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"Je vous donne un commandement nouveau : c'est de vous aimer les uns les autres.

 

Comme je vous ai aimés, vous aussi aimez-vous les uns les autres.

 

Ce qui montrera à tous les hommes que vous êtes mes disciples, c'est l'amour que vous aurez les uns pour les autres."

 

Evangile de Jésus-Christ selon  saint Jean 

   

 

Pentecôte

" Le Défenseur, l'Esprit Saint que le Père enverra en mon nom, lui, vous enseignera tout, et il vous fera souvenir de tout ce que je vous ai dit."

 

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean  

 

   

 

 El Papa es argentino. Jorge Bergoglio                 

Saint Père François

 

 

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1er mai 2011 Béatification de Jean-Paul II

Béatification du Serviteur de Dieu Jean-Paul II

 

 

  Béatification du Père Popieluszko

beatification Mass, in Warsaw, Poland

à Varsovie, 6 juin 2010, Dimanche du Corps et du Sang du Christ

 

 

presidential palace in Warsaw

Varsovie 2010

 

 

Basilique du Sacré-Cœur de Montmartre
Sanctuaire de l'Adoration Eucharistique et de la Miséricorde Divine

La miséricorde de Dieu est comme un torrent débordé. Elle entraîne les cœurs sur son passage.
(Saint Curé d'Ars)
 

 


Le côté du Christ a été transpercé et tout le mystère de Dieu sort de là. C’est tout le mystère de Dieu qui aime, qui se livre jusqu’au bout, qui se donne jusqu’au bout. C’est le don le plus absolu qui soit. Le don du mystère trinitaire est le cœur ouvert. Ce n’est pas une image, c’est une réalité. C’est la réalité la plus profonde qui soit, la réalité de l’amour.
Père Marie-Joseph Le Guillou




Dans le cœur transpercé
de Jésus sont unis
le Royaume du Ciel
et la terre d'ici-bas
la source de la vie
pour nous se trouve là.

Ce cœur est cœur divin
Cœur de la Trinité
centre de convergence
de tous les cœur humains
il nous donne la vie
de la Divinité.


Sainte Thérèse Bénédicte de la Croix
(Edith Stein)



Le Sacré-Cœur représente toutes les puissances d'aimer, divines et humaines, qui sont en Notre-Seigneur.
Père Marie-Eugène de l'Enfant Jésus

 



feuille d'annonces de la Basilique du Sacré-Coeur de Montmartre

 

 

 

 

 

 

 

     

The Cambrai Madonna

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... ma vocation, enfin je l’ai trouvée, ma vocation, c’est l’Amour !

 

 

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SAINT PIERRE ET SAINT ANDRÉ

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BENOÎT XVI à CHYPRE 

 

Benedict XVI and Cypriot Archbishop Chrysostomos, Church of 

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SALVE REGINA

4 mars 2013 1 04 /03 /mars /2013 05:00

Le texte biblique nous parle de la longue nuit de la recherche de Dieu, de la lutte pour en connaître le nom et en voir le visage ; c’est la nuit de la prière qui avec ténacité et persévérance demande à Dieu la bénédiction et un nouveau nom, une nouvelle réalité fruit de conversion et de pardon.

 

L'homme en prière par Benoît XVI 

 

Aujourd’hui, je voudrais réfléchir avec vous sur un texte du Livre de la Genèse, qui rapporte un épisode assez particulier de l’histoire du patriarche Jacob. C’est un passage qui n’est pas facile à interpréter, mais qui est important pour notre vie de foi et de prière ; il s’agit du récit de la lutte avec Dieu au gué du Yabboq, dont nous avons entendu un passage.

 

Comme vous vous en souviendrez, Jacob avait soustrait à son jumeau Esaü son droit d’aînesse en échange d’un plat de lentilles et avait ensuite soutiré par la ruse la bénédiction de son père Isaac, désormais très âgé, en profitant de sa cécité. Fuyant la colère d’Esaü, il s’était réfugié chez un parent, Laban ; il s’était marié, était devenu riche et s’en retournait à présent dans sa terre natale, prêt à affronter son frère après avoir prudemment pris certaines précautions. Mais, lorsque tout est prêt pour cette rencontre, après avoir fait traverser à ceux qui l’accompagnaient le gué du torrent qui délimitait le territoire d’Esaü, Jacob, demeuré seul, est soudain agressé par un inconnu avec lequel il lutte toute une nuit. Ce combat corps à corps — que nous trouvons dans le chapitre 32 du Livre de la Genèse — devient précisément pour lui une expérience particulière de Dieu.

 

La nuit est le temps favorable pour agir de façon cachée, et donc, pour Jacob, le meilleur moment pour entrer dans le territoire de son frère sans être vu et sans doute dans l’illusion de prendre Esaü par surprise. Mais c’est au contraire lui qui est surpris par une attaque soudaine, à laquelle il n’était pas préparé. Il avait joué d’astuce pour tenter d’échapper à une situation dangereuse, il pensait réussir à tout contrôler, et il doit en revanche affronter à présent une lutte mystérieuse qui le surprend seul et sans lui donner la possibilité d’organiser une défense adéquate. Sans défense, dans la nuit, le patriarche Jacob lutte contre quelqu’un. Le texte ne spécifie pas l’identité de l’agresseur ; il utilise un terme hébreu qui indique «un homme» de façon générique, «un, quelqu’un» ; il s’agit donc d’une définition vague, indéterminée, qui maintient volontairement l’attaquant dans le mystère. Il fait nuit, Jacob ne réussit pas à distinguer son adversaire et pour le lecteur, pour nous, il demeure inconnu ; quelqu’un s’oppose au patriarche et cela est l’unique élément sûr fourni par le narrateur. Ce n’est qu’à la fin, lorsque la lutte sera désormais terminée et que ce «quelqu’un» aura disparu, que Jacob le nommera et pourra dire qu’il a lutté avec Dieu.

 

L’épisode se déroule donc dans l’obscurité et il est difficile de percevoir non seulement l’identité de l’agresseur de Jacob, mais également le déroulement de la lutte. En lisant le passage, il est difficile d’établir qui des deux adversaires réussit à avoir le dessus ; les verbes utilisés sont souvent sans sujet explicite, et les actions se déroulent de façon presque contradictoire, de sorte que lorsque l’on croit que l’un des deux a l’avantage, l’action successive contredit immédiatement les faits et présente l’autre comme le vainqueur. Au début, en effet, Jacob semble être le plus fort, et l’adversaire — dit le texte — «ne le maîtrisait pas» (v. 26) ; et pourtant, il frappe Jacob à l’emboîture de la hanche, provoquant son déboîtement. On devrait alors penser que Jacob est sur le point de succomber, mais c’est l’autre au contraire qui lui demande de le lâcher ; et le patriarche refuse, en imposant une condition : «Je ne te lâcherai pas, que tu ne m'aies béni» (v. 27). Celui qui par la ruse avait dérobé son frère de la bénédiction due à l’aîné, la prétend à présent de l’inconnu, dont il commence sans doute à entrevoir les traits divins, mais sans pouvoir encore vraiment le reconnaître.

 

Son rival, qui semble retenu et donc vaincu par Jacob, au lieu de céder à la demande du patriarche, lui demande son nom : «Quel est ton nom». Et le patriarche répond : «Jacob» (v. 28). Ici, la lutte prend un tournant important. Connaître le nom de quelqu’un, en effet, implique une sorte de pouvoir sur la personne, car le nom, dans la mentalité biblique, contient la réalité la plus profonde de l’individu, en dévoile le secret et le destin. Connaître le nom veut dire alors connaître la vérité de l’autre et cela permet de pouvoir le dominer. Lorsque, à la demande de l’inconnu, Jacob révèle donc son nom, il se place entre les mains de son adversaire, c’est une façon de capituler, de se remettre totalement à l’autre.

