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"Je vous donne un commandement nouveau : c'est de vous aimer les uns les autres.

 

Comme je vous ai aimés, vous aussi aimez-vous les uns les autres.

 

Ce qui montrera à tous les hommes que vous êtes mes disciples, c'est l'amour que vous aurez les uns pour les autres."

 

Evangile de Jésus-Christ selon  saint Jean 

   

 

Pentecôte

" Le Défenseur, l'Esprit Saint que le Père enverra en mon nom, lui, vous enseignera tout, et il vous fera souvenir de tout ce que je vous ai dit."

 

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean  

 

   

 

 El Papa es argentino. Jorge Bergoglio                 

Saint Père François

 

 

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1er mai 2011 Béatification de Jean-Paul II

Béatification du Serviteur de Dieu Jean-Paul II

 

 

  Béatification du Père Popieluszko

beatification Mass, in Warsaw, Poland

à Varsovie, 6 juin 2010, Dimanche du Corps et du Sang du Christ

 

 

presidential palace in Warsaw

Varsovie 2010

 

 

Basilique du Sacré-Cœur de Montmartre
Sanctuaire de l'Adoration Eucharistique et de la Miséricorde Divine

La miséricorde de Dieu est comme un torrent débordé. Elle entraîne les cœurs sur son passage.
(Saint Curé d'Ars)
 

 


Le côté du Christ a été transpercé et tout le mystère de Dieu sort de là. C’est tout le mystère de Dieu qui aime, qui se livre jusqu’au bout, qui se donne jusqu’au bout. C’est le don le plus absolu qui soit. Le don du mystère trinitaire est le cœur ouvert. Ce n’est pas une image, c’est une réalité. C’est la réalité la plus profonde qui soit, la réalité de l’amour.
Père Marie-Joseph Le Guillou




Dans le cœur transpercé
de Jésus sont unis
le Royaume du Ciel
et la terre d'ici-bas
la source de la vie
pour nous se trouve là.

Ce cœur est cœur divin
Cœur de la Trinité
centre de convergence
de tous les cœur humains
il nous donne la vie
de la Divinité.


Sainte Thérèse Bénédicte de la Croix
(Edith Stein)



Le Sacré-Cœur représente toutes les puissances d'aimer, divines et humaines, qui sont en Notre-Seigneur.
Père Marie-Eugène de l'Enfant Jésus

 



feuille d'annonces de la Basilique du Sacré-Coeur de Montmartre

 

 

 

 

 

 

 

     

The Cambrai Madonna

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Cathédrale de Cambrai

 

 

 

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Ordinations du samedi 27 juin 2009 à Notre Dame de Paris


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... ma vocation, enfin je l’ai trouvée, ma vocation, c’est l’Amour !

 

 

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SALVE REGINA

20 juin 2015 6 20 /06 /juin /2015 11:00

Le trait qui distingue essentiellement le Paradis de l’Elysée, c’est que dans le premier les âmes saintes habitent le ciel avec Dieu et les anges, et que dans le dernier les ombres heureuses sont séparées de l’Olympe. Le système philosophique de Platon et de Pythagore qui divise l’âme en deux essences, le char subtil qui s’envole au-dessous de la lune, et l’esprit qui remonte vers la Divinité ; ce système, disons-nous, n’est pas de notre compétence, et nous ne parlons que de la théologie poétique.

 

Nous avons fait voir dans plusieurs endroits de cet ouvrage la différence qui existe entre la félicité des élus et celle des mânes de l’Elysée. Autre est de danser et de faire des festins, autre de connaître la nature des choses, de lire dans l’avenir, de voir les révolutions des globes, enfin d’être comme associé à l’omniscience, sinon à la toute-puissance de Dieu. Il est pourtant extraordinaire qu’avec tant d’avantages les poètes chrétiens aient échoué dans la peinture du ciel. Les uns ont péché par timidité, comme le Tasse et Milton ; les autres par fatigue, comme le Dante ; par philosophie, comme Voltaire ; ou par abondance, comme Klopstock. Il y a donc un écueil caché dans ce sujet ; voici quelles sont nos conjectures à cet égard.

