Crist-Pantocrator.jpg

"Je vous donne un commandement nouveau : c'est de vous aimer les uns les autres.

 

Comme je vous ai aimés, vous aussi aimez-vous les uns les autres.

 

Ce qui montrera à tous les hommes que vous êtes mes disciples, c'est l'amour que vous aurez les uns pour les autres."

 

Evangile de Jésus-Christ selon  saint Jean 

   

 

Pentecôte

" Le Défenseur, l'Esprit Saint que le Père enverra en mon nom, lui, vous enseignera tout, et il vous fera souvenir de tout ce que je vous ai dit."

 

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean  

 

   

 

 El Papa es argentino. Jorge Bergoglio                 

Saint Père François

 

 

La Manif Pour Tous 

La Manif Pour Tous photo C de Kermadec

La Manif Pour Tous Facebook 

 

 

Les Veilleurs Twitter 

Les Veilleurs

Les Veilleurs Facebook

 

 

 

papa%20GP%20II

1er mai 2011 Béatification de Jean-Paul II

Béatification du Serviteur de Dieu Jean-Paul II

 

 

  Béatification du Père Popieluszko

beatification Mass, in Warsaw, Poland

à Varsovie, 6 juin 2010, Dimanche du Corps et du Sang du Christ

 

 

presidential palace in Warsaw

Varsovie 2010

 

 

Basilique du Sacré-Cœur de Montmartre
Sanctuaire de l'Adoration Eucharistique et de la Miséricorde Divine

La miséricorde de Dieu est comme un torrent débordé. Elle entraîne les cœurs sur son passage.
(Saint Curé d'Ars)
 

 


Le côté du Christ a été transpercé et tout le mystère de Dieu sort de là. C’est tout le mystère de Dieu qui aime, qui se livre jusqu’au bout, qui se donne jusqu’au bout. C’est le don le plus absolu qui soit. Le don du mystère trinitaire est le cœur ouvert. Ce n’est pas une image, c’est une réalité. C’est la réalité la plus profonde qui soit, la réalité de l’amour.
Père Marie-Joseph Le Guillou




Dans le cœur transpercé
de Jésus sont unis
le Royaume du Ciel
et la terre d'ici-bas
la source de la vie
pour nous se trouve là.

Ce cœur est cœur divin
Cœur de la Trinité
centre de convergence
de tous les cœur humains
il nous donne la vie
de la Divinité.


Sainte Thérèse Bénédicte de la Croix
(Edith Stein)



Le Sacré-Cœur représente toutes les puissances d'aimer, divines et humaines, qui sont en Notre-Seigneur.
Père Marie-Eugène de l'Enfant Jésus

 



feuille d'annonces de la Basilique du Sacré-Coeur de Montmartre

 

 

 

 

 

 

 

     

The Cambrai Madonna

Notre Dame de Grâce

Cathédrale de Cambrai

 

 

 

Cathédrale Notre Dame de Paris 

   

Ordinations du samedi 27 juin 2009 à Notre Dame de Paris


la vidéo sur KTO


Magnificat

     



Solennité de l’Immaculée Conception de la Vierge Marie à Notre-Dame de Paris


NOTRE DAME DES VICTOIRES

Notre-Dame des Victoires




... ma vocation, enfin je l’ai trouvée, ma vocation, c’est l’Amour !

 

 

Rechercher

Voyages de Benoît XVI

 

SAINT PIERRE ET SAINT ANDRÉ

Saint Pierre et Saint André

 

BENOÎT XVI à CHYPRE 

 

Benedict XVI and Cypriot Archbishop Chrysostomos, Church of 

Salutation avec l'Archevêque Chrysostomos à l'église d' Agia Kyriaki Chrysopolitissa de Paphos, le vendredi 4 juin 2010

 

     

 

Benoît XVI en Terre Sainte  


 

Visite au chef de l'Etat, M. Shimon Peres
capt_51c4ca241.jpg

Visite au mémorial de la Shoah, Yad Vashem




 






Yahad-In Unum

   

Vicariat hébréhophone en Israël

 


 

Mgr Fouad Twal

Patriarcat latin de Jérusalem

 

               


Vierge de Vladimir  

Archives

    

 

SALVE REGINA

19 mars 2010 5 19 /03 /mars /2010 15:00

XXXII. DEUXIÈME CHUTE DE JÉSUS SOUS LA CROIX

La mère de Jésus, toute navrée de douleur, avait quitté le Forum près d'une heure auparavant, après le prononcé du jugement inique qui condamnait son fils, elle était accompagnée de Jean et de quelques femmes. Elle avait visité plusieurs endroits sanctifiés par les souffrances du Seigneur, mais lorsque le son de la trompette, l'empressement du peuple et la mise en mouvement du cortège de Pilate annoncèrent le départ pour le Calvaire, elle ne put résister au désir de voir encore son divin fils, et elle pria Jean de la conduire à un des endroits où Jésus devait passer.

Ils venaient du quartier de Sion ; ils longèrent un des cotés de la place que Jésus venait de quitter, et passèrent par des portes et des allées ordinairement fermées, mais qu'on avait laissées ouvertes parce que la foule se précipitait dans toutes les directions. Ils passèrent ensuite par le côté occidental d'un palais dont une porte s'ouvrait sur la rue où entra le cortège après la première chute de Jésus. Je ne sais plus bien si ce bâtiment n'était pas une dépendance du palais de Pilate, avec lequel il semblait communiquer par des cours et des allées ; mais d'après mes souvenirs d'aujourd'hui, je crois plutôt que c'était la demeure du grand-prêtre Caïphe, car son tribunal seul était à Sion. Jean obtint d'un domestique ou d'un portier compatissant la permission d'aller gagner la porte en question avec Marie et ceux qui l'accompagnaient. Un des neveux de Joseph d'Arimathie était avec eux, Suzanne, Jeanne Chusa et Salomé de Jérusalem accompagnaient la sainte Vierge.

Quand je vis la mère de Dieu, pâle, les yeux rouges de pleurs, tremblante et se soutenant à peine, traverser cette maison, enveloppée de la tête aux pieds dans un manteau d'un gris bleuâtre, je me sentis le cœur tout déchiré. On entendait déjà le bruit du cortège qui s'approchait, le son de la trompette et la voix du héraut criant le jugement au coin des rues. La porte fut ouverte par le domestique ; le bruit devint plus distinct et plus effrayant. Marie pria et dit à Jean : “Dois-je voir ce spectacle ? dois-je m'enfuir ? comment pourrai-je le supporter ? - Si vous ne restiez pas, répondit Jean, vous vous le reprocheriez amèrement plus tard”. Ils passèrent alors la porte ; elle s'arrêta et regarda à droite sur le chemin qui montait un peu et redevenait uni à l'endroit où était Marie. Hélas ! comme le son de la trompette lui perça le coeur ! Le cortège était encore à quatre-vingts pas de là ; il n'y avait pas de peuple en avant, mais des deux côtés et derrière quelques groupes. Beaucoup de gens de la populace qui avaient quitté le forum, les derniers couraient çà et là par des rues détournées pour trouver des places d'où ils pussent voir le cortège. Lorsque les gens qui portaient les instruments du supplice s'approchèrent d'un air insolent et triomphant, la mère de Jésus se prit à trembler et à gémir, elle joignit ses mains, et un de ces misérables demanda : “Quelle est cette femme qui se lamente ?” Un autre répond : “C'est la mère du Galiléen”. Quand ces scélérats entendirent ces paroles, ils accablèrent de leurs moqueries cette douloureuse mère ; ils la montrèrent au doigt, et l'un d'eux prit dans sa main les clous qui devaient attacher Jésus à la croix, et les présenta à la sainte Vierge d'un air moqueur. Elle regarda Jésus en joignant les mains, et, brisée par la douleur, s'appuya pour ne pas tomber contre la porte, pâle comme un cadavre et les lèvres bleues. Les Pharisiens passèrent sur leurs chevaux, puis l'enfant qui portait l'inscription, puis enfin, à deux pas derrière lui, le fils de Dieu son fils, le très saint, le rédempteur, son bien-aimé Jésus, chancelant, courbé sous son lourd fardeau, détournant douloureusement sa tête couronnée d'épines de la lourde croix qui pesait sur son épaule.