 

Mais dans le geste de se rendre, Jacob résulte paradoxalement aussi vainqueur, car il reçoit un nom nouveau, en même temps que la reconnaissance de sa victoire de la part de son adversaire, qui lui dit : «On ne t’appellera plus Jacob, mais Israël, car tu as été fort contre Dieu et contre les hommes et tu l’as emporté» (v. 29). «Jacob» était un nom qui rappelait l’origine problématique du patriarche ; en hébreu, en effet, il rappelle le terme «talon», et renvoie le lecteur au moment de la naissance de Jacob, lorsque, sortant du sein maternel, il tenait par la main le talon de son frère jumeau (cf. Gn 25, 26), presque en préfigurant l’acte de passer en premier, au détriment de son frère, qu’il aurait effectué à l’âge adulte ; mais le nom de Jacob rappelle également le verbe «tromper, supplanter». Eh bien, à présent, dans la lutte, le patriarche révèle à son opposant, dans le geste de se remettre et de se rendre, sa propre réalité d’imposteur, qui supplante ; mais l’autre, qui est Dieu, transforme cette réalité négative en positive : Jacob l’imposteur devient Israël, un nom nouveau lui est donné qui marque une nouvelle identité. Mais ici aussi, le récit conserve une duplicité voulue, car la signification la plus probable du nom Israël est «Dieu est fort, Dieu triomphe».

 

Jacob a donc prévalu, il a vaincu — c’est l’adversaire lui-même qui l’affirme — mais sa nouvelle identité, reçue de l’adversaire, affirme et témoigne de la victoire de Dieu. Et lorsque Jacob demandera, à son tour, son nom à son adversaire, celui-ci refusera de le lui dire, mais il se révélera dans un geste sans équivoque, en lui donnant la bénédiction. Cette bénédiction que le patriarche avait demandée au début de la lutte lui est à présent accordée. Et ce n’est pas la bénédiction obtenue par la tromperie, mais celle donnée gratuitement par Dieu, que Jacob peut recevoir car il est désormais seul, sans protection, sans astuces ni tromperies, il se remet sans défense, il accepte de se rendre et confesse la vérité sur lui-même. Ainsi, au terme de la lutte, ayant reçu la bénédiction, le patriarche peut finalement reconnaître l’autre, le Dieu de la bénédiction : «car — dit-il — j’ai vu Dieu face à face et j’ai eu la vie sauve» (v. 31), et il peut à présent traverser le gué, porteur d’un nom nouveau mais «vaincu» par Dieu et marqué pour toujours, boiteux à la suite de la blessure reçue.

 

Les explications que l’exégèse biblique peut donner à ce passage sont multiples ; les chercheurs reconnaissent en particulier dans celui-ci des intentions et des composantes littéraires de différents genres, ainsi que des références à certains récits populaires. Mais lorsque ces éléments sont repris par les auteurs sacrés et inclus dans le récit biblique, ils changent de signification et le texte s’ouvre à des dimensions plus vastes. L’épisode de la lutte au Yabboq se présente ainsi au croyant comme un texte paradigmatique dans lequel le peuple d’Israël parle de sa propre origine et définit les traits d’une relation particulière entre Dieu et l’homme. C’est pourquoi, comme cela est également affirmé dans le Catéchisme de l’Eglise catholique, «la tradition spirituelle de l’Eglise a retenu de ce récit le symbole de la prière comme combat de la foi et victoire de la persévérance» (n. 2573). Le texte biblique nous parle de la longue nuit de la recherche de Dieu, de la lutte pour en connaître le nom et en voir le visage ; c’est la nuit de la prière qui avec ténacité et persévérance demande à Dieu la bénédiction et un nouveau nom, une nouvelle réalité fruit de conversion et de pardon.

 

La nuit de Jacob au gué du Yabboq devient ainsi pour le croyant le point de référence pour comprendre la relation avec Dieu qui, dans la prière, trouve sa plus haute expression. La prière demande confiance, proximité, presque un corps à corps symbolique, non avec un Dieu adversaire et ennemi, mais avec un Seigneur bénissant qui reste toujours mystérieux, qui apparaît inaccessible. C’est pourquoi l’auteur sacré utilise le symbole de la lutte, qui implique force d’âme, persévérance, ténacité pour parvenir à ce que l’on désire. Et si l’objet du désir est la relation avec Dieu, sa bénédiction et son amour, alors la lutte ne pourra qu’atteindre son sommet dans le don de soi-même à Dieu, dans la reconnaissance de sa propre faiblesse, qui l’emporte précisément lorsqu’on en arrive à se remettre entre les mains miséricordieuses de Dieu.

 

Chers frères et sœurs, toute notre vie est comme cette longue nuit de lutte et de prière, qu’il faut passer dans le désir et dans la demande d’une bénédiction de Dieu qui ne peut pas être arrachée ou gagnée en comptant sur nos forces, mais qui doit être reçue avec humilité de Lui, comme don gratuit qui permet, enfin, de reconnaître le visage du Seigneur. Et quand cela se produit, toute notre réalité change, nous recevons un nouveau nom et la bénédiction de Dieu. Mais encore davantage : Jacob, qui reçoit un nom nouveau, devient Israël, il donne également un nom nouveau au lieu où il a lutté avec Dieu, où il l’a prié, il le renomme Penuel, qui signifie «Visage de Dieu». Avec ce nom, il reconnaît ce lieu comblé de la présence du Seigneur, il rend cette terre sacrée en y imprimant presque la mémoire de cette mystérieuse rencontre avec Dieu.

 

Celui qui se laisse bénir par Dieu, qui s’abandonne à Lui, qui se laisse transformer par Lui, rend le monde béni. Que le Seigneur nous aide à combattre la bonne bataille de la foi (cf 1 Tm 6, 12; 2 Tm 4, 7) et à demander, dans notre prière, sa bénédiction, pour qu’il nous renouvelle dans l’attente de voir son Visage.

 

Audience générale, 25 mai 2011, Benoît XVI 

 

La Lutte de Jacob avec l'Ange, par Delacroix, Eglise Saint Sulpice

 

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3 mars 2013 7 03 /03 /mars /2013 13:00

" A travers l’intercession, la prière à Dieu pour le salut des autres, se manifeste et s’exprime le désir de salut que Dieu nourrit toujours envers l’homme pécheur." 

 

L'homme en prière par Benoît XVI

 

Dans les deux dernières catéchèses, nous avons réfléchi sur la prière comme phénomène universel qui — bien que sous des formes diverses — est présente dans les cultures de tous les temps. Aujourd’hui, au contraire, je voudrais commencer un parcours biblique sur ce thème, qui nous aidera à approfondir le dialogue d’alliance entre Dieu et l’homme qui anime l’histoire du salut, jusqu’au sommet, à la parole définitive qui est Jésus Christ. Ce chemin nous conduira à nous arrêter sur certains textes importants et sur des figures exemplaires de l’Ancien et du Nouveau Testament. Ce sera Abraham, le grand patriarche, père de tous les croyants (cf. Rm 4, 11-12.16-17) qui nous offrira un premier exemple de prière, dans l’épisode de l’intercession pour les villes de Sodome et Gomorrhe. Et je voudrais également vous inviter à profiter du parcours que nous entreprendrons au cours des prochaines catéchèses pour apprendre à connaître davantage la Bible, que, j’espère, vous avez chez vous, et au cours de la semaine, à vous arrêter pour la lire et la méditer dans la prière, pour connaître la merveilleuse histoire du rapport entre Dieu et l’homme, entre Dieu qui se communique à nous et l’homme qui répond, qui prie.

