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"Je vous donne un commandement nouveau : c'est de vous aimer les uns les autres.

 

Comme je vous ai aimés, vous aussi aimez-vous les uns les autres.

 

Ce qui montrera à tous les hommes que vous êtes mes disciples, c'est l'amour que vous aurez les uns pour les autres."

 

Evangile de Jésus-Christ selon  saint Jean 

   

 

Pentecôte

" Le Défenseur, l'Esprit Saint que le Père enverra en mon nom, lui, vous enseignera tout, et il vous fera souvenir de tout ce que je vous ai dit."

 

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean  

 

   

 

 El Papa es argentino. Jorge Bergoglio                 

Saint Père François

 

 

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1er mai 2011 Béatification de Jean-Paul II

Béatification du Serviteur de Dieu Jean-Paul II

 

 

  Béatification du Père Popieluszko

beatification Mass, in Warsaw, Poland

à Varsovie, 6 juin 2010, Dimanche du Corps et du Sang du Christ

 

 

presidential palace in Warsaw

Varsovie 2010

 

 

Basilique du Sacré-Cœur de Montmartre
Sanctuaire de l'Adoration Eucharistique et de la Miséricorde Divine

La miséricorde de Dieu est comme un torrent débordé. Elle entraîne les cœurs sur son passage.
(Saint Curé d'Ars)
 

 


Le côté du Christ a été transpercé et tout le mystère de Dieu sort de là. C’est tout le mystère de Dieu qui aime, qui se livre jusqu’au bout, qui se donne jusqu’au bout. C’est le don le plus absolu qui soit. Le don du mystère trinitaire est le cœur ouvert. Ce n’est pas une image, c’est une réalité. C’est la réalité la plus profonde qui soit, la réalité de l’amour.
Père Marie-Joseph Le Guillou




Dans le cœur transpercé
de Jésus sont unis
le Royaume du Ciel
et la terre d'ici-bas
la source de la vie
pour nous se trouve là.

Ce cœur est cœur divin
Cœur de la Trinité
centre de convergence
de tous les cœur humains
il nous donne la vie
de la Divinité.


Sainte Thérèse Bénédicte de la Croix
(Edith Stein)



Le Sacré-Cœur représente toutes les puissances d'aimer, divines et humaines, qui sont en Notre-Seigneur.
Père Marie-Eugène de l'Enfant Jésus

 



feuille d'annonces de la Basilique du Sacré-Coeur de Montmartre

 

 

 

 

 

 

 

     

The Cambrai Madonna

Notre Dame de Grâce

Cathédrale de Cambrai

 

 

 

Cathédrale Notre Dame de Paris 

   

Ordinations du samedi 27 juin 2009 à Notre Dame de Paris


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Magnificat

     



Solennité de l’Immaculée Conception de la Vierge Marie à Notre-Dame de Paris


NOTRE DAME DES VICTOIRES

Notre-Dame des Victoires




... ma vocation, enfin je l’ai trouvée, ma vocation, c’est l’Amour !

 

 

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Voyages de Benoît XVI

 

SAINT PIERRE ET SAINT ANDRÉ

Saint Pierre et Saint André

 

BENOÎT XVI à CHYPRE 

 

Benedict XVI and Cypriot Archbishop Chrysostomos, Church of 

Salutation avec l'Archevêque Chrysostomos à l'église d' Agia Kyriaki Chrysopolitissa de Paphos, le vendredi 4 juin 2010

 

     

 

Benoît XVI en Terre Sainte  


 

Visite au chef de l'Etat, M. Shimon Peres
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Visite au mémorial de la Shoah, Yad Vashem




 






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Vicariat hébréhophone en Israël

 


 

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Vierge de Vladimir  

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SALVE REGINA

21 novembre 2011 1 21 /11 /novembre /2011 05:00

Au lendemain de la dédicace de la basilique Sainte-Marie-la-Neuve près du mur du Temple de Jérusalem, l’Église célèbre la consécration que fit d’elle-même à Dieu dès son enfance la future mère de Dieu, sous l’action de l’Esprit Saint, dont la grâce l’avait comblée dès sa conception immaculée.
Martyrologe romain

 

Présentation de la Vierge au Temple

Présentation de la Vierge au Temple, Cima da Conegliano

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19 novembre 2011 6 19 /11 /novembre /2011 05:00

Sainte Mathilde de Hackeborn par Benoît XVI

 

Je voudrais vous parler aujourd’hui de sainte Mathilde de Hackeborn, l’une des grandes figures du monastère de Helfta, ayant vécu au XIIIe siècle. Sa consœur, sainte Gertrude la Grande, dans le livre de l’œuvre Liber specialis gratiae (le livre de la grâce spéciale), dans lequel sont relatées les grâces spéciales que Dieu a données à sainte Mathilde, affirme : «Ce que nous avons écrit est bien peu au regard de ce que nous avons omis. Nous publions ces choses uniquement pour la gloire de Dieu et au bénéfice de notre prochain, car il nous semblerait injuste de garder le silence sur les si nombreuses grâces que Mathilde reçut de Dieu, moins pour elle-même, à notre avis, que pour nous et pour ceux qui viendront après nous» (Mathilde de Hackeborn, Liber specialis gratiae, VI, 1).

 

Cette œuvre a été rédigée par sainte Gertrude et par une autre consœur de Helfta et possède une histoire singulière. A l’âge de cinquante ans, Mathilde traversait une grave crise spirituelle unie à des souffrances physiques. C’est dans cette situation qu’elle confia à deux consœurs amies les grâces spéciales à travers lesquelles Dieu l’avait guidée depuis son enfance, mais elle ne savait pas que celles-ci notaient tout. Lorsqu’elle l’apprit, elle en fut profondément angoissée et troublée. Toutefois, le Seigneur la rassura en lui faisant comprendre que ce qui était écrit l’était pour la gloire de Dieu et le bénéfice de son prochain (cf. ibid., II, 25, v. 20). Ainsi, cette œuvre est la source principale à laquelle nous pouvons puiser les informations sur la vie et la spiritualité de notre sainte.

 

A travers elle, nous sommes introduits dans la famille du baron de Hackeborn, l’une des plus nobles, riches et puissantes de Thuringe, apparentée à l’empereur Frédéric II, et nous entrons dans le monastère de Helfta à l’époque la plus glorieuse de son histoire. Le baron avait déjà donné au monastère une fille, Gertrude de Hackeborn, dotée d’une forte personnalité, abbesse pendant quarante ans, capable de conférer une empreinte particulière à la spiritualité du monastère, le conduisant à une floraison extraordinaire comme centre de mystique et de culture, école de formation scientifique et théologique. Gertrude offrit aux moniales une instruction intellectuelle de haut niveau, qui leur permettait de cultiver une spiritualité fondée sur l’Ecriture Sainte, sur la liturgie sur la tradition patristique, sur la Règle et la spiritualité cistercienne, avec une prédilection particulière pour saint Bernard de Clairvaux et Guillaume de Saint-Thierry. Elle fut une véritable maîtresse, exemplaire en tout, dans la radicalité évangélique et dans le zèle apostolique. Dès son enfance, Mathilde accueillit et goûta le climat spirituel et culturel créé par sa sœur, en apportant ensuite sa marque personnelle.

 

Mathilde naquit en 1241 ou 1242 dans le château de Helfta ; elle était la troisième fille du baron. A l’âge de sept ans, avec sa mère, elle rendit visite à sa sœur Gertrude dans le monastère de Rodersdorf. Elle fut si fascinée par ce milieu qu’elle désira ardemment en faire partie. Elle y entra comme écolière, et en 1258, devint religieuse dans le couvent, se transférant entre temps à Helfta, dans le domaine des Hackeborn. Elle se distinguait par son humilité, sa ferveur, son amabilité, la transparence et l’innocence de sa vie, la familiarité et l’intensité avec lesquelles elle vivait la relation avec Dieu, la Vierge et les saints. Dotée de qualités naturelles et spirituelles élevées, comme «la science, l’intelligence, la connaissance des lettres humaines, la voix d’une merveilleuse douceur : tout la rendait apte à être pour le monastère un véritable trésor sous tous les aspects» (ibid., préambule). Aussi, «le rossignol de Dieu» — comme elle était appelée — encore très jeune, devint directrice de l’école du monastère, directrice du chœur, et maître des novices, fonctions qu’elle accomplit avec talent et un zèle inlassable, non seulement au bénéfice des moniales, mais de quiconque désirait puiser à sa sagesse et sa bonté.