Les archers le tiraient en avant avec des cordes ; son visage était livide, sanglant et meurtris : sa barbe inondée d'un sang à moitié figé qui en collait tous les poils ensemble. Ses yeux éteints et ensanglantés, sous l'horrible tresse de la couronne d'épines, jetèrent sur sa douloureuse mère un regard triste et compatissant, et trébuchant sous son fardeau, il tomba pour la seconde fois sur ses genoux et sur ses mains. Marie, sous la violence de sa douleur, ne vit plus ni soldats ni bourreaux elle ne vit que son fils bien-aimé réduit à ce misérable état ; elle se précipita de la porte de la maison au milieu des archers qui maltraitaient Jésus, tomba à genoux près de lui et le serra dans ses bras. J'entendis les mots : “Mon fils ! Ma mère !” mais je ne sais s'ils furent prononcés réellement ou seulement en esprit.
Il y eut un moment de désordre : Jean et les saintes femmes voulaient relever Marie. Les archers l'injurièrent ; l'un d'eux lui dit : “Femme, que viens-tu faire ici ? Si tu l'avais mieux élevé il ne serait pas entre nos mains !” Quelques soldats furent émus. Cependant ils repoussèrent la sainte Vierge en arrière, mais aucun archer ne la toucha. Jean et les femmes l'entourèrent, et elle tomba comme morte sur ses genoux contre la pierre angulaire de la porte, à laquelle le mur s'appuyait. Elle tournait le dos au cortège ; ses mains touchèrent à une certaine hauteur la pierre contre laquelle elle s'affaissa C'était une pierre veinée de vert. Ses genoux y laissèrent des cavités ; ses mains, à l'endroit où elle les avait appuyées, des marques moins profondes. C'étaient des empreintes un peu confuses, semblables à celles que la main laisse sur une pâte épaisse en frappant dessus. Je vis cette pierre, qui était fort dure, transportée dans la première église catholique établie près de la piscine de Bethsaïda, sous l'épiscopat de saint Jacques-le-Mineur.

J'ai déjà dit, et je le répète ici, que j'ai vu plusieurs fois de semblables empreintes produites sur la pierre par le contact de saints personnages, à l'occasion de grands événements. C'est aussi vrai que ce mot : “Les pierres en seraient émues”.

Les deux disciples qui étaient avec la mère de Jésus l'emportèrent dans l'intérieur de la maison dont la porte fut fermée. Pendant ce temps, les archers avaient relevé Jésus et lui avaient remis d'une autre manière la croix sur les épaules. Les bras de la croix s'étaient détachés : l'un des deux avait glissé et s'était pris dans les cordes. Ce fut celui-ci que Jésus embrassa, de sorte que par derrière la pièce principale penchait davantage vers la terre.

Je vis, çà et là, parmi la populace qui suivait le cortège en proférant des malédictions et des injures, quelques figures de femmes voilées et versant des larmes.
 


LA DOULOUREUSE PASSION DE NOTRE SEIGNEUR JESUS CHRIST
d'après les méditations de la Bienheureuse Anne-Catherine Emmerick
Traduction de l'Abbé de Cazalès
Gallica

Anna Katharina Emmerick
'Die ekstatische Jungfrau Katharina Emmerick' par Gabriel von Max,  München, Neue Pinakothek

Partager cet article
Repost0
19 mars 2010 5 19 /03 /mars /2010 14:00

XXXI. PREMIÈRE CHUTE DE JÉSUS SOUS LA CROIX

La rue, peu avant sa fin, se dirige à gauche, devient plus large et monte un peu ; il y passe un aqueduc souterrain venant de la montagne de Sion ; je crois qu'il longe le forum où courent aussi sous terre des rigoles revêtues en maçonnerie, et qu'il aboutit à la piscine probatique, près de la Porte des Brebis. J'ai entendu le bruit de l'eau coulant dans les conduits. On trouve avant la montée une espèce d'enfoncement où il y a souvent de l'eau et de la boue quand il a plu, et où l'on a placé une grosse pierre pour faciliter le passage, ce qui se voit souvent dans les rues de Jérusalem, lesquelles sont très inégales en plusieurs endroits.

Lorsque Jésus arriva là, il n'avait plus la force de marcher ; comme les archers le tiraient et le poussaient sans miséricorde, il tomba de tout son long contre cette pierre, et la croix tomba prés de lui. Les bourreaux s'arrêtèrent en le chargeant d'imprécations et en le frappant à grands coups de pied ; le cortège s'arrêta un moment en désordre : c'était en vain qu'il tendait la main pour qu'on l'aidât : “Ah ! dit-il, ce sera bientôt fini”, et il pria pour ses bourreaux ; mais les Pharisiens crièrent : “Relevez-le ; sans cela il mourra dans nos mains.” Des deux côtés du chemin on voyait ça et là des femmes qui pleuraient et des enfants qui s'effrayaient.

Soutenu par un secours surnaturel Jésus releva la tête, et ces hommes abominables, au lieu d'alléger ses souffrances, lui remirent ici la couronne d'épines. Lorsqu'ils l'eurent remis sur ses pieds en le maltraitant, ils replacèrent la croix sur son dos, et il lui fallut pencher de côté, avec des souffrances inouïes, sa tête déchirée par les épines, afin de faire place sur son épaule au fardeau dont il était chargé. C'est avec ce nouvel accroissement à ses tortures qu'il gravit en chancelant la montée que présentait ici la rue devenue plus large.
 


LA DOULOUREUSE PASSION DE NOTRE SEIGNEUR JESUS CHRIST
d'après les méditations de la Bienheureuse Anne-Catherine Emmerick
Traduction de l'Abbé de Cazalès
Gallica

Anna Katharina Emmerick
'Die ekstatische Jungfrau Katharina Emmerick' par Gabriel von Max,  München, Neue Pinakothek

Partager cet article
Repost0
18 mars 2010 4 18 /03 /mars /2010 07:00

XXX. JÉSUS PORTE SA CROIX

Lorsque Pilate eut quitté son tribunal, une partie des soldats le suivit et se rangea devant le palais pour former le cortège ; une petite escorte resta près des condamnés.


Vingt-huit Pharisiens armés, parmi lesquels les six ennemis acharnés de Jésus qui avaient pris part à son arrestation sur le Mont des Oliviers, vinrent à cheval sur le forum pour l'accompagner au supplice. Les archers conduisirent le Sauveur au milieu de la place, et plusieurs esclaves entrèrent par la porte occidentale, portant le bois de la croix qu'ils jetèrent à ses pieds avec fracas. Les deux bras étaient provisoirement attachés à la pièce principale avec des cordes. Les coins, le morceau de bois destiné à soutenir les pieds, l'appendice qui devait recevoir l'écriteau et divers autres objets furent apportés par des valets du bourreau.

Jésus s'agenouilla par terre, près de la croix, l'entoura de ses bras et la baisa trois fois, en adressant à voix basse à son Père un touchant remerciement pour la rédemption du genre humain qui commençait. Comme les prêtres, chez les païens, embrassaient un nouvel autel, le Seigneur embrassait sa croix, cet autel éternel du sacrifice sanglant et expiatoire. Les archers relevèrent Jésus sur ses genoux, et il lui fallut à grand peine charger ce lourd fardeau sur son épaule droite. Je vis des anges invisibles l'aider, sans quoi il n'aurait pas même pu le soulever. Il resta à genoux, courbé sous son fardeau.

Pendant que Jésus priait, des exécuteurs firent prendre aux deux larrons les pièces transversales de leurs croix, ils les leur placèrent sur le cou et y lièrent leurs mains : les grandes pièces étaient portées par des esclaves. Les pièces transversales n'étaient pas droites, mais un peu courbées. On les attacha, lors du crucifiement, à l'extrémité supérieure du tronc principal. La trompette de la cavalerie de Pilate se fit entendre, et un des Pharisiens à cheval s'approcha de Jésus agenouillé sous son fardeau, et lui dit : "Le temps des beaux discours est passé ; qu'on nous débarrasse de lui. En avant, en avant !" On le releva violemment, et il sentit tomber sur ses épaules tout le poids que nous devons porter après lui, suivant ses saintes et véridiques paroles.
Alors commença la marche triomphale du Roi des rois, si ignominieuse sur la terre, si glorieuse dans le ciel.

On avait attaché deux cordes au bout de l'arbre de la croix, et deux archers la maintenaient en l'air avec des cordes, pour qu'elle ne tombât pas par terre ; quatre autres tenaient des cordes attachées à la ceinture de Jésus ; son manteau, relevé, était attaché autour de sa poitrine. Le Sauveur, sous le fardeau de ces pièces de bois liées ensemble, me rappela vivement Isaac portant vers la montagne le bois destiné au sacrifice où lui-même devait être immolé.

