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"Je vous donne un commandement nouveau : c'est de vous aimer les uns les autres.

 

Comme je vous ai aimés, vous aussi aimez-vous les uns les autres.

 

Ce qui montrera à tous les hommes que vous êtes mes disciples, c'est l'amour que vous aurez les uns pour les autres."

 

Evangile de Jésus-Christ selon  saint Jean 

   

 

Pentecôte

" Le Défenseur, l'Esprit Saint que le Père enverra en mon nom, lui, vous enseignera tout, et il vous fera souvenir de tout ce que je vous ai dit."

 

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean  

 

   

 

 El Papa es argentino. Jorge Bergoglio                 

Saint Père François

 

 

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1er mai 2011 Béatification de Jean-Paul II

Béatification du Serviteur de Dieu Jean-Paul II

 

 

  Béatification du Père Popieluszko

beatification Mass, in Warsaw, Poland

à Varsovie, 6 juin 2010, Dimanche du Corps et du Sang du Christ

 

 

presidential palace in Warsaw

Varsovie 2010

 

 

Basilique du Sacré-Cœur de Montmartre
Sanctuaire de l'Adoration Eucharistique et de la Miséricorde Divine

La miséricorde de Dieu est comme un torrent débordé. Elle entraîne les cœurs sur son passage.
(Saint Curé d'Ars)
 

 


Le côté du Christ a été transpercé et tout le mystère de Dieu sort de là. C’est tout le mystère de Dieu qui aime, qui se livre jusqu’au bout, qui se donne jusqu’au bout. C’est le don le plus absolu qui soit. Le don du mystère trinitaire est le cœur ouvert. Ce n’est pas une image, c’est une réalité. C’est la réalité la plus profonde qui soit, la réalité de l’amour.
Père Marie-Joseph Le Guillou




Dans le cœur transpercé
de Jésus sont unis
le Royaume du Ciel
et la terre d'ici-bas
la source de la vie
pour nous se trouve là.

Ce cœur est cœur divin
Cœur de la Trinité
centre de convergence
de tous les cœur humains
il nous donne la vie
de la Divinité.


Sainte Thérèse Bénédicte de la Croix
(Edith Stein)



Le Sacré-Cœur représente toutes les puissances d'aimer, divines et humaines, qui sont en Notre-Seigneur.
Père Marie-Eugène de l'Enfant Jésus

 



feuille d'annonces de la Basilique du Sacré-Coeur de Montmartre

 

 

 

 

 

 

 

     

The Cambrai Madonna

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Ordinations du samedi 27 juin 2009 à Notre Dame de Paris


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... ma vocation, enfin je l’ai trouvée, ma vocation, c’est l’Amour !

 

 

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SAINT PIERRE ET SAINT ANDRÉ

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Benedict XVI and Cypriot Archbishop Chrysostomos, Church of 

Salutation avec l'Archevêque Chrysostomos à l'église d' Agia Kyriaki Chrysopolitissa de Paphos, le vendredi 4 juin 2010

 

     

 

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SALVE REGINA

7 mars 2014 5 07 /03 /mars /2014 12:00

La pénitence purement intérieure ne suffit pas, et tous les oracles de la foi nous apprennent qu'il y faut joindre l'extérieure, parce que la corruption du péché s'étant également répandue sur l'homme extérieur et sur l'homme intérieur, Dieu, dit saint Augustin, exige de nous, selon l'un et l'autre, le témoignage de notre condition. Conformément à cette maxime, vous devez être pendant le carême plus fidèle que jamais aux petites mortifications que Dieu vous a inspiré de vous prescrire à vous-même, afin qu'au moins en quelque chose vous ayez la consolation, suivant la parole de saint Paul, de porter sur votre corps la mortification du Seigneur Jésus, et quelle paraisse dans votre chair mortelle.

 

Par la même raison, le temps du carême doit encore allumer votre ferveur, pour rendre aux malades que Dieu confie à vos soins les visites de charité, et même les services humiliants qu'ils attendent de vous : car ces services et ces visites sont pour vous des œuvres de pénitence ; et vous devez vous souvenir que comme la foi est morte sans les œuvres, ainsi l'esprit de pénitence s'éteint peu à peu, quand il n'est pas entretenu par les œuvres de la pénitence.

 

Vous ne devez pas non plus négliger, autant qu'il dépend de vous, d'être plus modeste dans vos habits pendant le carême, qu'en tout autre temps de l'année, puisque le Saint-Esprit, en mille endroits de l'Ecriture, fait consister dans cette modestie un des devoirs de la pénitence des pécheurs : d'où vient que les pénitents de la primitive Eglise se revêtaient du cilice et se couvraient de cendres. Vous ne professez pas une autre religion qu'eux ; et tout votre zèle, à proportion et dans l'étendue de votre condition, doit être de vous conformer à eux.

 

L'aumône, selon la doctrine des Pères, ayant toujours été considérée comme inséparable du jeûne, parce que les pauvres, disaient-ils, doivent profiter de la pénitence des riches, il est évident que cette obligation des riches devient encore bien plus grande a leur égard, quand par des raisons légitimes ils sont dispensés de jeûner. L'aumône n'est plus alors un simple accompagnement, mais un supplément du jeûne, dont elle doit tenir la place. Il faut donc qu'elle soit plus abondante, comme étant due à double titre, et du jeûne et de l'aumône même. C'est par là que vous devez mesurer et régler vos aumônes pendant ce saint temps, ne vous contentant pas des aumônes que la loi commune de la charité vous engage à faire en toute sorte de temps, mais en faisant d'extraordinaires que la loi de la pénitence y doit ajouter, parce qu'il est constant qu'une pécheresse doit bien plus à Dieu sur ce point, qu'une chrétienne qui aurait conservé la grâce de son innocence. Vos aumônes, pour être le supplément de votre jeûne, et pour faire partie de votre pénitence, doivent être des aumônes qui vous coûtent ; je veux dire que vous les devez faire de ce que vous vous serez refusé à vous-même, et qu'une de vos dévotions du carême doit être de sacrifier à Dieu certaines choses dont vous voudrez bien vous priver pour avoir de quoi secourir votre prochain, préférant le soulagement de ses misères à votre sensualité, à votre curiosité, à votre vanité. C'est par de semblables victimes, dit le saint apôtre, qu'on se rend Dieu favorable.

