Il est vrai que leur propagation fut due en grande partie à l'influence des nouveaux ordres religieux; c'est ce que nous
raconterons au chapitre suivant.
Nous ne devons pas terminer le tableau de
l'époque liturgique des XIe et XIIe siècles, sans dire, en quelques mots, quelle fut l'action de l'ordre bénédictin en cette partie de la discipline ecclésiastique. Il suffira, pour mettre cette
influence en état d'être appréciée, de rappeler au lecteur que les moines, du VIIIe au XIIe siècle, remplirent tous les postes principaux dans l'Église, en même temps qu'ils furent presque les
seuls dépositaires de la science et des traditions. Ils donnèrent des papes comme saint Grégoire le Grand, saint Boniface IV, saint Agathon, saint Léon III, saint Pascal Ier, saint Léon IV, saint
Léon IX, Alexandre II, saint Grégoire VII, Urbain II, Pascal II, Calixte II et Innocent IV ; des docteurs sur la Liturgie et sur tout genre de doctrine, comme saint Léandre, saint Ildephonse,
Bède, Alcuin, Walafrid Strabon, Rhaban Maur, Usuard, Remy d'Auxerre, Notker le Bègue, Herman Contract, saint Pierre Damien, Bruno d'Asti, Hildebert du Mans et de Tours, Guy d'Arezzo, Rupert de
Tuit, saint Bernard, Pierre le Vénérable, etc.
Il advint de là que plusieurs usages bénédictins se fondirent dans la Liturgie d'Occident. Ainsi, l'Office du chapitre à Prime,
la Leçon brève et le Confiteor avant Compiles, l'oraison Visita, quœsumus, les antiennes Salve, Regina, Alma Redemptoris, etc.; le petit Office de la sainte Vierge ajouté à l'Office du
jour ; l'usage des hymnes, des séquences ; l'Aspersion et la Procession, le dimanche, avant la messe ; tous ces usages et beaucoup d'autres ont une origine monastique. On sait aussi que la
Commémoration de tous les Défunts, au deuxième jour de novembre, a passé de l'abbaye de Cluny, où elle fut instituée par saint Odilon, à toute l'Église d'Occident ; de même que la coutume de
chanter l'hymne Veni, Creator, à Tierce, durant l'octave de la Pentecôte, avait été établie dans le même monastère par saint Hugues, avant d'être adoptée à Rome et étendue à toutes les provinces
de la catholicité. Nous aurons ailleurs l'occasion d'indiquer beaucoup d'autres détails du même genre, nous avons voulu seulement, dans ce coup-d'œil général, signaler une des sources principales
des usages liturgiques de l'Occident.
Si nous considérons maintenant l'office divin tel qu'il se célébrait dans les monastères, à l'époque qui nous occupe, nous
voyons que le chant ecclésiastique, en particulier, y était de plus en plus florissant. Les offices des saints patrons s'y célébraient par des hymnes, des répons, des antiennes nouvellement
composés par les abbés, ou par de savants moines. On y tenait beaucoup plus que dans les cathédrales, à la pureté grégorienne ; on consultait les divers exemplaires anciens, et on cherchait avec
zèle à maintenir les traditions. Nous en voyons un exemple célèbre dans la conduite des premiers pères de Cîteaux. Une lettre de saint Bernard nous apprend que la réputation de l’Antiphonaire de
Metz n'étant pas encore éteinte au XIIe siècle, les moines de cette réforme l'avaient copié pour leur usage. Mais bientôt ils reconnurent que le chant était défectueux et avait souffert, tant de
l'injure du temps que de l'esprit d'innovation. Le Chapitre de Tordre confia à saint Bernard la commission de corriger les livres du chœur. Il s'adjoignit à cet effet ceux de ses confrères qui
passaient pour les plus habiles ; l'Antiphonaire, ainsi revu, fut approuvé par le Chapitre, et injonction fut faite à tous les monastères cisterciens de s'en servir.