 

Illuminée par le don divin de la contemplation mystique, Mathilde composa de nombreuses prières. C’est une maîtresse de doctrine fidèle et de grande humilité, conseillère, consolatrice, guide dans le discernement : «Elle distribuait — lit-on — la doctrine avec une abondance telle que l’on n’avait jamais vue dans le monastère, et nous avons hélas ! la grande crainte que l’on ne verra plus jamais rien de semblable. Les sœurs se réunissaient autour d’elle pour entendre la parole de Dieu, comme autour d’un prédicateur. Elle était le refuge et le réconfort de tous, et elle avait, par un don singulier de Dieu, la grâce de révéler librement les secrets du cœur de chacun. De nombreuses personnes, pas seulement dans le monastère, mais aussi des étrangers, des religieux et des laïcs, venus de loin, attestaient que cette sainte vierge les avait libérés de leur peine et qu’ils n’avaient jamais éprouvé autant de réconfort qu’auprès d’elle. En outre, elle composa et elle enseigna de nombreuses prières qui, si elles étaient réunies, dépasseraient le volume d’un psautier» (ibid., VI, 1).

 

En 1261, une petite fille de cinq ans du nom de Gertrude arrive au couvent : elle est confiée aux soins de Mathilde, qui a à peine vingt ans, qui l’éduque et la guide dans la vie spirituelle jusqu’à en faire non seulement une excellente disciple, mais sa confidente. En 1271 ou 1272, Mathilde de Megdeburg entre elle aussi au monastère. Le lieu accueille ainsi quatre grandes femmes — deux Gertrude et deux Mathilde —, gloire du monachisme germanique. Au cours de sa longue vie passée au monastère, Mathilde est frappée par d’incessantes et intenses souffrances auxquelles elle ajoute les très dures pénitences choisies pour la conversion des pécheurs. De cette manière, elle participe à la passion du Seigneur jusqu’à la fin de sa vie (cf. ibid., VI, 2). La prière et la contemplation sont l’humus vital de son existence : les révélations, ses enseignements, son service au prochain, son chemin dans la foi et dans l’amour ont ici leur racine et leur contexte. Dans le premier livre de l’œuvre Liber specialis gratiae, les rédactrices recueillent les confidences de Mathilde effectuées lors des fêtes du Seigneur, des saints et, de manière particulière, de la Bienheureuse Vierge Marie. La capacité que cette sainte possède de vivre la liturgie dans ses différents éléments, même les plus simples, en la portant dans la vie quotidienne monastique, est impressionnante. Certaines images, expressions, actions sont parfois éloignées de notre sensibilité, mais, si l’on considère la vie monastique et sa tâche de maîtresse et de directrice de chœur, on saisit sa capacité particulière d’éducatrice et de formatrice, qui aide ses consœurs à vivre intensément, en partant de la liturgie, chaque moment de la vie monastique.

 

Dans la prière liturgique, Mathilde accorde une importance particulière aux heures canoniques, à la célébration de la Messe, en particulier à la communion. Là, elle est souvent ravie en extase dans une profonde intimité avec le Seigneur dans son cœur très ardent et très doux, dans un dialogue merveilleux, où elle demande des lumières intérieures, alors qu’elle intercède de manière particulière pour sa communauté et ses consœurs. Au centre, se trouvent les mystères du Christ vers lesquels la Vierge Marie renvoie constamment pour marcher sur la voie de la sainteté : «Si tu désires la véritable sainteté, reste près de mon Fils ; Il est la sainteté même qui sanctifie toute chose» (ibid., I, 40). Dans son intimité avec Dieu est présent le monde entier, l’Eglise, les bienfaiteurs, les pécheurs. Pour elle, le ciel et la terre s’unissent.

 

Ses visions, ses enseignements, les épisodes de son existence sont décrits avec des expressions qui évoquent le langage liturgique et biblique. On saisit ainsi sa profonde connaissance des Saintes Ecritures, qui étaient son pain quotidien. Elle y a constamment recours, que ce soit pour mettre en valeur les textes bibliques lus pendant la liturgie, ou en y puisant des symboles, des termes, des paysages, des images, des personnages. Sa préférence va à l'Evangile : «Les paroles de l'Evangile étaient pour elle une nourriture merveilleuse et suscitaient dans son cœur des sentiments d'une telle douceur que souvent, prise par son enthousiasme, elle ne pouvait en terminer la lecture. La manière dont elle lisait ces mots étaient si fervente qu'elle suscitait chez tous la dévotion. De même, lorsqu'elle chantait dans le chœur, elle était tout absorbée en Dieu, transportée par une telle ardeur qu'elle manifestait parfois ses sentiments avec des gestes. D'autres fois, comme ravie en extase, elle n'entendait pas ceux qui l'appelaient ou la secouaient et elle avait beaucoup de difficultés à reprendre conscience des choses extérieures» (ibid., VI, 1). Dans l'une de ses visions, c'est Jésus lui-même qui lui recommande l'Evangile ; en lui ouvrant la plaie de son cœur très doux, il lui dit : «Vois combien mon amour est grand : si tu veux bien le connaître, tu ne le trouveras nulle part ailleurs mieux exprimé que dans l'Evangile. Personne n'a jamais entendu exprimer des sentiments plus forts et plus tendres que ceux-ci : Comme le Père m'a aimé, moi aussi je vous ai aimés (Jean XV, 9)» (ibid., I, 22).

 

Chers amis, la prière personnelle et liturgique, notamment la liturgie des Heures et la Messe sont à la racine de l'expérience spirituelle de sainte Mathilde de Hackeborn. En se laissant guider par les Saintes Ecritures et nourrir du Pain eucharistique. Elle a parcouru un chemin d'intime union avec le Seigneur, toujours dans la pleine fidélité à l'Eglise. Cela est également pour nous une puissante invitation à intensifier notre amitié avec le Seigneur, surtout à travers la prière quotidienne et la participation attentive, fidèle et active à la Messe. La liturgie est une grande école de spiritualité.

 

La disciple Gertrude décrit avec des expressions intenses les derniers moments de la vie de sainte Mathilde de Hackeborn, très difficiles, mais éclairés par la présence de la Bienheureuse Trinité, du Seigneur, de la Vierge Marie, de tous les saints, ainsi que de sa sœur de sang Gertrude. Lorsque arriva l'heure où le Seigneur voulut l'appeler à Lui, elle lui demanda de pouvoir encore vivre dans la souffrance pour le salut des âmes et Jésus se complut de cette marque d'amour supplémentaire.

 

Mathilde avait 58 ans. Elle parcourut la fin de sa route marquée par huit ans de graves maladies. Son œuvre et sa renommée de sainteté se répandirent rapidement. Lorsque son heure vint, «le Dieu de Majesté, unique douceur de l'âme qui l'aime, lui chanta : Venite vos, benedicti Patris mei, Venez, ô vous qui êtes bénis par mon Père, venez recevoir le royaume, et il l'associa à sa gloire» (ibid., VI, 8).

 

Sainte Mathilde de Hackeborn nous confie au Sacré Cœur de Jésus et à la Vierge. Elle invite à louer le Fils avec le Cœur de la Mère et à louer Marie avec le Cœur du Fils : «Je vous salue, ô Vierge très vénérée, dans cette douce rosée qui, du Cœur de la Très sainte Trinité, se répand en vous ; je vous salue dans la gloire et dans la joie avec laquelle vous vous réjouissez à présent dans l'éternité, vous qui la première d'entre toutes les créatures de la terre et du ciel, fûtes élue avant même la création du monde ! Amen» (ibid., I, 45).