 

Ce n'est pas assez : mais pour sanctifier le carême, il faut de plus retrancher les plaisirs et les vaines joies du monde ; rien n'étant plus opposé à l'esprit de la religion, beaucoup plus à l'esprit de la pénitence, que ce qui s'appelle plaisir, surtout dans un temps dédié à la pénitence solennelle de l'Eglise. Ainsi une âme chrétienne doit alors, non seulement abandonner tous les divertissements profanes qui ne sont permis en nul autre temps, comme les spectacles, les comédies, les danses ; mais même les jeux innocents, les conversations mondaines, les assemblées, les promenades, tout ce qui peut faire perdre l'esprit de recueillement et de componction. Il n'y a pas jusques aux personnes les plus séparées du monde par leur état de vie, qui ne doivent entrer dans cette pratique, ayant un soin particulier pendant le temps du carême, de s'abstenir de certaines récréations, et d'en faire à Dieu le sacrifice. Ce qui doit néanmoins s'entendre des choses qui ne sont ni nécessaires, ni utiles, et dont on se peut passer sans préjudice d'un plus grand bien. Ce qu'on accorde même pour lors ou à la santé, ou à une honnête relâche de l'esprit doit être accompagné d'une secrète douleur de se voir réduit à la nécessité de prendre ces petits soulagements, et à l'impuissance de faire une pénitence parfaite, telle qu'on voudrait la pouvoir faire pour s'acquitter pleinement auprès de Dieu.

 

Jésus-Christ, durant son jeûne de quarante jours, se retira au désert, et quitta ses disciples : d'où vous devez conclure que le carême des chrétiens doit être pour eux un temps de retraite et de séparation du monde, puisque le Fils de Dieu n'en usa de la sorte que pour notre instruction, et non pas pour sa propre sanctification ; et que le jeûne qu'il observa ne fut que pour servir de modèle au nôtre. Car c'est ce que tous les Pères de l'Eglise nous ont enseigné. Formez-vous sur ce grand exemple. Faites-vous une règle de vous séparer du monde, non par l'amour de votre repos, mais par le désir et le zèle de votre perfection. Ne vous contentez pas de cela : mais sans changer de lieu, ni en faire dépendre votre dévotion, établissez-vous au milieu de vous-même une solitude intérieure, où, dans le silence et hors du tumulte, vous communiquiez avec Dieu, donnant tous les jours du carême plus de temps à l'oraison et à la prière. Est-il personne au monde, sans exception, à qui cet exercice de retraite, joint à l'oraison et à une sainte communication avec Dieu, soit si nécessaire qu'à vous ? Disposez-vous donc à en tirer tous les avantages que Dieu par sa miséricorde y a attachés pour votre salut.

 

Car c'est à vous-même et de vous-même que Dieu dit, par le prophète Osée : Je la conduirai dans la solitude et là je lui parlerai au cœur.

 

 

BOURDALOUE, Instruction pour le temps du Carême, VI-IX

 

 

ŒUVRES COMPLÈTES DE BOURDALOUE

http://www.abbaye-saint-benoit.ch/saints/bourdaloue/

 

Banquet en nature morte, Abraham van Beyeren, Mauritshuis, The Hague

Banquet en nature morte, Abraham van Beyeren, Mauritshuis, The Hague

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6 mars 2014 4 06 /03 /mars /2014 12:00

Représentez-vous bien que le carême est un temps consacré à la pénitence, et qu'on peut par conséquent lui appliquer ce que saint Paul disait aux Corinthiens : Voici maintenant le temps favorable : voici les jours du salut ; parce qu'il n'y a point de temps dans l'année plus favorable pour nous que celui où nous travaillons à apaiser la colère de Dieu, ni de jours plus précieux pour le salut que ceux qui sont employés à expier nos péchés. C'est donc à vous d'entrer dans ce sentiment de l'Apôtre.

 

Quoique toute votre vie doive être une pénitence continuelle, eu égard aux fautes dont vous vous reconnaissez coupable devant Dieu, c'est particulièrement dans le carême que vous devez vous attacher à la pratique et aux exercices d'une vertu si importante et si nécessaire ; en sorte que vous puissiez dire : Voici maintenant le temps favorable pour moi, et qu'en effet ce soit pour vous un temps de pénitence. Car quel reproche auriez-vous à soutenir de la part de Dieu, si, pendant que toute l'Eglise est en pénitence, vous n'y étiez pas ; et si par le malheur et le désordre ou d'une vie lâche et dissipée, ou d'une vie molle et sensuelle, vous passiez ce temps du carême sans participer en aucune manière à la pénitence publique des chrétiens ! puisqu'alors , bien loin qu'il fût pour vous ce temps de grâce et de salut dont parle saint Paul, il ne servirait qu'à votre condamnation, et qu'il s'en suivrait de là que votre impénitence, criminelle en tout autre temps, le serait doublement en celui-ci.

 

Il n'y a nulle raison qui puisse vous dispenser de la pénitence, parce que la loi de la pénitence est une loi générale, dont personne n'est excepté ; une loi qui dans tous les états de la vie se peut accomplir, et contre laquelle la prudence de la chair ne peut jamais rien alléguer que de vain et de frivole. Plus il vous paraît difficile, dans la place où vous êtes, d'observer exactement cette loi, plus vous devez faire d'efforts pour vous y assujettir, parce que c'est justement pour cela que vous avez encore plus besoin de pénitence. Vos infirmités mêmes, au lieu de vous rendre impossible l'observation de cette loi, sont au contraire, dans les desseins de Dieu, de puissants secours pour vous aider à y satisfaire, soit en vous tenant lieu de pénitence, lorsqu'elles vont jusqu'à l'accablement des forces, comme il arrive dans les maladies : soit en vous servant de sujets pour remporter sur vous de saintes victoires, quand ce ne sont que des incommodités ordinaires que vous devez alors surmonter par la ferveur de l'esprit, afin que vous fassiez de votre corps, selon l'expression du maître des Gentils, une hostie vivante et agréable aux yeux de Dieu.