 

Le premier texte sur lequel nous voulons réfléchir se trouve dans le chapitre 18 du Livre de la Genèse ; on raconte que la cruauté des habitants de Sodome et Gomorrhe avait atteint son comble, au point qu’une intervention de Dieu était nécessaire pour arrêter le mal qui détruisait ces villes. C’est là qu’intervient Abraham avec sa prière d’intercession. Dieu décide de lui révéler ce qui est sur le point de se produire et lui fait connaître la gravité du mal et ses terribles conséquences, car Abraham est son élu, choisi pour devenir un grand peuple et faire parvenir la bénédiction divine à tout le monde. Sa mission est une mission de salut, qui doit répondre au péché qui a envahi la réalité de l’homme : à travers lui, le Seigneur veut ramener l’humanité à la foi, à l’obéissance, à la justice. Et à présent, cet ami de Dieu s’ouvre à la réalité et au besoin du monde, prie pour ceux qui s’apprêtent à être punis et demande qu’ils soient sauvés.

 

Abraham présente immédiatement le problème dans toute sa gravité, et dit au Seigneur : «Vas-tu vraiment supprimer le juste avec le pécheur ? Peut-être y a-t-il cinquante justes dans la ville. Vas-tu vraiment les supprimer et ne pardonneras-tu pas à la cité pour les cinquante justes qui sont dans son sein ? Loin de toi de faire cette chose-là ! De faire mourir le juste avec le pécheur, en sorte que le juste soit traité comme le pécheur. Loin de toi ! Est-ce que le juge de toute la terre ne rendra pas justice ?» (vv. 23-25). A travers ces paroles, avec un grand courage, Abraham place devant Dieu la nécessité d’éviter une justice sommaire : si la ville est coupable, il est juste de condamner son crime et d’infliger la peine mais — affirme le grand patriarche — il serait injuste de punir indifféremment tous les habitants. S’il y a des innocents dans la ville, ceux-ci ne peuvent être traités comme des coupables. Dieu, qui est un juge juste, ne peut agir ainsi, dit à raison Abraham à Dieu.

 

Cependant, si nous lisons le texte plus attentivement, nous nous rendons compte que la requête d’Abraham est encore plus sérieuse et plus profonde, car il ne se limite pas à demander le salut pour les innocents. Abraham demande le salut pour toute la ville et il le fait en en appelant à la justice de Dieu. En effet, il dit au Seigneur : «Et ne pardonneras-tu pas à la cité pour les cinquante justes qui sont dans son sein ?» (v. 24b). En agissant ainsi, il met en jeu une nouvelle idée de justice : non pas celle qui se limite à punir les coupables, comme le font les hommes, mais une justice différente, divine, qui cherche le bien et qui le crée à travers le pardon qui transforme le pécheur, le convertit et le sauve. Avec sa prière, Abraham n’invoque donc pas une justice purement rétributive, mais une intervention de salut qui, tenant compte des innocents, libère de la faute également les impies, en leur pardonnant. La pensée d’Abraham, qui semble presque paradoxale, peut ainsi être synthétisée : on ne peut pas, bien évidemment, traiter les innocents comme les coupables, cela serait injuste, il faut en revanche traiter les coupables comme les innocents, en mettant en œuvre une justice «supérieure», en leur offrant une possibilité de salut, car si les malfaiteurs acceptent le pardon de Dieu et confessent leur faute en se laissant sauver, ils ne continueront plus à faire le mal, ils deviendront eux aussi justes, sans qu’il ne soit plus nécessaire de les punir.

 

Telle est la requête de justice qu’Abraham exprime dans son intercession, une requête qui se fonde sur la certitude que le Seigneur est miséricordieux. Abraham ne demande pas à Dieu une chose contraire à son essence. Il frappe à la porte du cœur de Dieu en connaissant sa véritable volonté. Assurément, Sodome est une grande ville, cinquante justes semblent peu de chose, mais la justice de Dieu et son pardon ne sont-ils peut-être pas la manifestation de la force du bien, même s’il semble plus petit et plus faible que le mal ? La destruction de Sodome devait arrêter le mal présent dans la ville, mais Abraham sait que Dieu a d’autres manières et moyens pour mettre un frein à la diffusion du mal. C’est le pardon qui interrompt la spirale du péché, et c’est exactement ce à quoi Abraham fait appel, dans son dialogue avec Dieu. Et lorsque le Seigneur accepte de pardonner à la ville s’il y trouve cinquante justes, sa prière d’intercession commence à descendre vers les abîmes de la miséricorde divine. Abraham — comme nous nous en rappelons — fait progressivement diminuer le nombre des innocents nécessaires pour le salut : s’ils ne sont pas cinquante, quarante cinq pourraient suffire, et ensuite toujours moins, jusqu’à dix, en continuant avec sa supplication, qui devient presque hardie dans son insistance : «Peut-être n’y en aura-t-il que quarante... trente... vingt... dix...» (cf. vv. 29.30.31.32). Et plus le nombre devient petit, plus grande se révèle et se manifeste la miséricorde de Dieu, qui écoute avec patience la prière, l’accueille et répète à chaque supplication : «je pardonnerai... je ne détruirai pas... je ne ferai» (cf. vv. 26.28.29.30.31.32).

 

Ainsi, par l’intercession d’Abraham, Sodome pourra être sauve, si on n’y trouve ne serait-ce que dix innocents. Telle est la puissance de la prière. Car à travers l’intercession, la prière à Dieu pour le salut des autres, se manifeste et s’exprime le désir de salut que Dieu nourrit toujours envers l’homme pécheur. En effet, le mal ne peut être accepté, il doit être signalé et détruit à travers la punition : la destruction de Sodome avait précisément cette fonction. Mais le Seigneur ne veut pas la mort du méchant, mais qu’il se convertisse et vive (cf. Ez 18, 23; 33, 11) ; son désir est toujours celui de pardonner, de sauver, de donner vie, de transformer le mal en bien. Eh bien, c’est précisément ce désir divin qui, dans la prière, devient le désir de l’homme et s’exprime à travers les paroles de l’intercession. Avec sa supplication, Abraham prête sa voix, mais aussi son cœur, à la volonté divine : le désir de Dieu est miséricorde, amour et volonté de salut, et ce désir de Dieu a trouvé en Abraham et dans sa prière la possibilité de se manifester de manière concrète à l’intérieur de l’histoire des hommes, pour être présent là où la grâce est nécessaire. A travers la voix de sa prière, Abraham donne voix au désir de Dieu, qui n’est pas celui de détruire, mais de sauver Sodome, de donner vie au pécheur converti.

 

C'est ce que veut le Seigneur, et son dialogue avec Abraham est une manifestation prolongée et sans équivoque de son amour miséricordieux. La nécessité de trouver des hommes justes à l’intérieur de la ville devient de moins en moins exigeante et à la fin dix suffiront pour sauver la totalité de la population. Pour quelle raison Abraham s'arrête-t-il à dix, le texte ne le dit pas. Peut-être est-ce un nombre qui indique un noyau communautaire minimum (encore aujourd'hui, dix personnes sont le quorum nécessaire pour la prière publique juive).

 

Quoi qu'il en soit, il s'agit d'un petit nombre, une petite parcelle de bien à partir de laquelle sauver un grand mal. Mais on ne put pas même trouver dix justes à Sodome et Gomorrhe, et la ville fut détruite. Une destruction dont la nécessité est paradoxalement témoignée précisément par la prière d'intercession d'Abraham. Parce que c'est précisément cette prière qui a révélé la volonté salvifique de Dieu : le Seigneur était disposé à pardonner, il souhaitait le faire, mais les villes étaient enfermées dans un mal totalisant et paralysant, sans même un petit nombre d'innocents desquels partir pour transformer le mal en bien. Parce que c'est précisément ce chemin du salut que demandait lui aussi Abraham : être sauvés ne signifie pas simplement échapper à la punition, mais être libérés du mal qui nous habite. Ce n'est pas le châtiment qu'il faut éliminer, mais le péché, ce refus de Dieu et de l'amour qui porte déjà en lui-même le châtiment. Le prophète Jérémie dira au peuple rebelle : «Que ta méchanceté te châtie et que tes infidélités te punissent ! Comprends et vois comme il est mauvais et amer d'abandonner Yahvé ton Dieu» (Jr 2, 19). C'est de cette tristesse et de cette amertume que le Seigneur veut sauver l'homme en le libérant du péché. Mais il faut alors une transformation de l'intérieur, quelque point d'appui de bien, un commencement d'où partir pour transformer le mal en bien, la haine en amour, la vengeance en pardon. C'est pourquoi les justes doivent être à l'intérieur de la ville, et Abraham répète sans cesse : «peut-être s'en trouvera-t-il là...». «Là», c'est à l'intérieur de la réalité malade que doit se trouver ce germe de bien qui peut guérir et redonner la vie. C'est une parole qui s'adresse aussi à nous: que dans nos villes se trouve le germe de bien et que nous fassions tout pour qu'il n'y ait pas seulement dix justes pour faire réellement vivre et survivre nos villes et pour nous sauver de cette amertume autour de laquelle il y a l'absence de Dieu. Et dans la réalité malade de Sodome et Gomorrhe ce germe de bien n’existait pas.