A la suite de la lettre de saint Bernard, dont nous venons de parler, on trouve parmi les œuvres du saint docteur un traité fort
curieux, de Ratione cantus, destiné à servir de préface à l’Antiphonaire de Cîteaux. Il y a des raisons de douter que cet ouvrage soit de l'abbé de Clairvaux ; mais, quoi qu'il en soit,
il est d'un haut intérêt, pour le détail qu'on y trouve des principes qui présidèrent à la correction du chant cistercien. On voit que les premiers pères de Cîteaux furent d'habiles musiciens ;
mais peut-être pourrait-on dire que quelquefois, de leur propre aveu, ils réformèrent l’Antiphonaire de Metz, plutôt d'après des théories que sur la confrontation des divers exemplaires des
églises. Il est évident néanmoins que si l'on est quelquefois en droit de croire qu'on possède la phrase grégorienne dans sa pureté sur un morceau en particulier, c'est lorsque les exemplaires de
plusieurs églises éloignées s'accordent sur la même leçon ; mais ceci nous entraînerait trop loin et donnerait matière à des discussions totalement étrangères à l’objet de notre récit.
On voit, par les plus anciens bréviaires de Cîteaux, que cette réforme adopta, en manière de supplément à l’Antiphonaire
grégorien, plusieurs usages et pièces de chant qui appartenaient aux Églises de France, et en particulier à celle de Paris. C'est une remarque qu'on peut faire également au sujet de l'ordre de
Prémontré, fondé en 1120, et dont les livres présentent matière à la même observation. Ces livres sont restés purs, et comme l'un des répertoires de l'ancienne Liturgie romaine-française, jusqu'à
la fin du XVIIIe siècle, où le dernier abbé général (M. Lécuy, mort il y a peu d'années, grand vicaire de Paris), jugea à propos de les abolir, pour leur substituer des usages puisés dans ce que
présentait de plus exquis la moderne régénération gallicane.
Il nous reste encore à dire un mot sur le chant pendant les XIe et XIIe siècles. Il se maintint, pour la couleur générale, dans
le caractère que nous lui avons reconnu au chapitre précédent, et dont les répons du roi Robert sont la plus complète expression. Une mélodie rêveuse et quelque peu champêtre, mais d'une grande
douceur, en fait le caractère principal. Elle est produite par de fréquents repos sur la corde finale et sur la dominante, dans l'intention de marquer une certaine mesure vague, et par une longue
tirade de notes sur le dernier mot, qui n'est pas sans quelque charme.
Le répons de sainte Catherine, Virgo flagellatur, offre une marche plus vive et plus animée, jusqu'au verset qui forme
un intermède d'une mélodie tendre et suave ; mais toutes ces pièces n'ont plus la simplicité grandiose des motifs dont l’Antiphonaire grégorien a puisé l'idée dans la musique des Grecs.
A cette époque, la séquence se perfectionna. Elle cessa d'être un trope à la marche lente, au rythme irrégulier. Elle devint une
sorte d'hymne à mesure égale, et offrit par là l'occasion d'un précieux développement à la musique ecclésiastique. Au XIIe siècle, la séquence d'Abailard Mittit ad Virginem, fut ornée,
probablement par son auteur, de ce délicieux chant que les Parisiens modernes ont du moins conservé sur les modernes paroles de la prose actuelle : Humani generis. Nous touchons à
l'époque du Dies irœ et du Lauda, Sion.
Le XIe siècle vit en outre s'accomplir un grand événement pour le chant ecclésiastique. Guy d'Arezzo simplifia et améliora la
méthode d'enseignement du chant en fixant l'usage de la portée musicale, composée désormais de quatre lignes parallèles superposées sur lesquelles il échelonna les notes. On dit assez
généralement qu'il fut le premier à donner une méthode d'écrire le chant : c'est une erreur ; on avait des notes avant lui, comme on a pu le voir ci-dessus. Seulement, sa méthode soulageait
beaucoup l'œil et la mémoire, et fit tomber toutes les autres.