 

La pratique tout opposée où vous avez vécu doit non seulement vous confondre, mais vous animer contre vous-même, et vous exciter fortement à réparer tout ce que l'amour-propre vous a fait commettre au préjudice de cette divine loi de la pénitence ; car voilà les sentiments avec lesquels vous devez commencer le carême : résolue d'une façon ou d'autre, de subir cette loi, que vous ne devez point regarder comme un joug pesant, ni comme une loi onéreuse, mais plutôt comme une loi de grâce d'où dépend tout votre bonheur.

 

Toute la pénitence du carême, comme l'a très bien remarqué saint Léon, pape, ne se réduit pas à jeûner, ni à s'abstenir des viandes défendues ; c'en est bien une partie, mais ce n'est pas la principale ni la plus essentielle. Quoique le précepte de l'abstinence et du jeûne cesse en certaines conjonctures, celui de la pénitence subsiste toujours ; et comme il y a dans le monde des chrétiens relâchés, qui, par une espèce d'hypocrisie, jeûnent sans faire pénitence, ou parce qu'ils jeûnent sans renoncer à leur péché, ou parce qu'ils trouvent le moyen, par mille adoucissements, de jeûner sans se mortifier, ce qu'on peut appeler l'hypocrisie du jeûne, si souvent condamnée dans l'Ecriture : aussi, par une conduite toute contraire, les âmes fidèles à Dieu, quand le jeûne leur devient impossible, savent bien faire pénitence sans jeûner, parce que sans jeûner elles savent se vaincre elles-mêmes, s'interdire les délices de la vie, marcher dans les voies étroites du salut, et pratiquer en tout le reste la sévérité de l'Evangile. Suivez cette règle, et tenez-vous d'autant plus obligée à la pénitence, que vous vous sentez moins capable de garder à la lettre et dans la rigueur le commandement du jeûne. Car il est certain que la dispense de l'un ne vous peut être qu'un surcroît d'engagement pour l'autre. Si vous raisonnez en chrétienne, c'est ainsi que vous en devez user, afin que Dieu ne perde rien de ses droits, et que la délicatesse de votre santé ne vous empêche point de remplir la mesure de votre pénitence.

 

En conséquence de ces principes, la première chose que Dieu demande de vous, et que vous devez vous-même demander à Dieu pour tout ce saint temps, c'est l'esprit d'une salutaire componction, cet esprit de pénitence dont David était pénétré, et dont il faut qu'à son exemple vous vous mettiez en état de ressentir l'impression et l'efficace. C'est-à-dire que votre plus solide occupation pendant le Carême doit être de repasser tous les jours devant Dieu, dans l'amertume de votre âme, les désordres de votre vie, d'en reconnaître avec douleur la grièveté (gravité) et la multitude, de vous en humilier, de vous en affliger, de ne les perdre jamais de vue : tellement que vous puissiez dire comme ce saint roi : Seigneur, mon péché m'est toujours présent (Psal. L, 5.). Car, selon l'Ecriture, voilà en quoi consiste l'esprit de la pénitence. Or, une excellente pratique pour cela même, c'est que pendant le carême vous fassiez toutes vos actions dans cet esprit, et par le mouvement de cet esprit ; allant, par exemple, à la messe comme au sacrifice que vous allez offrir vous-même pour la réparation de vos péchés ; priant comme le publicain, et ne vous présentant jamais devant Dieu qu'en qualité de pénitente accablée du poids de vos péchés ; vous assujettissant de bon cœur aux devoirs pénibles de votre état, comme à des moyens d’effacer nos péchés; vous proposant pour motif dans chaque bonne œuvre de racheter vos péchés ; vous levant et vous couchant avec cette pensée: Je suis une infidèle, et Dieu ne me soutire sur la terre qu'afin que je fasse pénitence de mes péchés. Cette vue continuelle de vos péchés vous entretiendra dans l'esprit de la pénitence, et rien ne vous aidera plus à l'acquérir et à le conserver, que de vous accoutumer à agir de la sorte.

 

Cet esprit de pénitence, si vous êtes assez heureuse pour en être touchée, doit produire en vous un effet qui le suit naturellement, et qui en est la plus infaillible marque; savoir, la pénitence de l'esprit, c'est-à-dire une ferme et constante disposition où vous devez être de mortifier votre esprit, votre humeur, vos passions, vos inclinations, vos mauvaises habitudes, mais par-dessus tout votre orgueil, qui est peut-être dans vous le plus grand obstacle à la pénitence chrétienne : car le fond de la pénitence chrétienne, c'est l'humilité ; et tandis qu'un orgueil secret vous dominera, ne comptez point sur votre pénitence. Il faut donc, pour répondre aux desseins de Dieu, qu'en même temps que vous célébrez le carême avec l'Eglise, animée de l'esprit de la pénitence, vous vous appliquiez à être plus humble, plus douce, plus patiente, plus compatissante aux faiblesses d'autrui, plus vide de l'estime de vous-même ; que vous parliez moins librement des défauts de votre prochain, que vous soyez moins prompte à le condamner; que si, malgré vous, vous en avez du mépris, vous n'y ajoutiez pas la maligne joie de le témoigner ; car si vous ne prenez sur tout cela nul soin de vous contraindre, quelque pénitence que vous puissiez faire, vous ne commencez pas par celle qui doit justifier devant Dieu toutes les autres, et sans laquelle toutes les autres pénitences sont inutiles.

