau sa lourde infanterie ;


Ameutant ses tambours qui battaient pour la messe,
Gourmandant ces brigands qui couraient à confesse,
Déférente aux trois voix qui scellaient leur promesse ;


Ayant mis les soldats au pas sacramentaire,
Ayant mis les curés au pas réglementaire,
Et logé les Vertus au train régimentaire ;


Bien allante et vaillante et sans étourderie,
Bien venante et plaisante et sans coquetterie,
Bien disante et parlante et sans bavarderie ;


Révérant les coffrets sertis de pierrerie
Où les reliefs des saints ouvrés d’orfèvrerie
Reposent sur l’autel et sur la broderie ;


Sage comme une aïeule en sa tendre jeunesse,
Cadette ayant conquis le plus beau droit d’aînesse,
Grave et les yeux plus clairs que d’une chanoinesse,


La sainte la plus grande après sainte Marie.




Jeanne d'Arc en prière



texte de Charles Péguy :
La tapisserie de sainte Geneviève et de Jeanne d’Arc

tableau de Ary Sheffer
à l'église Saint Denys de la Chapelle
où Jeanne passa une nuit en prière



Saint Denys de la Chapelle à Paris 18e

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Tu as le don pour nous trouver des oeuvres rares, précieuses et méconnues, merci cher Assum !
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