Cette période fut donc véritablement féconde pour la Liturgie : on en jugera mieux encore en parcourant l'énumération des
travaux qui furent alors exécutés en cette partie. Nous l'ouvrirons donc, sans tarder davantage.
A la tête des Liturgistes du XIe siècle, nous plaçons le roi Robert, dont nous avons déjà tant parlé dans ce chapitre. Il
composa des séquences pour diverses fêtes. Outre celle de la Pentecôte : Sancti Spiritus adsit nobis gratia, que plusieurs ont confondue avec l'hymne Veni, Creator Spiritus, qui
est de Charlemagne, il en composa d'autres, pour Noël, Pâques, l'Ascension, la Nativité de la sainte Vierge, les fêtes de saint Martin, de saint Denys, de saint Agnan, évêque d'Orléans, etc. Il
célébra la sainte Vierge en vers latins, dans lesquels il excellait, et avait coutume de la nommer l’Etoile de son Royaume. Nous avons parlé de son beau Répons : Cornelius centurio. Un
autre qui commençait par ces mots : Judœa et Jerusalem, n'était pas moins goûté dans nos églises de France au moyen âge. Tout le monde sait le tour innocent que Robert joua à la reine
Constance, lui faisant croire qu'il était question d'elle dans un répons qu'il avait composé et qui commençait par ces mots : O constantia martyrum. Nous plaçons ici les paroles de ce
répons que les voûtes de nos cathédrales ont oublié, et que certainement bien peu de nos lecteurs connaissent. Il est triste qu'un siècle ait suffi pour effacer presque tous les points de contact
que la Liturgie, en France, avait avec l'histoire. On nous a donné des rites nationaux que nos pères n'avaient point connus.
R/. O constantia martyrum laudabilis, o charitas inextinguibilis, o patientia invincibilis, quœ licet interpressuras
persequentium visa sit despicabilis, Invenietur in laudem,et gloriam,et honorent, in tempore retributionis.
V/. Nobis ergo petimuspiis subveniant meritis, honoricati a Patre qui est in cœlis. Invenietur. Gloria Patri. O constantia
martyrum.
Ce beau répons, dont le chant est aussi touchant que les paroles en sont nobles, était le neuvième des Matines, au Commun de
plusieurs martyrs, dans certains bréviaires romains-français. Heureux temps où les rois composaient des chants pour leurs sujets, où les mélodies nationales étaient d'innocents répons, ou des
antiennes pleines de paix et d'onction !
(1007). L'ami de Robert, Fulbert, évêque de Chartres, composa, comme nous l'avons dit, trois répons de la plus grande beauté,
pour la Nativité de la sainte Vierge. Ils sont en vers mais non rimes, comme ce fut plus tard la mode au XIIIe siècle. Nous les insérons ici, parce qu'ils ont péri dans toute la France (L'Église
du Mans chante encore le second, Stirps Jesse : mais en dehors de l'office, à la procession du jour de l'Assomption de la sainte Vierge, avant la messe. ) : nous voudrions pouvoir en
donner le chant Plein d'une suave mélodie
I. R/. Solem justitiœ Regem paritura supremum, Stella Maria maris hodie processit ad ortum.
V/. Cernere divinum lumen gaudete, fideles. Stella Maria.
II. R/ Stirps Jesse virgam produxit, virgaqueforent et super hunc florem requiescit Spiritus almus.
V/. Virgo Dei genitrix virga est, flos Filius ejus. Et super hunc.
III. R/. Ad nutum Domini nostrum ditantis honorent, sicut spina rosam genuit Judœa Mariam.
V/. Ut vitium virtus operiret, gratia culpam. Sicut spina.