 

Il est de la nature de l’homme de ne sympathiser qu’avec les choses qui ont des rapports avec lui, et qui le saisissent par un certain côté, tel, par exemple, que le malheur. Le ciel, où règne une félicité sans bornes, est trop au-dessus de la condition humaine pour que l’âme soit fort touchée du bonheur des élus : on ne s’intéresse guère à des êtres parfaitement heureux. C’est pourquoi les poètes ont mieux réussi dans la description des enfers ; du moins l’humanité est ici, et les tourments des coupables nous rappellent les chagrins de notre vie ; nous nous attendrissons sur les infortunes des autres, comme les esclaves d’Achille, qui en répandant beaucoup de larmes sur la mort de Patrocle pleuraient secrètement leurs propres malheurs.

 

Pour éviter la froideur qui résulte de l’éternelle et toujours semblable félicité des justes, on pourrait essayer d’établir dans le ciel une espérance, une attente quelconque de plus de bonheur, ou d’une époque inconnue dans la révolution des êtres ; on pourrait rappeler davantage les choses humaines, soit en tirant des comparaisons, soit en donnant des affections et même des passions aux élus : l’Ecriture nous parle des espérances et des saintes tristesses du ciel. Pourquoi donc n’y aurait-il pas dans le paradis des pleurs tels que les saints peuvent en répandre ? Par ces divers moyens, on ferait naître des harmonies entre notre nature bornée et une constitution plus sublime, entre nos fins rapides et les choses éternelles : nous serions moins portés à regarder comme une fiction un bonheur qui, semblable au nôtre, serait mêlé de changements et de larmes.

 

D’après ces considérations sur l’usage du merveilleux chrétien dans la poésie, on peut du moins douter que le merveilleux du paganisme ait sur le premier un avantage aussi grand qu’on l’a généralement supposé. On oppose toujours Milton avec ses défauts à Homère avec ses beautés ; mais supposons que le chantre d’Eden fût né en France sous le siècle de Louis XIV, et qu’à la grandeur naturelle de son génie il eût joint le goût de Racine et de Boileau : nous demandons quel fût devenu alors le Paradis perdu, et si le merveilleux de ce poème n’eut pas égalé celui de l’Iliade et de l’Odyssée. Si nous jugions la mythologie d’après la Pharsale, ou même d’après l’Enéide, en aurions-nous la brillante idée que nous en a laissée le père des Grâces, l’inventeur de la ceinture de Vénus ? Quand nous aurons sur un sujet chrétien un ouvrage aussi parfait dans son genre que les ouvrages d’Homère, nous pourrons nous décider en faveur du merveilleux de la fable, ou du merveilleux de notre religion ; jusque alors il sera permis de douter de la vérité de ce précepte de Boileau :

De la foi d’un chrétien les mystères terribles

D’ornements égayés ne sont point susceptibles.

(Art poét., ch. III.)

 

Au reste, nous pouvions nous dispenser de faire lutter le christianisme avec la mythologie sous le seul rapport du merveilleux. Nous ne sommes entré dans cette étude que par surabondance de moyens, et pour montrer les ressources de notre cause. Nous pouvions trancher la question d’une manière simple et péremptoire ; car fût-il certain, comme il est douteux, que le christianisme ne pût fournir un merveilleux aussi riche que celui de la fable, encore est-il vrai qu’il y a une certaine poésie de l’âme, une sorte d’imagination du cœur, dont on ne trouve aucune trace dans la mythologie. Or, les beautés touchantes qui émanent de cette source feraient seules une ample compensation pour les ingénieux mensonges de l’antiquité.

 

Tout est machine et ressort, tout est extérieur, tout est fait pour les yeux dans les tableaux du paganisme ; tout est sentiment et pensée, tout est intérieur, tout est créé pour l’âme dans les peintures de la religion chrétienne. Quel charme de méditation ! quelle profondeur de rêverie ! Il y a plus d’enchantement dans une de ces larmes que le christianisme fait répandre au fidèle que dans toutes les riantes erreurs de la mythologie. Avec une Notre-Dame des Douleurs, une Mère de Pitié, quelque saint obscur, patron de l’aveugle et de l’orphelin, un auteur peut écrire une page plus attendrissante qu’avec tous les dieux du Panthéon. C’est bien là aussi de la poésie ! c’est bien là du merveilleux ! Mais voulez-vous du merveilleux plus sublime, contemplez la vie et les douleurs du Christ, et souvenez-vous que votre Dieu s’est appelé le Fils de l’Homme ! Nous osons le prédire : un temps viendra que l’on sera étonné d’avoir pu méconnaître les beautés qui existent dans les seuls noms, dans les seules expressions du christianisme ; l’on aura de la peine à comprendre comment on a pu se moquer de cette religion de la raison et du malheur.

