Jéhova de la terre a consacré les cimes
Elles sont de ses pas le divin marchepied
C'est là qu'environné de ses foudres sublimes
Il vole, il descend, il s'assied.
Sina, l'Olympe même, en conservent la trace
L'Oreb, en tressaillant, s'inclina sous ses pas
Thor entendit sa voix, Gelboé vit sa face
Golgotha pleura son trépas.
Dieu que l'Hébron connait, Dieu que Cédar adore
Ta gloire à ces rochers jadis se dévoila
Sur le sommet des monts nous te cherchons encore
Seigneur, réponds-nous ! es-tu là ?
Paisibles habitants de ces saintes retraites
Comme l'ont entendu les guides d'Israël
Dans le calme des nuits, des hauteurs où vous êtes
N'entendez-vous donc rien du ciel ?
Ne voyez-vous jamais les divines phalanges
Sur vos dômes sacrés descendre et se pencher ?
N'entendez-vous jamais des doux concerts des anges
Retentir l'écho du rocher ?
Quoi ! l'âme en vain regarde, aspire, implore, écoute
Entre le ciel et nous, est-il un mur d'airain ?
Vos yeux, toujours levés vers la céleste voûte
Vos yeux sont-ils levés en vain ?
Pour s'élancer, Seigneur, où ta voix les appelle
Les astres de la nuit ont des chars de saphirs
Pour s'élever à toi, l'aigle au moins a son aile
Nous n'avons rien que nos soupirs !
Que la voix de tes saints s'élève et te désarme
La prière du juste est l'encens des mortels
Et nous, pêcheurs, passons : nous n'avons qu'une larme
A répandre sur tes autels.
LAMARTINE, Improvisée à la Grande-Chartreuse (août 1823)
La Porte de la Grande-Chartreuse, François Frédéric Grobon
Méditations poétiques, Nouvelles méditations poétiques
" Plus je montais, plus je voyais Dieu. " (Nouvelles méditations poétiques)