Tels sont ces admirables répons composés pour l'Église de Chartres, par le Pontife qui posa les fondements de la merveilleuse
cathédrale qui brille d'une si sublime auréole. Un roi les nota en chant ; la France entière les adopta ; l'Europe les répéta après la France. Aujourd'hui, ces doux chants ne retentissent plus
dans les divins offices, et Chartres même, infidèle à son Fulbert et à la douce Vierge qu'il chanta, les ignore !
Nous nous sommes permis d'insérer ces quelques lignes de l'antique Liturgie de nos pères : ne pouvant résister au désir de
donner à nos lecteurs quelques traits de cette Liturgie romaine-française qui gît maintenant incomplète dans la poussière des bibliothèques. C'est de là que, de longues années, nous avons
entrepris de l'exhumer. Les volumes suivants nous fourniront plus d'une fois l'occasion d'en mettre en lumière les inspirations qui, nous en sommes sûr, seront trouvées nobles et
touchantes.
Fulbert a composé en outre plusieurs séquences et plusieurs hymnes. Parmi ces dernières, on remarque celle du temps pascal :
Chorus novœ Jerusalem.
(1008). Bernon, abbé de Reichenau, est auteur d'un précieux traité intitulé : De institutione missarum ; d'un dialogue,
sous ce titre : De Quatuor Temporum jejuniis, per sua sabbata observandis, ad Aribonem, Archiepiscopum Moguntinum ; d'une épure au même Aribon, De quatuor Adventus dominicis. Il
écrivit aussi un livre sur le chant, intitulé Libellus tonarius, ou Optes symphoniarum et tonorum, et le dédia à Piligrin, archevêque de Cologne. Trithême parle de trois
ouvrages de Bernon sur le chant, savoir : De musica, seu de tonis; De instrumentis musicis, et De mensura monochordi.
(1010). Adelbode, évêque d'Utrecht, composa le chant de l'Office de la nuit pour la fête de saint Martin. Il écrivit de Rome une
lettre curieuse sur la célébration de l'Avent ; il ne faut pas la confondre avec un traité, en forme de dialogue, qu'avait composé sur le même sujet Hériger, abbé de Lobbes.
(1012). Arnold, prévôt de Saint-Emmeran de Ratisbonne, composa des antiennes et des répons, pour la fête de ce saint
évêque.
(1014). Guy d'Arezzo, abbé de Saint-Pierre-d'Avellane, fut appelé à Rome par Benoît VIII, et travailla sous ce Pape et son
successeur Jean XIX, au perfectionnement de la musique ecclésiastique. Il fixa, comme nous l'avons dit, l'usage de la portée musicale, et pour graver dans la mémoire de ses élèves l'échelle des
sons, il eut l'idée d'employer le chant de la première strophe de l'hymne de saint Jean-Baptiste :
Ut queant laxis resonare fibris
Mira gestorum famuli tuorum,
Solve polluti labii reatum,
Sancte Johannes.
Dans cette strophe, l'intonation de la note s'élevait d'un degré sur chacune des syllabes ut, ré, mi, fa, sol, la; en la
répétant, les élèves apprenaient à distinguer les différentes notes de la gamme. Ils prirent naturellement l'habitude de les désigner par ces syllabes qui les leur rappelaient ; plus tard on
ajouta si pour désigner la septième note, et le système de notre gamme actuelle fut inventé. Cette méthode si simple, réduisant au pur mécanisme la pratique de la gamme, simplifia prodigieusement
l'étude du chant, en sorte qu'on pût l'apprendre aux enfants avec autant de facilité qu'on leur enseigne à épeler et à lire l'écriture. Ce moine, véritablement digne du nom de Grand, pour un si
éminent service, écrivit un traité de la musique, en deux livres, sous le nom de Micrologue, qu'il dédia à Théodalde, évêque d'Arezzo, et un opuscule De mensura monochordi. Enfin il
arrangea un antiphonaire, d'après sa méthode de notation, et Benoît VIII fut tellement frappé de la supériorité de ce travail, qu'au rapport de Guy lui-même, il regardait cette œuvre comme une
espèce de prodige.