 

En vain, disait un prophète, déchirons-nous nos vêtements, si nous ne déchirons nos cœurs : c'est le changement du cœur et de l'esprit qui fait la vraie pénitence ; autrement, ce que nous croyons être pénitence n'en est que l'ombre et le fantôme. Du reste, il n'y a personne à qui convienne plus qu'à vous cette pénitence de l'esprit, puisque vous confessez vous-même que c'est principalement par l'esprit que vous avez péché.

 

 

BOURDALOUE, Instruction pour le temps du Carême, I-V

 

 

ŒUVRES COMPLÈTES DE BOURDALOUE

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Jésus-Christ lavant les pieds de ses disciples, Le Tintoret

Jésus-Christ lavant les pieds de ses disciples, Le Tintoret

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23 mars 2013 6 23 /03 /mars /2013 10:00

Concluons par l'excellente réflexion de saint Bernard, qui renferme tout le fruit de ce discours.

 

De trois jugements que nous avons à subir, celui du monde, celui de nos consciences et celui de Dieu, saint Paul méprisait le premier, il se répondait du second, mais il redoutait le troisième. Il méprisait le premier, quand il disait : Peu m'importe que le monde me juge. Il se répondait du second, quand il ajoutait : Ma conscience ne me reproche rien. Et il redoutait le troisième, quand, tout apôtre qu'il était, il craignait d'être réprouvé : Subierat Paulus judicium mundi quod aspernabatur, judicium sui quo gloriabatur : sed restabat judicium Dei, quod reverebatur.

 

Or, quoi qu'il en soit à notre égard, et du jugement du monde et du jugement de notre conscience, craignons au moins, mes chers auditeurs, et craignons toujours le jugement de Dieu. Et parce que cette crainte est un don de Dieu, demandons-là tous les jours à Dieu.

 

Car il n'est rien de plus naturel que de craindre ; mais il n'est rien de plus surnaturel, ni de plus divin, que de craindre utilement pour le salut ; ce qui faisait dire au Prophète royal : Confige timore tuo carnes meas (Psalm., CXVIII, 120.) ; Seigneur, pénétrez ma chair de votre crainte, de votre crainte, ô mon Dieu ! et non pas de la mienne ; car la mienne me serait inutile, et même préjudiciable ; elle me troublerait sans me convertir ; au lieu que la vôtre me convertira et me sanctifiera, en me troublant. Or voilà celle dont j'ai besoin, et que je vous demande comme une de vos grâces les plus exquises, sachant bien qu'elle vient de vous et non pas de moi : Confige timore tuo.

 

Craignons le jugement de Dieu, et craignons-le, quelque justes et dans quelque état de perfection que nous puissions être ; car les Saints eux-mêmes le craignaient, et ils étaient saints parce qu'ils le craignaient. Ne nous en rapportons pas aux libertins du siècle, qui vivent dans l'ignorance et dans l'oubli des choses de Dieu. Mais croyons-en ceux qui furent éclairés des plus pures lumières de la vraie sagesse. Consultons les Jérôme et les Hilarion ; ils nous feront là-dessus des leçons touchantes. Tenons-nous-en toujours à ce parallèle, et disons-nous à nous-mêmes : Si ces hommes, qui furent des modèles et des miracles de sainteté, ont craint le jugement de Dieu, comment dois-je le craindre, moi pécheur, moi couvert de crimes ? s'ils l'ont craint dans les déserts et les solitudes, comment dois-je le craindre, moi qui me trouve exposé à tous les scandales et à toutes les tentations du monde ? s'ils l'ont craint dans les exercices et dans la ferveur d'une vie si austère et si pénitente, comment dois-je le craindre dans une vie si commune, si lâche, si imparfaite ? Pour peu que nous ayons de christianisme et de foi, cette comparaison nous persuadera et nous édifiera.

 

Craignons le jugement de Dieu, mais craignons-le souverainement ; car il ne sert à rien de le craindre, si nous ne le craignons préférablement à tout ; comme il ne sert à rien d'aimer Dieu, si nous ne l'aimons par-dessus tout.

 

Et voilà, mes Frères, notre désordre : nous craignons le jugement de Dieu, mais nous craignons encore plus les maux de la vie. Car la crainte des maux de la vie nous rend soigneux, vigilants, actifs ; et la crainte du jugement de Dieu ne nous fait faire aucun effort ni rien entreprendre. Craignons le jugement de Dieu, mais craignons encore plus le péché, puisque c'est le péché qui le doit rendre si formidable ; ou, pour mieux dire, craignons le jugement de Dieu pour fuir le péché, et fuyons le péché pour ne plus tant craindre le jugement de Dieu.

 

Craignons le jugement de Dieu, mais ne nous contentons pas de le craindre ; servons-nous de cette crainte pour corriger les erreurs de notre esprit, pour modérer les passions de notre cœur, pour résister aux attaques de la concupiscence, pour nous détacher des vains plaisirs du siècle, en un mot, pour réformer toute notre vie, suivant la belle maxime de saint Grégoire de Nazianze : Haec time, et hoc timore eruditus animum a concupiscam quasi frœno quodam retrahe.

 

Quand notre conscience nous fera des reproches secrets, et que par de pressants remords elle nous avertira que nous ne sommes pas dans l'ordre et que nous nous damnons ; rentrons en nous-mêmes, et disons à Dieu : Ah ! Seigneur, comment pourrai-je soutenir votre jugement, puisque je ne saurais même soutenir celui de ma raison et de ma foi ?

 

Quand nous nous trouvons engagés dans une occasion dangereuse, figurons-nous Dieu qui nous voit, et qui de sa main va lui-même écrire notre arrêt comme celui de l'impie Balthazar : ce ne sera point une imagination, mais une vérité.

 

Quand la tentation nous attaquera, et que nous sentirons notre volonté ébranlée, armons-nous de cette pensée, et demandons-nous : Que voudrais-je avoir fait lorsqu'il faudra comparaître devant le tribunal de Dieu ?