Le trompette de Pilate donna le signal du départ, parce que le gouverneur lui-même voulait se mettre à la tête d'un détachement pour prévenir toute espèce de mouvement tumultueux dans la ville. Il était à cheval, revêtu de son armure, et entouré de ses officiers et d'une troupe de cavaliers. Ensuite venait un détachement d'environ trois cents soldats d'infanterie, tous venus des frontières de l'Italie et de la Suisse. En avant du cortège allait un joueur de trompette, qui en sonnait à tous les coins de rue et proclamait la sentence. Quelques pas en arrière marchait une troupe d'hommes et d'enfants qui portaient des cordes, des clous, des coins et des paniers où étaient différents objets ; d'autres, plus robustes, portaient des porches, des échelles et les pièces principales des croix des deux larrons ; puis venaient quelques-uns des Pharisiens à cheval ; et un jeune garçon qui portait devant sa poitrine l'inscription que Pilate avait faite pour la croix ; il portait aussi, au haut d'une perche, la couronne d'épines de Jésus, qu'on avait jugé ne pouvoir lui laisser sur la tête pendant le portement de la croix. Ce jeune homme n'était pas très méchant.

Enfin s'avançait Notre Seigneur, les pieds nus et sanglants, courbé sous le pesant fardeau de la croix, chancelant, déchiré, meurtri, n'ayant ni mangé, ni bu, ni dormi depuis la Cène de la veille, épuisé par la perte de son sang, dévoré de fièvre, de soif, de souffrances intérieures infinies ; sa main droite soutenait la croix sur l'épaule droite ; sa gauche, fatiguée, faisait par moments un effort pour relever sa longue robe, où ses pieds mal assurés s'embarrassaient. Quatre archers tenaient à une grande distance le bout des cordes attachées à sa ceinture ; les deux archers de devant le tiraient à eux, les deux qui suivaient le poussaient en avant, en sorte qu'il ne pouvait assurer aucun de ses pas et que les cordes l'empêchaient de relever sa robe. Ses mains étaient blessées et gonflées par suite de la brutalité avec laquelle elles avaient été garrottées précédemment, son visage était sanglant et enflé, sa chevelure et sa barbe souillée de sang ; son fardeau et ses chaînes pressaient sur son corps son vêtement de laine, qui se collait à ses plaies et les rouvrait. Autour de lui, ce n'était que dérision et cruauté : mais ses souffrances et ses tortures indicibles ne pouvaient surmonter son amour ; sa bouche priait, et son regard éteint pardonnait.

Les deux archers placés derrière lui qui maintenaient en l'air l'extrémité de l'arbre de la croix à l'aide des cordes qui y étaient attachées augmentaient les souffrances de Jésus en déplaçant le fardeau qu'ils élevaient et faisaient tomber tour à tour. Le long du cortège marchaient plusieurs soldats armés de lances ; derrière Jésus venaient les deux larrons, conduits aussi avec des cordes chacun par deux bourreaux ; ils portaient sur la nuque les pièces transversales de leurs croix, séparées du tronc principal, et leurs bras étendus étaient attachés aux deux bouts. Ils n'avaient que des tabliers : la partie supérieure de leur corps était couverte d'une espèce de scapulaire sans manches et ouvert des deux côtés ; leur tête était coiffée d'un bonnet de paille. Ils étaient un peu enivrés par suite d'un breuvage qu'on leur avait fait prendre. Cependant le bon larron était très calme ; le mauvais, au contraire, était insolent, furieux et vomissait des imprécations ; les archers étaient des hommes bruns, petits, mais robustes avec des cheveux noirs, courts et hérissés ; ils avaient la barbe rare et peu fournie, ils n'avaient pas la physionomie juive : c'étaient des ouvriers du canal appartenant à une tribu d'esclaves égyptiens. Ils portaient des jaquettes courtes et des espèces de scapulaires de cuir sans manches : ils ressemblaient à des bêtes sauvages. La moitié des Pharisiens à cheval fermait la marche ; quelques-uns de ces cavaliers couraient ça et là pour maintenir l'ordre. Parmi les gens qui allaient en avant, portant divers objets, se trouvaient quelques enfants de basse condition, qui s'y étaient joints de leur propre mouvement. A une assez grande distance était le cortège de Pilate ; le gouverneur romain était en habit de guerre, au milieu de ses officiers, précédé d'un escadron de cavalerie et suivi de trois cents soldats à pied : il traversa le forum, puis entra dans une rue assez large. Il parcourait la ville afin de prévenir tout mouvement populaire.


Jésus fut conduit par une rue excessivement étroite et longeant l'arrière des maisons, afin de laisser place au peuple qui se rendait au Temple, et aussi pour ne pas gêner Pilate et sa troupe. La plus grande partie du peuple s'était mise en mouvement aussitôt après la condamnation. La plupart des Juifs se rendirent dans leurs maisons ou dans le Temple, afin de terminer à la hâte leurs préparatifs pour l'immolation de l'agneau pascal ; toutefois, la foule, composée d'un mélange de toute sorte de gens, étrangers, esclaves, ouvriers, femmes et enfants, était encore grande, et on se précipitait en avant de tous les côtés pour voir passer le triste cortège ; l'escorte des soldats romains empêchait qu'on ne s'y joignit, et les curieux étaient obligés de prendre des rues détournées et de courir en avant : la plupart allèrent jusqu'au Calvaire. La rue par laquelle on conduisit Jésus était à peine large de deux pas ; elle passait derrière des maisons, et il y avait beaucoup d'immondices.

Il y eut beaucoup à souffrir : les archers se trouvaient tout près de lui, la populace aux fenêtres l'injuriait, des esclaves lui jetaient de la boue et des ordures, de méchants garnements versaient sur lui des vases pleins d'un liquide noir et infect, des enfants même, excités par ses ennemis, ramassaient des pierres dans leurs petites robes, et couraient à travers le cortège pour les jeter sous ses pieds en l'injuriant. C'était ainsi que les enfants le traitaient, lui qui avait aimé les enfants, qui les avait bénis et déclarés bienheureux.
 


LA DOULOUREUSE PASSION DE NOTRE SEIGNEUR JESUS CHRIST
d'après les méditations de la Bienheureuse Anne-Catherine Emmerick
Traduction de l'Abbé de Cazalès
Gallica

Anna Katharina Emmerick
'Die ekstatische Jungfrau Katharina Emmerick' par Gabriel von Max,  München, Neue Pinakothek

Partager cet article
Repost0
17 mars 2010 3 17 /03 /mars /2010 09:00
XXIX. JÉSUS CONDAMNÉ A LA MORT DE LA CROIX

Pilate qui ne cherchait pas la vérité, mais un moyen de sortir d'embarras, était plus incertain que jamais : sa conscience disait : Jésus est innocent, sa femme disait : Jésus est saint ; sa superstition disait : Il est l'ennemi de tes dieux ; sa lâcheté disait : Il est un Dieu lui-même et se vengera. Il interrogea encore Jésus d'un ton inquiet et solennel, et Jésus lui parla de ses crimes les plus secrets, de la misérable destinée qui l'attendait et lui annonça que lui-même, au dernier jour, viendrait, assis sur les nuées du ciel, prononcer sur lui un juste jugement : cela jeta dans la fausse balance de sa justice un nouveau poids contre la mise en liberté de Jésus.

Il était furieux de se trouver là, dans toute la nudité de son ignominie intérieure, en face de Jésus qu'il ne pouvait s'expliquer : il s'indignait que cet homme qu'il avait fait fouetter, qu'il pouvait faire crucifier, lui prédit une fin misérable ; que cette bouche qui n'avait jamais été accusé de mensonge, cette bouche qui n'avait pas prononcé une parole pour se justifier, osât, dans de telles circonstances, le citer au dernier jour devant son tribunal : tout cela blessait profondément son orgueil. Toutefois, comme aucun sentiment ne pouvait prendre absolument le dessus dans ce misérable indécis, il était en même temps terrifié des menaces du Seigneur et il fit un dernier effort pour le sauver ; mais la peur que lui firent les Princes des prêtres, en le menaçant de se plaindre de lui à l'empereur, le poussa à une nouvelle lâcheté. La peur de l'empereur terrestre l'emporta en lui sur la crainte du roi dont le royaume n'est pas de ce monde. Le lâche scélérat se dit à soi-même : “s'il meurt, ce qu'il sait de moi et ce qu'il m'a prédit meurt avec lui”. La menace d'être dénoncé à l'empereur le détermina à faire leur volonté contrairement à la justice, à sa propre conviction et a la parole qu'il avait donnée à sa femme. Il livra le sang de Jésus, et il n'eut plus pour laver sa conscience que l'eau qu'il fit verser sur ses mains, en disant : “Je suis innocent du sang de ce juste, c'est à vous à en répondre”. Non, Pilate, tu en répondras aussi, car tu l'appelles juste et tu répands son sang ; tu es un juge infâme et sans conscience. Ce sang dont Pilate voulait purifier ses mains, les Pharisiens le réclamaient, appelant la malédiction sur eux-mêmes et sur leurs enfants ; ils demandèrent que ce sang rédempteur qui crie miséricorde pour nous, criât vengeance contre eux : ils crièrent : “Que son sang soit sur nous et sur nos enfants !”