 

Audience générale, 29 septembre 2010, Benoît XVI

 

 

Mechthild von Hackeborn

Mechthild und Gertrud von Helfta

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18 novembre 2011 5 18 /11 /novembre /2011 05:00

Odon de Cluny par Benoît XVI

 

Je voudrais reprendre la présentation des grands écrivains de l'Eglise d'Orient et d'Occident à l'époque médiévale, car, comme dans un miroir, nous voyons dans leur vie et dans leurs écrits ce que signifie être chrétiens. Je vous propose aujourd'hui la figure lumineuse de saint Odon, abbé de Cluny : celle-ci se situe dans le Moyen-Age monastique qui vit la surprenante diffusion en Europe de la vie et de la spiritualité inspirées par la Règle de saint Benoît. Il y eut au cours de ces siècles une prodigieuse apparition et multiplication de cloîtres qui, se ramifiant sur le continent, y diffusèrent largement la sensibilité et l'esprit chrétiens. Saint Odon nous reconduit, en particulier, à un monastère, Cluny qui, au Moyen-Age, compta parmi les plus illustres et célébrés et qui, aujourd'hui encore, révèle à travers ses ruines majestueuses les signes d'un passé glorieux en raison de l'intense attachement à l'ascèse, à l'étude, et, de façon particulière, au culte divin, entouré de dignité et de beauté.

 

Odon fut le deuxième abbé de Cluny. Il était né aux environs de 880, à la frontière entre le Maine et la Touraine, en France. Il fut consacré par son père au saint évêque Martin de Tours, à l'ombre bénéfique et dans la mémoire duquel Odon vécut ensuite toute sa vie, la concluant à la fin auprès de son tombeau. Le choix de la consécration religieuse fut précédé chez lui par l'expérience d'un moment spécial de grâce, dont il parla lui-même à un autre moine, Jean l'Italien, qui fut par la suite son biographe. Odon était encore adolescent, âgé environ de 16 ans, lorsque, au cours d'une veillée de Noël, il sentit s'élever spontanément de ses lèvres cette prière à la Vierge : "Notre Dame, Mère de miséricorde qui en cette nuit as donné à la lumière le Sauveur, prie pour moi. Que ton enfantement glorieux et singulier soit, ô Très pieuse, mon refuge" (Vita sancti Odonis, I, 9:  PL 133, 747). L'appellation "Mère de miséricorde", avec laquelle le jeune Odon invoqua alors la Vierge, sera celle avec laquelle il aimera ensuite s'adresser à Marie, l'appelant également "unique espérance du monde, grâce à laquelle nous ont été ouvertes les portes du paradis" (In veneratione S. Mariae Magdalenae:  PL 133, 721). Il lui arriva à cette époque de lire la Règle de saint Benoît et de commencer à en observer certaines indications, "portant, pas encore moine, le joug léger des moines" (ibid., I, 14:  PL 133, 50). Dans l'un de ses sermons, Odon célébrera Benoît comme "une lampe qui brille dans le stade ténébreux de cette vie" (De sancto Benedicto abbate : PL 133, 725), et le qualifiera de "maître de discipline spirituelle" (ibid., PL 133, 727). Il soulignera avec affection que la piété chrétienne "fait mémoire avec une plus grande douceur" de lui, dans la conscience que Dieu l'a élevé "parmi les Pères suprêmes et élus de la Sainte Eglise" (ibid., PL 133, 722).

 

Fasciné par l'idéal bénédictin, Odon quitta Tours et entra en tant que moine dans l'abbaye bénédictine de Baume, pour ensuite passer à celle de Cluny, dont il devint abbé en 927. De ce centre de vie spirituelle, il put exercer une vaste influence sur les monastères du continent. En Italie également, différents ermitages bénéficièrent de sa direction et de sa réforme, parmi lesquels celui de Saint-Paul-hors-les-Murs. Odon se rendit plus d'une fois à Rome, allant jusqu'à Subiaco, le Mont Cassin et Salerne. Ce fut précisément à Rome que, pendant l'été 942, il tomba malade. Se sentant proche de la fin, il voulut à tout prix revenir auprès de saint Martin à Tours, où il mourut pendant l'octavaire du saint, le 18 novembre 942.

 

Son biographe, en soulignant chez Odon la "vertu de la patience", offre une longue liste de ses autres vertus, telles que le mépris du monde, le zèle pour les âmes, l'engagement pour la paix des Eglises. Les grandes aspirations de l'abbé Odon étaient la concorde entre les rois et les princes, l'observance des commandements, l'attention envers les pauvres, l'amendement des jeunes, le respect des personnes âgées (cf. Vita sancti Odonis, I, 17:  PL 133, 49). Il aimait la petite cellule dans laquelle il résidait, "loin des yeux de tous, attentif à ne plaire qu'à Dieu" (ibid., I, 14:  PL 133, 49). Il ne manquait cependant pas d'exercer également, comme "source surabondante", le ministère de la parole et de l'exemple, "en pleurant ce monde comme étant immensément misérable" (ibid., i,17:  PL 133, 51). Chez un seul moine, commente son biographe, se trouvaient réunies les différentes vertus existant de manière dispersée dans les autres monastères : "Jésus, dans sa bonté, puisant aux différents jardins des moines, formait dans un petit lieu un paradis, pour irriguer par sa source le cœur des fidèles" (ibid., I, 14:  PL 133, 49).

 

Dans un passage d'un sermon en l'honneur de Marie de Magdala, l'abbé de Cluny nous révèle comment il concevait la vie monastique : "Marie qui, assise aux pieds du Seigneur, écoutait sa parole avec l'esprit attentif, est le symbole de la douceur de la vie contemplative, dont la saveur, plus on la goûte, pousse l'âme à se détacher encore davantage des choses visibles et des tumultes des préoccupations du monde" (In ven. S. Mariae Magd., PL 133, 717). C'est une conception qu'Odon confirme et développe dans ses autres écrits, desquels transparaissent l'amour de l'intériorité, une vision du monde comme étant une réalité fragile et précaire dont il faut se détacher, une inclination constante au détachement des choses ressenties, comme étant source d'inquiétude, une sensibilité aiguë pour la présence du mal chez les différentes catégories d'hommes, une profonde aspiration eschatologique. Cette vision du monde peut apparaître assez éloignée de la nôtre, toutefois celle d'Odon est une conception qui, voyant la fragilité du monde, valorise la vie intérieure ouverte à l'autre, à l'amour du prochain, et précisément ainsi transforme l'existence et ouvre le monde à la lumière de Dieu.

 

Une attention particulière doit être portée à la "dévotion" au Corps et au Sang du Christ qu'Odon, face à une négligence répandue qu'il déplorait vivement, cultiva toujours avec conviction. Il était en effet fermement convaincu de la présence réelle, sous les espèces eucharistiques, du Corps et du Sang du Seigneur, en vertu de la transformation "substantielle" du pain et du vin. Il écrivait : "Dieu, le Créateur de tout, a pris le pain, en disant qu'il était son Corps et qu'il l'aurait offert pour le monde et il a distribué le vin, en l'appelant son sang" ; or, "c'est une loi de nature que la transformation ait lieu selon le commandement du Créateur", et voilà donc qu'"immédiatement, la nature change sa condition habituelle : sans retard, le pain devient chair, et le vin devient sang" ; à l'ordre du Seigneur "la substance se transforme" (Odonis Abb. Cluniac. occupatio, ed. A. Swoboda, Lipsia 1900, p. 121). Malheureusement, remarque notre abbé, ce "sacro-saint mystère du Corps du Seigneur, qui constitue tout le salut du monde" (Collationes, XXVIII:  PL 133, 572) est célébré avec négligence. "Les prêtres, avertit-il, qui accèdent à l'autel de manière indigne, entachent le pain, c'est-à-dire le Corps du Christ" (ibid., PL 133, 572-573). Seul celui qui est uni spirituellement au Christ peut participer dignement à son Corps eucharistique:  dans le cas contraire, manger sa chair et boire son sang ne serait pas un bienfait, mais une condamnation (cf. ibid. XXX, PL 133, 575). Tout cela nous invite à croire avec une force et une profondeur nouvelles à la vérité de la présence du Seigneur. La présence du Créateur parmi nous, qui se remet entre nos mains et nous transforme comme il transforme le pain et le vin, transforme ainsi le monde.