 

Quand la passion voudra nous persuader que ce péché n'est pas si grand qu'on le pense, et qu'il n'est pas probable que le salut dépende de si peu de chose faisons la réflexion de saint Jérôme : Mais Dieu en jugera-t-il de la sorte ?

 

Craignons le jugement de Dieu, et que cette crainte de Dieu nous excite à le fléchir et à l’apaiser. Car, comme dit saint Augustin, il n'y a point d'autre appel de notre Juge irrité qu'à notre Juge gagné. Voulez-vous vous sauver de lui, ayez recours à lui : Neque enim est quo fugias a Deo irato nisi ad Deum placatum : vis fugere ab ipso ? fuge ad ipsum. Or nous le pouvons aisément, tandis que nous sommes sur la terre. Car ce Dieu, tout irrité qu'il est contre nous, s'apaise par nos larmes, s'apaise par nos bonnes œuvres, s'apaise par nos aumônes ; et nous avons tout cela entre les mains.

 

Enfin, craignons le jugement de Dieu ; et craignons surtout de perdre cette crainte, qui est une ressource pour nous dans nos désordres, et comme un port de salut.

 

Car cette crainte se peut perdre, et elle se perd tous les jours, particulièrement dans le grand monde. Les soins temporels l'étouffent, les conversations la dissipent, les petits péchés l'affaiblissent, le libertinage la détruit ; et la perte de cette, grâce est le commencement de la réprobation. En effet, que peut-on espérer d'une âme, et de quel moyen se peut-on servir pour sa conversion, quand elle a perdu la crainte du jugement de Dieu, et que les plus terribles vérités du christianisme ne font plus d'impression sur elle ?

 

C'est en craignant Dieu, mais d'une crainte chrétienne, qu'on se dispose à l'aimer, et c'est en l'aimant d'un amour efficace et pratique, qu'on parvient à la gloire que je vous souhaite.

 

BOURDALOUE, SUR LE JUGEMENT DERNIER 

   

Le Jugement Dernier, Pietro Cavallini, Santa Cecilia in Trastevere, Rome 

     

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22 mars 2013 5 22 /03 /mars /2013 06:10

 Car s'il n'y avait point de jugement à craindre, ou si l'idée de ce jugement pouvait être effacée de mon esprit, en sorte qu'il n'en restât nulle vue, nul souvenir, nulle créance ; dans quelque aveuglement que ma conscience se fût plongée, il me serait aisé d'y trouver la tranquillité et la paix ; quelque grossières que fussent mes erreurs, bien loin de troubler mon repos, elles l'affermiraient.

 

Ne pensant jamais qu'il y a un juge au-dessus de moi et un tribunal où je dois répondre, je vivrais sans inquiétude ; et le dernier de mes soins serait de m'éclaircir et de m'instruire si ma conscience est droite ou non, si je suis dans la bonne voie ou si je n'y suis pas, si je me flatte, si je me trompe, si je m'égare ; parce que je ne verrais pas le danger que l'on court en se flattant, en se trompant, en s'égarant.

 

Voila la situation où je serais.

 

D'où vient donc qu'il n'en va pas ainsi ? d'où vient que cette fausse conscience ne peut être calme, et qu'elle est au contraire une source de remords que nous combattons inutilement, et que nous ne pouvons étouffer ? D'où vient qu'à travers les nuages épais de l'intérêt ou de la passion qui la forment, il s'échappe toujours certains rayons de lumière qui, malgré nous, nous font entrevoir ce que nous voudrions ignorer ? En un mot, d'où vient que la conscience aveugle et corrompue ne l'emporte jamais tellement sur la saine conscience, que celle-ci, quoique d'une voix faible, ne réclame encore contre le mal que nous faisons, et qu'au moins, par des doutes affligeants et par des syndérèses (remords de conscience - Dictionnaire de l'Académie française, 1694) importunes, elle n'empêche la prescription de l’erreur qui nous fait agir ? Pourquoi tout cela, Chrétiens ? parce que nous ne sentons que trop qu'il y a un jugement de Dieu, où les ténèbres de nos consciences doivent être dissipées, et nos erreurs confondues.

 

C'est pour cela même, dit saint Grégoire pape, (belle et solide remarque), c'est pour cela que plus le jugement de Dieu est proche, plus la fausse conscience devient chancelante et timide dans son erreur. Pendant le cours de la vie, elle peut se soutenir en quelque manière ; et plus elle est fausse, plus elle paraît ferme et paisible. Mais aux approches de la mort toute sa fermeté se dément, la vérité reprend l'ascendant sur elle ; et c'est là qu'elle commence à se réveiller, à s'examiner, à se défier d'elle-même, à s'agiter.

 

Ainsi, par exemple, tandis que vous êtes encore dans une santé florissante, vous jouissez tranquillement du bien d'autrui et vous le retenez sans scrupule ; vous avez pour cela vos raisons dont vous êtes convaincu, ou dont vous croyez l'être ; vous avez consulté des gens habiles ou prétendu tels, et vous vous en reposez sur eux ; malgré l'injustice, vous comptez sur votre bonne foi, vous demeurez en paix : ainsi, dis-je, le présume-t-on, tandis qu'on ne pense qu'à goûter les douceurs de la vie, et que l'aiguillon de la mort ne se fait pas encore sentir, car jusque-là quelquefois s'étend le règne de la fausse conscience.

 

Mais qu'il survienne une maladie dangereuse, et qu'on se trouve pressé des douleurs de la mort, c'est alors que cette conscience tout à coup se déconcerte ; c'est alors qu'elle tombe dans les incertitudes et les perplexités les plus cruelles ; c'est alors que ces raisons sur quoi l'on s'appuyait ne paraissent plus si convaincantes, que les conseils qu'on a suivis deviennent suspects, que cette bonne foi dont on se flattait semble douteuse, qu'on ne trouve plus cette possession si légitime et si valide, et qu'on prend bien d'autres idées touchant le devoir rigoureux et indispensable de la restitution : pourquoi ? parce que le jugement de Dieu, qui n'est pas loin, change tout le système des choses, et les met dans une évidence où elles n'ont jamais été. Si c'était une conscience droite et conforme a la loi de Dieu, elle se soutiendrait à la vue même du jugement de Dieu, ou, s'il n'y avait point de jugement, quoique fausse et erronée, elle serait tranquille à la mort même.