 

Ici finissent les relations directes du christianisme et des Muses, puisque nous avons achevé de l’envisager poétiquement dans ses rapports avec les hommes et dans ses rapports avec les êtres surnaturels. Nous couronnerons ce que nous avons dit sur ce sujet par une vue générale de l’Ecriture : c’est la source où Milton, le Dante, le Tasse et Racine ont puisé une partie de leurs merveilles, comme les poètes de l’antiquité ont emprunté leurs grands traits d’Homère.

 

 

CHATEAUBRIAND, Génie du Christianisme ; Deuxième Partie - Poétique du Christianisme ; Livre 4 - Du merveilleux, ou de la poésie dans ses rapports avec les êtres surnaturels ; Chapitre XVI - Le Paradis

 

Paradis, Bouts, Musée des Beaux-Arts, Lille

Paradis, Bouts, Musée des Beaux-Arts, Lille

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19 juin 2015 5 19 /06 /juin /2015 18:00
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19 juin 2015 5 19 /06 /juin /2015 11:00

On avouera du moins que le purgatoire offre aux poètes chrétiens un genre de merveilleux inconnu à l’antiquité.

 

Il n’y a peut-être rien de plus favorable aux muses que ce lieu de purification, placé sur les confins de la douleur et de la joie, où viennent se réunir les sentiments confus du bonheur et de l’infortune. La gradation des souffrances en raison des fautes passées, ces âmes plus ou moins heureuses, plus ou moins brillantes, selon qu’elles approchent plus ou moins de la double éternité des plaisirs ou des peines, pourraient fournir des sujets touchants au pinceau. Le purgatoire surpasse en poésie le ciel et l’enfer, en ce qu’il présente un avenir qui manque aux deux premiers.

 

Dans l’Elysée antique le fleuve du Léthé n’avait point été inventé sans beaucoup de grâce ; mais toutefois on ne saurait dire que les ombres qui renaissaient à la vie sur ses bords présentassent la même progression poétique vers le bonheur que les âmes du purgatoire. Quitter les campagnes des mânes heureux pour revenir dans ce monde, c’était passer d’un état parfait à un état qui l’était moins ; c’était rentrer dans le cercle, renaître pour mourir, voir ce qu’on avait vu. Toute chose dont l’esprit peut mesurer l’étendue est petite : le cercle, qui chez les anciens exprimait l’éternité, pouvait être une image grande et vraie ; cependant il nous semble qu’elle tue l’imagination, en la forçant de tourner dans ce cerceau redoutable. La ligne droite prolongée sans fin serait peut-être plus belle, parce qu’elle jetterait la pensée dans un vague effrayant, et ferait marcher de front trois choses qui paraissent s’exclure, l’espérance, la mobilité et l’éternité.

 

Le rapport à établir entre le châtiment et l’offense peut produire ensuite dans le purgatoire tous les charmes du sentiment. Que de peines ingénieuses réservées à une mère trop tendre, à une fille trop crédule, à un jeune homme trop ardent ! Et certes, puisque les vents, les feux, les glaces prêtent leurs violences aux tourments de l’enfer, pourquoi ne trouverait-on pas des souffrances plus douces dans les chants du rossignol, dans les parfums des fleurs, dans le bruit des fontaines, ou dans les affections purement morales ? Homère et Ossian ont chanté les plaisirs de la douleur.

 

Une autre source de poésie qui découle du purgatoire est ce dogme par qui nous sommes enseignés que les prières et les bonnes œuvres des mortels hâtent la délivrance des âmes. Admirable commerce entre le fils vivant et le père décédé ! entre la mère et la fille, entre l’époux et l’épouse, entre la vie et la mort ! Que de choses attendrissantes dans cette doctrine ! Ma vertu, à moi chétif mortel, devient un bien commun pour tous les chrétiens ; et de même que j’ai été atteint du péché d’Adam, ma justice est passée en compte aux autres. Poètes chrétiens, les prières de vos Nisus atteindront un Euryale au delà du tombeau ; vos riches pourront partager leur superflu avec le pauvre ; et pour le plaisir qu’ils auront eu à faire cette simple, cette agréable action, Dieu les en récompensera encore, en retirant leur père et leur mère d’un lieu de peines !