Au bruit de ces cris sanguinaires, Pilate fit tout préparer pour prononcer sa sentence. Il se fit apporter des vêtements de cérémonie, il mit sur sa tête une espèce de diadème où brillait une pierre précieuse, et se revêtit d'un autre manteau : on porta aussi un bâton devant lui. Il était entouré de soldats, précédé d'officiers du tribunal, et suivi de scribes avec des rouleaux et des tablettes. Il y avait en avant un homme qui sonnait de la trompette. C'est ainsi qu'il se rendit de son palais sur le forum où se trouvait, en face de la colonne de la flagellation, un siège élevé pour le prononcé des jugements. Ce tribunal s'appelait Gabbatha : c'était comme une terrasse ronde où conduisaient des marches de plusieurs côtés, il y avait en haut un siège pour Pilate et, derrière ce siège, un banc pour des assesseurs ; un grand nombre de soldats entouraient cette terrasse et plusieurs se tenaient sur les degrés. Plusieurs des Pharisiens s'étaient déjà rendus au Temple. Il n'y eut qu'Anne, Caïphe et vingt-huit autres qui vinrent vers le tribunal lorsque Pilate mit ses vêtements de cérémonie. Les deux larrons avaient déjà été conduits devant le tribunal lorsque Jésus eût été montré au peuple. Le siège de Pilate était recouvert d'une draperie rouge sur laquelle était un coussin bleu avec des galons jaunes.

Le Sauveur, portant toujours son manteau rouge et sa couronne d'épines, fut alors amené par les archers devant le tribunal, à travers la foule qui le huait, et placé entre les deux malfaiteurs. Lorsque Pilate se fut assis sur son siège, il dit encore aux ennemis de Jésus : “Voilà votre roi. – Crucifiez-le ! répondirent-ils. – Dois-je crucifier votre roi ? dit encore Pilate. – Nous n'avons pas d'autre roi que César, crièrent les Princes des Prêtres." Pilate ne dit plus rien et commença à prononcer le jugement. Les deux voleurs avaient été condamnés antérieurement au supplice de la croix, mais les Princes des prêtres avaient demandé qu'on sursît à leur exécution, parce qu'ils voulaient faire un affront de plus à Jésus, en l'associant dans son supplice à des malfaiteurs de la dernière classe. Les croix des deux larrons étaient auprès d'eux : celle du Sauveur n'était pas encore là, parce que sa sentence de mort n'avait pas été prononcée.

La sainte Vierge, qui s'était retirée après la flagellation, se jeta de nouveau dans la foule pour entendre la sentence de mort de son fils et de son Dieu. Jésus se tenait debout au milieu des archers, au bas des marches du tribunal. La trompette se fit entendre pour demander du silence, et Pilate prononça son jugement sur le Sauveur avec le courroux d'un lâche. Je me sentis tout accablée par tant de bassesse et de duplicité. La vue de ce misérable, tout enflé de son importance, le triomphe et la soif de sang des Princes des prêtres, la détresse et la douleur profonde du Sauveur, les inexprimables angoisses de Marie et des saintes femmes, l'atroce avidité avec laquelle les Pharisiens guettaient leur proie. La contenance froidement insolente des soldats, enfin l'aspect de tant d'horribles figures de démons que je voyais mêlés à la foule, tout cela m'avait anéantie. Hélas ! je sentais que j'aurais dû être où était Jésus, mon fiancé chéri, car alors le jugement aurait été juste ; mais j'étais si déchirée par mes souffrances que je ne me rappelle plus exactement dans quel ordre les choses se passèrent. Je dirai à peu près ce dont je me souviens.

Pilate commença par un long préambule où les noms les plus pompeux étaient prodigués à l'empereur Tibère ; puis il exposa l'accusation intentée contre Jésus, que les Princes des prêtres avaient condamné à mort pour avoir troublé la paix publique et violé leur loi, en se faisant appeler Fils de Dieu et roi des Juifs, et dont le peuple avait demandé la mort sur la croix d'une voix unanime. Lorsqu'il ajouta qu'il avait trouvé ce jugement conforme à la justice, lui qui n'avait cessé de proclamer l'innocence de Jésus, je perdis presque connaissance à la vue de cette infâme duplicité puis il dit en terminant : “Je condamne Jésus de Nazareth, roi des Juifs, à être crucifié” et il ordonna aux archers d'apporter la croix. Je crois me rappeler qu'il brisa un long bâton et en jeta les morceaux aux pieds de Jésus.

La mère de Jésus tomba sans connaissance à ces mots, comme si la vie l'eût abandonnée ; maintenant il n'y avait plus de doute, la mort de son fils bien-aimé était certaine, la mort la plus cruelle et la plus ignominieuse. Jean et les saintes femmes l'emportèrent, afin que les hommes aveuglés qui l'entouraient ne missent pas le comble à leurs crimes en insultant à ses douleurs ; mais elle ne fut pas plus tôt revenue à elle qu'elle voulut parcourir les lieux témoins des souffrances de Jésus, et il fallut que ses compagnes la conduisissent de place en place, car le désir de s'associer à la Passion de Jésus par un culte mystique la poussait à offrir le sacrifice de ses larmes partout où le Rédempteur né de son sein avait souffert pour les péchés des hommes, ses frères. C'est ainsi que la mère du Sauveur consacra par ses larmes et prit possession de ces lieux sanctifiés pour l'Eglise, notre mère à tous, de même que Jacob, dressa comme un monument, et consacra, en l'oignant d'huile, la pierre près de laquelle il avait reçu la promesse.

Pilate écrivit le jugement sur son tribunal, et ceux qui se tenaient derrière lui le copièrent jusqu'à trois fois. On envoya aussi des messagers, car il y avait quelque chose qui devait être signé par d'autres personnes ; je ne sais pas si cela se rapportait au jugement ou si c'étaient d'autres ordres. Toutefois quelques-unes de ces pièces furent envoyées dans des endroits éloignés. Pilate écrivit touchant Jésus un jugement qui prouvait sa duplicité, car il était tout différent de celui qu'il avait prononcé de vive voix. Je vis que, pendant ce temps, son esprit était plein de trouble, et qu'il écrivait en quelque sorte contre sa volonté ; on eût dit qu'un ange de colère guidait sa plume ; le sens de cet écrit, dont je ne me souviens qu'en général, était à peu prés celui-ci : “Forcé par les Princes des prêtres, le Sanhédrin et le peuple près de se soulever, qui demandaient la mort de Jésus de Nazareth, comme coupable d'avoir troublé la paix publique, blasphémé et violé leur loi, je le leur ai livré pour être crucifié, quoique leurs inculpations ne me parussent pas claires, afin de n'être pas accusé devant l'empereur d'avoir favorisé l'insurrection et mécontenté le peuple par un déni de justice. Je le leur ai livré avec deux autres criminels déjà condamnés, dont leurs menées avaient fait retarder l'exécution, parce qu'ils  voulaient que Jésus fût exécuté avec eux”. Ici le misérable écrivit encore tout autre chose que ce qu'il voulait.

Puis il écrivit l'inscription de la croix en trois lignes sur une tablette de couleur foncée. Le jugement où Pilate s'excusait fut transcrit plusieurs fois et envoyé en différents lieux. Mais les Princes des prêtres eurent encore des contestations avec lui : ce jugement ne les satisfaisait pas ; ils se plaignaient notamment de ce qu'il avait écrit qu'ils avaient fait retarder l'exécution des larrons pour que Jésus fût crucifié avec eux ; ils s'élevèrent aussi contre l'inscription, et demandèrent qu'on ne mît pas “roi des Juifs”, mais “qui s'est dit roi des Juifs”. Pilate s'impatienta, se moqua d'eux et leur répondit avec colère : “Ce que j'ai écrit est écrit.” Ils voulaient aussi que la croix du Christ ne s'élevât pas plus au-dessus de sa tête que celle des deux larrons ; cependant il fallait la faire plus haute, car, par la faute des ouvriers, il y avait réellement trop peu de place pour mettre l'inscription de Pilate ; ils cherchèrent à profiter de cette circonstance afin de faire supprimer l'inscription qui leur semblait injurieuse pour eux. Mais Pilate ne voulut pas y consentir, et il fallut allonger la croix en y ajoutant un nouveau morceau de bois. Ces différentes circonstances concoururent à donner à la croix cette forme significative que j'ai souvent vue ; ainsi ses deux bras allaient en s'élevant comme les branches d'un arbre en s'écartant du tronc, et elle ressemblait à un Y dont le trait inférieur serait prolongé entre les deux autres ; les bras étaient plus minces que le tronc ; chacun d'eux y avait été ajusté séparément, et on avait enfoncé un coin de chaque côté au point de jonction pour en assurer la solidité. Or, comme la pièce du milieu, par suite de mesures mal prises, ne dépassait pas assez la tête pour que l'écriteau de Pilate pût y être placé convenablement, on y ajouta un appendice et on assujettit un morceau de bois à la place des pieds pour les maintenir.