 

Mais ce qui l'effraie à cette dernière heure, c'est sa fausseté, opposée à la vérité de ce jugement redoutable dont la mort doit être suivie.

 

Ce qui l'effraie, c'est la présence d'un Juge souverain, de qui seul dépend, ou tout notre bonheur, ou tout notre malheur ; à qui seul nous devons tous rendre compte, mais qui ne rend compte à nul autre qu'à lui-même de ses arrêts ; d'un Juge équitable qui pèse tout dans la plus juste balance, et qui punit précisément ou qui récompense selon les œuvres ; d'un Juge éclairé, qui lit dans le fond des cœurs pour en connaître les plus secrets sentiments, qui voit tout et qui n'oublie rien, qui tient tout marqué dans son souvenir avec des caractères ineffaçables, par conséquent à qui rien n'échappe, pas une pensée, pas un désir, pas une parole, pas une œillade, pas un geste, pas un mouvement ; d'un Juge tout-puissant, qui bien au-dessus des juges de la terre, lesquels n'exercent leur justice que sur le corps, peut avec le corps perdre l'âme, et la perdre pour jamais ; d'un Juge inflexible, que rien ne touche, ni inclination, ni compassion, ni égard, ni considération, ni crainte, ni espérance.

 

Voilà ce que le plus aveugle et le plus endurci pécheur ne peut voir de près avec assurance, voilà ce qui le surprend, ce qui l'interdit, ce qui le confond.

 

BOURDALOUE, SUR LE JUGEMENT DERNIER

 

Le Jugement Dernier, Pietro Cavallini, Santa Cecilia in Trastevere, Rome 

 

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21 mars 2013 4 21 /03 /mars /2013 12:30

Conscience droite, dont nous ne pouvons dès cette vie même, ni toujours, ni absolument nous défaire.

 

Ceci est remarquable.

 

Car il ne dépend pas de nous d'avoir ou de n'avoir pas cette lumière que Dieu fait luire sur nous, et, comme parle le Prophète, qu'il a gravée dans nos âmes, en nous imprimant ce caractère de raison qui est une partie de nous-mêmes : Signatum est super nos lumen vultus tui, Domine (Psalm., IV, 7.). Il ne dépend pas de nous de l'effacer, ce divin caractère.

 

Dès qu'il a plu à Dieu de nous donner cette droiture d'esprit, comme la première grâce et le fondement de toutes les autres grâces, quoi que nous fassions, nous avons à compter avec nous-mêmes, et il ne nous est plus libre de vivre dans cette indépendance où le libertinage voudrait bien parvenir, mais où il ne parviendra jamais tandis que cette raison subsistera.

En vain voulons-nous éteindre ce rayon qui nous éclaire ; en vain faisons-nous des efforts pour secouer le joug de la conscience, pour en étouffer la voix qui nous importune, pour en émousser les pointes qui nous piquent, pour nous endurcir contre ses remords et nous affermir contre ses reproches. C'est un censeur qui nous suit partout, qui nous accuse partout, qui nous condamne partout : nous le trouvons au milieu de nos plaisirs, et il y répand l'amertume ; nous le trouvons dans les plus nombreuses compagnies, et, malgré le tumulte et le bruit du monde, il nous fait entendre ses cris ; nous nous disons mille fois à nous-mêmes, pour nous rassurer, comme les impies : Paix, paix : Dicentes : Pax, pax (Jerem., VI, 14.) ; et mille fois la conscience nous répond : Point de paix ; guerre et mort : Et non erat pax.

 

Or, de là, concluait saint Augustin, j'apprends, Seigneur, ce que je dois craindre de votre justice. Car je me dis à moi-même, ajoutait ce Père : Si je ne puis éviter le jugement de ma conscience, dont les lumières, quoique pures, ne sont néanmoins encore qu'obscurité et que ténèbres, comparées à celles de Dieu, comment me défendrai-je de ce jugement, où sera employée contre moi toute la sagesse, toute la vérité, toute la science, et, ce qui doit bien plus me faire trembler, toute la sainteté de Dieu même ?

 

Jugement inévitable ; rien qui puisse me dérober au pouvoir du juge qui me poursuit.

 

Jugement irrévocable ; rien qui lui fasse changer l'arrêt qu'il aura une fois prononcé.

 

Jugement éternel ; autant que Dieu sera Dieu (et il le sera toujours), autant sera-t-il mon juge ; et autant qu'il sera mon juge, autant me tiendra-t-il toujours dans sa puissance, et toujours soumis à ses coups.

 

Mais après tout, à force de se pervertir, ne peut-on pas se faire une fausse conscience : et du moins la fausse conscience n'affaiblit-elle pas alors ou même, ne détruit-elle pas entièrement ce préjugé que nous pouvons tirer de nous-mêmes pour connaître le jugement de Dieu ?

 

Ecoutez ma réponse : car je conviens du principe ; mais sur ce principe je raisonne bien autrement que vous, et je prétends qu'il en doit suivre une conséquence toute contraire.

 

Il est vrai que, par l'aveuglement où nous jette le péché, l'on se fait tous les jours dans le monde de fausses consciences ; mais je dis que ces fausses consciences sont elles-mêmes les plus sensibles et les plus tristes préjugés du jugement de Dieu. Comment cela ? Ah ! Chrétiens, que le temps ne me permet-il de donner à cette vérité toute l'étendue qu'elle demande ! mais il y faudrait un discours entier.