 

C’est une belle chose d’avoir, par l’attrait de l’amour, forcé le cœur de l’homme à la vertu, et de penser que le même denier qui donne le pain du moment au misérable donne peut-être à une âme délivrée une place éternelle à la table du Seigneur.

 

 

CHATEAUBRIAND, Génie du Christianisme ; Deuxième Partie - Poétique du Christianisme ; Livre 4 - Du merveilleux, ou de la poésie dans ses rapports avec les êtres surnaturels ; Chapitre XV - Du Purgatoire

 

La Madone du Carmel et les âmes du Purgatoire, Tiepolo (1696, Venise - 1770, Madrid)

La Madone du Carmel et les âmes du Purgatoire, Tiepolo (1696, Venise - 1770, Madrid)

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18 juin 2015 4 18 /06 /juin /2015 11:00

L’entrée de l’Averne, dans le sixième livre de l’Enéide, offre des vers d’un travail achevé.

Ibant obscuri sola sub nocte per umbram,

Perque domos Ditis vacuas et inania regna.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Pallentesque habitant Morbi, tristisque Senectus,

Et Metus, et malesuada Fames, et turpis Egestas,

Terribiles visu formae ; Lethumque Laborque,

Tum consanguineus Lethi Sopor, et mala mentis

Gaudia…

(Lib. VI, v. 268 et seq.)

 

Il suffit de savoir lire le latin pour être frappé de l’harmonie lugubre de ces vers. Vous entendez d’abord mugir la caverne où marchent la Sibylle et Enée : Ibant obscuri sola sub nocte per umbram ; puis tout à coup vous entrez dans des espaces déserts, dans les royaumes du vide ; Perque domos Ditis vacuas et inania regna. Viennent ensuite des syllabes sourdes et pesantes, qui rendent admirablement les pénibles soupirs des enfers. Tristisque Senectus et Metus. — Lethumque Laborque ; consonances qui prouvent que les anciens n’ignoraient pas l’espèce de beauté attachée à la rime. Les Latins, ainsi que les Grecs, employaient la répétition des sons dans les peintures pastorales et dans les harmonies tristes.

 

Le Dante, comme Enée, erre d’abord dans une forêt qui cache l’entrée de son enfer : rien n’est plus effrayant que cette solitude. Bientôt il arrive à la porte, où se lit la fameuse inscription :

Per me si va nella città dolente,

Per me si va nell’eterno dolore :

Per me si va tra la perduta gente.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Lasciate ogni speranza, voi ch’entrate.

 

Voilà précisément la même sorte de beautés que dans le poète latin. Toute oreille sera frappée de la cadence monotone de ces rimes redoublées, où semble retentir et expirer cet éternel cri de douleur qui remonte du fond de l’abîme. Dans les trois per me si va, on croit entendre le glas de l’agonie du chrétien. Le lasciate ogni speranza est comparable au plus grand trait de l’enfer de Virgile.

 

Milton, à l’exemple du poète de Mantoue, a placé la Mort à l’entrée de son enfer (Lethum), et le Péché, qui n’est que le mala mentis gaudia, les joies coupables du cœur. Il décrit ainsi la première :

. . . . . . . . . . . The other shape, etc.

" L’autre forme, si l’on peut appeler de ce nom ce qui n’avait point de formes, se tenait debout à la porte. Elle était sombre comme la nuit, hagarde comme dix furies ; sa main brandissait un dard affreux, et sur cette partie qui semblait sa tête elle portait l’apparence d’une couronne."

 

Jamais fantôme n’a été représenté d’une manière plus vague et plus terrible. L’origine de la Mort, racontée par le Péché, la manière dont les échos de l’enfer répètent le nom redoutable lorsqu’il est prononcé pour la première fois, tout cela est une sorte de noir sublime, inconnu de l’antiquité.

 

En avançant dans les enfers, nous suivrons Enée au champ des larmes. lugentes campi. Il y rencontre la malheureuse Didon ; il l’aperçoit dans les ombres d’une forêt, comme on voit, ou comme on croit voir la lune nouvelle se lever à travers les nuages :

Qualem primo qui surgere mense

Aut videt, aut vidisse putat, per nubile lunam.