 

Saint Odon a été un véritable guide spirituel tant pour les moines que pour les fidèles de son temps. Devant "le grand nombre des vices" répandus dans la société, le remède qu'il proposait avec fermeté était celui d'un changement de vie radical, fondé sur l'humilité, l'austérité, le détachement des choses éphémères et l'adhésion aux choses éternelles (cf. Collationes, XXX, PL 133, 613). Malgré le réalisme de son diagnostic sur la situation de son temps, Odon n'est pas tenté par le pessimisme : "Nous ne disons pas cela - précise-t-il - pour précipiter dans le désespoir ceux qui voudront se convertir. La miséricorde divine est toujours disponible ; elle attend l'heure de notre conversion" (ibid.:  PL 133, 563). Et il s'exclame :  "Ô ineffables entrailles de la piété divine ! Dieu poursuit les fautes et protège toutefois les pécheurs" (ibid., PL 133, 592). Soutenu par cette conviction, l'abbé de Cluny aimait s'arrêter en contemplation devant la miséricorde du Christ, le Sauveur, qu'il qualifiait de manière suggestive "d'amant des hommes" : amator hominum Christus (ibid., LIII:  PL 133, 637). Jésus a pris sur lui les fléaux qui auraient dû nous être réservés - observe-t-il - pour sauver ainsi la créature qui est son œuvre et qu'il aime (cf. ibid.:  PL 133, 638).

 

Ici apparaît un trait du saint abbé presque caché à première vue sous la rigueur de son austérité de réformateur :  la profonde bonté de son âme. Il était austère, mais surtout il était bon, un homme d'une grande bonté, une bonté qui provient du contact avec la bonté divine. Odon, comme nous le disent ses contemporains, diffusait autour de lui la joie dont il était empli. Son biographe atteste n'avoir jamais entendu sortir de bouche d'homme "tant de douceur en paroles" (ibid., I, 17:  PL 133, 31). Il avait l'habitude, rappelle son biographe, d'inviter au chant les jeunes enfants qu'il rencontrait sur la route pour ensuite leur faire quelque petit don, et il ajoute : "ses paroles étaient pleines de joie, son hilarité communiquait à notre cœur un joie intime" (ibid., ii; 5:  PL 133, 63). De cette manière, le vigoureux et aimable abbé médiéval, passionné de réforme, à travers une action incisive alimentait chez les moines, comme aussi chez les fidèles laïcs de son temps, l'intention de progresser d'un pas vif sur le chemin de la perfection chrétienne.

 

Nous voulons espérer que sa bonté, la joie qui provient de la foi, unies à l'austérité et à l'opposition aux vices du monde, toucheront aussi notre cœur, afin que nous aussi puissions trouver la source de la joie qui jaillit de la bonté de Dieu.

 

Audience Générale, 2 septembre 2009, Benoît XVI

 

 

    pavement du choeur de l' abbaye de Cluny

Carreau orné d' une fleur à huit pétales de marbre blanc provenant du choeur de l' Abbaye de Cluny

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17 novembre 2011 4 17 /11 /novembre /2011 05:00

Elisabeth de Hongrie par Benoît XVI

 

Aujourd’hui, je voudrais vous parler de l’une des femmes du Moyen Age ayant suscité le plus d’admiration ; il s’agit de sainte Elisabeth de Hongrie, appelée également Elisabeth de Thuringe.

 

Elle naquit en 1207 ; les historiens débattent sur son lieu de naissance. Son père était André II, riche et puissant roi de Hongrie qui, pour renforcer les liens politiques, avait épousé la comtesse allemande Gertrude d’Andechs-Merania, sœur de sainte Edwige, elle-même épouse du duc de Silésie. Elisabeth vécut à la cour de Hongrie les quatre premières années de son enfance uniquement, avec sa sœur et ses trois frères. Elle aimait le jeu, la musique et la danse ; elle récitait fidèlement ses prières, et manifestait déjà une attention particulière pour les pauvres, qu’elle aidait au moyen d’une bonne parole ou d’un geste affectueux.

 

Son enfance heureuse fut brusquement interrompue lorsque, de la lointaine Thuringe, arrivèrent des chevaliers pour la conduire à son nouveau domicile, en Allemagne centrale. Selon la coutume de l’époque, en effet, son père avait établi qu’Elisabeth devienne princesse de Thuringe. Le Landgrave ou comte de cette région était l’un des souverains les plus riches et influents d’Europe au début du XIIIe siècle, et son château était un centre de splendeur et de culture. Mais derrière les fêtes et la gloire apparente se cachaient les ambitions des princes féodaux, souvent en guerre entre eux, et en conflit avec les autorités royales et impériales. Dans ce contexte, le Landgrave Herman accueillit bien volontiers les fiançailles entre son fils Ludovic et la princesse hongroise. Elisabeth quitta sa patrie pourvue d’une riche dot et d’une importante suite, composée notamment de ses demoiselles de compagnie personnelles, dont deux demeureront ses amies fidèles jusqu’à la fin. Ce sont elles qui nous ont laissé de précieuses informations sur l’enfance et la vie de la sainte.

 

Après un long voyage, ils arrivèrent à Eisenach, pour monter ensuite vers la forteresse de Wartburg, l’imposant château dominant la ville. C’est là que furent célébrées les fiançailles de Ludovic et Elisabeth. Au cours des années qui suivirent, tandis que Ludovic apprenait le métier de chevalier, Elisabeth et ses compagnes étudiaient l’allemand, le français, le latin, la musique, la littérature et la broderie. Bien que les fiançailles aient été décidées pour des raisons politiques, entre les deux jeunes gens naquit un amour sincère, animé par la foi et le désir d’accomplir la volonté de Dieu. A l’âge de 18 ans, Ludovic, après la mort de son père, commença à régner sur la Thuringe. Mais Elisabeth devint l’objet de critiques voilées, car sa façon de se comporter ne correspondait pas à la vie de la cour. Ainsi, la célébration du mariage se déroula elle aussi sans faste, et les dépenses pour le banquet furent en partie dévolues aux pauvres. Dans sa profonde sensibilité, Elisabeth voyait les contradictions entre la foi professée et la pratique chrétienne. Elle ne supportait pas les compromis. Un jour, en entrant dans l’église en la fête de l’Assomption, elle enleva sa couronne, la déposa devant la croix et demeura prostrée au sol, le visage couvert. Lorsque sa belle-mère lui reprocha son geste, elle répondit : «Comment moi, misérable créature, puis-je continuer de porter une couronne de dignité terrestre, lorsque je vois mon Roi Jésus Christ couronné d’épines ?». Elle se comportait devant Dieu comme envers ses sujets. Dans les Dépositions des quatre demoiselles de compagnie, nous trouvons ce témoignage : «Elle ne consommait aucune nourriture sans s’assurer auparavant qu’elle provenait des propriétés et des biens légitimes de son époux. Tout en s’abstenant des biens procurés de façon illicite, elle se prodiguait pour dédommager ceux qui avaient subi une violence». Un véritable exemple pour tous ceux qui occupent des rôles de guide : l’exercice de l’autorité, à tous les niveaux, doit être vécu comme un service à la justice et à la charité, dans la recherche constante du bien commun.