 

Mais la miséricorde de Dieu dans l'histoire de son peuple s'élargit encore davantage. Si pour sauver Sodome il fallait dix justes, le prophète Jérémie dira, au nom du Tout-Puissant, qu'il suffit d'un seul juste pour sauver Jérusalem : «Parcourez les rues de Jérusalem, regardez donc, renseignez-vous, cherchez sur ses places si vous découvrez un homme, un qui pratique le droit, qui recherche la vérité alors je pardonnerai à cette ville» (5, 1). Le nombre a encore diminué, la bonté de Dieu se montre encore plus grande. Et pourtant, cela ne suffit pas encore, la miséricorde surabondante de Dieu ne trouve pas la réponse de bien qu'elle cherche, et Jérusalem tombe sous l'assaut de l'ennemi. Il faudra que Dieu lui-même devienne ce juste. C'est le mystère de l'Incarnation : pour garantir un juste, il se fait homme. Le juste sera toujours là puisque c'est Lui : mais il faut que Dieu lui-même devienne ce juste. L’infini et surprenant amour divin sera pleinement manifesté lorsque le Fils de Dieu se fera homme, le Juste définitif, le parfait Innocent, qui apportera le salut au monde entier en mourant sur la croix, en pardonnant et en intercédant pour ceux qui «ne savent pas ce qu'ils font» (Lc 23, 34). Alors la prière de chaque homme trouvera sa réponse, chacune de nos intercessions sera alors pleinement exaucée.

 

Chers frères et sœurs, que la supplique d'Abraham, notre père dans la foi, nous enseigne à ouvrir toujours davantage notre cœur à la miséricorde surabondante de Dieu, pour que, dans la prière quotidienne, nous sachions désirer le salut de l'humanité et le demander avec persévérance et avec confiance au Seigneur qui est grand dans l'amour.

 

Audience générale, 18 mai 2011, Benoît XVI 

 

Heures à l'usage de Rome, Abraham intercédant en faveur

Comme Abram parla a Nostre Seigneur pour Sodome, Heures à l'usage de Rome

 

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2 mars 2013 6 02 /03 /mars /2013 09:00

" La prière qui est ouverture et élévation du cœur à Dieu, devient un rapport personnel avec Lui. Et même si l'homme oublie son Créateur, le Dieu vivant et vrai ne cesse d'appeler le premier l'homme à la rencontre mystérieuse de la prière."

 

L'homme en prière par Benoît XVI 

 

Je voudrais aujourd’hui continuer de réfléchir sur la façon dont la prière et le sentiment religieux font partie de l’homme tout au long de son histoire.

 

Nous vivons à une époque où les signes du sécularisme sont évidents. Dieu semble être disparu de l’horizon de diverses personnes ou devenu une réalité envers laquelle on demeure indifférent. Nous voyons toutefois, dans le même temps, de nombreux signes qui nous indiquent un réveil du sentiment religieux, une redécouverte de l’importance de Dieu pour la vie de l’homme, une exigence de spiritualité, de dépasser une vision purement horizontale, matérielle de la vie humaine. En regardant l’histoire récente, on constate l’échec de ceux qui, à l’époque des Lumières, prévoyaient la disparition des religions et exaltaient une raison absolue, détachée de la foi, une raison qui devait écraser les ténèbres des dogmatismes religieux et dissoudre le «monde du sacré», en restituant à l’homme sa liberté, sa dignité et son autonomie de Dieu. L’expérience du siècle dernier, avec les deux tragiques guerres mondiales, a remis en question ce progrès que la raison autonome, l’homme sans Dieu, semblait pouvoir garantir.

 

Le Catéchisme de l’Eglise catholique affirme : «Par la création, Dieu appelle tout être du néant à l’existence. Même après avoir perdu la ressemblance avec Dieu par son péché, l’homme reste à l’image de son Créateur. Il garde le désir de Celui qui l’appelle à l’existence. Toutes les religions témoignent de cette quête essentielle des hommes» (n. 2566). Nous pourrions dire — comme je l’ai montré dans la dernière catéchèse — qu’il n’y a eu aucune grande civilisation, des temps les plus reculés jusqu’à nos jours, qui n’ait été religieuse.

 

L’homme est par nature religieux, il est homo religiosus comme il est homo sapiens et homo faber : «Le désir de Dieu — affirme encore le Catéchisme — est inscrit dans le cœur de l’homme, car l’homme est créé par Dieu et pour Dieu» (n. 27). L’image du Créateur est imprimée dans son être et il ressent le besoin de trouver une lumière pour donner une réponse aux questions qui concernent le sens profond de la réalité ; réponse qu’il ne peut trouver en lui-même, dans le progrès, dans la science empirique. L’homo religiosus ne ressort pas seulement des mondes antiques, il traverse toute l’histoire de l’humanité.

 

A ce propos, le riche terrain de l’expérience humaine a vu naître diverses formes de religiosité, dans la tentative de répondre au désir de plénitude et de bonheur, au besoin de salut, à la recherche de sens. L’homme «numérique», tout comme celui des cavernes, cherche dans l’expérience religieuse le moyen de dépasser sa finitude et d’assurer son aventure terrestre précaire. D’ailleurs, sans un horizon transcendant, la vie perdrait son sens plénier et le bonheur, auquel nous tendons tous, est projeté spontanément vers l’avenir, dans un lendemain qui reste encore à réaliser. Le Concile Vatican II, dans la déclaration Nostra aetate, l’a souligné de façon synthétique : «Les hommes attendent des diverses religions la réponse aux énigmes cachées de la condition humaine, qui, hier comme aujourd’hui, agitent profondément le cœur humain : Qu’est-ce que l’homme ? Quel est le sens et le but de la vie ? Qu’est-ce que le bien et qu’est-ce que le péché ? Quels sont l’origine et le but de la souffrance ? Quelle est la voie pour parvenir au vrai bonheur ? Qu’est-ce que la mort, le jugement et la rétribution après la mort ? Qu’est-ce enfin que le mystère dernier et ineffable qui embrasse notre existence, d’où nous tirons notre origine et vers lequel nous tendons ?» (n. 1).

 

L’homme sait qu’il ne peut répondre seul à son besoin fondamental de comprendre. Même s’il a nourri et nourrit encore l’illusion de se suffire à lui-même, il fait l’expérience de ne pas se suffire à lui-même. Il a besoin de s’ouvrir à autre chose, à quelque chose ou à quelqu’un qui puisse lui donner ce qui lui manque, il doit sortir de lui-même pour aller vers Celui qui est en mesure de remplir l’ampleur et la profondeur de son désir.