 

En effet, ces fausses consciences que nous nous faisons, et qui se forment en nous par la corruption du péché, ne sont jamais, ou presque jamais des consciences tranquilles ; et l'expérience surtout nous apprend qu'elles ne sont point à l’épreuve ni des frayeurs de la mort, ni de certaines conjonctures de la vie, où , malgré nous, leur apparente et prétendue tranquillité est nécessairement troublée.

 

Or, cela même, dans la pensée de saint Augustin, est une des plus fortes conjectures et une des plus incontestables preuves du jugement de Dieu que je vous prêche et de son extrême sévérité.

 

BOURDALOUE, SUR LE JUGEMENT DERNIER

 

 

Pilate se lavant les mains, Mattia Preti

 

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20 mars 2013 3 20 /03 /mars /2013 12:30

Oui, c'est par nos propres consciences que Dieu déjà nous fait notre procès, et il n'a pas besoin pour nous juger d'un autre tribunal.

 

Ce sont nos propres consciences qui lui fournissent contre nous des témoignages et des preuves ; et quand ma conscience me reproche que je suis un criminel, que j'ai péché contre la loi, que ce que je fais est injuste, c'est comme si Dieu me disait ce que le maître de l’Evangile dit à ce mauvais serviteur : De ore tuo te judico (Luc., XIX, 22.) ; je vous condamne par votre bouche.

 

Il s'ensuit donc qu'à prendre la chose dans un sens, et dans un sens très naturel, le jugement de Dieu à notre égard est déjà fait, et qu'il n'est point nécessaire que nous attendions pour cela ce dernier jour, où le Fils de l'Homme, assis sur le trône de sa gloire, portera des arrêts de vie et de mort. Car ce jugement extérieur et public que Dieu fera de nous à la fin des siècles, n'ajoutera rien à ce jugement secret et intérieur de nos consciences que l’appareil et la solennité ; et supposé la justice que nous nous serons rendue, et que nous nous rendons malgré nous dans le fond de l'âme, il ne restera plus, ce semble, au Sauveur du monde, que de produire au jour ce que nous irons caché dans les ténèbres.

 

C’est pourquoi l'Apôtre parlant du jugement dernier, l'appelle si souvent le jour de la manifestation des cœurs, le jour de la révélation, où le livre des consciences sera ouvert ; comme si tout le jugement de Dieu devait consister à ouvrir ce livre, et à nous faire voir que nous sommes déjà jugés par nous-mêmes et dans nous-mêmes.

 

Mystère que saint Augustin avait bien compris, lorsque, expliquant ces paroles de Jésus-Christ : Qui non credit jam judicatus est (Joan., III, 18.), celui qui ne croit pas est déjà jugé, il en tire cette admirable conséquence : Nondum apparuit judicium, et jam factum est judicium, le jugement de Dieu ne paraît pas encore, et il ne paraîtra qu'à la consommation des temps ; mais sans paraître, il est néanmoins déjà fait pour nous. Nous le prévenons, ou plutôt, nous n'en attendons pour ainsi dire, que la publication, parce que nous en trouvons déjà dans nous l’instruction et la décision : Nondum apparuit judicium, et jam factum est judicium.

 

Ah ! mes chers auditeurs, avec quelle attention, avec quelle crainte, avec quel respect ne devons-nous pas écouter la voix de la conscience, puisque c'est la voix de Dieu même, non seulement qui nous menace, mais qui nous juge ?

 

Cependant si cette voix secrète que Dieu nous fait entendre, sans se montrer encore à nous, toute secrète qu'elle est, nous saisit néanmoins si vivement, et nous cause tant de frayeur et d'épouvante, que sera-ce quand Dieu éclatera ? quand, au son de la trompette fatale qui réveillera les morts, et qui des quatre parties du monde rassemblera tous les hommes, il nous appellera nous-mêmes devant son tribunal ? quand, assis sur le trône, non point seulement de sa majesté, mais de sa justice, au milieu de ses ministres, et armé de son tonnerre, il se présentera lui-même à nous comme un Dieu irrité, comme un Dieu ennemi, comme un Dieu vengeur ? quand aux yeux de tout l'univers, également attentif à l'écouter et à nous considérer, il tirera de notre cœur notre condamnation pour la rendre juridique et solennelle, et que, par un dernier jugement, il viendra confirmer et, pour user de cette expression, sceller l'arrêt que nous aurons tant de fois déjà porté contre nous ?

 

C'est là, dit le Sage, que les pécheurs sentiront plus que jamais tout le poids de leurs péchés.

 

C'est là qu'ils en gémiront plus amèrement que jamais : Et erunt gementes (Sap., IV, 19.).

 

C'est là qu'ils en verront avec plus d'horreur que jamais et toute l'énormité et toute la honte : Et erunt in contumelia inter mortuos in perpetuum (Ibid.).

 

C'est là qu'ils en craindront plus que jamais les suites affreuses : Venient in cogitatione peccatorum suorum timidi (Ibid., 20.) ; qu'ils en seront accablés, qu'ils en seront désolés : Usque adsupremum desolabuntur (Ibid., 19.) ; et que la conscience, si grièvement blessée et si souvent méprisée, témoin et juge, mais témoin alors et juge public, vengera pleinement sur eux et authentiquement ses droits : Et traducent illos ex adverso iniquitates ipsorum (Ibid., 20.).

 

BOURDALOUE, SUR LE JUGEMENT DERNIER

 

Le Jugement Dernier (détail), Hieronymus Bosch

 

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19 mars 2013 2 19 /03 /mars /2013 12:30

Quelque emportés que nous soyons dans nos passions, et quelque déréglés que nous puissions être dans nos mœurs, nous avons, Chrétiens, une conscience.

 

Et il nous est même si naturel, non seulement d'en avoir une, mais d'en suivre les mouvements, que jusque dans l'état et le désordre du péché, quand nous secouons le joug de la conscience, par une conduite bien surprenante, mais qui n'a rien néanmoins de contradictoire, nous nous faisons une conscience pour n'en point avoir, et pour pécher avec plus de liberté.