 

Elisabeth pratiquait assidûment les œuvres de miséricorde : elle donnait à boire et à manger à ceux qui frappaient à sa porte, elle procurait des vêtements, elle payait les dettes, elle prenait soin des malades et enterrait les morts. En descendant de son château, elle se rendait souvent avec ses servantes dans les maisons des pauvres, apportant du pain, de la viande, de la farine et d’autres aliments. Elle remettait la nourriture personnellement et contrôlait avec attention les vêtements et les lits des pauvres. Ce comportement fut rapporté à son mari, qui non seulement n’en fut pas ennuyé, mais qui répondit aux accusateurs : «Tant qu’elle ne vend pas le château, j’en suis content !». C’est dans ce contexte que se situe le miracle du pain transformé en roses : alors qu’Elisabeth marchait sur la route avec son tablier rempli de pain pour les pauvres, elle rencontra son mari qui lui demanda ce qu’elle portait. Elle ouvrit son tablier et, au lieu du pain, apparurent des roses magnifiques. Ce symbole de charité est présent de nombreuses fois dans les représentations de sainte Elisabeth.

 

Son mariage fut profondément heureux : Elisabeth aidait son mari à élever ses qualités humaines à un niveau surnaturel, et lui, en échange, protégeait sa femme dans sa générosité envers les pauvres et dans ses pratiques religieuses. Toujours plus admiratif en raison de la foi profonde de son épouse, Ludovic, se référant à son attention envers les pauvres, lui dit : «Chère Elisabeth, c’est le Christ que tu as lavé, nourri et dont tu as pris soin». Un témoignage clair de la façon dont la foi et l’amour envers Dieu et envers le prochain renforcent la vie familiale et rendent l’union matrimoniale encore plus profonde.

 

Le jeune couple trouva un soutien spirituel chez les frères mineurs, qui, à partir de 1222, se diffusèrent en Thuringe. Parmi eux, Elisabeth choisit le frère Roger (Rüdiger) comme directeur spirituel. Lorsqu’il lui raconta l’épisode de la conversion du jeune et riche marchand François d’Assise, Elisabeth s’enthousiasma encore plus sur son chemin de vie chrétienne. A partir de ce moment-là, elle fut encore davantage décidée à suivre le Christ pauvre et crucifié, présent chez les pauvres. Même lorsque son premier fils naquit, suivi de deux autres, notre sainte ne négligea jamais ses œuvres de charité. En outre, elle aida les frères mineurs à construire à Halberstadt un couvent, dont frère Roger devint le supérieur. La direction spirituelle d’Elisabeth passa, ainsi, à Conrad de Marbourg.

 

Une dure épreuve fut l’adieu à son mari, à la fin de juin 1227, lorsque Ludovic IV s’associa à la croisade de l’empereur Frédéric II, rappelant à sa femme qu’il s’agissait d’une tradition pour les souverains de Thuringe. Elisabeth répondit : «Je ne te retiendrai pas. Je me suis entièrement donnée à Dieu et à présent je dois aussi te donner». Mais la fièvre décima les troupes et Ludovic tomba malade et mourut à Otrante, avant même d’embarquer, en septembre 1227, à l’âge de vingt-sept ans. Elisabeth, ayant appris la nouvelle, ressentit une telle souffrance qu’elle se retira dans la solitude, mais ensuite, fortifiée par la prière et réconfortée par l’espérance de le revoir au Ciel, elle recommença à s’intéresser aux affaires du royaume.

 

Mais une autre épreuve l’attendait : son beau-frère usurpa le gouvernement de la Thuringe, se déclarant le véritable héritier de Ludovic et accusant Elisabeth d’être une femme pieuse incompétente pour gouverner. La jeune veuve, avec ses trois enfants, fut chassée du château de Wartburg et se mit à la recherche d'un lieu où trouver refuge. Seules deux de ses servantes demeurèrent à ses côtés, l'accompagnèrent et confièrent les trois enfants aux soins des amis de Ludovic. En voyageant de village en village, Elisabeth travaillait là où elle était accueillie, elle assistait les malades, elle filait et elle cousait. Au cours de ce calvaire supporté avec beaucoup de foi, avec patience et dévouement à Dieu, certains parents qui lui étaient restés fidèles et considéraient comme illégitimes le gouvernement de son beau-frère, réhabilitèrent son nom. Ainsi Elisabeth, au début de l'année 1228, put recevoir un revenu approprié pour se retirer dans le château de famille à Marbourg, où habitait aussi son directeur spirituel Conrad. C'est lui qui rapporta au Pape Grégoire IX le fait suivant : «Le Vendredi saint de 1228, les mains posées sur l'autel dans la chapelle de sa ville de Eisenach, où elle avait accueilli les frères mineurs, en présence de plusieurs frères et de parents, Elisabeth renonça à sa propre volonté et à toutes les vanités du monde. Elle voulait renoncer aussi à toutes ses possessions, mais je l'en dissuadais par amour des pauvres. Peu après, elle construisit un hôpital, elle recueillit les malades et les invalides et elle servit à sa table les plus misérables et les plus abandonnés. L’ayant moi-même réprimandée à ce propos, Elisabeth répondit qu'elle recevait des pauvres une grâce spéciale et l’humilité» (Epistula magistri Conradi, 14-17).

 

Nous pouvons percevoir dans cette affirmation une certaine expérience mystique semblable à celle vécue par saint François : le Poverello d'Assise déclara en effet dans son testament, qu'en servant les lépreux, ce qui auparavant lui était amer fut transmué en douceur de l'âme et du corps (Testamentum, 1-3). Elisabeth passa les trois dernières années de sa vie dans l'hôpital qu'elle avait fondé, servant les malades, veillant avec les mourants. Elle essayait toujours d'accomplir les services les plus humbles et les travaux répugnants. Elle devint ce que nous pourrions appeler aujourd'hui une femme consacrée dans le monde (soror in saeculo) et forma, avec d'autres amies, vêtues de gris, une communauté religieuse. Ce n'est pas par hasard qu'elle est la patronne du Tiers Ordre régulier de saint François et de l'Ordre franciscain séculier.

 

En novembre 1231, elle fut frappée par de fortes fièvres. Lorsque la nouvelle de sa maladie se propagea, une foule de gens accourut lui rendre visite. Après une dizaine de jours, elle demanda que les portes fussent fermées, pour demeurer seule avec Dieu. Dans la nuit du 17 novembre, elle s'endormit doucement dans le Seigneur. Les témoignages sur sa sainteté furent si nombreux qu’à peine quatre ans plus tard, le Pape Grégoire IX la proclama sainte et, la même année, fut consacrée la belle église construite en son honneur à Marbourg.

 

Chers frères et sœurs, dans la figure de sainte Elisabeth, nous voyons que la foi et l'amitié avec le Christ créent le sens de la justice, de l'égalité entre tous, des droits des autres et créent l'amour, la charité. Et de cette charité naît aussi l'espérance, la certitude que nous sommes aimés par le Christ et que l'amour du Christ nous attend et ainsi nous rend capables d'imiter le Christ et de voir le Christ dans les autres.

 

Sainte Elisabeth nous invite à redécouvrir le Christ, à l'aimer, à avoir la foi et trouver ainsi la vraie justice et l'amour, ainsi que la joie d'être un jour plongés dans l'amour divin, dans la joie de l'éternité avec Dieu.

 

Audience générale, 20 octobre 2010, Benoît XVI 

 

Saint Elisabeth of Hungary

SAINTE ELISABETH DE HONGRIE, par Sándor Liezen-Mayer, 1882, Musée National de Hongrie

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16 novembre 2011 3 16 /11 /novembre /2011 05:00

Sainte Gertrude par Benoît XVI

 

Sainte Gertrude la Grande, dont je voudrais vous parler aujourd'hui, nous conduit cette semaine aussi au monastère de Helfta, où sont nés certains des chefs-d’œuvre de la littérature religieuse féminine latino-allemande. C'est à ce monde qu’appartient Gertrude, l'une des plus célèbres mystiques, seule femme en Allemagne à recevoir l'épithète de «Grande», en raison de sa stature culturelle et évangélique : à travers sa vie et sa pensée, elle a influencé de manière singulière la spiritualité chrétienne. C'est une femme exceptionnelle, dotée de talents naturels particuliers et d'extraordinaires dons de grâce, d'une profonde humilité et d’un zèle ardent pour le salut du prochain, d'une intime communion avec Dieu dans la contemplation et de disponibilité à venir au secours des plus démunis.