 

L’homme porte en lui une soif d’infini, une nostalgie d’éternité, une recherche de beauté, un désir d’amour, un besoin de lumière et de vérité, qui le poussent vers l’Absolu ; l’homme porte en lui le désir de Dieu. Et l’homme sait, d’une certaine façon, qu’il peut s’adresser à Dieu, il sait qu’il peut le prier. Saint Thomas d’Aquin, l’un des plus grands théologiens de l’histoire, définit la prière comme l’«expression du désir que l’homme a de Dieu». Cette attraction vers Dieu, que Dieu lui-même a placée dans l’homme, est l’âme de la prière, qui revêt ensuite tant de formes et de modalités selon l’histoire, le temps, le moment, la grâce et même le péché de chaque orant. L’histoire de l’homme a, en effet, connu diverses formes de prière, car il a développé différentes modalités d’ouverture vers l’Autre et vers l’Au-delà, si bien que nous pouvons reconnaître la prière comme une expérience présente dans chaque religion et culture.

 

En effet, chers frères et sœurs, comme nous l’avons vu mercredi dernier, la prière n’est pas liée à un contexte particulier, mais elle se trouve inscrite dans le cœur de chaque personne et de chaque civilisation. Naturellement, lorsque nous parlons de prière comme expérience de l’homme en tant que tel, de l’homo orans, il est nécessaire d’avoir à l’esprit que celle-ci est une attitude intérieure, avant d’être une série de pratiques et de formules, une manière d’être devant Dieu avant d’être l’accomplissement d’actes de culte ou la prononciation de paroles. La prière a son centre et plonge ses racines au plus profond de la personne ; c’est pourquoi elle n’est pas facilement déchiffrable et, pour le même motif, elle peut être sujette à des malentendus et à des mystifications. C’est dans ce sens également que nous pouvons comprendre l’expression : prier est difficile. En effet, la prière est le lieu par excellence de la gratuité, de la tension vers l’Invisible, l’Inattendu, l’Ineffable. C’est pourquoi l’expérience de la prière est un défi pour tous, une «grâce» à invoquer, un don de Celui à qui nous nous adressons.

 

Dans la prière, à chaque époque de l’histoire, l’homme se considère lui-même, ainsi que sa situation face à Dieu, à partir de Dieu et par rapport à Dieu, et il fait l’expérience d’être une créature qui a besoin d’aide, incapable de se procurer toute seule l’accomplissement de sa propre existence et de sa propre espérance. Le philosophe Ludwig Wittgenstein rappelait que «prier signifie sentir que le sens du monde est en dehors du monde». Dans la dynamique de cette relation avec celui qui donne un sens à l’existence, avec Dieu, la prière trouve l’une de ses expressions typiques dans le geste de se mettre à genoux. C’est un geste qui contient en lui-même une ambivalence radicale : en effet, je peux être contraint de me mettre à genoux — condition d’indigence et d’esclavage —, mais je peux également m’agenouiller spontanément, en déclarant ma limite et, donc, mon besoin d’un Autre. C’est à lui que je déclare être faible, nécessiteux, «pécheur». Dans l’expérience de la prière, la créature humaine exprime toute la conscience de soi, tout ce qu’elle réussit à saisir de sa propre existence et, dans le même temps, elle se tourne entièrement vers l’Etre face auquel elle se trouve, elle oriente son âme vers ce Mystère dont elle attend l’accomplissement des désirs les plus profonds et l’aide pour surmonter l’indigence de sa propre vie. Dans le fait de regarder un Autre, de se diriger «au-delà» se trouve l’essence de la prière, comme expérience d’une réalité qui dépasse ce qui est sensible et contingent.

 

Toutefois, c'est uniquement en Dieu qui se révèle que la recherche de l'homme s’accomplit pleinement. La prière qui est ouverture et élévation du cœur à Dieu, devient ainsi un rapport personnel avec Lui. Et même si l'homme oublie son Créateur, le Dieu vivant et vrai ne cesse d'appeler le premier l'homme à la rencontre mystérieuse de la prière. Comme l'affirme le Catéchisme : «Cette démarche d’amour du Dieu fidèle est toujours première dans la prière, la démarche de l’homme est toujours une réponse. Au fur et à mesure que Dieu se révèle et révèle l’homme à lui-même, la prière apparaît comme un appel réciproque, un drame d’Alliance. A travers des paroles et des actes, ce drame engage le cœur. Il se dévoile à travers toute l’histoire du salut» (n. 2567).

 

Chers frères et sœurs, apprenons à demeurer davantage devant Dieu, Dieu qui s'est révélé en Jésus Christ, apprenons à reconnaître dans le silence, dans l'intimité de nous-mêmes, sa voix qui nous appelle et nous ramène à la profondeur de notre existence, à la source de la vie, à l'origine du salut, pour nous faire aller au-delà de la limite de notre vie et nous ouvrir à la mesure de Dieu, à la relation avec Lui, qui est Amour infini.

 

Audience générale, 11 mai 2011, Benoît XVI

   

Anges, Bicci di Lorenzo

 

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1 mars 2013 5 01 /03 /mars /2013 17:00

A la fin de cette semaine spirituellement si intense, il n’y a qu’un mot à dire: merci ! Merci à vous pour cette communauté en prière à l’écoute, qui m’a accompagné au cours de cette semaine. Merci surtout à vous, Eminence, pour ces «itinéraires» si beaux dans l’univers de la foi, dans l’univers des Psaumes. Nous avons été fascinés par la richesse, par la profondeur, par la beauté de cet univers de la foi et nous sommes reconnaissants car la Parole de Dieu nous a parlé de manière nouvelle, avec une force nouvelle.

 

« L’art de croire, l’art de prier » était le fil conducteur. Il m’est venu à l’esprit le fait que les théologiens médiévaux ont traduit le mot logos non seulement par verbum, mais aussi par ars : verbum et ars sont interchangeables. Ce n’est que dans les deux termes réunis qu’apparaît, pour les théologiens médiévaux, toute la signification du mot logos. Le Logos n’est pas seulement une raison mathématique : le Logos a un cœur, le Logos est aussi amour. La vérité est belle, vérité et beauté vont de pair : la beauté est le sceau de la vérité.

 

Toutefois, en partant des Psaumes et de notre expérience de chaque jour, vous avez fortement souligné que le «très beau» du sixième jour — exprimé par le Créateur — est en permanence contredit, dans ce monde, par le mal, par la souffrance, par la corruption. Et il semble presque que le malin veuille sans cesse souiller la création, pour contredire Dieu et pour rendre sa vérité et sa beauté méconnaissables.

 

Dans un monde autant marqué par le mal, le Logos, la Beauté éternelle et l’Ars éternel, doit apparaître comme caput cruentatum. Le Fils incarné, le Logos incarné, est couronné par une couronne d’épines ; mais c’est pourtant précisément ainsi, dans cette figure souffrante du Fils de Dieu, que nous commençons à voir la beauté la plus profonde de notre Créateur et Rédempteur; nous pouvons cependant, dans le silence de la «nuit obscure», écouter la Parole.

 

Croire n’est autre que, dans l’obscurité du monde, toucher la main de Dieu et ainsi, dans le silence, écouter la Parole, voir l’Amour.

 

Benoît XVI, Conclusion des exercices spirituels de la Curie romaine, 23 février 2013

 

Le Christ, Homme des Douleurs

 

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1 mars 2013 5 01 /03 /mars /2013 10:00

«Suis-moi», dit le Seigneur ressuscité à Pierre ; telle est sa dernière parole à ce disciple, choisi pour paître ses brebis.

 

«Suis-moi» – cette parole lapidaire du Christ peut être considérée comme la clé pour comprendre le message qui vient de la vie de notre regretté et bien-aimé Pape Jean-Paul II, dont nous déposons aujourd’hui le corps dans la terre comme semence d’immortalité - avec le cœur rempli de tristesse, mais aussi de joyeuse espérance et de profonde gratitude.

 

Suis-moi – depuis qu’il était jeune étudiant Karol Wojtyła s’enthousiasmait pour la littérature, pour le théâtre, pour la poésie. Travaillant dans une usine chimique, entouré et menacé par la terreur nazie, il a entendu la voix du Seigneur : Suis-moi ! Dans ce contexte très particulier il commença à lire des livres de philosophie et de théologie, il entra ensuite au séminaire clandestin créé par le Cardinal Sapieha et, après la guerre, il put compléter ses études à la faculté de théologie de l’université Jagellon de Cracovie.