 

Ce morceau est d’un goût exquis ; mais le Dante est peut-être aussi touchant dans la peinture des campagnes des pleurs. Virgile a placé les amants au milieu des bois de myrtes et dans des allées solitaires ; le Dante a jeté les siens dans un air vague et parmi des tempêtes qui les entraînent éternellement ; l’un a donné pour punition à l’amour ses propres rêveries, l’autre en a cherché le supplice dans l’image des désordres que cette passion fait naître. Le Dante arrête un couple malheureux au milieu d’un tourbillon : Françoise de Rimini, interrogée par le poète, lui raconte ses malheurs et son amour :

Noi leggevamo, etc.

" Nous lisions un jour, dans un doux loisir, comment l’amour vainquit Lancelot. J’étais seule avec mon amant, et nous étions sans défiance, plus d’une fois nos visages pâlirent, et nos yeux troublés se rencontrèrent, mais un seul instant nous perdit tous deux. Lorsque enfin l’heureux Lancelot cueille le baiser désiré, alors celui qui ne me sera plus ravi colla sur ma bouche ses lèvres tremblantes, et nous laissâmes échapper le livre par qui nous fut révélé le mystère de l’amour."

 

Quelle simplicité admirable dans le récit de Françoise ! quelle délicatesse dans le trait qui le termine ! Virgile n’est pas plus chaste dans le quatrième livre de l’Enéide, lorsque Junon donne le signal, dant signum. C’est encore au christianisme que ce morceau doit une partie de son pathétique. Françoise est punie pour n’avoir pas su résister à son amour, et pour avoir trompé la foi conjugale : la justice inflexible de la religion contraste avec la pitié que l’on ressent pour une faible femme.

 

Non loin du champ des larmes, Enée voit le champ des guerriers. Il y rencontre Déiphobe cruellement mutilé. Son histoire est intéressante, mais le seul nom d’Ugolin rappelle un morceau fort supérieur. On conçoit que Voltaire n’ait vu dans les feux d’un enfer chrétien que des objets burlesques ; cependant ne vaut-il pas mieux pour le poète y trouver le comte Ugolin, et matière à des vers aussi beaux, à des épisodes aussi tragiques ?

 

Lorsque nous passons de ces détails à une vue générale de l’Enfer et du Tartare, nous voyons dans celui-ci les Titans foudroyés, Ixion menacé de la chute d’un rocher, les Danaïdes avec leur tonneau,Tantale trompé par les ondes, etc.

 

Soit que l’on commence à s’accoutumer à l’idée de ces tourments, soit qu’ils n’aient rien en eux-mêmes qui produise le terrible, parce qu’ils se mesurent sur des fatigues connues dans la vie, il est certain qu’ils font peu d’impression sur l’esprit. Mais voulez-vous être remué, voulez-vous savoir jusqu’où l’imagination de la douleur peut s’étendre, voulez-vous connaître la poésie des tortures et les hymnes de la chair et du sang, descendez dans l’Enfer du Dante. Ici des ombres sont ballottées par des tourbillons d’une tempête, là des sépulcres embrasés renferment les fauteurs de l’hérésie. Les tyrans sont plongés dans un fleuve de sang tiède ; les suicides, qui ont dédaigné la noble nature de l’homme, ont rétrogradé vers la plante : ils sont transformés en arbres rachitiques, qui croissent dans un sable brûlant, et dont les harpies arrachent sans cesse des rameaux. Ces âmes ne reprendront point leurs corps au jour de la résurrection ; elles les traîneront dans l’affreuse forêt pour les suspendre aux branches des arbres auxquelles elles sont attachées.

 

Si l’on dit qu’un auteur grec ou romain eût pu faire un Tartare aussi formidable que l’Enfer du Dante, cela d’abord ne conclurait rien contre les moyens poétiques de la religion chrétienne ; mais il suffit d’ailleurs d’avoir quelque connaissance du génie de l’antiquité pour convenir que le ton sombre de l’Enfer du Dante ne se trouve point dans la théologie païenne, et qu’il appartient aux dogmes menaçants de notre foi.