Pendant que Pilate prononçait son jugement inique, je vis que Claudia Procle, sa femme, lui renvoyait son gage et renonçait à lui ; le soir de ce jour elle quitta secrètement le palais pour se réfugier près des amis de Jésus, et on la tint cachée dans un souterrain sous la maison de Lazare, à Jérusalem. Ce même jour, ou quelque temps après, je vis aussi un ami du Sauveur graver sur une pierre verdâtre, derrière la terrasse de Gabbatha, deux lignes où se trouvaient les mots de Judex injustus, et le nom de Claudia Procle : je me souviens qu'un groupe nombreux de personnes qui s'entretenaient se trouvait en ce moment sur le forum, pendant que cet homme, caché derrière elles, gravait ces lignes sans qu'on pût le remarquer. Je vis enfin que cette pierre se trouve encore, sans qu'on le sache, dans les fondements d'une maison ou d'une église à Jérusalem au lieu où se trouvait Gabbatha. Claudia Procle se fit chrétienne, suivit saint Paul et devint son amie proche.

Lorsque la sentence eut été prononcée, pendant que Pilate écrivait et se querellait avec les Princes des prêtres, Jésus fut livré aux archers comme une proie ; jusque-là ces hommes abominables avaient gardé quelque retenue en présence du tribunal ; maintenant il était à leur discrétion. On apporta ses habits qui lui avaient été ôtés chez Caïphe ; ils avaient été mis de côté, et je pense que des hommes compatissants les avaient lavés, car ils étaient propres. C'était aussi, je crois, la coutume chez les Romains de remettre leurs vêtements à ceux qu'on conduisait au supplice. Les méchants hommes qui entouraient Jésus le mirent de nouveau à nu et lui délièrent les mains afin de pouvoir l'habiller, ils arrachèrent de son corps couvert de plaies le manteau de laine rouge qu'ils lui avaient mis par dérision, et rouvrirent par là beaucoup de ses blessures ; il mit lui-même en tremblant son vêtement de dessous, et ils lui jetèrent son scapulaire sur les épaules. Comme la couronne d'épines était trop large et empêchait qu'on pût passer la robe brune sans couture que lui avait faite sa mère, on la lui arracha de la tête, et toutes ses blessures saignèrent de nouveau avec des douleurs indicibles. Ils lui mirent encore son vêtement de laine blanche, sa large ceinture, et enfin son manteau ; puis ils lui attachèrent de nouveau, au milieu du corps, le cercle à pointes de fer auquel étaient liées les cordes avec lesquelles ils le traînaient ; tout cela se fit avec leur brutalité et leur cruauté ordinaires.

Les deux larrons étaient à droite et à gauche de Jésus ; ils avaient les mains liées, et, comme Jésus devant le tribunal, une chaîne autour du cou. Ils n'avaient, pour tout vêtement, qu'un linge autour des reins, un scapulaire d'étoffe grossière, ouvert sur le côté et sans manches, et sur la tête un bonnet de paille tressée, assez semblable à un bourrelet d'enfant ; leur peau était d'un brun sale et couverte de meurtrissures livides, provenant de leur flagellation de la veille. Celui qui se convertit par la suite était dés lors calme et pensif ; l'autre était grossier et insolent ; il s'unissait aux archers pour maudire et insulter Jésus, qui regardait ses deux compagnons avec amour et offrait pour leur salut toutes ses souffrances.

Les archers rassemblaient tous les instruments du supplice et préparaient tout pour cette terrible et douloureuse marche dans laquelle le Sauveur, plein d'amour et accablé de douleur, voulait porter le poids des péchés de l'ingrate humanité et répandre, pour les expier, son sang précieux coulant, comme d'un calice, de son corps percé de part en part par les plus vils des hommes.

Anne et Caïphe avaient enfin terminé leurs discussions avec Pilate ; ils tenaient deux longues bandes de parchemin où étaient des copies du jugement, et se dirigeaient en hâte vers le Temple, craignant d'y arriver trop tard. C'est ici que les Princes des prêtres se séparèrent du véritable Agneau pascal. Ils allaient au Temple de pierre pour immoler et manger le symbole, et laissaient d'ignobles bourreaux conduire à l'autel de la croix l'agneau de Dieu dont l'autre n'était que la figure. C'est ici que se séparaient les deux routes, dont l'une conduisait au symbole du sacrifice, l'autre à son accomplissement : ils abandonnèrent à des bourreaux impurs et inhumains l'Agneau pascal pur et rédempteur, le véritable Agneau de Dieu qu'ils avaient défiguré extérieurement par toutes leurs abominations et qu'ils s'étaient efforcés de souiller, et ils se rendaient en toute hâte au Temple de pierre pour immoler des agneaux, purifiés, lavés et bénis. Ils avaient bien pris toutes leurs précautions pour ne pas contracter d'impuretés extérieures et leur âme était toute souillée par la colère, la haine et l'envie. “Que son sang soit sur nous et sur nos enfants !” avaient-ils dit, et par ces paroles ils avaient accompli la cérémonie, mis la main du sacrificateur sur la tête de la victime. Ici se séparaient les deux routes qui menaient à l'autel de la loi et à l'autel de la grâce.

Pilate s'en revint dans son palais, entouré de ses officiers et de ses gardes, précédé d'un trompette, Pilate, le païen orgueilleux et irrésolu, tremblant devant Dieu et adorant les idoles, le courtisan du monde, l'esclave de la mort, triomphant dans le temps jusqu'à ce qu'arrive le terme de la mort éternelle.

Le jugement inique fut rendu vers dix heures du matin, suivant notre manière de compter.


LA DOULOUREUSE PASSION DE NOTRE SEIGNEUR JESUS CHRIST
d'après les méditations de la Bienheureuse Anne-Catherine Emmerick
Traduction de l'Abbé de Cazalès
Gallica

Anna Katharina Emmerick
'Die ekstatische Jungfrau Katharina Emmerick' par Gabriel von Max,  München, Neue Pinakothek 
Partager cet article
Repost0
16 mars 2010 2 16 /03 /mars /2010 12:00

XXVII. ECCE HOMO

Jésus recouvert du manteau rouge, la couronne d'épines sur la tête, le sceptre de roseau entre ses mains garrottées, fut reconduit dans le palais de Pilate. Il était méconnaissable à cause du sang qui remplissait ses yeux, sa bouche et sa barbe. Son corps n'était qu'une plaie ; il ressemblait à un linge trempé dans du sang.


Il marchait courbé et chancelant ; le manteau était si court qu'il lui fallait se plier en deux pour cacher sa nudité : car lors du couronnement d'épines, ils lui avaient de nouveau arraché tous ses vêtements. Quand il arriva devant Pilate, cet homme cruel ne put s'empêcher de frémir d'horreur et de pitié ; il s'appuya sur un de ses officiers et tandis que le peuple et les prêtres insultaient et raillaient, il s'écria : “Si le diable des Juifs est aussi cruel qu'eux, il ne fait pas bon être en enfer auprès de lui.” Lorsque Jésus eut été traîné péniblement au haut de l'escalier, Pilate s'avança sur la terrasse et on sonna de la trompette pour annoncer que le gouverneur voulait parler : il s'adressa aux Princes des prêtres et à tous les assistants, et leur dit : “Je le fais amener encore une fois devant vous, afin que vous sachiez que je ne le trouve coupable d'aucun crime”.

Jésus fut alors conduit près de Pilate par les archers, de sorte que tout le peuple rassemblé sur le forum pouvait le voir. C'était un spectacle terrible et déchirant, accueilli d'abord par une horreur muette, que cette apparition du fils de Dieu tout sanglant sous sa couronne d'épines, abaissant ses yeux éteints sur les flots du peuple, pendant que Pilate le montrait du doigt et criait aux Juifs : “Voici l'homme !”