 

Très souvent, dans ses lettres aux prêtres et dans ses livres autobiographiques, il nous a parlé de son sacerdoce, lui qui fut ordonné prêtre le 1er novembre 1946. Dans ces textes, il interprète son sacerdoce en particulier à partir de trois paroles du Seigneur. Avant tout celle-ci : «Ce n’est pas vous qui m’avez choisi, c’est moi qui vous ai choisis et établis afin que vous partiez, que vous donniez du fruit, et que votre fruit demeure» (Jn 15, 16).

 

La deuxième parole est celle-ci : «Le vrai berger donne sa vie pour ses brebis» (Jn 10, 11).

 

Et finalement : «Comme le Père m’a aimé, moi aussi je vous ai aimés. Demeurez dans mon amour» (Jn 15, 9). Dans ces trois paroles, nous voyons toute l’âme de notre Saint-Père. Il est réellement allé partout, et inlassablement, pour porter du fruit, un fruit qui demeure.

 

« Levez-vous, allons !», c’est le titre de son avant-dernier livre. «Levez-vous, allons !» – par ces paroles, il nous a réveillés d’une foi fatiguée, du sommeil des disciples d’hier et d’aujourd’hui. «Levez-vous, allons !» nous dit-il encore aujourd’hui. Le Saint-Père a été ensuite prêtre jusqu’au bout, parce qu’il a offert sa vie à Dieu pour ses brebis, et pour la famille humaine tout entière, dans une donation de soi quotidienne au service de l’Église et surtout dans les épreuves difficiles de ces derniers mois. Ainsi, il s’est uni au Christ, le bon pasteur qui aime ses brebis.

 

Et enfin, «demeurez dans mon amour»: le Pape, qui a cherché la rencontre avec tous, qui a eu une capacité de pardon et d’ouverture du cœur pour tous, nous dit, encore aujourd’hui, avec ces différentes paroles du Seigneur: en demeurant dans l’amour du Christ nous apprenons, à l’école du Christ, l’art du véritable amour.

 

Suis-moi  ! En juillet 1958, commence pour le jeune prêtre Karol Wojtyła une nouvelle étape sur le chemin avec le Seigneur et à la suite du Seigneur. Karol s’était rendu comme d’habitude avec un groupe de jeunes passionnés de canoë aux lacs Masuri pour passer des vacances avec eux. Mais il portait sur lui une lettre qui l’invitait à se présenter au Primat de Pologne, le Cardinal Wyszyński et il pouvait deviner le but de la rencontre: sa nomination comme évêque auxiliaire de Cracovie. Laisser l’enseignement académique, laisser cette communion stimulante avec les jeunes, laisser le grand combat intellectuel pour connaître et interpréter le mystère de la créature humaine, pour rendre présent dans le monde d’aujourd’hui l’interprétation chrétienne de notre être – tout cela devait lui apparaître comme se perdre soi-même, perdre précisément ce qui était devenu l’identité humaine de ce jeune prêtre. Suis-moi – Karol Wojtyła accepta, entendant la voix du Christ dans l’appel de l’Église. Et il a compris ensuite jusqu’à quel point était vraie la parole du Seigneur : «Qui cherchera à conserver sa vie la perdra. Et qui la perdra la sauvegardera» (Lc 17, 33).

 

Notre Pape – nous le savons tous – n’a jamais voulu sauvegarder sa propre vie, la garder pour lui ; il a voulu se donner lui-même sans réserve, jusqu’au dernier instant, pour le Christ et de ce fait pour nous aussi. Il a fait ainsi l’expérience que tout ce qu’il avait remis entre les mains du Seigneur lui était restitué de manière nouvelle. Son amour du verbe, de la poésie, des lectures, fut une part essentielle de sa mission pastorale et a donné une nouvelle fraîcheur, une nouvelle actualité, un nouvel attrait à l’annonce de l’Évangile, même lorsque ce dernier est signe de contradiction.

 

Suis-moi ! En octobre 1978, le Cardinal Wojtyła entendit de nouveau la voix du Seigneur. Se renouvelle alors le dialogue avec Pierre, repris dans l’Évangile de cette célébration : «Simon, fils de Jean, m’aimes-tu ? Sois le pasteur de mes brebis !» À la question du Seigneur, Karol, m’aimes-tu ? l’Archevêque de Cracovie répond du plus profond de son cœur : «Seigneur, tu sais tout: tu sais bien que je t’aime».

 

L’amour du Christ fut la force dominante de notre bien-aimé Saint-Père ; ceux qui l’ont vu prier, ceux qui l’ont entendu prêcher, le savent bien. Ainsi, grâce à son profond enracinement dans le Christ, il a pu porter une charge qui est au-delà des forces purement humaines : être le pasteur du troupeau du Christ, de son Église universelle.

 

Ce n’est pas ici le moment de parler des différents aspects d’un pontificat aussi riche. Je voudrais seulement relire deux passages de la liturgie de ce jour, dans lesquels apparaissent des éléments centraux qui l’annoncent. Dans la première lecture, saint Pierre nous dit – et le Pape le dit aussi avec saint Pierre : «En vérité, je le comprends : Dieu ne fait pas de différence entre les hommes ; mais, quelle que soit leur race, il accueille les hommes qui l’adorent et qui font ce qui est juste. Il a envoyé la Parole aux fils d’Israël, pour leur annoncer la paix par Jésus Christ : c’est lui, Jésus, qui est le Seigneur de tous» (Ac 10, 34-36). Et, dans la deuxième lecture, – saint Paul, et avec saint Paul notre Pape défunt – nous exhorte à haute voix : «Mes frères bien-aimés que je désire tant revoir, vous, ma joie et ma récompense; tenez bon dans le Seigneur, mes bien-aimés» (Ph 4, 1).

 

Suis-moi ! En même temps qu’il lui confiait de paître son troupeau, le Christ annonça à Pierre son martyre. Par cette parole qui conclut et qui résume le dialogue sur l’amour et sur la charge de pasteur universel, le Seigneur rappelle un autre dialogue, qui s’est passé pendant la dernière Cène. Jésus avait dit alors : «Là où je m’en vais, vous ne pouvez pas y aller». Pierre lui dit : «Seigneur, où vas-tu ?». Jésus lui répondit : « Là où je m’en vais, tu ne peux pas me suivre pour l’instant ; tu me suivras plus tard» (Jn 13, 33.36). Jésus va de la Cène à la Croix, et à la Résurrection – il entre dans le mystère pascal ; Pierre ne peut pas encore le suivre. Maintenant – après la Résurrection – ce moment est venu, ce «plus tard». En étant le Pasteur du troupeau du Christ, Pierre entre dans le mystère pascal, il va vers la Croix et la Résurrection. Le Seigneur le dit par ces mots, «Quand tu étais jeune ... tu allais où tu voulais, mais quand tu seras vieux, tu étendras les mains, et c’est un autre qui te mettra ta ceinture, pour t’emmener là où tu ne voudrais pas aller» (Jn 21, 18).

 

Dans la première période de son pontificat, le Saint-Père, encore jeune et plein de force, allait, sous la conduite du Christ, jusqu’aux confins du monde. Mais ensuite il est entré de plus en plus dans la communion aux souffrances du Christ, il a compris toujours mieux la vérité de ces paroles : «C’est un autre qui te mettra ta ceinture ...». Et vraiment, dans cette communion avec le Seigneur souffrant, il a annoncé infatigablement et avec une intensité renouvelée l’Évangile, le mystère de l’amour qui va jusqu’au bout (cf. Jn 13, 1).