 

A Helfta, elle se mesure, pour ainsi dire, systématiquement à sa maîtresse Mathilde de Hackeborn, dont j'ai parlé à l'Audience de mercredi dernier ; elle noue des relations avec Mathilde de Magdebourg, une autre mystique médiévale ; elle grandit en recevant les soins maternels, doux et exigeants, de l'abbesse Gertrude. De ces trois consœurs, elle puise des trésors d'expérience et de sagesse ; elle les élabore dans sa propre synthèse, en parcourant son itinéraire religieux avec une confiance sans limite dans le Seigneur. Elle exprime la richesse de la spiritualité non seulement de son monde monastique, mais aussi et surtout biblique, liturgique, patristique et bénédictin, avec un timbre tout à fait personnel et de façon très communicative.

 

Elle naît le 6 janvier 1256, en la fête de l'Epiphanie, mais l'on ne sait rien ni de ses parents, ni de son lieu de naissance. Gertrude écrit que le Seigneur lui-même lui révèle le sens de ce premier déracinement : «Je l'ai choisie pour ma demeure parce que je vois avec délices que tout ce que les hommes aiment dans cette élue est mon œuvre propre […] Aussi je l'ai exilée en quelque sorte loin de tous ses parents, afin que personne ne l'aimât à ce titre et que je fusse le seul motif de l'affection qu'on aurait pour elle» (Les Révélations, I, 16).

 

A l'âge de cinq ans, en 1261, elle entre au monastère, comme c'était souvent le cas à l'époque, pour la formation et l'étude. Elle y passe toute son existence, dont elle signale elle-même les étapes les plus significatives. Dans ses mémoires, elle rappelle que le Seigneur l'a prévenue avec une patience compatissante et une infinie miséricorde, en oubliant les années de l'enfance, de l'adolescence et de la jeunesse, passées — écrit-elle — «dans un tel aveuglement, que si vous ne m'aviez donné une horreur naturelle du mal, un attrait pour le bien avec les sages conseils de mon entourage, il me semble que je serais tombée dans toutes les occasions de faute, sans remords de conscience, absolument comme si j'avais été une païenne […]. Cependant vous m'aviez choisie dès ma plus tendre enfance, afin de me faire grandir au milieu des vierges consacrées, dans le sanctuaire béni de la Religion» (ibid., II, 23 ).

 

Gertrude est une étudiante extraordinaire, elle apprend tout ce que l’on peut apprendre des sciences du Trivium et du Quadrivium, la formation de cette époque ; elle est fascinée par le savoir et se donne tout entière à l'étude profane avec ardeur et ténacité, avec une réussite scolaire dépassant toutes les attentes. Si nous ne savons rien de ses origines, elle nous dit beaucoup de ses passions de jeunesse : littérature, musique et chant, art de l’enluminure la ravissent ; elle a un caractère fort, décidé, immédiat et impulsif ; elle dit souvent être négligente ; elle reconnaît ses défauts, elle en demande humblement pardon. Elle demande avec humilité conseil et prière pour sa conversion. Certains traits et défauts de son tempérament l'accompagneront jusqu'à la fin, au point de surprendre certaines personnes s'étonnant que le Seigneur lui donne une telle préférence.

 

En tant qu’étudiante, elle se consacre ensuite entièrement à Dieu dans la vie monastique et pendant vingt ans, rien d’exceptionnel n’a lieu : l’étude et la prière constituent son activité principale. En raison de ses qualités, elle excelle parmi ses consœurs ; elle fait preuve de ténacité pour consolider sa culture dans divers domaines. Mais, au cours de l’Avent 1280, elle commence à ressentir un dégoût pour tout cela, en perçoit la vanité, et le 27 janvier 1281, quelques jours seulement avant la fête de la purification de la Vierge, vers l’heure des Complies, le soir, le Seigneur illumine ses denses ténèbres. Avec délicatesse et douceur, il calme le trouble qui l’angoisse, trouble que Gertrude voit comme un don même de Dieu «pour renverser la tour de vaine gloire et de curiosité élevée par mon orgueil. Orgueil insensé car je ne méritais même pas de porter le nom et l'habit de la Religion. Toutefois c'était bien le chemin que vous choisissiez, ô mon Dieu, pour me révéler votre salut» (Ibid., II, 1, p. 87). La vision d’un jeune homme la guide pour démêler le nœud d’épines qui opprimait son âme, en la prenant par la main. Dans cette main, Gertrude reconnaît «les joyaux précieux des plaies sacrées qui ont annulé tous les titres qui pouvaient nous être opposés» (ibid., II, 1, p. 89), et reconnaît Celui qui sur la Croix nous a sauvés par son sang, Jésus.

 

A partir de ce moment, sa vie de communion intime avec le Seigneur s’intensifie, en particulier au cours des temps liturgiques les plus significatifs — l’Avent et Noël, Carême et Pâques, la fête de la Vierge — même lorsque, malade, elle ne pouvait se rendre au chœur. C’est le même humus liturgique que Mathilde, sa maîtresse, que Gertrude décrit toutefois à travers des images, des symboles et des termes plus simples et linéaires, plus réalistes, avec des références plus directes à la Bible, aux Pères, au monde bénédictin.

 

Sa biographe indique deux directions de ce que nous pourrions définir sa «conversion» particulière : dans les études, avec le passage radical des études humanistes profanes à celles théologiques, et dans l’observance monastique, avec le passage de la vie qu’elle qualifie de négligente à la vie de prière intense, mystique, avec une exceptionnelle ardeur missionnaire. Le Seigneur, qui l’avait choisie dans le sein maternel et qui l’avait fait participer, dès son enfance, au banquet de la vie monastique, la ramène par sa grâce «des choses extérieures à la contemplation intérieure, des occupations terrestres au soin des choses célestes». Gertrude comprend alors qu'elle était restée loin de Lui dans une région de dissemblance, comme elle dit avec saint Augustin ; de s’être consacrée avec trop d’ardeur aux études libérales, à la sagesse humaine, en négligeant la science spirituelle, se privant du goût de la véritable sagesse ; elle est conduite à présent à la montagne de la contemplation, où elle se dépouille du vieil homme pour se revêtir de l’homme nouveau. «C'est ainsi que de grammairienne elle devint théologienne, relisant sans cesse les pages divines qu’elle pouvait se procurer, et remplissant son cœur des plus utiles et des plus douces sentences de la Sainte Ecriture. Aussi avait-elle toujours à sa disposition la Parole de Dieu afin de satisfaire ceux qui venaient la consulter et de réfuter toute idée fausse par des témoignages de la Sainte Ecriture employés si à propos, qu'on n'y trouvait rien à objecter» (ibid., I, 1, p. 25).

 

Getrude transforme tout cela en apostolat : elle se consacre à écrire et à divulguer la vérité de la foi avec clarté et simplicité, grâce et persuasion, servant avec amour et fidélité l’Eglise, au point d’être utile et appréciée par les théologiens et les personnes pieuses. Il nous reste peu de son intense activité, notamment en raison des événements qui conduisirent à la destruction du monastère d’Helfta. Outre Le Héraut de l'Amour Divin ou Les révélations, il nous reste les Exercices spirituels, un rare joyau de la littérature mystique spirituelle.