(1020). Olbert, abbé de Gemblours, fut habile dans la science du chant ecclésiastique. Entre autres compositions de ce genre qui
lui appartiennent, la chronique de son monastère lui attribue les chants et les hymnes de saint Véron et de sainte Vandru.
(1025). Saint Odilon, abbé de Cluny, instituteur de la Commémoration des Défunts, au 2 novembre, nous a laissé des hymnes en
l'honneur de la sainte Vierge, de sainte Adélaïde et de saint Mayeul, son illustre prédécesseur.
(1026). Arnoul, moine de Saint-André d'Andaone, outre ses écrits sur le comput ecclésiastique, composa un martyrologe abrégé, ou
plutôt un calendrier des saints de l'année.
(1027). Saint Léon IX, auparavant Brunon, évêque de Toul, fut très habile dans le chant ecclésiastique, et composa avec un grand
art les répons de l'office de saint Grégoire le Grand, de saint Cyriaque, martyr, de sainte Odile, vierge, de saint Nicolas, de saint Hydulphe, évêque de Trêves. On a chanté, jusqu'en 1775, cet
office de saint Hydulphe, dans l'abbaye de Moyenmoutier. Depuis qu'il fut élevé à la papauté, se trouvant à Metz, il y composa des répons, pour l'office de saint Gorgon, martyr.
(1030). Adhémar, moine de Saint-Martial de Limoges, est regardé par plusieurs comme l'auteur du supplément à l'ouvrage
d'Amalaire De divinis Officiis, donné par D. Mabillon, au tome deuxième des Analecta.
(1035). Angelran, abbé de Saint-Riquier, mit en chant l'office de saint Valéry et celui de saint Vulfran.
(1039). Godescalc, prévôt d'Aix-la-Chapelle, chapelain de Henri III, composa un grand nombre de séquences pour la messe.
(1040). Herman Contract, élevé d'abord à Saint-Gall, puis moine de Reichenau, fut un prodige de science pour son temps. Nous ne
devons parler ici que de ses travaux liturgiques. Il écrivit sur le chant trois traités, savoir : De musica, De monochordo, De conflictu sonorum. Passant ensuite de la théorie à la
pratique, il composa les paroles et le chant si mélodieux des Antiennes Salve, Regina; Alma Redemptoris Mater ; les séquences Ave, prœclara maris Stella ; O florens rosa ;
Rex omnipotens, du jour de l'Ascension, et beaucoup d'autres, parmi lesquelles plusieurs mettent le Veni, Sancte Spiritus, attribué par d'autres à Innocent III ; le répons Simon
Bar-Jona pour saint Pierre, ceux de l'Annonciation, des saints Anges, etc.
(1040). Aaron, abbé de Saint-Martin, puis de Saint-Pantaléon de Cologne, écrivit un livre De utilitate cantus vocalis
et de modo cantandi et psallendi.
(1040). Jean de Garland, Anglais, composa un poème, intitulé De mysteriis Missœ, et le dédia à Foulques, évêque de
Londres.
(1050). Michel Psellus, qui avait été le précepteur de l'empereur Michel Ducas, embrassa plus tard la vie monastique. Allatius
nous fait connaître de lui les ouvrages suivants qui ont rapport à la Liturgie : Expositio in illud quod in solemni Christi Ascensionis die dicitur : Hodie Sancta Condura et cras Ascensio ;
Expositio in illud: Domine, Jesu Christe, Deus noster, miserere nostri, Amen ; Paraphrasis carmine iambico in canonem S. Cosmœ, Maiumœ episcopi, sancta et magtia feria quinta canen
dum.