 

Il a interprété pour nous le mystère pascal comme mystère de la Divine miséricorde. Il écrit dans son dernier livre la limite imposée au mal «est en définitive la Divine miséricorde» (Mémoire et identité, p. 71). Et en réfléchissant sur l’attentat, il affirme : «En souffrant pour nous tous, le Christ a conféré un sens nouveau à la souffrance, il l’a introduite dans une nouvelle dimension, dans un nouvel ordre : celui de l’amour [...]. C’est la souffrance qui brûle et consume le mal par la flamme de l’amour et qui tire aussi du péché une floraison multiforme de bien» (ibid., p. 201-202).

 

Animé par cette perspective, le Pape a souffert et aimé en communion avec le Christ et c’est pourquoi le message de sa souffrance et de son silence a été si éloquent et si fécond.

 

Divine miséricorde : le Saint-Père a trouvé le reflet le plus pur de la miséricorde de Dieu dans la Mère de Dieu. Lui, qui tout jeune avait perdu sa mère, en a d’autant plus aimé la Mère de Dieu. Il a entendu les paroles du Seigneur crucifié comme si elles lui étaient personnellement adressées : «Voici ta Mère». Et il a fait comme le disciple bien-aimé : il l’a accueillie au plus profond de son être (eis ta idia : Jn 19, 27) – Totus tuus. Et de cette Mère il a appris à se conformer au Christ.

 

Pour nous tous demeure inoubliable la manière dont en ce dernier dimanche de Pâques de son existence, le Saint-Père, marqué par la souffrance, s’est montré encore une fois à la fenêtre du Palais apostolique et a donné une dernière fois la Bénédiction Urbi et Orbi.

 

Nous pouvons être sûrs que notre Pape bien-aimé est maintenant à la fenêtre de la maison du Père, qu’il nous voit et qu’il nous bénit. Oui, puisses-tu nous bénir, Très Saint Père, nous confions ta chère âme à la Mère de Dieu, ta Mère, qui t’a conduit chaque jour et te conduira maintenant à la gloire éternelle de son Fils, Jésus Christ, notre Seigneur.

 

Amen

 

Homélie du Cardinal Joseph Ratzinger aux Obsèques de Sa Sainteté Jean-Paul II 

 

Domine quo vadis ?

 

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1 mars 2013 5 01 /03 /mars /2013 05:00

   

L'homme en prière, par BenoîtXVI

 

Aujourd'hui, je voudrais entamer une nouvelle série de catéchèses. Après les catéchèses sur les Pères de l'Eglise, sur les grands théologiens du Moyen-âge, sur les grandes figures de femmes, je voudrais à présent choisir un thème qui nous tient tous très à cœur : le thème de la prière, de manière spécifique la prière chrétienne, la prière que nous a enseignée Jésus et que continue à nous enseigner l’Eglise. C’est en Jésus en effet que l'homme devient capable de s'approcher de Dieu avec la profondeur et l'intimité du rapport de paternité et de filiation. Avec les premiers disciples, avec une humble confiance, nous nous adressons alors au Maître et nous Lui demandons : «Seigneur, enseigne-nous à prier» (Lc 11, 1).

 

Lors des prochaines catéchèses, en nous approchant de la Sainte Ecriture, de la grande tradition des Pères de l'Eglise, des Maîtres de spiritualité, de la Liturgie, nous voulons apprendre à vivre encore plus intensément notre relation avec le Seigneur, dans une sorte d’«école de prière». Nous savons bien, en effet, que la prière ne doit pas être considérée comme allant de soi : il faut apprendre à prier, comme en acquérant toujours à nouveau cet art ; même ceux qui sont très avant dans la vie spirituelle sentent toujours le besoin de se mettre à l'école de Jésus pour apprendre à prier avec authenticité. Nous recevons la première leçon du Seigneur à travers Son exemple. Les Evangiles nous décrivent Jésus en dialogue intime et constant avec le Père : c’est une communion profonde de celui qui est venu dans le monde non pour faire sa volonté, mais celle du Père qui l'a envoyé pour le salut de l'homme.

 

Dans cette première catéchèse, comme introduction, je voudrais proposer quelques exemples de prière présents dans les cultures antiques, pour relever comment, pratiquement toujours et partout celles-ci se sont adressées à Dieu.

 

Je commence par l'ancienne Egypte, par exemple. Ici, un homme aveugle, demandant à la divinité de lui rendre la vue, atteste quelque chose d'universellement humain, qui est la pure et simple prière de requête de la part de qui se trouve dans la souffrance, cet homme prie : «Mon cœur désire te voir... Toi qui m'as fait voir les ténèbres, crée pour moi la lumière. Fais que je te voie ! Penche sur moi ton visage aimé» (A. Barucq – F. Daumas, Hymnes et prières de l’Egypte ancienne, Paris 1980). Fais que je te voie ; c'est là le cœur de la prière !

 

Dans les religions de la Mésopotamie dominait un sentiment de culpabilité mystérieux et paralysant, mais sans qu’il soit privé pour autant de l'espérance de rachat et de libération de la part de Dieu. Ainsi pouvons-nous apprécier cette supplication de la part d'un croyant de ces anciens cultes, qui résonne ainsi : «Ô Dieu qui es indulgent même pour la faute la plus grave, absous mon péché.... Regarde Seigneur, ton esclave épuisé, et souffle sur lui ta brise : sans attendre pardonne-lui. Allège ta sévère punition. Libéré de mes liens, fais que je recommence à respirer ; brise mes chaînes, défaits mes liens» (M.-J. Seux, Hymnes et prières aux Dieux de Babylone et d’Assyrie, Paris 1976). Autant d'expressions qui démontrent comment l’homme, dans sa recherche de Dieu, a eu l'intuition, même confusément, d'un côté de sa faute, de l'autre de l'aspect de la miséricorde et de la bonté divine.

 

Au sein de la religion païenne, dans la Grèce antique, on assiste à une évolution très significative : les prières, tout en continuant d’invoquer l’aide divine pour obtenir la faveur céleste dans toutes les circonstances de la vie quotidienne et pour obtenir des bénéfices matériels, s’orientent progressivement vers les requêtes les plus désintéressées, qui permettent à l’homme croyant d’approfondir sa relation avec Dieu et de devenir meilleur. Par exemple, le grand philosophe Platon cite une prière de son maître, Socrate, considéré à juste titre comme l’un des fondateurs de la pensée occidentale. Socrate priait ainsi : «... donnez-moi la beauté intérieure de l'âme ! Quant à l'extérieur, je me contente de celui que j'ai, pourvu qu'il ne soit pas en contradiction avec l'intérieur, que le sage me paraisse riche, et que j'aie seulement autant, d'or qu'un sage peut en supporter, et en employer» (Œuvres I. Phèdre 279c). Il voudrait avant tout avoir une beauté intérieure et être sage, et non pas riche d’argent.

 

Dans ces superbes chefs-d’œuvre de la littérature de tous les temps que sont les tragédies grecques, aujourd’hui encore, après vingt-cinq siècles, lues, méditées et représentées, sont contenues des prières qui expriment le désir de connaître Dieu et d’adorer sa majesté. L’une de celles-ci dit : «Ô toi qui donnes le mouvement à la terre, et qui en même temps résides en elle, qui que tu sois, Jupiter, impénétrable à la vue des mortels, nécessité de la nature, ou intelligence des hommes, je te rends hommage ; car, par des voies secrètes, tu gouvernes toutes les choses humaines selon la justice» (Euripide, Les Troyennes, 884-886). Dieu demeure un peu vague et toutefois, l’homme connaît ce Dieu inconnu et prie celui qui guide les destinées de la terre.

 

Chez les Romains également, qui constituèrent ce grand Empire dans lequel naquit et se diffusa en grande partie le christianisme des origines, la prière, même si elle est associée à une conception utilitariste et fondamentalement liée à la demande de protection divine sur la vie de la communauté civile, s’ouvre parfois à des invocations admirables en raison de la ferveur de la piété personnelle, qui se transforme en louange et en action de grâces. En est témoin un auteur de l’Afrique romaine du IIe siècle après Jésus Christ, Apulée. Dans ses écrits, il manifeste l’insatisfaction de ses contemporains à l’égard de la religion traditionnelle et le désir d’un rapport plus authentique avec Dieu. Dans son chef-d’œuvre intitulé Les métamorphoses, un croyant s’adresse à une divinité féminine à travers ces paroles : «Divinité sainte, source éternelle de salut, protectrice adorable des mortels, qui leur prodigues dans leurs maux l'affection d'une tendre mère ; pas un jour, pas une nuit, pas un moment ne s'écoule qui ne soit marqué par un de tes bienfaits» (Apulée de Madaure, Métamorphoses, XI, 25).