 

En ce qui concerne l’observance religieuse, notre sainte est «donc une très forte colonne de la Religion, un défenseur si zélé de la justice et de la vérité» (ibid., I, 1, ), dit sa biographe. A travers les mots et l’exemple, elle suscite chez les autres une grande ferveur. Aux prières et à la pénitence de la règle monastique, elle en ajoute d’autres avec une telle dévotion et un tel abandon confiant en Dieu, qu’elle suscite chez ceux qui la rencontrent la conscience d’être en présence du Seigneur. Et de fait, Dieu lui-même lui fait comprendre qu’il l’a appelée à être un instrument de sa grâce. Gertrude se sent indigne de cet immense trésor divin, elle confesse qu’elle ne l’a pas conservé et valorisé. Elle s’exclame : «Je vous offre la douleur que j'éprouve [...] de ne m'être pas servie avec soin et révérence des dons que j'avais reçus. Ne m'eussiez-vous donné, en souvenir de vous, à moi si indigne, qu'un léger fil de lin, j'aurais dû le recevoir avec un respect infini» (ibid., I, 5). Mais, reconnaissant sa pauvreté et son indignité, elle adhère à la volonté de Dieu : «j'ai dû combattre mon goût personnel — affirme-t-elle —, et considérer qu'ayant si peu profité de vos grâces, elles ne pouvaient m'avoir été accordées pour moi seule, puisque votre sagesse éternelle ne se trompe en rien. Ô Dispensateur de tous les biens, qui m'avez comblée gratuitement de tant de grâces, faites au moins qu'en lisant cet écrit, le cœur d'un de vos amis soit ému par votre condescendance, et vous remercie de ce que, pour l'amour des âmes, vous avez conservé si longtemps au milieu des souillures de mon cœur une pierre précieuse d'un tel prix» (ibid., II, 5).

 

En particulier, deux faveurs lui sont plus chères que toutes les autres, comme Gertrude l’écrit elle-même : «La première est l'empreinte que vous avez formée sur mon cœur, par les splendides joyaux de vos plaies sacrées. La seconde est cette blessure d'amour si profonde et si efficace que, (dussé-je vivre mille ans dans le plus complet délaissement), je goûterais sans cesse un bonheur ineffable au souvenir de ces deux bienfaits. Ils me seraient à chaque heure une source suffisante de consolation, de lumière et de gratitude. Pour ajouter à ces faveurs, vous m'avez encore admise à l'incomparable familiarité de votre tendresse, en m'offrant l'arche très noble de votre divinité, c'est-à-dire votre Cœur sacré, pour que j'y trouve mes délices [...]. Enfin vous m'avez donné pour avocate votre très douce Mère la bienheureuse Vierge Marie, me recommandant plusieurs fois à elle avec autant de tendresse qu'en mettrait un époux à confier à sa propre mère l'épouse qu'il s'est choisie» (ibid., II, 23).

 

Tendue vers la communion sans fin, elle conclut sa vie terrestre le 17 novembre 1301 ou 1302 à l’âge d’environ 46 ans. Dans le septième Exercice, celui de la préparation à la mort, sainte Gertrude écrit : «Ô Jésus, toi qui m’es immensément cher, sois toujours avec moi, pour que mon cœur demeure avec toi et que ton amour persévère avec moi sans possibilité de division et que mon trépas soit béni par toi, afin que mon esprit, libéré des liens de la chair, puisse immédiatement trouver le repos en toi. Amen» (Exercices).

 

Il me semble évident que ces choses ne sont pas seulement des choses du passé, historiques, mais l'existence de sainte Gertrude reste une école de vie chrétienne, de voie droite, et nous montre que le cœur d'une vie heureuse, d'une vie véritable, est l'amitié avec Jésus, le Seigneur. Et cette amitié s'apprend dans l'amour pour Les Ecritures Saintes, dans l'amour pour la liturgie, dans la foi profonde, dans l'amour pour Marie, de manière à connaître toujours plus réellement Dieu lui-même et le bonheur véritable, but de notre vie.

 

Audience générale, 6 octobre 2010, Benoît XVI  

 

SAINTE GERTRUDE, Westfälisches Landesmuseum, Cologne

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15 novembre 2011 2 15 /11 /novembre /2011 05:00

Saint Albert le Grand par Benoît XVI

 

L'un des plus grands maîtres de la théologie médiévale est saint Albert le Grand. Le titre de "grand" (magnus), avec lequel il est passé à l'histoire, indique l'étendue et la profondeur de sa doctrine, qu'il associa à la sainteté de sa vie. Mais ses contemporains déjà n'hésitaient pas à lui attribuer des titres d'excellence ; l'un de ses disciples, Ulrich de Strasbourg, le définit comme "merveille et miracle de notre temps".

 

Il naquit en Allemagne au début du XIIIe siècle, et tout jeune encore, il se rendit en Italie, à Padoue, siège de l'une des plus célèbres universités du moyen-âge. Il se consacra à l'étude de ce que l'on appelle les "arts libéraux" : grammaire, rhétorique, dialectique, arithmétique, géométrie, astronomie et musique, c'est-à-dire de la culture générale, manifestant cet intérêt typique pour les sciences naturelles, qui devait bientôt devenir le domaine de prédilection de sa spécialisation.

 

Au cours de son séjour à Padoue, il fréquenta l'église des dominicains, auxquels il s'unit par la suite avec la profession des vœux religieux. Les sources hagiographiques font comprendre qu'Albert a pris cette décision progressivement. Le rapport intense avec Dieu, l'exemple de sainteté des frères dominicains, l'écoute des sermons du bienheureux Jourdain de Saxe, successeur de saint Dominique à la tête de l'Ordre des prêcheurs, furent les facteurs décisifs qui l'aidèrent à surmonter tout doute, vainquant également les résistances familiales. Souvent, dans les années de notre jeunesse, Dieu nous parle et nous indique le projet de notre vie. Comme pour Albert, pour nous tous aussi, la prière personnelle nourrie par la Parole du Seigneur, l'assiduité aux sacrements et la direction spirituelle donnée par des hommes éclairés sont les moyens pour découvrir et suivre la voix de Dieu. Il reçut l'habit religieux des mains du bienheureux Jourdain de Saxe.

 

Après son ordination sacerdotale, ses supérieurs le destinèrent à l'enseignement dans divers centres d'études théologiques liés aux couvents des Pères dominicains. Ses brillantes qualités intellectuelles lui permirent de perfectionner l'étude de la théologie à l'Université la plus célèbre de l'époque, celle de Paris. Albert entreprit alors l'activité extraordinaire d'écrivain, qu'il devait poursuivre toute sa vie.

 

Des tâches prestigieuses lui furent confiées. En 1248, il fut chargé d'ouvrir une université de théologie à Cologne, l'un des chefs-lieux les plus importants d'Allemagne, où il vécut à plusieurs reprises, et qui devint sa ville d'adoption. De Paris, il emmena avec lui à Cologne un élève exceptionnel, Thomas d'Aquin. Le seul mérite d'avoir été le maître de saint Thomas d'Aquin suffirait pour que l'on nourrisse une profonde admiration pour saint Albert. Entre ces deux grands théologiens s'instaura un rapport d'estime et d'amitié réciproque, des attitudes humaines qui contribuent beaucoup au développement de la science. En 1254, Albert fut élu provincial de la Provincia Teutoniae – teutonique – des Pères dominicains, qui comprenait des communautés présentes dans un vaste territoire du centre et du nord de l'Europe. Il se distingua par le zèle avec lequel il exerça ce ministère, en visitant les communautés et en rappelant constamment les confrères à la fidélité, aux enseignements et aux exemples de saint Dominique.

 

Ses qualités n'échappèrent pas au pape de l'époque, Alexandre IV, qui voulut Albert pendant un certain temps à ses côtés à Anagni – où les papes se rendaient fréquemment – à Rome même et à Viterbe, pour bénéficier de ses conseils théologiques. Ce même souverain pontife le nomma évêque de Ratisbonne, un grand et célèbre diocèse, qui traversait toutefois une période difficile. De 1260 à 1262, Albert accomplit ce ministère avec un dévouement inlassable, réussissant à apporter la paix et la concorde dans la ville, à réorganiser les paroisses et les couvents, et à donner une nouvelle impulsion aux activités caritatives.