Pendant que Jésus, le corps déchiré, couvert de son manteau de dérision, baissant sa tête inondée de sang et transpercée par les épines, tenant le sceptre de roseau dans ses mains garrottées, courbé en deux pour cacher sa nudité, navré de douleur et de tristesse et pourtant ne respirant qu'amour et mansuétude, était exposé comme un fantôme sanglant, devant le palais de Pilate, en face des prêtres et du peuple qui poussaient des cris de fureur, des troupes d'étrangers court vêtus, hommes et femmes, traversaient le forum pour descendre à la piscine des Brebis, afin de prendre part à l'ablution des agneaux de Pâque, dont les bêlements plaintifs se mêlaient sans cesse aux clameurs sanguinaires de la multitude, comme s'ils eussent voulu rendre témoignage en faveur de la vérité qui se taisait. Cependant le véritable Agneau pascal de Dieu, le mystère révélé, mais inconnu de ce saint jour, accomplissait les prophéties et se courbait en silence sur le billot où il devait être immolé.


Les Princes des prêtres et leurs adhérents furent saisis de rage à l'aspect de Jésus, et ils crièrent : “Qu'on le fasse mourir ! qu'on le crucifie ! – N'en avez-vous pas assez ? dit Pilate ; il a été traité de manière à ne plus avoir le désir d'être roi”. Mais ces forcenés criaient toujours plus fort, et tout le peuple faisait entendre ces terribles paroles : “Qu'on le fasse mourir ! qu'on le crucifie !” Pilate fit encore sonner de la trompette, et dit : “Alors prenez-le et crucifiez-le, car je ne le trouve coupable d'aucun  crime”.

Ici, quelques-uns des prêtres s'écrièrent : “Nous avons une loi selon laquelle il doit mourir, car il s'est dit le fils de Dieu ! Sur quoi Pilate répondit : “Si vous avez des lois d'après lesquelles celui-ci doit mourir, je ne me soucie point d'être Juif”. Toutefois cette parole : “il s'est dit le fils de Dieu”, réveilla les craintes superstitieuses de Pilate, il fit conduire Jésus ailleurs, alla à lui et lui demanda d'où il était. Mais Jésus ne répondit pas, et Pilate lui dit : “Tu ne me réponds pas ! Ne sais-tu pas que j'ai le pouvoir de te faire crucifier et celui de te remettre en liberté ?” Et Jésus répondit : “Tu n'aurais aucun pouvoir sur moi s'il ne t'avait été donné d'en haut : c'est pourquoi celui qui m'a livré à toi a commis un plus grand péché”.


Claudia Procle, que les hésitations de son mari inquiétaient, lui envoya de nouveau son gage pour lui rappeler sa promesse, mais celui-ci lui fit faire une réponse vague et superstitieuse dont le sens était qu'il s'en rapportait à ses dieux. Les ennemis du Sauveur apprirent les démarches de Claudia en sa faveur, et ils firent répandre parmi le peuple que les partisans de Jésus avaient séduit la femme de Pilate ; que, s'il était mis en liberté, il s'unirait aux Romains et que tous les Juifs seraient exterminés.


Pilate dans son irrésolution était comme un homme ivre, sa raison ne savait plus où se prendre. Il dit encore une fois aux ennemis de Jésus qu'il ne trouvait en lui rien de criminel, et comme ceux-ci demandèrent sa mort avec plus de violence que jamais, Pilate, troublé, jeté dans l'indécision, tant par la confusion de ses propres pensées que par les songes de sa femme et les graves paroles de Jésus, voulut obtenir du Sauveur une réponse qui le tirât de ce pénible état ; il revint vers lui dans le prétoire et resta seul avec lui. “Serait-ce donc là un Dieu ?” se dit-il à lui-même en regardant Jésus sanglant et défiguré ; puis tout à coup il l'adjura de lui dire s'il était Dieu, s'il était ce roi promis aux Juifs, jusqu'où s'étendait son empire et de quel ordre était sa divinité ; lui promettant de lui rendre la liberté, s'il lui disait tout cela. Je ne puis répéter que le sens de la réponse que lui fit Jésus. Le Sauveur lui parla avec une sévérité effrayante ; il lui fit voir en quoi consistait sa royauté et son empire, il lui montra ce que c'était que la vérité, car il lui dit la vérité. Il lui dévoila tout ce que lui, Pilate, avait commis de crimes secrets, lui prédit le sort qui l'attendait, l'exil, la misère et une fin terrible, puis il lui annonça que le Fils de l'homme viendrait un jour prononcer sur lui un juste jugement.


Pilate à moitié effrayé, à moitié irrité des paroles de Jésus, revint sur la terrasse et dit encore qu'il voulait délivrer Jésus : alors on lui cria : “Si tu le délivres, tu n'es pas l'ami de César, car celui qui veut se faire roi est l'ennemi de César.” D'autres disaient qu'ils l'accuseraient devant l'empereur d'avoir troublé leur fête ; qu'il fallait en finir parce qu'ils étaient obligés d'être à dix heures au Temple. Le cri : “Qu'il soit crucifié !” se faisait entendre de tous les côtés, il retentissait jusque sur les toits plats du forum ou beaucoup de gens étaient montés. Pilate vit que ses efforts auprès de ces furieux étaient inutiles. Le tumulte et les cris avaient quelque chose d'effrayant, et la masse entière du peuple était dans un tel état d'agitation qu'une insurrection était à craindre. Pilate se fit apporter de l'eau ; un de ses serviteurs la lui versa sur les mains devant le peuple, et il cria au haut de la terrasse : “Je suis innocent du sang de ce juste, ce sera à vous à en répondre.”

Alors s'éleva un cri horriblement unanime de tout le peuple parmi lequel se trouvaient des gens de toutes les parties de la Palestine : “Que son sang soit sur nous et sur nos enfants”.



LA DOULOUREUSE PASSION DE NOTRE SEIGNEUR JESUS CHRIST
d'après les méditations de la Bienheureuse Anne-Catherine Emmerick
Traduction de l'Abbé de Cazalès
Gallica

Anna Katharina Emmerick
'Die ekstatische Jungfrau Katharina Emmerick' par Gabriel von Max,  München, Neue Pinakothek 

Partager cet article
Repost0
16 mars 2010 2 16 /03 /mars /2010 05:00

XXVI. COURONNEMENT D'ÉPINES 

Pendant la flagellation de Jésus, Pilate parla encore plusieurs fois au peuple, qui une fois fit entendre ce cri : “il faut qu'il meure, quand nous devrions tous mourir aussi !” Quand Jésus fut conduit au corps de garde, ils crièrent encore : “Qu'on le tue ! qu'on le tue !” Car il arrivait sans cesse de nouvelles troupes de Pharisiens que les Commissaires des Princes des prêtres excitaient à crier ainsi. Il y eut ensuite une pause. Pilate donna des ordres à ses soldats ; les Princes des prêtres et leurs conseillers, qui se tenaient sous des arbres et sous des toiles tendues, assis sur des bancs placés des deux côtés de la rue devant la terrasse de Pilate, se firent apporter a manger et à boire par leurs serviteurs. Pilate, l'esprit troublé par ses superstitions, se retira quelques instants pour consulter ses dieux et leur offrir de l'encens.


La sainte Vierge et ses amis se retirèrent du forum après avoir recueilli le sang de Jésus. Je les vis entrer avec leurs linges sanglants dans une petite maison peu éloignée bâtie contre un mur. Je ne sais plus à qui elle appartenait. Je ne me souviens pas d'avoir vu Jean pendant la flagellation.


Le couronnement d'épines eut lieu dans la cour intérieure du corps de garde situé contre le forum, au-dessus des prisons. Elle était entourée de colonnes et les portes étaient ouvertes. Il y avait là environ cinquante misérables, valets de geôliers, archers, esclaves et autres gens de même espèce qui prirent une part active aux mauvais traitements qu'eut à subir Jésus. La foule se pressait d'abord autour de l'édifice ; mais il fut bientôt entouré d'un millier de soldats romains, rangés en bon ordre, dont les rires et les plaisanteries excitaient l'ardeur des bourreaux de Jésus comme les applaudissements du public excitent les comédiens.


Au milieu de la cour ils roulèrent la base d'une colonne où se trouvait un trou qui avait dû servir pour assujettir le fût. Ils placèrent dessus un escabeau très bas, qu'ils couvrirent par méchanceté de cailloux pointus et de tessons de pot. Ils arrachèrent les vêtements de Jésus de dessus son corps couvert de plaies, et lui mirent un vieux manteau rouge de soldat qui ne lui allait pas aux genoux et où pendaient des restes de houppes jaunes. Ce manteau se trouvait dans un coin de la chambre : on en revêtait ordinairement les criminels après leur flagellation, soit pour étancher leur sang, soit pour les tourner en dérision.