(1050). Jean, dit le Géomètre, souvent cité par saint Thomas d'Aquin, dans sa Catena aurea sur les Évangiles, vécut au
XIe siècle. Il est auteur de quatre grandes hymnes en l'honneur de la sainte Vierge, qui se trouvent dans la Bibliothèque des Pères de Lyon et ailleurs. Allatius nous apprend qu'il avait composé
d'autres hymnes pour les différentes fêtes de l'année.
(1050). Humbert, moine de Moyenmoutier, nota plusieurs antiennes, en l'honneur de saint Grégoire, pape, de saint Hydulphe et de
saint Colomban.
(1050). Odon, moine de l'abbaye des Fossés, près Paris, est auteur des répons que l'on chantait autrefois le jour de la fête de
saint Babolein, premier abbé de ce monastère.
(1054). Jean, dit Mauropus (aux pieds noirs), d'abord moine, puis métropolitain d'Euchaïte,dans l'Asie Mineure, composa beaucoup
d'hymnes, savoir vingt-quatre Canons paradétiques au Christ Sauveur, deux autres cantiques adressés pareillement au Verbe incarné, soixante-sept à la sainte Vierge, un au saint Ange gardien, deux
à saint Jean-Baptiste, d'autres pour les fêtes des saints Basile, Grégoire de Nazianze et Jean Chrysostome.
(1057). Saint Pierre Damien, d'abord moine et abbé, puis cardinal et évêque d'Ostie, a laissé de nombreux monuments de son génie
et de son savoir liturgiques. Nous citerons ici le traité De septem horis canonicis ; le livre sur Dominus vobiscum ; un autre Contra sedentes tempore Divini Officii ;
enfin une grande quantité d'hymnes, antiennes et autres pièces liturgiques que l'on peut voir en tête du quatrième tome de ses œuvres publiées par Constantin Gaetani. Nous citerons parmi
celles-ci les belles hymnes de la Croix, de Pâques, de l'Annonciation et de l'Assomption de la sainte Vierge, de saint Pierre, de saint Paul, de saint André, de saint Jean l'Évangéliste, de saint
Vincent, de saint Grégoire le Grand, de saint Benoît, etc.
(1057). Albéric, moine du Mont-Cassin, et depuis cardinal, écrivit un dialogue De musica, et des hymnes pour Pâques,
l'Ascension, les fêtes de la Sainte-Croix, de l'Assomption de la sainte Vierge, de saint Paul, de saint Apollinaire, etc.
(1057), Einhard II, d'abord moine et abbé, puis évêque de Spire, composa en quatre livres un ouvrage très important De
cœremoniis Ecclesiœ.
(1058). Gosselin, moine de Saint-Bertin, suivit en Angleterre Hermann, évêque de Salisbury, et se rendit célèbre dans ce pays,
par sa grande science du chant ecclésiastique. Il composa une séquence en l'honneur de sainte Étheldrède.
(1060). Vitmond, moine de Saint-Évroul, fut aussi un habile compositeur de chant ecclésiastique. Orderic Vital dit que l'on
chantait encore de son temps, à Saint-Évroul, des antiennes et des répons de la façon de Vitmond, et des hymnes qu'il avait notées sur des airs très mélodieux.
(1060). Lambert, abbé de Saint-Laurent de Liège,composa le chant et les paroles d'un office, en l'honneur de saint Héribert,
archevêque de Cologne.
(1060). Francon, écolâtre de la cathédrale de Liège, écrivit, au rapport de Sigebert, un traité sur le chant
ecclésiastique.
(1060). Alphane, moine du Mont-Cassin, archevêque de Salerne, a laissé des hymnes en l'honneur de sainte Christine, de sainte
Sabine, de saint Matthieu, de saint Nicolas, de saint Maur, etc.
(1061). Jean, comte de Bayeux, d'abord évêque d'Avranches, puis archevêque de Rouen, a écrit un livre célèbre De divinis
Officiis.