 

Conduite, remarque judicieusement saint Bernard, dans l'excellent traité qu'il a composé sur cette matière, conduite d'où nous apprenons qu'il faut distinguer en nous deux sortes de conscience : l'une que Dieu nous a donnée, et l'autre dont nous sommes nous-mêmes les auteurs ; l'une pure et droite, parce qu'elle est l'ouvrage de Dieu ; l'autre fausse et pleine d'erreurs, parce que nous la formons dans nous, et qu'elle vient de nous.

 

Prenez garde, s'il vous plaît.

 

Conscience droite, dont nous ne saurions nous défaire, et que nous ne pouvons corrompre. Fausse conscience, mais qui, par la raison même qu'elle est fausse, ne peut jamais être tranquille ; ou du moins dont la tranquillité ne peut être constante, ni à l'épreuve de certains états, de certaines conjonctures, où elle est immanquablement et nécessairement troublée : voilà ce que je vous donne encore comme un préjugé secret et domestique, mais sûr et infaillible, du jugement de Dieu. Celle-là dans sa droiture et dans son intégrité, celle-ci dans ses variations et dans son instabilité ; celle-là dans la pureté de ses lumières, celle-ci, jusque dans son aveuglement ; l'une et l'autre, par leurs reproches et leurs anxiétés.

 

Suivez-moi toujours, mes chers auditeurs. Ces deux articles, par où je vais finir, comprennent ce qu'il y a dans la religion de plus solide et de plus touchant.

 

Il a été de la sagesse et de l'empire de Dieu, disait David, d'établir sur les hommes un législateur ; et ne puis-je pas dire que, sans autre législateur et sans autre loi, nous avons une conscience qui suffit pour nous tenir lieu de loi, et qui nous domine avec plus d'empire que tous les législateurs ?

 

Qu'est-ce que la conscience ? un jugement, répond saint Bernard, que nous faisons de nous-mêmes, et que. malgré nous nous prononçons contre nous-mêmes. Car il n'est pas en notre pouvoir, tandis que nous avons une conscience, de ne nous pas juger ; il ne nous est pas libre de pécher, et de ne nous pas condamner.

 

Or, ce jugement forcé de nous-mêmes est déjà le préliminaire du jugement de Dieu, puisqu'il n'est forcé que parce que c'est Dieu même qui le fait en nous indépendamment de nous ; ou plutôt, parce que c'est Dieu même qui se sert de nous pour exercer sur nous sa plus souveraine et sa plus absolue domination.

 

Ne savez-vous pas, dit-il à Caïn, au moment qu'il méditait le meurtre de son frère, et que, saisi de l'horreur d'une si noire perfidie, il avait peine à s'y résoudre, ne savez-vous pas que si vous faites bien, vous en aurez la récompense, et que si vous faites mal, votre péché se présentera d'abord devant vous ? Nonne si bene egeris, recipies ? sin autem male, statim in foribus peccatum aderit ? (Genes., IV, 7.)

 

C'est-à-dire, comme l'expliquent saint Jérôme et après lui tous les interprètes, ne savez-vous pas que le jugement de votre péché suivra de près votre péché même ; et qu'à l'instant que vous l'aurez commis, sans aller plus loin, et sans attendre davantage, vous en trouverez dans vous-même la condamnation et le châtiment ? Ne savez-vous pas que ce péché ne sera pas plutôt sorti de votre cœur, où vous l'aurez conçu et enfanté, qu'il se tournera contre vous, qu'il se fera voir à vous pour vous troubler, pour vous effrayer, pour vous tourmenter ? Statim in foribus peccatum aderit.

 

C'est ce qu'éprouva Caïn, et l'effet répondit à la menace. A peine a-t-il satisfait son ressentiment et sa passion, à peine a-t-il porté ses mains parricides sur l'innocent Abel, que le voilà livré à sa conscience, qui, comme un juge inexorable, disons mieux, qui, comme un impitoyable bourreau, lui fait souffrir le plus cruel supplice. Il tombe, dit le texte sacré, dans un abattement qui paraît sur son visage, mais qui n'est encore qu'une légère figure du trouble de son âme, et des remords dont son cœur est déchiré. Il entend la voix de Dieu qui le poursuit. Qu'avez-vous fait ? lui dit le Seigneur ; le sang de votre frère cri vengeance contre vous. Cette voix de Dieu qui lui parle, cette voix du sang d'Abel qui crie contre lui, ce n'est rien autre chose, disent les Pères, que la voix intérieure de sa conscience qui lui reproche son crime.

 

Ah ! mon péché est trop grand, conclut-il lui-même, pour en espérer la rémission. Il en convient, il ne s'en défend pas : bien loin de penser à se justifier, il est le premier à se condamner et à se punir. Car il se retire, selon l'expression de l'Ecriture, de devant la face du Seigneur ; il est fugitif et vagabond sur la terre, il se regarde comme un homme maudit ; et ce que nous remarquons dans l'exemple de ce fameux réprouvé, l'image de tous les réprouvés, c'est encore ce qui se passe tous les jours dans la conscience des pécheurs.

 

Or, n'est-ce pas là, reprend éloquemment saint Augustin, le jugement de Dieu déjà commencé ? Ces agitations, ce saisissement du pécheur à la vue de ses crimes, cette horreur de lui-même en les commettant, cette honte et même ce désespoir de les avoir commis, ce soin de les couvrir et de les tenir cachés, ces alarmes secrètes mais pleines d'effroi, ces agonies mortelles, convaincu qu'il est de ce qu'il a fait et de ce qu'il mérite : que nous présage tout cela, disons mieux, que nous démontre tout cela, sinon un jugement, mais un jugement redoutable dont nous sommes menacés, et qui, dès maintenant et en partie, s'exécute dans nous-mêmes ?

 

BOURDALOUE, SUR LE JUGEMENT DERNIER

 

Caïn et Abel, Pietro Novelli

 

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