 

Dans les années 1263-1264, Albert prêcha en Allemagne et en Bohême, envoyé par le pape Urbain IV, pour retourner ensuite à Cologne et reprendre sa mission d'enseignant, de chercheur et d'écrivain. Etant un homme de prière, de science et de charité, il jouissait d'une grande autorité dans ses interventions, à l'occasion de divers événements concernant l'Eglise et la société de l'époque : ce fut surtout un homme de réconciliation et de paix à Cologne, où l'archevêque était entré en opposition farouche avec les institutions de la ville ; il se prodigua au cours du déroulement du IIe Concile de Lyon, en 1274, convoqué par le pape Grégoire X pour favoriser l'union avec les Grecs, après la séparation du grand schisme d'Orient de 1054 ; il éclaircit la pensée de Thomas d'Aquin, qui avait rencontré des objections et même fait l'objet de condamnations totalement injustifiées.

 

Il mourut dans la cellule de son couvent de la Sainte-Croix à Cologne en 1280, et il fut très vite vénéré par ses confrères. L'Eglise le proposa au culte des fidèles avec sa béatification, en 1622, et avec sa canonisation, en 1931, lorsque le pape Pie XI le proclama Docteur de l'Eglise. Il s'agissait d'une reconnaissance sans aucun doute appropriée à ce grand homme de Dieu et éminent savant non seulement dans le domaine des vérités de la foi, mais dans de très nombreux autres domaines du savoir ; en effet, en regardant le titre de ses très nombreuses œuvres, on se rend compte que sa culture a quelque chose de prodigieux, et que ses intérêts encyclopédiques le conduisirent à s'occuper non seulement de philosophie et de théologie, comme d'autres contemporains, mais également de toute autre discipline alors connue, de la physique à la chimie, de l'astronomie à la minéralogie, de la botanique à la zoologie. C'est pour cette raison que le pape Pie XII le nomma patron de ceux qui aiment les sciences naturelles et qu'il est également appelé Doctor universalis, précisément en raison de l'ampleur de ses intérêts et de son savoir.

 

Les méthodes scientifiques utilisées par saint Albert le Grand ne sont assurément pas celles qui devaient s'affirmer au cours des siècles suivants. Sa méthode consistait simplement dans l'observation, dans la description et dans la classification des phénomènes étudiés, mais ainsi, il a ouvert la porte pour les travaux à venir.

 

Il a encore beaucoup à nous enseigner. Saint Albert montre surtout qu'entre la foi et la science il n'y a pas d'opposition, malgré certains épisodes d'incompréhension que l'on a enregistrés au cours de l'histoire. Un homme de foi et de prière comme saint Albert le Grand, peut cultiver sereinement l'étude des sciences naturelles et progresser dans la connaissance du micro et du macrocosme, découvrant les lois propres de la matière, car tout cela concourt à abreuver sa soif et à nourrir son amour de Dieu. La Bible nous parle de la création comme du premier langage à travers lequel Dieu – qui est intelligence suprême – nous révèle quelque chose de lui. Le Livre de la Sagesse, par exemple, affirme que les phénomènes de la nature, dotés de grandeur et de beauté, sont comme les œuvres d'un artiste, à travers lesquelles, par analogie, nous pouvons connaître l'Auteur de la création (cf. Sg 13, 5). Avec une comparaison classique au Moyen-âge et à la Renaissance, on peut comparer le monde naturel à un livre écrit par Dieu, que nous lisons selon les diverses approches de la science. En effet, combien de scientifiques, dans le sillage de saint Albert le Grand, ont mené leurs recherches inspirés par l'émerveillement et la gratitude face au monde qui, à leurs yeux de chercheurs et de croyants, apparaissait et apparaît comme l'œuvre bonne d'un Créateur sage et aimant ! L'étude scientifique se transforme alors en un hymne de louange. C'est ce qu'avait bien compris un grand astrophysicien de notre époque, Enrico Medi, et qui écrivait : "Oh, vous mystérieuses galaxies, je vous vois, je vous calcule, je vous entends, je vous étudie, je vous découvre, je vous pénètre et je vous recueille. De vous, je prends la lumière et j'en fais de la science, je prends le mouvement et j'en fais de la sagesse, je prends le miroitement des couleurs et j'en fais de la poésie ; je vous prends vous, étoiles, entre mes mains, et tremblant dans l'unité de mon être, je vous élève au-dessus de vous-mêmes, et en prière je vous présente au Créateur, que seulement à travers moi, vous étoiles, vous pouvez adorer". (Le opere. Inno alla creazione)

 

Saint Albert le Grand nous rappelle qu'entre science et foi une amitié existe et que les hommes de science peuvent parcourir à travers leur vocation à l'étude de la nature, un authentique et fascinant parcours de sainteté.

 

Son extraordinaire ouverture d'esprit se révèle également dans une opération culturelle qu'il entreprit avec succès : l'accueil et la mise en valeur de la pensée d'Aristote. A l'époque de saint Albert, en effet, la connaissance de beaucoup d'œuvres de ce grand philosophe grec ayant vécu au quatrième siècle avant Jésus Christ, en particulier dans le domaine de l'éthique et de la métaphysique, était en effet en train de se répandre. Celles-ci démontraient la force de la raison, elles expliquaient avec lucidité et clarté le sens et la structure de la réalité, son intelligibilité, la valeur et la fin des actions humaines. Saint Albert le Grand a ouvert la porte à la réception complète de la philosophie d'Aristote dans la philosophie et la théologie médiévales, une réception élaborée ensuite de manière définitive par saint Thomas. Cette réception d'une philosophie, disons, païenne pré-chrétienne, fut une authentique révolution culturelle pour cette époque. Pourtant, beaucoup de penseurs chrétiens craignaient la philosophie d'Aristote, la philosophie non chrétienne, surtout parce que celle-ci, présentée par ses commentateurs arabes, avait été interprétée de manière à apparaître, au moins sur certains points, comme tout à fait inconciliable avec la foi chrétienne. Il se posait donc un dilemme : foi et raison sont-elles ou non en conflit l'une avec l'autre ?

 

C'est là que réside l'un des grands mérites de saint Albert : avec une rigueur scientifique il étudia les œuvres d'Aristote, convaincu que tout ce qui est vraiment rationnel est compatible avec la foi révélée dans les Saintes Ecritures. En d'autres termes, saint Albert le Grand a ainsi contribué à la formation d'une philosophie autonome, distincte de la théologie et unie à elle uniquement par l'unité de la vérité. Ainsi est apparue au XIIIe siècle une distinction claire entre ces deux savoirs, philosophie et théologie qui, en dialogue entre eux, coopèrent de manière harmonieuse à la découverte de la vocation authentique de l'homme, assoiffé de vérité et de béatitude : et c'est surtout la théologie, définie par saint Albert comme une "science affective", qui indique à l'homme son appel à la joie éternelle, une joie qui jaillit de la pleine adhésion à la vérité.

 

Saint Albert le Grand fut capable de communiquer ces concepts de manière simple et compréhensible. Authentique fils de saint Dominique, il prêchait volontiers au peuple de Dieu, qui était conquis par sa parole et par l'exemple de sa vie.

 

Chers frères et sœurs, prions le Seigneur pour que ne viennent jamais à manquer dans la sainte Eglise de doctes théologiens, pieux et savants comme saint Albert le Grand et pour que ce dernier aide chacun de nous à faire sienne la "formule de la sainteté" qu'il adopta dans sa vie : "Vouloir tout ce que je veux pour la gloire de Dieu, comme Dieu veut pour sa gloire tout ce qu'Il veut", soit se conformer toujours à la volonté de Dieu pour vouloir et faire tout, seulement et toujours pour Sa gloire.

 

Audience Générale, 24 mars 2010, Benoît XVI

   

Saint Albert the Great

Saint Albert le Grand, par Tommaso da Modena

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14 novembre 2011 1 14 /11 /novembre /2011 05:00

Le premier membre de l’Ordre de la Merci qui mérita de recevoir la couronne du martyre pour la délivrance des captifs et la prédication de la foi chrétienne en pays infidèle.
Martyrologe romain

 

San Serapio

SAN SERAPIO, Zurbarán

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