Ils traînèrent ensuite Jésus au siège qu'ils lui avaient préparé et l'y firent asseoir brutalement. C'est alors qu'ils lui mirent la couronne d'épines. Elle était haute de deux largeurs de main, très épaisse et artistement tressée. Le bord supérieur était saillant. Ils la lui placèrent autour du front en manière de bandeau, et la lièrent fortement par derrière. Elle était faite de trois branches d'épines d'un doigt d'épaisseur, artistement entrelacées, et la plupart des pointes étaient à dessein tournées en dedans. Elles appartenaient à trois espèces d'arbustes épineux, ayant quelques rapports avec ce que sont chez nous le nerprun, le prunellier et l'épine blanche. Ils avaient ajouté un bord supérieur saillant d'une épine semblable à nos ronces : c'était par là qu'ils saisissaient la couronne et la secouaient violemment.

J'ai vu l'endroit où ils avaient été chercher ces épines. Quand ils l'eurent attachée sur la tête de Jésus, ils lui mirent un épais roseau dans la main. Ils firent tout cela avec une gravité dérisoire, comme s'ils l'eussent réellement couronné roi. Ils lui prirent le roseau des mains, et frappèrent si violemment sur la couronne d'épines que les yeux du Sauveur étaient inondés de sang. Ils s'agenouillèrent devant lui, lui firent des grimaces, lui crachèrent au visage et le souffletèrent en criant : “Salut, Roi des Juifs !” Puis ils le renversèrent avec son siège en riant aux éclats, et l'y replacèrent de nouveau avec violence.


Je ne saurais répéter tous les outrages qu'imaginaient ces hommes. Jésus souffrait horriblement de la soif ; car les blessures faites par sa barbare flagellation lui avaient donné la fièvre, et il frissonnait ; sa chair était déchirée jusqu'aux os, sa langue était retirée, et le sang sacré qui coulait de sa tête rafraîchissait seul sa bouche brûlante et entrouverte. Jésus fut ainsi maltraité pendant environ une demi heure, aux rires et aux cris de joie de la cohorte rangée autour du prétoire.



LA DOULOUREUSE PASSION DE NOTRE SEIGNEUR JESUS CHRIST
d'après les méditations de la Bienheureuse Anne-Catherine Emmerick
Traduction de l'Abbé de Cazalès
Gallica

Anna Katharina Emmerick
'Die ekstatische Jungfrau Katharina Emmerick' par Gabriel von Max,  München, Neue Pinakothek

Partager cet article
Repost0
15 mars 2010 1 15 /03 /mars /2010 08:00
XXII. FLAGELLATION DE JÉSUS

Pilate, ce juge lâche et irrésolu, avait fait entendre plusieurs fois ces paroles pleines de déraison : “Je ne trouve point de crime en lui : c'est pourquoi je vais le faire flageller et ensuite le mettre en liberté”. Les Juifs, de leur côté, continuaient de crier : “Crucifiez-le ! Crucifiez-le !” Toutefois Pilate voulut encore essayer de faire prévaloir sa volonté, et il ordonna de flageller Jésus à la manière des Romains.

Alors les archers, frappant et poussant Jésus avec leurs bâtons, le conduisirent sur le forum à travers les flots tumultueux d'une populace furieuse. Au nord du palais de Pilate, à peu de distance du corps de garde, se trouvait, en avant d'une des halles qui entouraient le marché, une colonne où se faisaient les flagellations. Les exécuteurs vinrent avec des fouets, des verges et des cordes, qu'ils jetèrent au pied de la colonne. C'étaient six hommes bruns, plus petits que Jésus, aux cheveux crépus et hérissés, à la barbe courte et peu fournie. Ils portaient pour tout vêtement une ceinture autour du corps, de méchantes sandales et une pièce de cuir, ou de je ne sais quelle mauvaise étoffe ouverte sur les côtés comme un scapulaire et couvrant la poitrine et le dos ; ils avaient les bras nus. C'étaient des malfaiteurs des frontières de l'Egypte, condamnés pour leurs crimes à travailler aux canaux et aux édifices publics, et dont les plus méchants et les plus ignobles remplissaient les fonctions d'exécuteurs dans le prétoire. Ces hommes cruels avaient déjà attaché à cette même colonne et fouetté jusqu'à la mort de pauvres condamnés. Ils ressemblaient à des bêtes sauvages ou à des démons, et paraissaient à moitié ivres. Ils frappèrent le Sauveur à coups de poing, le traînèrent avec leurs cordes, quoiqu'il se laissât conduire sans résistance, et l'attachèrent brutalement à la colonne. Cette colonne était tout à fait isolée et ne servait de support à aucun édifice. Elle n'était pas très élevée, car un homme de haute taille aurait pu en étendant le bras, en atteindre la partie supérieure qui était arrondie et pourvue d'un anneau de fer. A la moitié de sa hauteur se trouvaient encore des anneaux ou des crochets. On ne saurait exprimer avec quelle barbarie ces chiens furieux traitèrent Jésus en le conduisant là ; ils lui arrachèrent le manteau dérisoire d'Hérode, et le jetèrent presque par terre. Jésus tremblait et frissonnait devant la colonne.

Quoique se soutenant à peine, il se hâta d'ôter lui-même ses habits avec ses mains enflées et sanglantes. Pendant qu'ils le frappaient et le poussaient, il pria de la manière la plus touchante, et tourna la tête un instant vers sa mère, qui se tenait, navrée de douleur, dans le coin d'une des salles du marché, et, comme il lui fallut ôter jusqu'au linge qui ceignait ses reins, il dit en se tournant vers la colonne pour cacher sa nudité : “Détournez vos yeux de moi”. Je ne sais s'il prononça ces paroles ou s'il les dit intérieurement, mais je vis que Marie l'entendit : car, au même instant, elle tomba sans connaissance dans les bras des saintes femmes qui l'entouraient. Jésus embrassa la colonne ; les archers lièrent ses mains élevées en l'air derrière l'anneau de fer qui y était fiché, et tendirent tellement ses bras en haut, que ses pieds, attachés fortement au bas de la colonne, touchaient à peine la terre. Le Saint des Saints, dans sa nudité humaine fut ainsi étendu avec violence sur la colonne des malfaiteurs, et deux de ces furieux, altérés de son sang commencèrent à flageller son corps sacré de la tête aux pieds. Les premières verges dont ils se servirent semblaient de bois blanc très dur ; peut-être aussi étaient ce des nerfs de boeuf ou de fortes lanières de cuir blanc.


Notre Sauveur, le Fils de Dieu, vrai Dieu et vrai homme, frémissait et se tordait comme un ver sous les coups de ces misérables ; ses gémissements doux et clairs se faisaient entendre comme une prière affectueuse sous le bruit des verges de ses bourreaux. De temps en temps, le cri du peuple et des Pharisiens venait comme une sombre nuée d'orage étouffer et emporter ces plaintes douloureuses et pleines de bénédictions ; on criait : “Faites-le mourir ! Crucifiez-le !” Car Pilate était encore en pourparlers avec le peuple ; et quand il voulait faire entendre quelques paroles au milieu du tumulte populaire, une trompette sonnait pour demander un instant de silence. Alors on entendait de nouveau le bruit des fouets, les sanglots de Jésus, les imprécations des archers et le bêlement des agneaux de Pâques, qu'on lavait à peu de distance, dans la piscine des Brebis. Quand ils étaient lavés, on les portait, la bouche enveloppée, jusqu'au chemin qui menait au Temple, afin qu'ils ne se salissent pas de nouveau, puis on les conduisait à l'extérieur vers la partie occidentale où ils étaient encore soumis à une ablution rituelle. Ce bêlement avait quelque chose de singulièrement touchant. C'étaient les seules voix à s'unir aux gémissements du Sauveur.

Le peuple juif se tenait à quelque distance du lieu de la flagellation. Les soldats romains étaient postés en différents endroits et surtout du côté du corps de garde. Beaucoup de gens de la populace allaient et venaient, silencieux ou l'insulte à la bouche ; quelques-uns se sentirent touchés, et il semblait qu'un rayon partant de Jésus les frappait. Je vis d'infâmes jeunes gens presque nus, qui préparaient des verges fraîches près du corps de garde, d'autres allaient chercher des branches d'épine. Quelques archers des Princes des prêtres s'étaient mis en rapport avec les bourreaux, et leur donnaient de l'argent. On leur apporta aussi une cruche pleine d'un épais breuvage rouge, dont ils burent jusqu'à s'enivrer. Au bout d'un quart d'heure, les deux bourreaux qui flagellaient Jésus furent remplacés par deux autres. Le corps du Sauveur était couvert de taches noires, bleues et rouges, et son sang coulait par terre ; il tremblait et son corps était agité de mouvements convulsifs. Les injures et les moqueries se faisaient entendre de tous côtés.
Il avait fait froid cette nuit ; depuis le matin jusqu'à présent, le ciel était resté couvert : par intervalles, il tombait un peu de grêle, au grand étonnement du peuple. Vers midi, le ciel s'éclaircit et le soleil brilla.