(1064). Jean Bar-Susan, patriarche jacobite d'Antioche, est auteur d'une anaphore, qui se trouve au Missel chaldaïque, et d'un
livre dans lequel il prétend justifier contre les Coptes, l'usage de mêler du sel et de l'huile au pain eucharistique.
(1068). Guillaume, abbé d'Hirsauge, composa un traité De musica et tonis, et un autre De psalterio. Il
recueillit aussi les coutumes de son monastère, et ce recueil renferme beaucoup de particularités liturgiques intéressantes.
(1070). Bonizon, évêque de Plaisance, massacré cruellement par les schismatiques, fauteurs de l'empereur Henri IV, écrivit un
livre De Sacramentis, adressé à Gaultier, prieur du monastère de Léon, et publié par Muratori.
(1070). Osberne, chantre et sous-prieur de Cantorbéry, ami de l'archevêque Lanfranc, publia un traité De musica.
(1070). Didier, abbé du Mont-Cassin, et depuis Pape sous le nom de Victor III, fut fort zélé pour le chant ecclésiastique et
pour la splendeur des offices divins. Il composa lui-même des chants, ou des hymnes en l'honneur de saint Maur.
(1071). Raynald, évêque de Langres, rédigea lui-même l'office de saint Mammès, martyr, patron de son Église. Il en prit le texte
dans les poésies de Walafrid Strabon,et composa lui-même le chant.
(1074). Nicolas III, patriarche de Constantinople, est auteur d'un poëme De jejuniis et festis totius anni, et d'un
règlement ecclésiastique De oblationibus liturgicis.
(1075). Lanfranc, moine du Bec, puis archevêque de Cantorbéry, ayant fait confirmer les moines dans la possession où ils étaient
de desservir les cathédrales en Angleterre, rédigea un recueil de statuts concernant la discipline que l'on devait observer dans tous les monastères de ce royaume, et principalement la
célébration des offices divins. Ces statuts sont une des plus précieuses sources où l'on doive puiser la connaissance des usages liturgiques des moines, au moyen âge.
(1075). Thomas, archevêque d'York, composa le chant d'un grand nombre d'hymnes. Guillaume de Malmesbury dit de ce prélat qu'il
avait la voix très-belle, et que lorsqu'il entendait un air agréable, il l'accommodait aussitôt aux hymnes et aux chants ecclésiastiques ; mais il ne voulait pas souffrir dans l'Église une
musique efféminée et sans gravité.
(1080). Durand, abbé de Saint-Martin de Troarn, composa des antiennes et des répons avec leur chant pour diverses fêtes de
l'année, et en l'honneur de Notre-Seigneur, de la sainte Vierge, des Anges, des Apôtres, des Martyrs, et autres saints révérés dans l'Église.
(1080). Udalric, moine de Cluny, recueillit les usages de cet illustre monastère, et son travail publié par dom Luc d'Achery,
est un des plus importants monuments de la Liturgie bénédictine.
(1080). Irène, femme de l'empereur Alexis Comnène, ayant fondé à Constantinople un monastère de filles, leur donna des
constitutions qui sont contenues dans le livre appelé Typique. Le cérémonial contenu dans ce livre est du plus haut intérêt pour la connaissance des usages claustraux des monastères de
filles, en Orient.
(1091). Aribon, personnage dont l'état et la qualité sont aujourd'hui inconnus, écrivit un traité De musica, qu'il
dédia à un évêque, nommé Ellenhard. Il y parlait avec enthousiasme de Guillaume, abbé d'Hirsauge, dont nous avons fait mention plus haut, et le qualifiait le premier des musiciens, l'Orphée et le
Pythagore modernes.
(1094). Jean Saïd Bar-Sabuni, évêque jacobite de Mélitine, est auteur d'une hymne acrostiche, que les jacobites chantent durant
la cérémonie de la tonsure des moines.