 

 

CHATEAUBRIAND, Génie du Christianisme ; Deuxième Partie - Poétique du Christianisme ; Livre 4 - Du merveilleux, ou de la poésie dans ses rapports avec les êtres surnaturels ; Chapitre XIV - Parallèle de l’Enfer et du Tartare. Entrée de l’Averne. Porte de l’Enfer du Dante. Didon. Françoise de Rimini. Tourments des coupables

 

Les ombres de Francesca da Rimini et de Paolo Malatesta apparaissent à Dante et à Virgile, Ary Scheffer, Musée du Louvre, Aile Denon, 1er étage, salle 77

Les ombres de Francesca da Rimini et de Paolo Malatesta apparaissent à Dante et à Virgile, Ary Scheffer, Musée du Louvre, Aile Denon, 1er étage, salle 77

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17 juin 2015 3 17 /06 /juin /2015 11:00

Entre plusieurs différences qui distinguent l’enfer chrétien du Tartare, une surtout est remarquable : ce sont les tourments qu’éprouvent eux-mêmes les démons. Pluton, les Juges, les Parques et les Furies ne souffraient point avec les coupables. Les douleurs de nos puissances infernales sont donc un moyen de plus pour l’imagination, et conséquemment un avantage poétique de notre enfer sur l’enfer des anciens.

 

Dans les champs Cimmériens de l’Odyssée, le vague des lieux, les ténèbres, l’incohérence des objets, la fosse où les ombres viennent boire le sang, donnent au tableau quelque chose de formidable, et qui peut-être ressemble plus à l’enfer chrétien que le Ténare de Virgile. Dans celui-ci l’on remarque les progrès des dogmes philosophiques de la Grèce. Les Parques, le Cocyte, le Styx, se retrouvent dans les ouvrages de Platon. Là commence une distribution de châtiments et de récompenses inconnue à Homère. Nous avons déjà fait remarquer que le malheur, l’indigence et la faiblesse étaient, après le trépas, relégués par les païens dans un monde aussi pénible que celui-ci. La religion de Jésus-Christ n’a point ainsi sevré nos âmes. Nous savons qu’au sortir de ce monde de tribulations, nous autres misérables, nous trouverons un lieu de repos, et, si nous avons eu soif de la justice dans le temps, nous en serons rassasiés dans l’éternité Sitiunt justitiam ipsi saturabuntur.

 

Si la philosophie est satisfaite, il ne nous sera pas très difficile peut-être de convaincre les Muses. A la vérité nous n’avons point d’enfer chrétien traité d’une manière irréprochable. Ni le Dante, ni le Tasse, ni Milton, ne sont parfaits dans la peinture des lieux de douleur. Cependant quelques morceaux excellents, échappés à ces grands maîtres, prouvent que si toutes les parties du tableau avaient été retouchées avec le même soin, nous posséderions des enfers aussi poétiques que ceux d’Homère et de Virgile.

 

 

CHATEAUBRIAND, Génie du Christianisme ; Deuxième Partie - Poétique du Christianisme ; Livre 4 - Du merveilleux, ou de la poésie dans ses rapports avec les êtres surnaturels ; Chapitre XIII - L’Enfer chrétien

 

Le Jugement Dernier, Hieronymus Bosch

Le Jugement Dernier, Hieronymus Bosch

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16 juin 2015 2 16 /06 /juin /2015 17:43
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16 juin 2015 2 16 /06 /juin /2015 11:00

Nous touchons à la dernière des machines poétiques, c’est-à-dire aux voyages des êtres surnaturels. C’est une des parties du merveilleux dans laquelle Homère s’est montré le plus sublime. Tantôt il raconte que le char du dieu vole comme la pensée d’un voyageur qui se rappelle, en un instant, les lieux qu’il a parcourus ; tantôt il dit :

Autant qu’un homme assis au rivage des mers

Voit, d’un roc élevé, d’espace dans les airs,

Autant des Immortels les coursiers intrépides

En franchissent d’un saut.

 

Quoi qu’il en soit du génie d’Homère et de la majesté de ses dieux, son merveilleux et sa grandeur vont encore s’éclipser devant le merveilleux du christianisme.

 

Satan arrivé aux portes de l’enfer, que le Péché et la Mort lui ont ouvertes, se prépare à aller à la découverte de la création.

Like a furnace mouth

The sudden view

Of all this world at once.

 

Les portes de l’enfer s’ouvrent vomissant, comme la bouche d’une fournaise, des flocons de fumée et des flammes rouges. Soudain, aux regards de Satan se dévoilent les secrets de l’antique abîme ; océan sombre et sans bornes, où les temps, les dimensions et les lieux viennent se perdre, où l’ancienne Nuit et le Chaos, aïeux de la Nature, maintiennent une éternelle anarchie au milieu d’une éternelle guerre, et règnent par la confusion. Satan, arrêté sur le seuil de l’enfer, regarde dans le vaste gouffre, berceau et peut-être tombeau de la Nature ; il pèse en lui-même les dangers du voyage. Bientôt, déployant ses ailes, et repoussant du pied le seuil fatal, il s’élève dans des tourbillons de fumée. Porté sur ce siège nébuleux, longtemps il monte avec audace ; mais la vapeur, graduellement dissipée, l’abandonne au milieu du vide. Surpris, il redouble en vain le mouvement de ses ailes, et comme un poids mort, il tombe.