Le second couple de bourreaux tomba avec une nouvelle rage sur Jésus ; ils avaient une autre espèce de baguettes ; s'étaient comme des bâtons d'épines avec des noeuds et des pointes. Leurs coups déchirèrent tout le corps de Jésus ; son sang jaillit à quelque distance, et leurs bras en étaient arrosés. Jésus gémissait, priait et tremblait. Plusieurs étrangers passèrent dans le forum sur des chameaux, et regardèrent avec effroi et avec tristesse, lorsque le peuple leur expliqua ce qui se passait. C'étaient des voyageurs, dont quelques-uns avaient reçu le baptême de Jean ou entendu les sermons de Jésus sur la montagne. Le tumulte et les cris ne cessaient pas près de la maison de Pilate.


De nouveaux bourreaux frappèrent Jésus avec des fouets : c'étaient des lanières, au bout desquelles étaient des crochets de fer qui enlevaient des morceaux de chair à chaque coup. Hélas ! qui pourrait rendre ce terrible et douloureux spectacle ? Leur rage n'était pourtant pas encore satisfaite : ils délièrent Jésus et l'attachèrent de nouveau, le des tourné à la colonne. Comme il ne pouvait plus se soutenir, ils lui passèrent des cordes sur la poitrine, sous les bras et au-dessous des genoux, et attachèrent aussi ses mains derrière la colonne. Tout son corps se contractait douloureusement : il était couvert de sang et de plaies. Alors ils fondirent de nouveau sur lui comme des chiens furieux. L'un d'eux tenait une verge plus déliée, dont il frappait son visage. Le corps du Sauveur n'était plus qu'une plaie ; il regardait ses bourreaux avec ses yeux pleins de sang, et semblait demander merci ; mais leur rage redoublait, et les gémissements de Jésus devenaient de plus en plus faibles.


L'horrible flagellation avait duré près de trois quarts d'heure, lorsqu'un étranger de la classe inférieure, parent de l'aveugle Ctésiphon guéri par Jésus, se précipita vers le derrière de la colonne avec un couteau en forme de faucille ; il cria d'une voir indignée : “Arrêtez ! ne frappez pas cet innocent jusqu'à le faire mourir !” Les bourreaux, qui étaient ivres, s'arrêtèrent, étonnés ; il coupa rapidement les cordes assujetties derrière la colonne qui retenaient Jésus, puis il s'enfuit et se perdit dans la foule. Jésus tomba presque sans connaissance au pied de la colonne sur la terre toute baignée de son sang. Les exécuteurs le laissèrent là, s'en allèrent boire, et appelèrent des valets de bourreau, qui étaient occupés dans le corps de garde à tresser la couronne d'épines.

Comme Jésus, couvert de plaies saignantes, s'agitait convulsivement au pied de la colonne, je vis quelques filles perdues, à l'air effronté, s'approcher de lui en se tenant par les mains. Elles s'arrêtèrent un moment et le regardèrent avec dégoût. Dans ce moment, la douleur de ses blessures redoubla et il leva vers elles sa face meurtrie. Elles s'éloignèrent, et les soldats et les archers leur adressèrent en riant des paroles indécentes.


Je vis à plusieurs reprises, pendant la flagellation, des anges en pleurs entourer Jésus, et j'entendis sa prière pour nos péchés, qui montait constamment vers son Père au milieu de la grêle de coups qui tombait sur lui. Pendant qu'il était étendu dans son sang au pied de la colonne, je vis un ange lui présenter quelque chose de lumineux qui lui rendit des forces. Les archers revinrent et le frappèrent avec leurs pieds et leurs bâtons, lui disant de se relever parce qu'ils n'en avaient pas fini avec ce roi. Jésus voulut prendre sa ceinture qui était à quelque distance : alors ces misérables le poussèrent avec le pied de côté et d'autre, en sorte que le pauvre Jésus fut obligé de se traîner péniblement sur le sol, dans sa nudité sanglante, comme un ver à moitié écrasé, pour pouvoir atteindre sa ceinture et en couvrir ses reins déchirés. Quand ils l'eurent remis sur ses jambes tremblantes, ils ne lui laissèrent pas le temps de remettre sa robe, qu'ils jetèrent seulement sur ses épaules nues, et avec laquelle il essuya le sang qui coulait sur son visage, pendant qu'ils le conduisaient en hâte au corps de garde, en lui faisait faire un détour. Ils auraient pu s'y rendre plus directement parce que les halles et le bâtiment qui était en face du forum étaient ouverts, en sorte qu'on pouvait voir le passage sous lequel les deux larrons et Barabbas étaient emprisonnés ; mais ils le conduisirent devant le lieu où siégeaient les Princes des Prêtres qui s'écrièrent : “Qu'on le fasse mourir ! Qu'on le fasse mourir !” et se détournèrent avec dégoût. Puis ils le menèrent dans la cour intérieure du corps de garde. Lorsque Jésus entra, il n'y avait pas de soldats, mais des esclaves, des archers, des goujats, enfin le rebut de la population.


Comme le peuple était dans une grande agitation, Pilate avait fait venir un renfort de garnison romaine de la citadelle Antonia. Ces troupes, rangées en bon ordre, entouraient le corps de garde. Elles pouvaient parler, rire et se moquer de Jésus ; mais il leur était interdit de quitter leurs rangs. Pilate voulait par là tenir le peuple en respect. Il y avait bien un millier d'hommes. 


XXIII. MARIE PENDANT LA FLAGELLATION DE JESUS


Je vis la sainte Vierge en extase continuelle pendant la flagellation de notre divin Rédempteur ; elle vit et souffrit intérieurement avec un amour et une douleur indicibles tout ce que souffrait son fils. Souvent de faibles gémissements sortaient de sa bouche ; ses yeux étaient rouges de larmes. Elle était voilée et étendue dans les bras de Marie d'Héli, sa sœur aînée, qui était déjà vieille et ressemblait beaucoup à Anne, leur Mère. Marie de Cléophas, fille de Marie d'Héli était aussi là et se tenait presque toujours au bras de sa mère. Les saintes amies de Marie et de Jésus étaient voilées, tremblantes de douleur et d'inquiétude, serrées autour de la sainte Vierge, et poussant de faibles gémissements comme si elles eussent attendu leur propre sentence de mort. Marie avait une longue robe blanche et par-dessus un grand manteau de laine blanche avec un voile d'un blanc approchant du jaune. Madeleine était bouleversée et terrassé par la douleur, ses cheveux étaient épars sous son voile.

Lorsque Jésus, après la Flagellation, tomba au pied de la colonne, je vis Claudia Procle, la femme de Pilate, envoyer à la mère de Dieu de grandes pièces de toile. Je ne sais si elle croyait que Jésus serait délivré et que cette toile serait nécessaire à sa mère pour panser ses blessures, ou si la païenne compatissante savait l'usage auquel la sainte Vierge emploierait son présent.

Marie, revenue à elle, vit son fils tout déchiré conduit par les archers : il essuya ses yeux pleins de sang pour regarder sa mère. Elle étendit les mains vers lui et suivit des yeux la trace sanglante de ses pieds. Je vis bientôt Marie et Madeleine, comme le peuple se portait d'un autre côté, s'approcher de la place où Jésus avait été flagellé : cachées par les autres saintes femmes et par quelques personnes bien intentionnées qui les entouraient elles se prosternèrent à terre près de la colonne, et essuyèrent partout le sang sacré de Jésus avec les linges qu'avait envoyés Claudia Procle.

Jean n'était pas en ce moment près des saintes femmes, qui étaient à peu près au nombre de vingt. Le fils de Siméon, celui de Véronique, celui d'Obed, Aram et Themni, neveu d'Arimathie, étaient occupés dans le Temple, pleins de tristesse et d'angoisse. Il était environ neuf heures du matin lorsque finit la flagellation.


LA DOULOUREUSE PASSION DE NOTRE SEIGNEUR JESUS CHRIST
d'après les méditations de la Bienheureuse Anne-Catherine Emmerick
Traduction de l'Abbé de Cazalès
Gallica

Anna Katharina Emmerick
'Die ekstatische Jungfrau Katharina Emmerick' par Gabriel von Max,  München, Neue Pinakothek
Partager cet article
Repost0