 

Pendant la même période, l’empereur Marc-Aurèle — qui était un philosophe qui réfléchissait sur la condition humaine — affirme la nécessité de prier pour établir une coopération fructueuse entre action divine et action humaine. Il écrit dans ses Souvenirs/Pensées : «Qui te dit que les dieux ne nous aident pas également en ce qui dépend de nous ? Commence donc à les prier et tu verras» (Dictionnaire de Spiritualité XII/2, col. 2213). Ce conseil de l’empereur philosophe a été effectivement mis en pratique par d’innombrables générations d’hommes avant le Christ, démontrant ainsi que la vie humaine sans la prière, qui ouvre notre existence au mystère de Dieu, devient privée de sens et de référence. En effet, dans chaque prière s’exprime toujours la vérité de la créature humaine, qui d’une part fait l’expérience de la faiblesse et de l’indigence, et demande donc de l’aide au Ciel, et de l’autre est dotée d’une dignité extraordinaire, car, en se préparant à accueillir la Révélation divine, elle se découvre capable d’entrer en communion avec Dieu.

 

Chers amis, dans ces exemples de prières des différentes époques et civilisations apparaît la conscience que l’être humain a de sa condition de créature et de sa dépendance d’un Autre qui lui est supérieur et source de tout bien. L’homme de tous les temps prie car il ne peut faire à moins de se demander quel est le sens de son existence, qui reste obscur et décourageant, s’il n’est pas mis en relation avec le mystère de Dieu et de son dessein sur le monde. La vie humaine est un mélange de bien et de mal, de souffrance imméritée et de joie et de beauté, qui nous pousse spontanément et irrésistiblement à demander à Dieu cette lumière et cette force qui puisse nous secourir sur la terre et ouvrir une espérance qui aille au-delà des frontières de la mort. Les religions païennes demeurent une invocation qui, de la terre, attend une parole du Ciel. L’un des derniers grands philosophes païens, qui vécut à une époque déjà pleinement chrétienne Proclus de Constantinople, donne voix à cette attente, en disant : «Inconnaissable, personne ne te contient. Tout ce que nous pensons t’appartient. Nos maux et nos biens sont en toi, chacune de nos aspirations dépend de toi, ô Ineffable, que nos âmes sentent présent, en t’élevant un hymne de silence» (Hymnes).

 

Dans les exemples de prière des différentes cultures, que nous avons pris en considération, nous pouvons voir un témoignage de la dimension religieuse et du désir de Dieu inscrit dans le cœur de chaque homme, qui trouvent leur accomplissement et leur pleine expression dans l’ancien et dans le Nouveau Testament. La Révélation, en effet, purifie et porte à sa plénitude l’aspiration originelle de l’homme à Dieu, en lui offrant, dans la prière, la possibilité d’une relation plus profonde avec le père céleste.

 

Au début de notre chemin dans l’«Ecole de la prière» nous voulons alors demander au Seigneur qu’il illumine notre esprit et notre cœur pour que la relation avec Lui dans la prière soit toujours plus intense, affectueuse et constante. Encore une fois, nous lui disons : «Seigneur, apprends-nous à prier» (Lc 11, 1).

 

Audience générale, 4 mai 2011, Benoît XVI

 

 

Rome, Ruines du Forum, Canaletto

 

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28 février 2013 4 28 /02 /février /2013 12:30

Je voudrais maintenant ajouter encore un troisième point : c’était le Concile des Pères – le vrai Concile –, mais c’était aussi le Concile des médias. C’était presqu’un Concile en soi, et le monde a perçu le Concile à travers eux, à travers les médias.

 

Donc le Concile immédiatement efficace qui est arrivé au peuple, a été celui des media, non celui des Pères. Et tandis que le Concile des Pères se réalisait à l’intérieur de la foi, c’était un Concile de la foi qui cherche l’intellectus, qui cherche à se comprendre et cherche à comprendre les signes de Dieu en ce moment, qui cherche à répondre au défi de Dieu en ce moment et de trouver dans la Parole de Dieu la parole pour aujourd’hui et demain, tandis que tout le Concile – comme je l’ai dit – se mouvait à l’intérieur de la foi, comme fides quaerens intellectum, le Concile des journalistes ne s’est pas réalisé, naturellement, à l’intérieur de la foi, mais à l’intérieur des catégories des médias d’aujourd’hui, c’est-à-dire hors de la foi, avec une herméneutique différente. C’était une herméneutique politique : pour les médias, le Concile était une lutte politique, une lutte de pouvoir entre divers courants dans l’Église. Il était évident que les médias prendraient position pour la partie qui leur apparaissait convenir le plus avec leur monde.

 

Il y avait ceux qui cherchaient la décentralisation de l’Église, le pouvoir pour les évêques et puis, à travers la parole “Peuple de Dieu”, le pouvoir du peuple, des laïcs. Il y avait cette triple question : le pouvoir du Pape, transféré ensuite au pouvoir des évêques et au pouvoir de tous, la souveraineté populaire. Naturellement, pour eux, c’était la partie à approuver, à divulguer, à favoriser. Et ainsi aussi pour la liturgie : la liturgie comme acte de foi n’intéressait pas, mais comme quelque chose où se font des choses compréhensibles, quelque chose de l’activité de la communauté, une chose profane. Et nous savons que c’était une tendance qui se fondait aussi historiquement, à savoir : la sacralité est une chose païenne, éventuellement aussi de l’Ancien Testament. Dans le Nouveau, vaut seulement le fait que le Christ est mort dehors : c’est-à-dire hors des portes, c’est-à-dire dans le monde profane. La sacralité est donc à terminer, le culte est aussi profanité ; le culte n’est pas culte mais un acte de l’ensemble, de la participation commune, et ainsi aussi une participation comme activité. Ces traductions, ces banalisations de l’idée du Concile ont été virulentes dans la pratique de l’application de la Réforme liturgique ; elles sont nées d’une vision du Concile extérieure à sa propre clé, celle de la foi. Et ainsi aussi pour la question de l’Écriture : l’Écriture est un livre, historique, à traiter historiquement et rien d’autre, et ainsi de suite.

 

Nous savons combien ce Concile des médias fut accessible à tous. Donc, c’était celui qui dominait, le plus efficace, et il a créé tant de calamités, tant de problèmes, réellement tant de misères : séminaires fermés, couvents fermés, liturgie banalisée… et le vrai Concile a eu de la difficulté à se concrétiser, à se réaliser ; le Concile virtuel était plus fort que le Concile réel. Mais la force réelle du Concile était présente et, au fur et à mesure, il se réalise toujours plus et devient la véritable force qui ensuite est aussi vraie réforme, vrai renouvellement de l’Église.

 

Il me semble que, 50 ans après le Concile, nous voyons comment ce Concile virtuel se brise, se perd, et le vrai Concile apparaît avec toute sa force spirituelle. Et voilà notre tâche, particulièrement en cette Année de la foi, à partir de cette Année de la foi, travailler pour que le vrai Concile, avec sa force de l’Esprit Saint, se réalise et que l’Église soit réellement renouvelée. Nous espérons que le Seigneur nous y aide.

 

Moi, retiré, dans la prière, je serai toujours avec vous, et ensemble nous irons de l’avant avec le Seigneur, dans cette certitude : le Seigneur vainc !

 

Benoît XVI, rencontre avec le clergé de Rome, 14 février 2013

 

Benoît XVI 14.04.2010

 

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