 

" L’instant où je chante verrait encore sa chute si l’explosion d’un nuage tumultueux rempli de soufre et de flamme ne l’eut élancé à des hauteurs égales aux profondeurs où il était descendu. Jeté sur des terres molles et tremblantes, à travers les éléments épais ou subtils, il marche, il vole, il nage, il rampe. A l’aide de ses bras, de ses pieds, de ses ailes, il franchit les syrtes, les détroits, les montagnes. Enfin une universelle rumeur, des voix et des sons confus viennent avec violence assaillir son oreille. Il tourne aussitôt son vol de ce côté, résolu d’aborder l’Esprit inconnu de l’abîme, qui réside dans ce bruit, et d’apprendre de lui le chemin de la lumière.

" Bientôt il aperçoit le trône du Chaos, dont le sombre pavillon s’étend au loin sur le gouffre immense. La Nuit, revêtue d’une robe noire, est assise à ses côtés : fille aînée des Etres, elle est l’épouse du Chaos. Le Hasard, le Tumulte, la Confusion, la Discorde aux mille bouches, sont les ministres de ces divinités ténébreuses. Satan paraît devant eux sans crainte.

" Esprits de l’abîme, leur dit-il, Chaos, et vous, antique Nuit, je ne viens point pour épier les secrets de vos royaumes. Apprenez-moi le chemin de la lumière."

" Le vieux Chaos répond en mugissant : Je te connais, ô étranger ! Un monde nouveau pend au-dessus de mon empire, du côté où tes légions tombèrent. Vole, et hâte-toi d’accomplir tes desseins. Ravages, dépouilles, ruines, vous êtes les espérances du Chaos !"

" Il dit ; Satan plein de joie s’élève avec une nouvelle vigueur ; il perce comme une pyramide de feu l’atmosphère ténébreuse. Enfin l’influence sacrée de la lumière commence à se faire sentir. Parti des murailles du ciel, un rayon pousse au loin dans le sein des ombres une douteuse et tremblante aurore ; ici la Nature commence, et le Chaos se retire. Guidé par ces mobiles blancheurs, Satan, comme un vaisseau longtemps battu de la tempête, reconnaît le port avec joie, et glisse plus doucement sur les vagues calmées. A mesure qu’il avance vers le jour, l’empyrée, avec ses tours d’opale et ses portes de vivants saphirs, se découvre à sa vue.

" Enfin il aperçoit au loin une haute structure, dont les marches magnifiques s’élèvent jusqu’aux remparts du ciel. Perpendiculairement au pied des degrés mystiques s’ouvre un passage vers la terre. Satan s’élance sur la dernière marche, et, plongeant tout à coup ses regards dans les profondeurs au-dessous de lui, il découvre avec un immense étonnement tout l’univers à la fois."

 

Pour tout homme impartial, une religion qui a fourni un tel merveilleux et qui de plus a donné l’idée des amours d’Adam et d’Eve, n’est pas une religion anti-poétique. Qu’est-ce que Junon allant aux bornes de la terre en Ethiopie, auprès de Satan remontant du fond du chaos jusqu’aux frontières de la nature ? Il y a même dans l’original un effet singulier que nous n’avons pu rendre, et qui tient pour ainsi dire au défaut général du morceau : les longueurs que nous avons retranchées semblent allonger la course du prince des ténèbres et donner au lecteur un sentiment vague de cet infini au travers duquel il a passé.

 

 

CHATEAUBRIAND, Génie du Christianisme ; Deuxième Partie - Poétique du Christianisme ; Livre 4 - Du merveilleux, ou de la poésie dans ses rapports avec les êtres surnaturels ; Chapitre XII - Suite des machines poétiques. Voyages des dieux homériques ; Satan allant à la découverte de la création

 

Milton, Mihály Munkácsy (1844, Munkács - 1900, Endenich), Public Library, New York

Milton, Mihály Munkácsy (1844, Munkács - 1900, Endenich), Public Library, New York

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