(1096). Névelon, moine de Corbie, rédigea un Martyrologe, abrégé de celui d'Adon.
(1097). Bruno d'Asti, abbé du Mont-Cassin, puis évêque de Segni, est un des grands liturgistes du XIe siècle. On lui doit les
livres suivants : De ornamentis ecclesiœ; De Sacrificio azymi, et De Sacramentis ecclesiœ, mysteriis, atque ecclesiasticis ritibus.
(1097). Micrologus, tel est le titre d'un ouvrage anonyme qui est aussi intitulé De observationibus
ecclesiasticis. Ce livre, qui est un des monuments principaux de la science liturgique, a été écrit peu après la mort de saint Grégoire VII, arrivée en 1085. On y trouve l'explication de
l'Office, suivant la forme en laquelle ce Pape l'avait réduit. Il ne faut pas confondre cet opuscule avec le Micrologue de Guy d'Arezzo, qui ne traite que de la musique et du chant. Zaccaria
croit pouvoir l'attribuer à Ives de Chartres.
(1097). Ives, d'abord abbé de Saint-Quentin, puis évêque de Chartres, fut un des plus grands, des plus doctes et des plus saints
prélats de son temps. Il excella dans l'explication des mystères de la Liturgie, comme on peut le voir par la lecture d'un grand nombre de ses sermons, qui font autorité en cette matière.
L'indication de ces sermons nous entraînerait trop loin : on peut consulter la bibliothèque des Pères, ou la collection d'Hittorp.
(1097). Saint Anselme, abbé du Bec, et ensuite archevêque de Cantorbéry, composa, avec l'onction qui se remarque dans tous ses
écrits, des hymnes et un Psautier de la sainte Vierge.
(1097). Le vénérable Hildebert de Lavardin, évêque du Mans, puis archevêque de Tours, a laissé, entre autres compositions qui
vont à notre sujet, un poëme infiniment précieux, intitulé : Versus de mysteriis et ordine Missae. Nous citerons encore les opuscules suivants : Liber, seu prosa de Natali
Domini ; De Sacramentis ; De utraque parte altaris ; De tribus Missis in Natali Domini.
(1105). Odon, écolâtre d'Orléans, puis abbé de Saint-Martin de Tournay, enfin évêque de Cambrai, est auteur d'une courte
exposition du Canon de la Messe.
(1110). Geoffroy, abbé de la Trinité de Vendôme, a composé quatre hymnes, dont la première en l'honneur de la sainte Vierge, et
les trois autres sur la conversion de sainte Marie-Magdeleine. Plusieurs de ses opuscules renferment des traits importants pour la compréhension des doctrines liturgiques de cette époque.
(1110). Marbode, évêque de Rennes, est auteur de trois hymnes en l'honneur de sainte Marie-Magdeleine.
(1111). Robert, prieur de Saint-Laurent de Liège, écrivit un traité De divinis Officiis.
(1111). Rupert, abbé de Tuy, se recommanda, comme liturgiste, par son ouvrage De divinis Officiis per anni circulum,
divisé en douze livres. Il a composé en outre plusieurs hymnes, savoir deux en l'honneur du Saint-Esprit, et les autres pour la fête de plusieurs saints martyrs.
(1113). Etienne, évêque d'Autun, et qui mourut moine de Cluny, a laissé un livre De Sacramento Altaris.
DOM GUÉRANGER
INSTITUTIONS LITURGIQUES : CHAPITRE XI : ABOLITION
DU RITE GOTHIQUE OU MOZARABE EN ESPAGNE. TRAVAUX DE SAINT GRÉGOIRE VII SUR LA LITURGIE. PROGRES DU CHANT ECCLÉSIASTIQUE. RITE ROMAIN-FRANÇAIS. AUTEURS LITURGISTES DES XIe ET XIIe SIECLES.
Tree of
Jesse, from a manuscript made at the Cistercian Abbey of Cîteaux